Madame la Présidente, je profite du temps qui m'est accordé dans le débat sur le projet de loi C-4 pour aborder des questions que les gens de ma circonscription se posent sur l'Accord Canada—États-Unis—Mexique, qu'on appelle aussi le nouvel ALENA, questions sur lesquelles tous les Canadiens méritent des réponses.
Le Parti conservateur a une longue liste de réalisations dans le domaine commercial et il comprend l'importance du commerce international. Le gouvernement précédent a négocié des accords commerciaux avec plus de 40 pays.
Dans ma circonscription, Kelowna—Lake Country, beaucoup de secteurs dépendent du commerce international. Notre région est la zone commerciale la plus importante entre Vancouver et Calgary, et notre aéroport se classe parmi les 10 aéroports canadiens les plus achalandés.
La Commission de développement économique du centre de l'Okanagan a publié un rapport qui présente un aperçu des secteurs. Dans ma circonscription, le secteur manufacturier comprend l'industrie agroalimentaire et l'industrie aérospatiale de pointe. Nous produisons des métaux, du plastique, du bois, du béton et de la fibre de verre. Le rapport prévoit que la fabrication de produits métalliques, l'exploitation des minéraux non métalliques ainsi que la fabrication de matériel de transport, de produits de plastique, de produits en caoutchouc et de boissons connaîtront la croissance la plus forte. L'éventail de fabricants permet aux nouvelles entreprises et aux entreprises existantes de trouver d'excellents partenaires locaux.
Lorsque la Chine a commencé à imposer des embargos sur les produits agricoles canadiens, les producteurs de cerises de ma circonscription craignaient qu'ils soient les suivants et ont commencé à étudier la possibilité d'accroître leurs exportations vers les États-Unis et vers d'autres marchés. Pour les agriculteurs et toutes les entreprises, il est donc important que nous entretenions des relations commerciales stables et clairement définies.
L'ALENA n'était pas parfait, mais il a été bénéfique pour le Canada, grâce aux échanges commerciaux de 2 milliards de dollars par jour entre les deux pays. Les États-Unis sont notre principal partenaire commercial. Ils achètent 75 % des exportations canadiennes.
Je crois savoir que la majorité des grandes associations industrielles du Canada de même que les premiers ministres des provinces et des territoires nous encouragent à ratifier l'ACEUM. Dans leur communiqué, les premiers ministres déclarent ceci: « Outre la recherche de la ratification de l’ACEUM, les premiers ministres des provinces et territoires continuent de considérer comme une priorité les échanges avec les États-Unis pour dénouer d’autres enjeux commerciaux tels que les politiques Buy American et le conflit du bois d’œuvre résineux. »
Pourquoi la politique d'achat aux États-Unis n'a-t-elle pas été abordée dans l'ACEUM? Le Mexique a obtenu un chapitre sur le sujet, mais pas le Canada. Il n'y a pas de chapitre sur les marchés publics.
Il y a beaucoup d'incertitude depuis quatre ans. Nous avons perdu des débouchés commerciaux, et les investissements sont en veilleuse. Beaucoup de gens veulent simplement pouvoir aller de l'avant en connaissance de cause. Goldy Hyder, du Conseil canadien des affaires, a déclaré que le nouvel ALENA conclu est « suffisamment bon » pour le Canada et « nous permet de nous rendre jusqu'au prochain changement de gouvernement des États-Unis ».
Je vais parler aux députés d'une industrie qui pense que l'ACEUM est assez bon, mais qui n'est pas plus avancée, comme tant d'autres industries du pays dont nous entendons parler. Il s'agit de l'industrie vinicole, plus précisément en Colombie-Britannique. En Ontario aussi, il y a de l'incertitude.
Pas plus tard que lundi dernier, je me suis entretenue avec Miles Prodan, directeur général du British Columbia Wine Institute. Il a consenti à ce que je fasse part de ses observations à la Chambre aujourd'hui. Il a dit: « Nous acceptons et appuyons la ratification de l'Accord Canada—États-Unis—Mexique, et ce, même si cet accord n'apporte ni amélioration ni avantage pour l'industrie vinicole. Le maintien du statu quo est pour nous une victoire. » Il parle au nom des 281 exploitations viticoles VQA que représente son organisme en Colombie-Britannique, dont 32 sont situées dans ma circonscription, Kelowna—Lake Country. « Le maintien du statu quo est pour nous une victoire. »
Le différend commercial actuel avec l'Australie, qui conteste l'exemption de la taxe d'accise fédérale sur les vins entièrement canadiens, risque d'avoir des conséquences dévastatrices. Comme je l'ai mentionné à la Chambre hier, en 2018, à la suite de l'imposition, par le gouvernement libéral, d'une taxe avec indexation sur la bière, le vin et les spiritueux, l'Australie a demandé à l'Organisation mondiale du commerce de se pencher sur l'exemption accordée aux vins entièrement canadiens. L'indexation signifie que cette taxe augmentera automatiquement d'année en année.
L'ébauche du rapport sur cet examen de l'Organisation mondiale du commerce est attendue en avril, et le rapport définitif devrait être déposé cet été. Une décision de l'OMC contre le Canada serait juridiquement contraignante et aurait des répercussions désastreuses pour les quelque 400 exploitations vinicoles canadiennes, parce qu'elle leur imposerait un fardeau de millions de dollars en nouvelles taxes. Elle mettrait en péril cette industrie importante et des emplois canadiens. Voilà qui montre que les libéraux n'ont pas mûrement réfléchi aux ramifications de leurs décisions et de leurs politiques fiscales et qu'ils les comprennent mal.
Le 16 janvier, les députés qui représentent une circonscription où se trouvent des établissements vinicoles ont signé une lettre adressée à la ministre de la Petite Entreprise, de la Promotion des exportations et du Commerce international. Il s'agit d'une initiative du député de Prince Albert, qui est chargé du commerce international dans le cabinet fantôme. Dans la lettre, on demande que le gouvernement noue un dialogue avec l'Australie afin de résoudre le différend avant que l'OMC rende sa décision. Le 31 janvier, nous avons reçu une réponse de la part de la ministre. Dans sa lettre, elle déclare:
La position de l'Australie sur l'exemption du droit d'accise demeure claire et inébranlable. Toute entente négociée doit prévoir l'abolition complète de l'exemption des droits d'accise pour les vins du Canada. Cette position a été confirmée à des représentants canadiens, pas plus tard qu'en décembre 2019.
Je soulève la question aujourd'hui, car il s'agit d'une tendance que nous avons observée dans les négociations commerciales avec le gouvernement actuel. C'est comme si l'Australie avait tracé une ligne dans le sable et nous demandait ce que nous allions faire.
Il se peut que le gouvernement australien agisse ainsi parce que, comme bien d'autres pays, il est mécontent de l'absence du premier ministre à la réunion des signataires du Partenariat transpacifique, un accord que le premier ministre avait seulement à signer. Il paraît que les signataires du Partenariat transpacifique, y compris l'Australie, étaient indignés.
En ce qui concerne les négociations de l'Accord Canada—États-Unis—Mexique, le président du comité des voies et moyens de la Chambre des représentants des États-Unis a dit que la vice-première ministre et le premier ministre ont accédé à presque toutes les demandes des États-Unis, uniquement pour faire exécuter l'accord. Quelles autres concessions avons-nous accepté de faire pour susciter une telle déclaration?
À tout le moins, le gouvernement est conséquent. On nous a parlé de la façon dont le Canada a négocié l'Accord Canada—États-Unis—Mexique avec les États-Unis, c'est-à-dire en faisant une concession après l'autre, et nous le voyons encore dans la question du commerce avec l'Australie. Cette attitude de laissez-faire ne sert pas bien les Canadiens et les familles.
Un autre secteur important qui a été exclu des négociations concernant l'Accord Canada—États-Unis—Mexique est l'industrie du bois d'œuvre en Colombie-Britannique. Dans la dernière année, des milliers d'emplois ont disparu dans cette industrie. Au total, le secteur du bois d'œuvre a perdu quelque 50 000 emplois au cours des dernières années. Je suis intervenue à la Chambre pour parler de l'impact direct de cette situation sur ma circonscription, Kelowna—Lake Country, qui a perdu 217 emplois permanents.
Le secteur des ressources durables a été frappé durement et il doit actuellement payer les droits de douane imposés par les États-Unis. Pourquoi l'industrie du bois d'œuvre est-elle absente de l'Accord? Pour le soutien de la classe moyenne, on repassera.
En tant que parlementaires, nous avons le devoir de réfléchir sérieusement et d'examiner attentivement le projet de loi. Il est irresponsable de la part du gouvernement de précipiter les choses. Il n'est pas simplement question de chiffres. Il est aussi question de vies, de familles et d'emplois. Quand le gouvernement libéral nous exhorte avec insouciance à adopter le projet de loi à toute vapeur, je me demande sérieusement de quels emplois il se préoccupe le plus.
Le processus de ratification est légèrement différent d'un pays à l'autre. En juin dernier, l'Accord a été ratifié par le Sénat mexicain. Puis, en raison de modifications apportées au texte, il a été ratifié de nouveau en décembre dernier. Aux États-Unis, la Chambre des représentants a commencé à débattre de l'Accord en septembre 2019 et elle l'a adopté en décembre 2019. Le Sénat l'a ensuite adopté le 16 janvier 2020.
Je suis consciente qu'il y a eu des élections, mais nous avons tous été élus en octobre dernier. Après les élections, les conservateurs ont exhorté le gouvernement libéral à rappeler la Chambre le 25 novembre, car nous devions nous retrousser les manches et nous mettre au travail pour les Canadiens. Or, le gouvernement a fait la sourde oreille, et le premier ministre n'a pas rappelé la Chambre avant le 5 décembre.
L'Accord Canada—États-Unis—Mexique devait être présenté de nouveau après les élections, mais le gouvernement n'a pas déposé le projet de loi C-4 avant le 29 janvier. Nous débattons de l'Accord bien après que nos partenaires commerciaux eurent terminé de le faire, et le gouvernement nous demande maintenant de précipiter les choses. Le gouvernement a été tout simplement irresponsable et imprudent en attendant aussi longtemps pour présenter de nouveau un projet de loi portant mise en œuvre de cet accord. Il est important que nous fassions preuve de diligence raisonnable, en particulier puisque le gouvernement ne nous a toujours pas fourni d'analyse des répercussions économiques. C'est ce que réclame sans cesse l'opposition officielle depuis presque deux mois, mais le gouvernement n'a pas encore donné suite à sa demande.
Nous avons entendu dire que le gouvernement avait mené une analyse des répercussions économiques. Cependant, il y a deux jours, la vice-première ministre a indiqué à la Chambre que le gouvernement présenterait l'analyse une fois qu'elle sera terminée.
Une analyse a-t-elle réellement été faite? Est-ce qu'elle a été effectuée uniquement dans certains secteurs? Est-elle incomplète? Y a-t-il des industries où les résultats de l'analyse ne sont pas positifs, et les libéraux ne veulent pas que cette information soit révélée maintenant? Nous avons besoin de réponses à ces questions.
Les conservateurs appuient le libre-échange avec les États-Unis. Ils souhaitent la conclusion d'accords commerciaux avec nos plus proches alliés. L'ALENA est un héritage des conservateurs. Les entreprises canadiennes méritent d'avoir des certitudes, et on ne devrait pas nous presser de voter sur ce projet de loi crucial alors que nos questions demeurent sans réponse. En tant que parlementaires, nous devons disposer de toute l'information nécessaire. Nous le devons aux collectivités que nous représentons. J'exhorte tout le monde à voter pour le renvoi du projet de loi au comité afin que nous puissions examiner certaines de ces questions comme il se doit.