Le deuxième rapport est le résultat de l'étude menée par le comité de l'éthique sur les dérapages éthiques du gouvernement libéral, créé sous le prétexte fallacieux d'aider les Canadiens pendant la pandémie de COVID‑19, et illustre une forte tendance à la corruption. Mais je laisse cela de côté pour l'instant.
Ce rapport communique également à la Chambre ce que j'estime être plusieurs outrages ou atteintes au privilège. Je remercie à l'avance la présidence pour son indulgence, car je dois souligner avec regret que le deuxième rapport expose pas moins de sept questions de privilège. Heureusement, plusieurs d'entre elles peuvent être regroupées sous un même thème, ce qui devrait nous aider à les aborder plus rapidement.
Dans l'intérêt de tous, et à mon avis, il y a trois atteintes au privilège liées au défaut de comparaître devant le comité de l'éthique sur ordre de la Chambre le 25 mars 2021. Ensuite, il y en a trois autres relatives à la directive du gouvernement de défier l'ordre de la Chambre. Enfin, il y a la question des propos trompeurs ou de l'ingérence de la ministre de la Diversité et de l'inclusion et de la Jeunesse par rapport aux preuves fournies aux comités.
Je commencerai par le défaut de comparaître des témoins. Comme l'indiquent les pages 699 et 700 des Journaux du 25 mars 2021, la Chambre a adopté un ordre qui se lit comme suit:
Que, eu égard au pouvoir des comités de mener leurs importantes enquêtes sur des questions d’intérêt public:
a) en ce qui concerne l’étude du Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et de l’éthique sur les questions de conflits d’intérêts et de lobbying en relation avec les dépenses liées à la pandémie.
Puis:
(ii) Rick Theis, le directeur des politiques et des affaires du Cabinet du premier ministre, soit cité à comparaître devant le Comité le lundi 29 mars 2021, à 14 heures,
(iii) Amitpal Singh, le conseiller en politiques auprès de la vice-première ministre, soit cité à comparaître devant le Comité le mercredi 31 mars 2021, à 14 heures,
(iv) Ben Chin, le conseiller principal du premier ministre, soit cité à comparaître devant le Comité le jeudi 8 avril 2021, à 14 heures.
Et plus loin:
c) si le premier ministre devait comparaître devant les comités mentionnés aux paragraphes a) et b), à l’une ou l’autre des dates et heures mentionnées, durant au moins trois heures, à la place du témoin cité à comparaître et de tout autre témoin devant comparaître plus tard devant le même comité, ces témoins soient déchargés de leur obligation de comparaître conformément à cet ordre.
Cette façon de procéder, par laquelle la Chambre adopte un ordre pour appuyer les délibérations du comité, est peut-être inhabituelle, mais pas irrégulière. Par exemple, à la page 51 de la 14e édition de l'ouvrage Odgers' Australian Senate Practice, on souligne ceci: « Le Sénat peut ordonner à certains témoins de comparaître devant les comités [...] Le Sénat peut également ordonner que des documents soient produits pour les comités. »
De toute façon, l'annexe A du deuxième rapport nous informe que le comité a accepté de signaler à la Chambre, au moyen de cette annexe, que les trois témoins ne se sont pas présentés aux heures prévues. De plus, l'annexe A confirme que le premier ministre n'a pas comparu au nom des trois témoins comme la Chambre l'avait autorisé dans son ordre.
Il est bien connu qu'une question de privilège doit être soulevée à la première occasion. Étant donné que la décision de la Chambre du 25 mars fait en sorte que la création hybride d'un ordre de la Chambre appuie exclusivement les délibérations d'un comité, on se demande quelle est la bonne façon de présenter une plainte concernant toute violation.
Selon nos ouvrages de procédure, lorsque des comités sont concernés, la question doit d'abord être présentée à la Chambre au moyen d'un rapport de comité. Les pages 152 et 153 de la troisième édition de La procédure et les usages de la Chambre des communes de Marc Bosc et André Gagnon le confirment. On y lit: « La présidence a toujours eu pour politique, sauf dans des circonstances extrêmement graves, de n’accueillir des questions de privilège découlant de délibérations de comités que sur présentation, par le comité visé, d’un rapport traitant directement de la question et non lorsqu’elles étaient soulevées à la Chambre par un député ».
Le 12 avril, soit le premier jour de séance suivant celui où les témoins étaient absents, le légiste et conseiller parlementaire a comparu devant le comité de l'éthique, et je lui ai demandé son avis lors de cet échange.
À la page 22 du compte rendu, je lui ai posé la question suivante:
Monsieur Dufresne, dans ce cas précis, alors que la Chambre a ordonné la comparution de certaines personnes devant le Comité et la présentation ou la remise de documents au Comité, quelle est la marche à suivre? Le président du Comité doit-il d'abord en saisir la Chambre ou, étant donné qu'il s'agit d'un ordre de la Chambre, un député peut-il simplement soulever le problème directement auprès du Président de la Chambre des communes?
Le légiste a répondu:
Normalement, selon les décisions antérieures de Présidents de la Chambre, si une question concerne un comité et des renseignements devant lui être remis, il est généralement d'usage d'attendre que le comité ait d'abord examiné la question, ce qui lui donne l'occasion de déterminer s'il est satisfait.
Compte tenu de cet avis, j'ai attendu que le comité de l'éthique finisse son travail avant de soulever cette question à la Chambre des communes, comme je le fais maintenant.
Avant de passer à un autre sujet, il y a un autre aspect lié au moment choisi pour soulever la question dont je devrais parler, puisque je m'attends à ce que les libéraux en parlent lorsqu'ils répondront à ces arguments. Le comité a convenu de demander une réponse du gouvernement au rapport, au titre de l'article 109 du Règlement. Selon cette disposition, on ne peut pas proposer de motion portant adoption du rapport avant le dépôt de la réponse ou, le cas échéant, jusqu'à l'expiration de la période de 120 jours suivant la présentation du rapport.
L'ouvrage de Bosc et Gagnon, par exemple, est muet sur la question. Par ailleurs, l'article 48(1) du Règlement indique clairement l'obligation suivante: « Quand la question de privilège est posée, elle doit être immédiatement prise en considération. »
La page 80 de l'ouvrage de Bosc et Gagnon décrit l'atteinte aux privilèges et l'outrage au Parlement de la façon suivante:
Tout acte tenant du mépris ou constituant une attaque contre les droits, pouvoirs et immunités de la Chambre et de ses députés, soit par une personne ou un organisme de l'extérieur, soit par un de ses députés, est considéré comme une « atteinte aux privilèges » et est punissable par la Chambre. Il existe toutefois d'autres affronts contre la dignité et l'autorité du Parlement qui peuvent ne pas constituer une atteinte aux privilèges comme telle. Ainsi, la Chambre revendique le droit de punir au même titre que l'outrage tout acte qui, sans porter atteinte à un privilège précis, nuit ou fait obstacle à la Chambre [...] ou transgresse l'autorité ou la dignité de la Chambre, par exemple la désobéissance à ses ordres légitimes [...]
À la page suivante, le Bosc et Gagnon fait référence au rapport de 1999 du Joint Committee on Parliamentary Privilege du Royaume-Uni, qui a dressé une liste de certains types d’outrage. Le huitième point de la liste est « sans excuse valable, ne pas se présenter devant la Chambre ou un comité après avoir été cité à comparaître ». Il est suivi par le dixième point « sans excuse valable, désobéir à un ordre légal de la Chambre ou d’un comité ».
L'argument est présenté de façon encore plus succincte au paragraphe 15.5 du Treatise on The Law, Privileges, Proceedings and Usage of Parliament d'Erskine May, qui stipule que « des témoins qui refusent de comparaître peuvent être coupables d'outrage. »
Voici ce que dit le paragraphe 15.7:
Peut donner lieu à une accusation d'outrage la désobéissance à une règle précise, à savoir le refus ou la négligence d'un témoin ou d'une autre personne de se présenter devant l'une ou l'autre des Chambres ou un comité après avoir été cité à comparaître.
Ces questions sont au cœur des privilèges du Parlement, un ensemble de lois qui nous permettent de nous acquitter de nos devoirs et responsabilités au nom de nos concitoyens et dont les origines remontent loin et sont ancrées dans la Constitution canadienne.
À la page 137 de Bosc et Gagnon se trouve l'observation suivante:
Selon le préambule et l’article 18 de la Loi constitutionnelle de 1867, le Parlement jouit du droit de procéder à des enquêtes, d’exiger la comparution de témoins et d’ordonner la production de documents, des droits essentiels à son bon fonctionnement. Ces droits sont d’ailleurs aussi anciens que le Parlement lui-même [...]
Voici ce qu'on peut lire au paragraphe 234 du rapport britannique de 1999 que je viens de mentionner: « Depuis au moins l'époque élisabéthaine, les comités examinent des questions en faisant comparaître des témoins. » Je tiens à préciser qu'il ne s'agit pas ici de notre souveraine actuelle, mais de la reine d'Angleterre de 1558 à 1603, dont Sa Majesté porte le nom.
L'ancien député libéral Derek Lee, pour sa part, affirme à la page 6 de son ouvrage de 1999, intitulé The Power of Parliamentary Houses to Send for Persons, Papers & Records, que l'origine de ce pouvoir remonte au règne du roi Édouard III pendant la moitié du XIVe siècle.
Voici ce qu'écrit, en 1840, Alpheus Todd, ancien bibliothécaire parlementaire, à la page 313 de son ouvrage intitulé The Practice and Privileges of the Two Houses of Parliament: « Les deux Chambres du Parlement peuvent convoquer des témoins — privilège essentiel et incontesté qu'elles ont en commun avec tous les tribunaux — afin de les interroger sur tous les sujets sur lesquels elles peuvent avoir besoin d'information pour orienter leurs débats. »
La portée de ces pouvoirs qui prennent racine dans le rôle de grand enquêteur de la nation est décrite aux pages 198 et 199 de la deuxième édition de l'ouvrage Le privilège parlementaire au Canada, de Joseph Maingot: « La seule limitation que la Chambre pourrait elle-même s'imposer serait que l'enquête doive se rapporter à un sujet relevant de la compétence législative du Parlement, en particulier lorsque des témoins doivent être entendus et qu'on envisage de recourir à la compétence pénale du Parlement. Cette restriction est conforme au droit des Chambres du Parlement de convoquer une personne et de l'obliger à témoigner sur un sujet relevant de leur compétence respective. »
Il y a un instant, j'ai mentionné le principe selon lequel toute violation de privilège concernant les travaux des comités doit d'abord être rapportée par le comité. Le Bosc et Gagnon fournit des exemples de telles violations à la page 153:
La plupart des incidents signalés par les comités ont trait à la conduite de députés, de témoins ou du public ou encore au non-respect d’un ordre de comité. Les comités ont eu l’occasion de faire rapport à la Chambre du refus de témoins de comparaître lorsqu’on les y avait convoqués; du refus de témoins de répondre à des questions; du refus de témoins de fournir des documents ou des dossiers; du refus de certaines personnes d’obéir aux ordres d’un comité; de la divulgation de faits survenus durant une réunion à huis clos; de la divulgation de projets de rapports et de la présentation de faux témoignages devant un comité. Les comités peuvent également faire rapport de cas d’outrage, par exemple de comportement irrespectueux à l’endroit de l’autorité ou des activités d’un comité, d’intimidation de membres ou de témoins ou de refus de témoins de prêter serment.
Maingot, à la page 250, décrit comment le fait de désobéir à un ordre de la Chambre, comme l'ont fait MM. Theis, Singh et Chin par rapport à l'ordre du 25 mars, constitue un outrage:
La désobéissance aux règles ou aux ordres constitue un affront à la dignité de la Chambre, qui peut donc y donner suite, non seulement pour sa propre satisfaction, mais pour veiller à ce qu'on lui témoigne le respect nécessaire à la sauvegarde de son autorité et à défaut duquel la Chambre ne pourrait remplir sa mission. C'est pourquoi la désobéissance peut être considérée comme un outrage, mais la Chambre tient toujours compte des circonstances pour atténuer la sanction à imposer.
La désobéissance aux règles ou aux ordres est un outrage évident; il peut s'agir du refus de comparaître à la barre de la Chambre sur ordre de celle-ci, du refus de se présenter en personne et de produire les documents exigés par un comité (l'outrage n'est alors prononcé officiellement que lorsque le comité fait rapport de l'incident à la Chambre et que celle-ci y donne suite) [...]
Comme je l'ai indiqué, il est inhabituel de présenter un ordre de la Chambre pour qu'un témoin comparaisse en comité. Cela dit, il est déjà arrivé que l'on fasse fi d'ordres de comparaître à la Chambre.
Quelques exemples sont présentés aux pages 130 à 132 de Bosc et Gagnon. Les deux premiers exemples concernant la question de privilège dont nous sommes saisis se trouvent à la page 130:
Le 31 mars et le 1er avril 1874, Louis Riel (Provencher) reçoit l’ordre de comparaître de son siège devant la Chambre pour s’être dérobé à la justice dans l’affaire de la rébellion de la rivière Rouge et du meurtre de Thomas Scott. Il fait fi de cet ordre et se fait par la suite expulser de la Chambre [...]
Toujours en 1891, le Comité des comptes publics mentionne dans son rapport qu’André Senécal, un employé du Bureau de l’imprimerie du gouvernement, a fait défaut de se soumettre à une citation à comparaître devant le Comité. La Chambre adopte une motion lui enjoignant de se présenter à la barre de la Chambre. Il omet de le faire et la Chambre ordonne qu’il soit mis sous la garde du sergent d’armes, qui ne parvient pas à le retrouver. Les choses en restent là.
Ce dernier cas — qui concerne M. Senécal, un fonctionnaire occupant le poste de surintendant de l'imprimerie — commence, dans le recueil des débats de la Chambre, à la page 454 des Journaux du 27 août 1891, lorsque le comité des comptes publics déclare que M. Senécal ne s'est pas présenté après avoir été appelé à comparaître. Ce témoin recherché aurait prétendu suivre les conseils du médecin et avoir, de plus, démissionné de son poste au sein de la fonction publique.
L'ouvrage de Bosc et Gagnon indique qu'aucune autre mesure n'a été prise à l'endroit de M. Senécal, mais certains efforts ont tout de même été faits en ce sens. Le sous-sergent-d'armes, le lieutenant-colonel Henry Smith, informe la Chambre de ce qui suit le 1er septembre 1891, comme on peut le lire à la colonne 4852 des Débats de la Chambre des communes:
M. l'Orateur, j'ai l'honneur de faire rapport que le témoin André Senécal a quitté Ottawa le ou vers le 24 du mois dernier et, bien que j'aie fait des recherches minutieuses, je n'ai pu découvrir le lieu de sa retraite. En conséquence, l'ordre lui enjoignant de comparaître à la barre de la chambre cette après-midi a été signifié à un membre de sa famille à sa résidence, à Ottawa.
Un autre incident, concernant un député qui faisait l'objet d'une enquête pour un scandale de corruption, est raconté dans l'ouvrage de Bosc et Gagnon à la page 136, en ces termes:
En 1891, Israël Tarte, de Montmorency, accuse Thomas McGreevy, de Québec-Ouest, de corruption relativement aux travaux d’amélioration au port de Québec. La Chambre renvoie l’affaire au Comité des privilèges et élections. Lors de sa comparution devant le Comité, M. McGreevy refuse de répondre aux questions qui lui sont posées. Le Comité fait rapport à la Chambre le 12 août 1891 et lui demande de prendre la décision qu’elle jugerait appropriée. Le 13 août, la Chambre ordonne à M. McGreevy d’être présent à son siège le 18 août. Constatant ce jour-là l’absence de M. McGreevy, la Chambre ordonne qu’il soit commis à la garde du sergent d’armes.
Les comptes rendus de la Chambre concernant cette affaire montrent que les ordres de la Chambre n'étaient pas que de vains mots imprimés sur papier. Comme on peut le lire à la colonne 4079 des Débats, lorsque M. McGreevy ne s'est pas présenté à l'heure convenue le 18 août 1891, monsieur le Président Peter White a fait le point devant la Chambre. Il a déclaré:
Le greffier m'a appris qu'une copie de l'ordre de la Chambre de jeudi dernier, dûment signée par lui, avait été expédiée par la poste vendredi dernier à l'honorable Thomas McGreevy, à Québec, lorsqu'on eut appris qu'il n'était pas à Ottawa, et qu'un télégramme lui faisant part de l'ordre lui avait en même temps été envoyé à Québec. Le gérant de la compagnie de télégraphe North-Western à Québec a informé le greffier que le télégramme avait été dûment remis à l'honorable Thomas McGreevy, vendredi dernier, à 2.45 heures p.m., au bureau de la compagnie de navigation Richelieu et Ontario.
Lorsque la Chambre a ordonné que M. McGreevy soit placé sous garde, le lieutenant-colonel Smith ne s'est pas contenté de mettre la copie de l'ordre dans sa poche. Il a sauté dans un train et s'est mis à la poursuite du député déserteur. À la page 422 des Journaux du 20 août 1891, on peut lire:
M. l'Orateur informe la Chambre que, conformément à l'ordre de la Chambre du 18 courant, il a adressé son mandat au sergent d'armes intérimaire lui ordonnant de prendre sous sa garde l'honorable Thomas McGreevy, et qu'il a reçu le rapport suivant de cet officier: —
Chambre des communes
Ottawa, 20 août 1891.
Monsieur, — J'ai l'honneur de faire rapport que je suis arrivé à Québec, hier, à 3 p.m., et que je me suis mis immédiatement à la recherche de M. Thomas McGreevy, à son domicile, à son bureau et ailleurs, mais que je n'ai pu le trouver. Plus tard, j'ai appris, de bonne source, autant que je sache, qu'il avait quitté Québec par le chemin de fer le Grand-Tronc, mais il m'a été impossible de savoir pour quelle destination. Je n'ai aucun doute qu'il a quitté Québec plusieurs heures avant mon arrivée en cette cité.
J'ai l'honneur d'être, monsieur,
Votre obéissant serviteur,
Henry R. Smith,
Sergent d'armes intérimaire, C. des C.
Finalement, le comité des privilèges, qui enquêtait sur les allégations de corruption portées contre M. McGreevy, a terminé ses travaux et en a fait rapport à la Chambre. On peut lire l'issue de l'affaire à la page 136 de Bosc et Gagnon:
Le 29 septembre, la Chambre adopte une résolution déclarant M. McGreevy coupable de mépris envers l'autorité de la Chambre pour avoir omis de se présenter à son siège comme on le lui avait ordonné, ainsi que de certaines autres infractions. La Chambre adopte ensuite une seconde résolution expulsant M. McGreevy.
Ces mesures ont été prises à la suite des conclusions du comité des privilèges.
Revenons à la liste de Bosc et Gagnon, que j'ai mentionnée plus tôt. Aux pages 131 et 132, on parle d'un autre cas pertinent. On y lit ceci:
En 1894, Jean Baptiste Provost et Omer Édouard Larose négligent de se soumettre à une citation à comparaître comme témoins devant le Comité des privilèges et élections. Le Comité en fait rapport à la Chambre et lui demande d’« agir en conséquence ». La Chambre adopte alors une motion enjoignant aux deux témoins de comparaître à la barre de la Chambre. Constatant leur absence, la Chambre ordonne au sergent d’armes de les mettre en état d’arrestation afin de les forcer à comparaître à la barre de la Chambre. Ils comparaissent finalement, répondent aux questions et sont libérés.
Cette affaire se rapporte à deux épiciers de Québec qui, en 1894, ne se sont pas soumis à une citation à comparaître devant un comité qui entreprenait une enquête sur des allégations de corruption contre un député. Ils ont expliqué leur refus en disant qu'on ne leur avait pas avancé de l'argent pour leurs frais de déplacement. Les témoins ont persisté dans leur refus, même lorsque la Chambre des communes a émis un ordre de comparaître. Cependant, comme je l'ai souligné, la Chambre a ordonné au sergent d’armes de les mettre en état d’arrestation, et il s'est exécuté.
Lorsqu'ils ont comparu à la barre, M. Provost et M. Larose ont tous les deux dû répondre aux deux mêmes questions de la part du premier ministre, sir John Thompson. Ces deux questions, qui figurent aux pages 299 et 300 des Journaux du 13 juin 1894, sont les suivantes:
1. Avez-vous quelque chose à dire pour expliquer pourquoi vous avez désobéi à la sommation du comité des Privilèges et Élections de cette Chambre de vous présenter devant le comité, et à l’ordre de la Chambre vous enjoignant de comparaître à la barre de la Chambre?
2. Êtes-vous prêt à promettre à la Chambre que si vous êtes mis en liberté, vous comparaîtrez devant le comité des privilèges et Élections à sa première séance, pour y donner votre témoignage, ainsi qu’à chaque séance subséquente, jusqu’à ce que vous soyiez dispensé de ce faire?
Après une réponse positive des deux témoins à la dernière question, la Chambre les a libérés de la garde du sergent d’armes.
En ce qui concerne un témoin qui refuserait de comparaître, à la page 548 de l’ouvrage d’Odgers, ce dernier indique que les ordres du Sénat australien de cette nature ont été traités différemment de celui du 25 mars. Je le cite:
Dans tous les cas de cette nature, les ordres ont été respectés et les témoins ont comparu, et dans un cas, les documents nécessaires ont été présentés. Les témoins étaient tous des titulaires de charge publique; cette procédure n’a pas été appliquée pour de simples citoyens.
En revanche, la Chambre des communes du Royaume-Uni s'est retrouvée, tout récemment, dans une situation qui rappelle beaucoup la nôtre. En 2018, le comité du numérique, de la culture, des médias et du sport de ladite Chambre a indiqué à la Chambre en question que, dans le cadre de son étude sur les fausses nouvelles, elle avait invité Dominic Cummings, qui avait été le directeur de la campagne en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, Vote Leave, lors du référendum sur le Brexit de 2016, à venir témoigner puis le lui avait ordonné.
M. Cummings a ignoré l'ordre qui lui avait été donné et, le 5 juin 2018, le comité a signalé à la Chambre que son absence « constituait une entrave grave au fonctionnement du présent comité en l'empêchant de s'acquitter de la tâche qui lui avait été assignée par la Chambre. »
En réponse, le 7 juin 2018, la Chambre des communes du Royaume-Uni a adopté les motions suivantes inscrites aux pages 1 et 2 des Procès-verbaux:
Il est résolu que la Chambre prenne note du troisième rapport spécial du comité du numérique, de la culture, des médias et du sport (HC 1115);
Il est ordonné que M. Dominic Cummings s'engage auprès du comité, au plus tard le 11 juin 2018 à 18 heures, à comparaître devant le comité au plus tard le 20 juin 2018.
La page 5 des Procès-verbaux du 20 juin 2018 montre que le président du comité a signalé à la Chambre que M. Cummings n'a pas respecté les ordres de la Chambre. Puis, le 28 juin 2018, la Chambre a renvoyé l'affaire à son comité des privilèges. Après que le comité des privilèges eut fait son rapport à la Chambre des communes...