Merci, madame la présidente.
Je suis passionnée et forte, et je pense que cette passion et cette force m'ont été transmises en grande partie par ma famille, mais aussi par les électeurs que je représente.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais mentionner deux ou trois choses.
Je porte souvent ces boucles d'oreilles, fabriquées par une jeune femme du Nunavik, qui étudie en vue d'obtenir un diplôme et qui doit s'occuper de jeunes enfants. L'appui que je lui offre lui permet de poursuivre ses études. Mon bracelet en peau de phoque provient d'un événement organisé par Canadian Roots Exchange, qui a réuni des centaines de personnes, autochtones et non autochtones, de partout au pays. Je porte aussi un bracelet HopePact de la campagne We Matter, qui fait la promotion du partage de messages positifs entre les jeunes. Les peuples autochtones font souvent face à des taux de violence et de suicide dévastateurs. Cette plateforme a pour but de véhiculer des messages positifs. En lien avec hier, je porte une robe rouge pour manifester mon appui et ma solidarité envers nos femmes et filles autochtones disparues et assassinées, FFADA, ainsi que pour promouvoir cette cause. Je porte des bottes en peau de phoque ou kamik, que vous ne voyez pas. Elles viennent d'Arviligjuaq. Ces symboles sont vraiment importants et, à mon avis, ils reflètent directement les défis auxquels nous sommes trop souvent confrontés en tant que peuples autochtones, mais aussi la beauté et la force qui en découlent.
Lorsque je me promène, et surtout ici à la Chambre des communes, j'aime à penser que je représente plus que ce que vous me voyez parfois défendre.
La COVID-19 et le fait de vivre cette pandémie ont largement contribué à mettre en lumière toutes les inégalités vécues dans la circonscription que je représente, partout au Nunavut et dans l'Inuit Nunangat, dans les collectivités qui comptent une majorité d'Autochtones. Cette pandémie fait ressortir des enjeux qui se posent souvent, surtout ici à la Chambre des communes, et dont nous savons qu'ils continuent d'être problématiques.
Ce qui est décourageant, c'est que beaucoup de problèmes auraient pu être évités si des mesures avaient été prises pour que les électeurs que je représente ne soient pas aussi frustrés, stressés ou effrayés. Il y a tellement de questions sans réponse, madame la présidente.
Nous vivons ces inégalités dans notre territoire depuis des décennies et cela fait longtemps que nous aurions dû agir. Quand je parle d'action, je parle de droits fondamentaux de la personne. Je parle des aspects fondamentaux que représente le fait d'être un être humain, de vivre dans ce pays et d'être Canadien. Je parle de l'accès à l'eau potable toute l'année. Je parle de la capacité de se nourrir et de nourrir sa famille. Je parle d'un endroit sûr où vivre. Je ne devrais pas avoir à parler de cela ici en 2020, en tant que représentante de tout un territoire. Si nous voulons réussir à sortir de cette pandémie, le gouvernement fédéral doit s'occuper davantage de ces droits fondamentaux de la personne dans la circonscription que je représente.
Ce qui est frustrant, c'est que du financement a été promis, mais qu'il n'a pas été versé au territoire. Des demandes ont été faites à trois reprises. Quelqu'un a demandé, lors d'une réunion du comité des finances, quand le territoire pourrait s'attendre à voir cet argent. J'ai également posé la question au comité dont je fais partie. Je pose la question pour la troisième fois, mais elle reste toujours sans réponse.
Heureusement, aucun cas positif n'a encore été confirmé chez nous. Un cas avait été signalé dans le territoire, à Pond Inlet, mais il s'est révélé être un faux positif. Pond Inlet fait déjà face à d'importants problèmes d'infrastructures liées à l'eau et à l'accès à une eau potable propre. Ces problèmes remontent à octobre, bien avant cette pandémie.
J'aimerais vraiment féliciter le gouvernement du Nunavut, le directeur de la santé publique et Pond Inlet d'avoir réagi aussi rapidement et d'avoir déjà mis un plan en place, ainsi que d'avoir utilisé les ressources et l'équipement limités dont ils disposent pour réagir aussi bien.
Comme je l'ai également mentionné... et j'espère que je n'aurai pas à le faire encore trop longtemps, mais je n'ai pas l'intention d'abandonner avant que ce soit réglé. Pour un grand nombre des électeurs que je représente, les nombreux Nunavummiut, principalement des Inuits, ainsi que dans l'ensemble de l'Inuit Nunangat, dans les quatre régions, le logement est un problème majeur. C'est le manque de logements, mais aussi les logements qui sont infestés de moisissures. Je reçois sans cesse des photos, et c'est absolument épouvantable de voir dans quelles conditions vivent ces personnes. Nous savons que le problème subsiste, et nombreux sont ceux à la Chambre des communes qui le reconnaissent.
Malheureusement, le dernier budget fédéral a fait en sorte que cette année, il y a encore moins de logements que les années précédentes. Les besoins étaient déjà criants, mais malgré cela on continue de nous enlever des choses.
Les taux de maladies respiratoires sont très élevés dans la circonscription que je représente. Le taux de tuberculose chez les Nunavummiut continue d'être 290 fois plus élevé que chez les non-Autochtones. Je crois que c'est encore pire au Nunavik. La tuberculose pose un problème dans tout l'Inuit Nunangat, et nous continuons de voir... Je ne sais même pas si je peux parler d'« effort raté », parce que je ne connais même pas le niveau d'effort déployé.
Le Nunavut ne dispose malheureusement que de sept ventilateurs. Pour ce qui est des questions de santé plus urgentes, celles qui pourraient nécessiter une intervention chirurgicale même mineure, un accouchement par exemple, la plupart du temps, les gens doivent quitter le territoire. Pouvez-vous imaginer donner naissance à votre premier enfant sans pouvoir être entourée de votre famille et de vos amis, parce que vous ne pouvez même pas accoucher dans la collectivité où vous vivez?
Les services de santé font cruellement défaut depuis longtemps. Nous avons besoin de plus de précisions sur la façon dont le gouvernement fédéral fera venir sur le territoire des fournitures clés, comme de l'équipement de protection individuelle, et sur le moment où il le fera. Je sais que les besoins sont pressants partout au pays, mais je vois aussi une occasion de lancer des initiatives nous permettant de travailler avec nos couturières. Nous pouvons promouvoir des initiatives qui contribuent au bien-être de la collectivité, à ce sentiment d'appartenance.
Nous attendons depuis des semaines des réponses critiques concernant des ressources et des services de la part de plusieurs ministres. Comme je l'ai déjà dit, les réponses concrètes se font toujours attendre. Bien souvent, les Nunavummiut et les Inuits sont forcés de s'adapter à une façon de penser ou de faire du Sud, alors que leur accès aux ressources et aux services est déjà très limité. Souvent, cela n'a même pas de sens pour eux, la culture de l'humilité en étant absente.
Comme je l'ai déjà mentionné, les évacuations médicales d'urgence et les problèmes de santé graves font en sorte que des personnes sont envoyées à l'extérieur du territoire. À l'heure actuelle, la circonscription que je représente est assujettie à l'une des politiques de voyage les plus restrictives, sinon la plus contraignante. Toutes les chirurgies qui peuvent être mises en attente le sont maintenant. Nous devons nous assurer que lorsque notre vie reprendra, selon la nouvelle normalité, il n'y aura pas d'arriérés de cas et nous n'aurons pas de personnes qui souffriront de maladies graves parce qu'elles ont dû attendre une chirurgie ou un suivi. Nous devons nous assurer qu'il y a un plan pour les personnes qui ont survécu à cette pandémie.
Il y a beaucoup de temps d'attente pour obtenir les résultats des tests qui sont effectués. Heureusement, les électeurs de la circonscription que je représente sont très patients, parce que la situation est frustrante. Il y a déjà les logements dont j'ai parlé, qui sont surpeuplés, et le manque d'accès à la nourriture et à l'eau qui sont problématiques. Comment pouvons-nous demander aux Canadiens de se conformer à certaines règles alors que ces services et ces ressources ne sont même pas là au départ?
En temps normal, les Nunavummiut de certaines collectivités en particulier plus que d'autres, et notamment pendant la fonte printanière, sont aux prises avec un approvisionnement en eau potable défaillant à longueur d'année. C'est le moment où les avis d'ébullition de l'eau sont les plus nombreux. C'est le moment où les infrastructures font défaut en raison des conditions particulières qui prévalent dans le Nord.
Comment pouvons-nous demander aux membres d'une collectivité de s'assurer qu'ils se lavent constamment les mains et veiller à ce qu'ils désinfectent et gardent leur maison propre, alors qu'ils n'ont même pas les infrastructures nécessaires pour accéder à de l'eau potable?
J'ai également eu l'occasion de parler en comité du service Internet dans les collectivités que je représente, qui n'est pas très bon, pour dire les choses poliment. Je ne sais pas si je pourrais participer à un Parlement virtuel à partir de la circonscription que je représente. Je ne peux pas affirmer avec certitude que je pourrais le faire. Le volume de mégabits par seconde et ce genre de choses laissent grandement à désirer dans certaines collectivités.
Nous parlons bien souvent des répercussions individuelles. Ce dont nous ne parlons pas, ce sont des enjeux plus larges. En raison de la faiblesse de la bande passante, lorsque quelqu'un présente une demande d'identité ou de permis de conduire au gouvernement du Nunavut, la demande est envoyée ici à Ottawa et le document est renvoyé dans nos collectivités. Il y a des gens qui attendent des mois. Certains des électeurs que je représente communiquent avec moi parce qu'ils attendent parfois depuis plus d'un an une pièce d'identité.
Comment ces personnes auront-elles accès aux nombreuses choses qui dépendent de ces documents? Il y a tellement de choses pour lesquelles cette information est nécessaire. Ce n'est là qu'un aperçu de la réalité concernant un service aussi important, qui devrait être accessible, mais qui ne l'est pas. Par ailleurs, comment allons-nous pouvoir demander aux gens de travailler à partir de chez eux avec une aussi mauvaise connexion? Comment allons-nous pouvoir demander aux enfants qui fréquentent l'école d'accéder à des ressources en ligne? Voilà le genre de choses dont on ne tient pas pleinement compte, selon moi, surtout pour la circonscription que je représente. Même s'il semble s'agir d'un aspect secondaire, l'effet d'entraînement que cela suscite, compte tenu du lien qui existe avec tant d'autres enjeux dans ma circonscription, est bien présent, malheureusement.
Prenons l'accès aux services bancaires, en ligne ou non. Je fais affaire avec la même banque depuis un certain nombre d'années. Je n'ai accès à ses services que par téléphone, parce qu'il n'y a pas de succursale de cette banque dans la ville d'où je viens. La succursale la plus proche se trouve à 40 minutes en avion et le billet coûte environ 800 $. Cela n'a aucun sens. L'accessibilité est essentielle, et il s'agit d'une lacune flagrante dans la circonscription que je représente.
Des annonces ont été faites, comme celle de 25 millions de dollars pour le programme Nutrition Nord, qui ne s'attaque pas du tout à la cause profonde de l'insécurité alimentaire dans ma circonscription. Il y a déjà tellement de problèmes qui se posent au sujet de ce programme. Lorsque vient s'ajouter à cela une pandémie, cela ne fait qu'aggraver davantage la situation pour la circonscription et les électeurs que je représente.
Comme je l'ai mentionné, le gouvernement du Nunavut attend toujours les 30,8 millions de dollars promis sur les 42 millions de dollars demandés. J'espère avoir une réponse bientôt. Je vais continuer d'exercer des pressions jusqu'à ce que cela se produise. Nous attendons toujours d'autres renseignements sur le soutien offert par les subventions territoriales et la Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants, en lien direct avec l'aide que peuvent obtenir nos étudiants.
Il y a encore beaucoup de lacunes dans les prêts aux petites entreprises. La PCU est parfois inaccessible pour les électeurs que je représente. De nombreux bijoutiers-joailliers, sculpteurs, musiciens, artistes, artisans et beaucoup d'autres personnes sont laissés-pour-compte dans ma circonscription. C'est la même chose partout au pays. De nombreux artistes et artisans autochtones tombent entre les mailles du filet.
Cela étant dit, j'aimerais essayer de mettre les choses en perspective en faisant un parallèle avec la course. Si nous étions tous sur la ligne de départ et qu'on nous disait: « Faites un pas en avant si vous avez grandi dans un logement sécuritaire et confortable qui n'était pas surpeuplé. » Je ne bougerais pas. Si on nous disait « Faites un pas en avant si vous n'avez jamais été touché par le suicide. » Je ne bougerais pas. Si on nous disait « Faites un pas en avant si vous avez les moyens de nourrir votre famille. » Je serais toujours à la même place, alors que les autres coureurs seraient déjà bien en avance sur moi.
C'est de cet écart dont je veux parler. C'est cet écart que nous devons combler.
Aidez-moi à placer mes électeurs sur un pied d'égalité pour qu'ils puissent jouir dans la vie des mêmes occasions que tous les autres Canadiens.