Je suis prêt à me prononcer sur la question de privilège soulevée le 18 février 2020 par le député de Timmins—Baie James concernant la réponse du gouvernement à la question écrite Q-163.
Dans son intervention, le député a allégué que le ministre de la Justice et procureur général du Canada a délibérément induit la Chambre en erreur dans une réponse à une question écrite concernant les frais engagés dans le cadre des poursuites liées à des causes portées devant le Tribunal canadien des droits de la personne. En somme, le député a fait valoir que les montants précisés dans la réponse du gouvernement ne correspondent pas à ceux que des citoyens ont obtenus grâce à des demandes d’accès à l’information. Selon lui, le gouvernement a commis un outrage à la Chambre, car il l’a délibérément induite en erreur en fournissant des renseignements incomplets ou inexacts dans sa réponse à la question écrite Q-163.
Dans sa réponse, le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes a indiqué que le gouvernement applique une formule cohérente pour calculer le montant des frais juridiques qui est transmis dans les réponses écrites, et il a fait valoir qu’on ne connaît pas la méthodologie utilisée pour calculer les montants obtenus par d’autres personnes. Il a ajouté que les divergences ne signifient aucunement que les calculs du gouvernement ont été faits de mauvaise foi ou pour induire la Chambre en erreur. Il s’agit selon lui d’un débat sur les faits et, pour cette raison, il est d’avis qu’il n’y a pas matière à invoquer le privilège. Autrement dit, à son avis, les députés ne s’entendent pas sur la façon dont les montants finaux ont été calculés, mais ces désaccords ne sont pas inhabituels lorsqu’on débat d’une question selon des perspectives différentes.
Je remercie les députés de leurs interventions. En gros, le député de Timmins—Baie James soutient que la réponse obtenue est délibérément trompeuse, car, comme il l’a mentionné dans son intervention, les renseignements qui y figurent ne correspondent pas à ceux qu’un universitaire et un journaliste ont obtenus par un autre moyen, alors que le secrétaire parlementaire laisse entendre que la méthodologie utilisée par d’autres sources peut être différente de celle que le gouvernement a appliquée.
En fin de compte, il semble s'agir d'un désaccord sur les faits, et il n'est pas de mon ressort, à titre de Président, de me prononcer sur une telle question. Nos précédents à ce sujet sont clairs, et, comme le précise la Procédure et les usages de la Chambre des communes, troisième édition, à la page 529,
[a]ucune disposition du Règlement ne permet au Président de contrôler les réponses que le gouvernement donne aux questions.
De plus, dans le cas qui nous occupe, contrairement à la situation exposée dans les précédents cités par le député de Timmins—Baie James, une même personne n’a pas présenté deux ensembles de faits différents à la Chambre et rien ne porte à croire que l’on a tenté d’induire délibérément la Chambre en erreur. Pour ces motifs, la présidence ne peut conclure qu’il y a de prime abord matière à question de privilège.
Il est possible que le député de Timmins—Baie James ne soit pas satisfait de la réponse qu’il a reçue. Diverses possibilités s’offrent toutefois à lui pour pousser la question plus loin. Il peut, entre autres, soumettre une autre question écrite formulée différemment ou encore poser une question directement au ministre durant la période des questions orales ou dans le cadre des délibérations d’un comité.
Le secrétaire parlementaire, dans son intervention du 25 février 2020, a aussi mentionné que les députés pourraient s’adresser directement à un ministre ou un secrétaire parlementaire pour obtenir des clarifications lorsqu’ils estiment que les renseignements sont incomplets ou qu’il semble y avoir une divergence avec d’autres sources d’information. Il a fait valoir que, la plupart du temps, ces divergences découlent simplement d’une erreur, d’une omission ou d’un malentendu et elles ne constituent pas une tentative délibérée d’induire la Chambre en erreur.
La présidence doit toutefois avouer qu'une meilleure communication entre les députés, qui demandent les renseignements, et le gouvernement, qui fournit les renseignements, pourrait peut-être permettre d'améliorer la communication des renseignements et d'éviter que toute insatisfaction fasse l'objet d'une question de privilège. Cependant, la présidence tient à rassurer la Chambre que lorsque des députés estiment qu'il y a eu atteinte à leurs privilèges, ils ont le droit de porter la question à l'attention du Président de cette façon.
Pour conclure, comme mes prédécesseurs l’ont souligné à plusieurs reprises, je tiens à rappeler toute l’importance de l’exactitude des renseignements qui sont fournis par le gouvernement et sur lesquels les députés comptent pour s’acquitter de leurs fonctions parlementaires.
Je remercie les députés de leur attention.