Madame la Présidente, comme toujours, c'est avec grand plaisir que je prends la parole à la Chambre au nom des incroyables électeurs de Cowichan—Malahat—Langford. Je suis heureux d'avoir l'occasion de présenter mes réflexions sur le sujet à l'étude aujourd'hui, à savoir le projet de loi C-4, Loi portant mise en œuvre de l'Accord entre le Canada, les États-Unis d'Amérique et les États-Unis mexicains.
Je voudrais d'abord souligner la relation que nous entretenons avec les États-Unis. Les liens qui unissent le Canada et les États-Unis sont les plus importants qui soient, en raison de l'ampleur des échanges et du volume des déplacements qui ont lieu entre nos deux pays, en plus de l'histoire que nous partageons depuis longtemps. Je veux également souligner à quel point ces négociations ont été difficiles pour bon nombre des vaillants négociateurs commerciaux, surtout lorsque les Américains changeaient leur politique du jour au lendemain, au gré des gazouillis du président Trump.
La position des néo-démocrates en matière de commerce a toujours été la même: nous avons besoin d'accords commerciaux équitables comportant des protections exécutoires pour les travailleurs, l'environnement, les droits des peuples autochtones et les femmes. Nous sommes d'avis que, bien trop souvent — il y a de nombreux exemples que nous pourrions énumérer —, les négociations commerciales semblent se transformer en documents qui énumèrent les droits des sociétés et qui accordent beaucoup d'importance à l'harmonisation de la réglementation. Je comprends que dans certains cas, cela peut être une chose positive, car nous ne voulons pas que nos entreprises soient ensevelies sous la paperasse. Cependant, il faut se rappeler que ce sont souvent les grandes multinationales qui cherchent à assurer la libre circulation des biens entre les pays, et que souvent, la réglementation en place est propre et unique au pays en question. Quand il s'agit de réglementation portant sur la protection de l'environnement ou les droits des travailleurs, elle est extrêmement importante. Nous ne voulons pas faire la course au plus petit dénominateur commun en facilitant tout simplement la libre circulation des biens et du commerce sans respecter ces aspects très importants.
Je comprends également que la renégociation de l'ALENA a été provoquée par le président Trump. Encore une fois, cela indique pourquoi le Canada doit maintenir des relations avec les divers organes du gouvernement américain. Il faut que le Canada cultive ses relations à la Chambre des représentants et au Sénat des États-Unis et, surtout, avec les gouverneurs et les assemblées législatives des États, car le pouvoir est réparti sur un réseau très vaste, et non pas détenu par une seule personne.
Le débat sur l'accord est intéressant. Non seulement nous sommes saisis de l'accord au cours de la présente législature, mais nous avons aussi tenu un débat important dans ce dossier lors de la 42e législature. Je me souviens que l'ACEUM a souvent été le thème de la période des questions. Je tiens à souligner l'excellent travail de mon ancienne collègue Tracey Ramsey, l'ancienne députée d'Essex qui, en tant que porte-parole de notre parti en matière de commerce international, a souvent sondé les tactiques de négociation du gouvernement et les objectifs qu'on pensait atteindre avec celles-ci.
À l'époque, nous soutenions qu'il fallait attendre avant de procéder à la ratification de l'accord, parce que, comme il apparaissait clairement à tout observateur intéressé, les démocrates de la Chambre des représentants des États-Unis souhaitaient vivement changer certaines dispositions de l'accord. Pourtant, le gouvernement libéral de la 42e législature a cru que ce serait une erreur. Il a voulu conclure l'accord tel quel, sans tenir compte du fait que des modifications suivraient.
En fait, à l'époque où la vice-première ministre était la ministre responsable de ce dossier, elle a dit ceci: « Monsieur le Président, ce que le NPD devrait comprendre, c'est que la réouverture de cet accord ouvrirait une boîte de Pandore ». Elle a ajouté que le NPD serait naïf de penser que la réouverture de l'accord serait bénéfique pour les Canadiens. Pourtant, c'est exactement ce qui s'est produit. Pour autant que je sache, il n'était jamais arrivé que le Canada doive compter sur les gestes d'un gouvernement étranger pour arriver à un meilleur accord. C'est une situation sans précédent, je crois.
Si seulement le Parlement du Canada avait pu participer davantage au processus! Je sais que de nombreux députés de l'opposition en parlaient souvent et soulignaient qu'il serait possible d'obtenir un accord plus favorable, mais non: le gouvernement tenait à aller de l'avant. Nous avons heureusement pu obtenir un accord renégocié. Les démocrates américains étaient sur le point d'inclure des dispositions importantes. Quand on regarde le tout, on voit qu'il y a décidément des améliorations.
Je me tourne vers ma province, la Colombie-Britannique. Je vis sur l'île de Vancouver. De toute évidence, la grande industrie qui n'est pas mentionnée dans l'accord est celle du bois d'œuvre. Le différend qui oppose le Canada aux États-Unis dans ce secteur est toujours en cours et je crois comprendre que le Canada a dû faire part de ses préoccupations à l'Organisation mondiale du commerce.
Un nuage d'incertitude plane toujours sur l'industrie de nombreux travailleurs en Colombie-Britannique. Beaucoup de scieries ont fermé leurs portes au cours des dernières décennies. Les travailleurs de nombreuses collectivités de la Colombie-Britannique ont dû faire la transition de l'industrie de la foresterie vers une industrie qui relève du tourisme ou des services. Cependant, cette transition a changé à jamais le visage de nombreuses petites villes de la Colombie-Britannique.
En ce qui concerne les villes qui ont la chance d'avoir encore une scierie prospère, elles sont toujours en proie à beaucoup d'incertitude. Il s'agit certainement d'un aspect des relations canado-américaines qu'il faut étudier et améliorer.
En tant que porte-parole du NPD en matière d'agriculture, je m'en voudrais de ne pas parler des concessions dans le cadre de cet accord qui toucheront le secteur laitier soumis à la gestion de l'offre. Nous cédons un certain pourcentage de notre marché, comme nous l'avons fait dans le cadre du PTPGP et de l'AECG. À la Chambre, les libéraux ne cessent de dire que leur parti défend le système de gestion de l'offre et que c'est leur parti qui l'a mis en place. Cependant, nous avons commencé à voir d'autres reculs. Le problème, c'est que, lorsqu'il a négocié cet accord et ouvert certains secteurs de notre marché aux États-Unis, en particulier les secteurs soumis à la gestion de l'offre, le gouvernement a, en quelque sorte, demandé aux producteurs laitiers canadiens de faire les frais des problèmes de surproduction d'un autre pays.
Je m'explique. L'État du Wisconsin produit plus de lait que l'ensemble du Canada. Étant donné que cet État n'a pas de système de gestion de l'offre, il y a des fluctuations incontrôlées dans les prix. Nombre d'agriculteurs doivent faire faillite là-bas. Dans cet État, il y a de graves problèmes de santé mentale, et aucune protection n'est offerte. D'une certaine façon, nous ouvrons notre marché pour nous plier aux exigences des États-Unis. On s'apprête à faire les frais de la surproduction des États-Unis.
Ce n'est pas tout. Selon l'article 3.A.3 de l'accord, le Canada a accepté des seuils d'exportation. Il y aura dorénavant des seuils pour divers produits comme les préparations pour nourrissons, les concentrés de protéines de lait et le lait écrémé en poudre. Cela signifie que le Canada a accepté des seuils absolus concernant les exportations dans ces catégories. Pire, si le Canada dépasse ces seuils, il devra appliquer des droits à l'exportation, ce qui fera en sorte que les produits canadiens n'auront plus un prix concurrentiel.
J'aimerais savoir si un rapport d'évaluation des répercussions économiques a été préparé concernant les effets que ces seuils auront sur la croissance future de l'industrie. Le gouvernement a-t-il mené une analyse pour savoir si l'industrie canadienne s'approche déjà des seuils proposés? De plus, dans la négociation des dispositions sur l'entrée en vigueur, a-t-on pensé à donner assez de temps aux producteurs canadiens pour qu'ils s'ajustent et s'adaptent à ces changements?
Pendant le débat sur le projet de loi C-4, j'aimerais vraiment que les députés réfléchissent à ce que nous pourrions faire pour améliorer le processus en vue de la négociation de futurs accords commerciaux.
Comme nous le savons tous, la négociation des traités internationaux, notamment des accords commerciaux, est une prérogative de la Couronne. C'est un pouvoir latent dont dispose la Couronne depuis des siècles. Il est certain que la négociation d'ententes fait partie des droits de l'exécutif. Il y a cependant un problème: devant le produit final présenté à la Chambre des communes, tout ce que nous sommes autorisés à faire, c'est de voter oui ou non. L'entente est déjà signée. Notre rôle se limite au projet de loi de mise en œuvre.
Je sais que de nombreux groupes ont été consultés. Je me demande toutefois s'il est possible pour nous d'établir un processus où les députés pourraient avoir une discussion approfondie sur le sujet, où ils définiraient les objectifs et où ils joueraient un rôle plus déterminant, comme c'est le cas au Parlement européen et au Congrès des États-Unis. Nous serions ainsi à même de garantir, pour les négociations futures, peut-être avec le Royaume-Uni, que nous représentons la population avec une bien meilleure idée de ce que nous tentons d'accomplir.
Je répondrai volontiers aux questions de mes collègues.