Merci, madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité. Bonjour.
Je suis directeur adjoint des exigences au Service canadien du renseignement de sécurité. Entre autres choses, ma direction est chargée de l’analyse des renseignements que le SCRS collecte sur les menaces pour la sécurité du Canada. Elle fournit des évaluations du renseignement et des conseils au gouvernement afin de l’aider à prendre des décisions.
Je tiens à vous remercier de m’avoir invité à participer à l’examen de la Loi sur Investissement Canada que réalise le Comité.
Je tiens à commencer en mettant brièvement l’accent sur la mission du SCRS, celle d’enquêter sur des activités qu’il soupçonne de constituer des menaces envers la sécurité du Canada, de conseiller le gouvernement du Canada au sujet de ces dernières et de prendre des mesures visant à les réduire. Les menaces pour la sécurité du Canada sont définies à l’article 2 de la Loi sur le SCRS comme étant l’espionnage ou le sabotage, les activités d’ingérence étrangère, le terrorisme ou les activités destinées à saper le gouvernement par la violence.
Comme nous l'expliquons dans notre récent rapport public, l’ampleur, la gravité et les conséquences possibles des activités d’espionnage économique menées au Canada par des États continuent de croître. Pour satisfaire leurs intérêts nationaux en matière d’économie, de renseignement et de défense, certains pays se livrent à des activités d’espionnage. Or, l’espionnage a des répercussions importantes au Canada sur le plan économique: il se traduit par des pertes d’emplois, de propriété intellectuelle et de revenus pour les entreprises comme pour l’État, et par une réduction de l’avantage concurrentiel.
Avec notre prospérité économique, notre monde universitaire et les milieux de la recherche ouverts, le Canada offre des avenues attirantes pour les investisseurs étrangers. Bien qu’ils soient essentiels à la prospérité canadienne, les investissements de pays étrangers ont le potentiel, dans certains cas, de nuire à nos intérêts de sécurité nationale. L’acquisition de propriété intellectuelle ou de technologies sensibles, ou de grandes quantités de données privées concernant des citoyens canadiens, si elles sont destinées à être utilisées par des États étrangers ou placées sous leur contrôle, peut menacer la sécurité nationale. La grande majorité des investissements étrangers au Canada se fait de manière ouverte et transparente. Cependant, un certain nombre de sociétés d’État et d’entreprises privées liées au gouvernement ou aux services secrets d’un pays, ou soupçonnées de l’être, peuvent chercher à acheter des entreprises au Canada ou à mener d’autres activités économiques motivées par des raisons autres que commerciales basées sur leurs objectifs stratégiques.
Des États étrangers se livrent à de l'espionnage et à de l'ingérence étrangère visant le Canada depuis des années. Ce n'est pas une nouvelle activité. Le directeur du SCRS, M. Vigneault, a parlé publiquement de l’impact de ces menaces sur l’économie et les intérêts nationaux du Canada, y compris les menaces posées par la Chine et la Russie. Dans son examen de 2019 de l'ingérence étrangère et son rapport public, le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement indique également que ces États, parmi d'autres, sont préoccupants.
Bien que je ne puisse pas parler en détail de questions opérationnelles, je peux vous assurer que le SCRS enquête activement sur toutes les menaces d'ingérence étrangère et d'espionnage et collabore avec vos collègues du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement sur ces questions importantes dans un contexte classifié.
Cette menace est particulièrement marquée pendant la pandémie de COVID-19, qui a fragilisé de nombreuses entreprises canadiennes. Des auteurs de menaces étrangères pourraient chercher à en profiter.
Afin d’évaluer les répercussions possibles, en vertu de la Loi sur Investissement Canada, le gouvernement est autorisé à examiner les investissements étrangers pour protéger la sécurité nationale. Le SCRS est un organisme d’enquête prévu par le règlement, aux termes des dispositions relatives à la sécurité nationale de la Loi. À ce titre, il enquête sur les préoccupations de sécurité découlant d’investissements étrangers attribués à des entités associées à d’autres États. Le SCRS collabore avec divers ministères et organismes fédéraux, notamment Innovation, Sciences et Développement économique Canada, le ministère de la Défense nationale, le Centre de la sécurité des télécommunications et la GRC, pour fournir des conseils dans le cadre de l’examen réalisé pour la sécurité nationale.
Bien que je ne puisse pas citer publiquement de conseils donnés par le SCRS ni de transactions particulières, je tiens à souligner que c’est au gouverneur en conseil qu’il revient d’autoriser ou d’interdire certains investissements, ou encore d’imposer des mesures d’atténuation dans les cas où un investissement porterait atteinte à la sécurité nationale.
L’achat de sociétés n’est pas le seul moyen par lequel des acteurs hostiles peuvent menacer la sécurité économique du Canada. Les auteurs de menaces peuvent aussi obtenir des informations canadiennes exclusives en menant des cyberattaques ou des activités d’espionnage, ou en utilisant la menace interne. La menace interne est attribuable à des personnes qui ont directement accès aux systèmes et à la propriété intellectuelle des milieux d’affaires ou de recherche; il peut donc s’agir de gens d’affaires, de scientifiques ou de chercheurs. Autrement dit, les espions d’aujourd’hui portent plus souvent le sarrau que l’imperméable.
Le SCRS a observé que la technologie et le savoir-faire, en particulier dans le monde universitaire et les petites et moyennes entreprises, étaient souvent plus vulnérables quant à l’espionnage parrainé par des États.
Merci beaucoup. Voilà qui met fin à ma déclaration liminaire.