Madame la Présidente, je remercie ma collègue d'Edmonton Strathcona de ses interventions, qui sont toujours extrêmement pertinentes, senties et empreintes d'humanité.
Dans Hamlet, Shakespeare fait dire à un de ses personnages qu'il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark. En ce moment, j'ai l'impression qu'il y a quelque chose de pourri au bureau du ministre de la Défense nationale. En effet, à plusieurs reprises, il a laissé tomber les hommes et les femmes des forces armées. Il a fait des opérations de camouflage, il a essayé d'ignorer des faits, il a essayé de balayer les choses sous le tapis et il a trompé le comité parlementaire lorsqu'il a répondu à des questions. Les gens des forces armées méritent beaucoup mieux que cela, car ce sont des femmes et des hommes courageux. Ils prennent des risques, ils sont prêts à faire des sacrifices et ils assurent notre sécurité et celle du pays.
À mon avis, les hommes et les femmes qui travaillent dans les forces armées doivent absolument être respectés. Ils méritent mieux que cela. Le ministre de la Défense nationale les a laissés tomber et a préféré fermer les yeux sur de graves allégations, dont les allégations d'inconduite sexuelle, et sur d'autres problèmes, notamment ceux survenus en Irak. Il a toujours préféré essayer d'étouffer l'affaire. On dirait que le modus operandi du ministre, c'est de ne pas régler le problème, de regarder ailleurs ou de balayer les problèmes sous le tapis. À ses yeux, si l'on ne voit plus les problèmes, ils n'existent plus. Or ce n'est pas le cas.
Le ministre de la Défense nationale, protégé par le premier ministre et par l'ensemble du gouvernement libéral, a particulièrement laissé tomber les femmes qui servent au sein des forces armées. Cela est regrettable, puisque c'est en flagrante contradiction avec tous les grands discours des libéraux, dans lesquels ils disent que le gouvernement est féministe et qu'il se préoccupe grandement du sort des femmes et de l'avancée des femmes, afin d'atteindre une égalité réelle.
À plusieurs reprises, ce ministre, protégé par le premier ministre, a échoué au test. Les gens qui travaillent au sein des forces armées sont des travailleurs et des travailleuses qui ont une vocation unique et particulière. Nous devons être reconnaissants envers eux. Personnellement, je suis reconnaissant envers mon grand-père, Urgel Boulerice, qui a servi dans les forces armées lors de la Deuxième Guerre mondiale. Cela me fait penser à ma collègue d'Edmonton Strathcona, qui a parlé de son grand-père. Son histoire était vraiment très intéressante. Ces gens ont le droit de travailler dans un environnement sécuritaire et sain. Le gouvernement libéral a carrément échappé à ses obligations.
On fait face à un climat délétère, à une culture d'impunité et à une culture toxique. Malgré tous les rapports et les recommandations, le gouvernement libéral, le premier ministre et le ministre de la Défense nationale ont été incapables d'assurer un climat de travail sain et sécuritaire. Tous les travailleurs et travailleuses du pays y ont droit, y compris ceux et celles qui servent dans nos forces armées.
Je n'ai pas rencontré énormément de militaires, puisqu'il n'y a pas de base militaire dans ma région. Dans ma circonscription, Rosemont—La Petite‑Patrie, il y a une légion, et j'ai rencontré ses membres à quelques reprises. Comparativement à d'autres de mes collègues, je n'ai pas cette proximité. Par contre, j'ai passé trois jours sur une frégate entre Halifax, en Nouvelle‑Écosse, et Saint‑Jean, à Terre-Neuve. Pendant trois jours, j'ai vécu avec des marins sur la frégate NCSM Ville de Québec — je dois dire que c'est un très beau nom. J'y ai rencontré des hommes et des femmes extrêmement dévoués et professionnels qui veulent bien faire leur métier et qui avaient des histoires absolument incroyables à raconter, dont des opérations antipirates sur les côtes de l'Afrique de l'Est, entre autres. Je salue tout leur travail et leur bravoure. Si je parle de cela, c'est parce que j'essaie d'amener cela sous l'angle des droits des femmes et des droits des travailleurs et des travailleuses.
Je veux prendre un peu de recul et poser la question suivante: que faisons-nous ici, comme parlementaires, quand nous faisons de la politique? Il faut être à l'écoute des gens. Il faut être proche des gens. Il faut entendre leurs problèmes et essayer de trouver des solutions. Yann Martel nous a déjà dit, lors d'un congrès du NPD, que cela prenait une faculté qu'on appelle l'empathie, c'est-à-dire la capacité de se mettre dans la peau de quelqu'un d'autre pour mieux comprendre sa vie.
Je dois avouer que j'ai eu un parcours privilégié et qu'il y a des difficultés que je ne peux pas comprendre. Je ne fais pas partie d'une minorité, je n'ai pas été exclu ou discriminé et je n'ai pas été victime de racisme ou de sexisme. Cette capacité à se mettre à la place des autres et à faire preuve d'humanité, de solidarité et de fraternité me semble essentielle.
J'en profite pour lire un texte de Jacques Prévert qui nous met justement dans cette prédisposition. Je trouve cela intéressant d'avoir ce point de vue dans cette discussion, parce qu'il y a un lien évident. Cela va prendre deux minutes, puis je vais revenir au sujet principal. Le voici:
Le soleil brille pour tout le monde, il ne brille pas dans les prisons, il ne brille pas pour ceux qui travaillent dans la mine, Ceux qui écaillent le poisson Ceux qui mangent de la mauvaise viande Ceux qui fabriquent les épingles à cheveux Ceux qui soufflent vides les bouteilles que d'autres boiront pleines Ceux qui coupent leur pain avec leur couteau Ceux qui passent leurs vacances dans les usines Ceux qui ne savent pas ce qu'il faut dire [...]Ceux qu'on n'endort pas chez le dentiste Ceux qui crachent leurs poumons dans le métro Ceux qui fabriquent dans les caves les stylos avec lesquels d'autres écriront en plein air que tout va pour le mieux Ceux qui en ont trop à dire pour pouvoir le dire Ceux qui ont du travail Ceux qui n'en ont pas Ceux qui en cherchent Ceux qui n'en cherchent pas Ceux qui donnent à boire aux chevaux Ceux qui regardent leur chien mourir Ceux qui ont le pain quotidien relativement hebdomadaire Ceux qui l'hiver se chauffent dans les églises Ceux que le suisse envoie se chauffer dehors Ceux qui croupissent Ceux qui voudraient manger pour vivre Ceux qui voyagent sous les roues Ceux qui regardent la Seine couler Ceux qu'on engage, qu'on remercie, qu'on augmente, qu'on diminue, qu'on manipule, qu'on fouille, qu'on assomme Ceux dont on prend les empreintes Ceux qu'on fait sortir des rangs au hasard et qu'on fusille Ceux qu'on fait défiler devant l'Arc Ceux qui ne savent pas se tenir dans le monde entier Ceux qui n'ont jamais vu la mer Ceux qui sentent le lin parce qu'ils travaillent le lin Ceux qui n'ont pas l'eau courante Ceux qui sont voués au bleu horizon Ceux qui jettent le sel sur la neige moyennant un salaire absolument dérisoire Ceux qui vieillissent plus vite que les autres Ceux qui ne se sont pas baissés pour ramasser l'épingleCeux qui crèvent d'ennui le dimanche après-midi parce qu'ils voient venir le lundiEt le mardi, et le mercredi, et le jeudi, et le vendredi Et le samedi Et le dimanche après-midi.
Je pense que cela nous dit qu'il faut être capable de voir ceux qui ont des vies et des difficultés différentes et qui souffrent. En ce moment, dans les Forces armées canadiennes, il y a des gens qui souffrent et qui ont vécu des difficultés. C'est pour cela qu'il y a eu des allégations d'inconduite et des enquêtes. Malheureusement, le ministre de la Défense, au lieu d'essayer de se mettre à la place des gens qui vivent des difficultés et qui souffrent, a préféré essayer d'étouffer l'affaire fois après fois.
Il l'a fait dans le cas de l'enquête sur les allégations d'inconduite sexuelle, mais ce n'est pas la première fois. Il y a des choses qui me troublent énormément dans les réflexes de l'actuel ministre de la Défense. Rappelons quand même qu'avant toute cette saga incroyable, il y avait eu des vidéos de membres des forces irakiennes qui commettaient des crimes contre des femmes irakiennes, y compris des agressions sexuelles, des viols et des meurtres potentiels. Quelle était la réponse du ministre de la Défense, à ce moment-là? Il a donné le conseil de simplement ne pas regarder les vidéos.
En 2016, après être devenu ministre de la Défense, le ministre a décidé volontairement d'écarter une enquête sur des transferts de prisonniers en Afghanistan, alors qu'ils étaient remis à des autorités locales déjà reconnues pour pratiquer la torture de manière routinière sur leurs prisonniers. Cela va complètement à l'encontre de nos engagements internationaux et des conventions de Genève. On ne doit pas transférer des prisonniers si on pense qu'ils vont être maltraités ou torturés.
Il y a donc des preuves accablantes démontrant que ce ministre est incompétent, qu'il ne mérite pas notre confiance et qu'il ne mérite pas la confiance de la Chambre. C'est pour cela qu'au NPD, nous demandons sa démission.