Monsieur le Président, je remercie mon cher collègue conservateur de partager son temps de parole avec une bloquiste. Ça va bien aller.
J'aimerais reculer dans le temps, parce qu'il y a une période pendant laquelle on a bien fait les choses. Le 13 mars a été notre dernière journée à la Chambre. Par la suite, le pays a été mis en pause. Cette pause a pas mal bouleversé nos vies, tant nos vies personnelles que nos vies collectives et nos vies en tant que députés, en tant que parlementaires. Or nous avons su nous ajuster.
J'ai entendu mon collègue de La Prairie dire que l'une des grandes forces dont nous avons fait preuve pendant cette période était la solidarité. Je suis d'accord avec lui sur cela. D'ailleurs, nous espérons que la solidarité sera aussi au rendez-vous après la crise.
Nous avons aussi eu la possibilité de parler des choses que nous devions faire. Une des choses qu'il fallait faire était de permettre une exception quant à notre rôle à la Chambre. Le Bloc québécois y a contribué. Il fallait donner à la Chambre des pouvoirs exceptionnels. Je rappelle à mes collègues que, sur le plan économique, la crise actuelle est aussi importante que la Deuxième Guerre mondiale. Ce n'est pas rien.
Je remercie le député de Longueuil—Saint-Hubert de ses bons mots au sujet de mon passé en tant qu'infirmière.
Sur le plan sanitaire, nous sommes devant un virus dont on ne connaît pas encore tout. C'est la raison pour laquelle les représentants de la santé publique demandent à la population d'être prudente en matière de « déconfinement ». Nous devons en tenir compte, car ce serait irresponsable de ne pas le faire.
Cela dit, le gouvernement a mis en place des mesures d'urgence. La Prestation canadienne d'urgence a connu des ratés, au départ, mais elle est devenue inclusive par la suite. La Prestation canadienne d'urgence a principalement répondu à une faille du système de protection, du filet social, c'est-à-dire à une faille du régime d'assurance-emploi. On a réalisé que le régime d'assurance-emploi ne pouvait dédommager les 8 millions de travailleurs et de travailleuses qui ont perdu leur emploi.
On a aussi mis en place la Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants. On l'a revendiquée parce que certains étudiants étaient tombés entre les mailles du filet. Cette prestation est plus récente. Le Bloc québécois a exigé que l'on veille à ce que ces mesures de soutien, qui profitent aux travailleurs autant qu'aux étudiants, soient accompagnées de mesures incitatives au travail. Nous avons vu cela venir.
Je tiens aussi à rappeler que l'engagement pris à la Chambre le 29 avril, si ma mémoire est bonne, afin de poursuivre nos travaux de la manière que nous connaissons, n'a pas été honoré.
La subvention salariale d'urgence était de 10 % au départ, mais nous avons travaillé fort pour qu'elle soit de 75 % et pour que les règles soient assouplies, afin que plus d'entreprises en bénéficient. Il faut préserver le lien d'emploi pour assurer la relance.
Nous n'avons jamais pensé que la portée de la prestation serait augmentée. Quand on mange des bonbons Smarties, on garde habituellement les rouges pour la fin. Dans ce cas-ci, ce sont les Rouges qui mangent en premier.
Je trouve décevant et même indécent que des subventions salariales dont l'objectif est d'aider les entreprises tiennent lieu de salaire partisan.
Aujourd'hui, je déplore le fait qu'on n'a pas trouvé de solutions. On ne peut plus rester en pause et en confinement. On est appelé à se « déconfiner ».
D'ailleurs, la société le fait. Cela a commencé dans chacune de nos provinces, et je dirais même durant la crise, parce qu'on avait Zoom.
En passant, Zoom est la première chose dont j'exige d'être déconfinée.
Les chambres de commerce et nos municipalités devaient répondre à la crise. Or on voyait déjà les gens se mettre en mouvement pour trouver des solutions là où il y avait des failles et pour penser un coup à l'avance, parce qu'on savait que cela ne durerait pas et qu'un jour, il y aurait reprise.
À la Chambre, nous sommes rendus là. Si on veut penser le « maintenant » et l'« après », notre pouvoir législatif doit être retrouvé. Je vais donner des exemples. Un de mes collègues en a parlé tout à l'heure, mais je vais parler de l'environnement.
Si on pense à une relance verte et durable, il va falloir nécessairement penser — je vais parler des travailleuses et des travailleurs, car cela a été mon domaine durant toute ma vie — que cette transition doit se faire aussi pour les travailleuses et les travailleurs. Cela est essentiel, et on va avoir besoin de mesures législatives.
La Prestation canadienne d'urgence va prendre fin. Tel qu'on le connaît, notre régime d'assurance-emploi, qui est un programme fédéral, ne sera pas capable de répondre à tous quand la PCU prendra fin, parce qu'il laisse pour compte majoritairement des femmes, qui sont les plus touchées par le travail atypique et le travail à temps partiel et qui sont donc exclues, parce que les travailleurs de l'industrie saisonnière sont actuellement dans le trou noir de l'assurance-emploi où des projets pilotes prenaient fin le 20 mai mais dont on n'a toujours pas de réponse, et ainsi de suite.
On parle de congés de maladie. S'il y a une mesure qu'on a revendiquée avant et qu'on pourrait mettre en place, c'est celle des prestations spéciales de maladie qui sont de seulement 15 semaines et qui devraient passer à 52 semaines.
Or, pour cela, il faut un Parlement qui légifère. Il va nous falloir des mesures pérennes, durables et prévisibles si on veut éviter une autre période, une autre pandémie. Certains nous prédisent déjà qu'on va en avoir à l'automne. On souhaite que non. C'est possible aussi qu'il n'y en ait pas, mais il faut pouvoir prévenir. On ne pourra pas le faire seulement en se posant des questions, seulement en se demandant ce qui va bien et ce qui ne va pas bien, et comment on peut réagir.
Je vais parler de ce qui se passe dans les entreprises. On annonce de plus en plus de faillites. On annonce de plus en plus d'entreprises qui n'auront pas la capacité de survivre et qui se mettent sous la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies.
Qu'est-ce qui arrive aux caisses de retraite, au bas de laine des travailleuses et des travailleurs? En plus d'avoir perdu leur emploi, d'avoir des salaires qui sont bien en deçà de la valeur de leur travail, ils risquent de perdre leur bas de laine si on ne protège pas les caisses de retraite.
Autant de raisons qu'on aurait dû discuter au lieu que le premier ministre soit opportuniste en prenant sur ses épaules 10 jours de congés de maladie — c'est certain qu'on n'est pas contre —, mais en sachant très bien que cela relevait de modifications aux lois de chacune des provinces. C'est donc impossible de l'imposer, et il ne peut qu'y avoir entente.
Cela m'indigne, non pas parce que la revendication n'est pas importante, mais parce que cela ne tient pas compte du genre de parcours qu'on devait faire à la Chambre aujourd'hui, c'est-à-dire décider qu'on peut et qu'on doit reprendre les travaux parlementaires parce qu'on a l'obligation d'entreprendre des mesures qui sont législatives, pérennes, durables et surtout prévisibles. On ne peut plus agir à la pièce.