Madame la Présidente, j'ai eu l'occasion d'écouter de nombreuses interventions sur le sujet aujourd'hui. Je tenterai de scinder la question en deux ou trois éléments, mais je vais d'abord parler du processus. Ce dernier est important, car nous voulons à tout prix partir du bon pied.
Les comités permanents de la Chambre ont toujours été bien vus, et les quatre dernières années en ont fait la preuve. Même lorsque j'étais dans l'opposition, j'ai toujours affirmé l'importance du rôle que jouent les comités permanents dans la Cité parlementaire et de l'excellent travail qu'ils accomplissent pour les Canadiens de partout au pays. Je crois que nous sous-estimons souvent leur importance.
Je vais revenir sur certaines des questions que j'ai posées à différents députés d'en face.
D'abord, j'ai tenté autant que j'ai pu d'obtenir des explications sur ce qui fait que, selon eux, un comité permanent ne serait pas en mesure d'accomplir ce que le comité spécial proposé pourrait faire.
En ce qui a trait à la motion, la Chambre fera ce qu'elle veut. Nous devrons attendre le vote, mais la motion me rend plutôt mal à l'aise. Je vais vous dire pourquoi.
Nous entamons la session parlementaire, pour ainsi dire, et, à l'issue des dernières élections, un message assez clair a été envoyé à tous les députés: les Canadiens veulent que le Parlement fonctionne. Ils réclament une responsabilisation accrue, davantage de coopération et ainsi de suite.
Si on me donne un peu de temps, je crois que je pourrais dresser facilement une liste d'une dizaine de sujets dont nous pourrions discuter au cours des 12 prochains jours consécutifs de séance. Je pourrais dire que ces sujets sont extrêmement importants, qu'il y va des intérêts canadiens et que, grand Dieu, nous devrions créer un comité spécial de la Chambre des communes pour que les députés puissent en discuter en profondeur, convoquer des témoins, et cetera. Je suis persuadé que j'y arriverais, même à moi seul. Si j'avais l'occasion et le temps de m'asseoir avec nombre de collègues des deux côtés de la Chambre, la liste serait quatre fois plus longue, et même plus. Je pourrais dresser une liste quasi infinie de sujets à confier à des comités spéciaux en leur demandant, pour le bien des Canadiens d'un bout à l'autre du pays, d'en discuter.
Je pense toutefois que nous n'avons pas besoin de cela, car nous avons des parlementaires très compétents des deux côtés de la Chambre qui auront la possibilité de siéger aux comités permanents, dont le nombre est considérable. Si je ne m'abuse, il y a 24 comités permanents. Un membre du bureau du greffier peut me corriger si j'ai tort.
Tous ces comités auront un président et plusieurs vice-présidents, et dans chacun d'eux, ce sera à l'opposition d'en établir l'ordre du jour, puisqu'elle sera majoritaire. Alors, si les députés croient sincèrement à la collaboration — et j'entends beaucoup de mes collègues dire que c'est le cas —, doit-on en déduire qu'en ce qui concerne les comités, nous devrions essayer de faire consensus, malgré le contexte minoritaire, au lieu de nous en remettre au vote de la majorité? Les députés sont-ils prêts à accepter que, dans certaines situations, nous visions l'obtention d'un consensus quand viendra le temps de renvoyer telle ou telle question aux comités?
J'imagine que, bien souvent, la décision appartiendra au comité permanent concerné. C'est la composition d'un comité — et la personnalité des députés qui en feront partie — qui déterminera si ses travaux iront rondement ou non d'ici la fin de la législature, que celle-ci dure six mois, un an et demi, trois ans, peu importe. J'aurais tendance à dire aux nouveaux députés et à ceux qui n'ont jamais fait partie d'un comité permanent que l'éventail des sujets qui peuvent être étudiés par les comités permanents est très vaste. Certains ont produit des rapports mémorables. Ils font un travail remarquable.
Les comités permanents peuvent s'intéresser à énormément de choses. Si l'un d'eux décide d'étudier telle ou telle question, même s'il n'en a pas expressément reçu l'instruction, il y a toujours moyen de trouver un lien indirect avec son mandat. Si c'est sa volonté, il peut alors procéder à l'étude souhaitée.
L'une des premières choses qu'un comité fera après l'élection d'un président et de vice-présidents est d'établir un comité directeur ou un sous-comité. C'est lui qui déterminera les sujets importants qui seront étudiés au cours d'un certain nombre de semaines, de mois ou même d'années. Une partie des débats qui ont eu lieu à la Chambre, en particulier en ce qui concerne une question que j'ai posée, montre que l'enjeu n'est pas nouveau et qu'il ne disparaîtra pas. Même des députés de l'opposition ont reconnu qu'ils n'ont pas clairement démontré le caractère urgent. S'ils croyaient qu'il y avait urgence, j'imagine qu'ils auraient demandé la tenue d'un débat d'urgence sur la question. Cette distinction ne veut pas dire que ce n'est pas important; c'est d'une importance capitale, surtout quand je pense aux deux Michael qui sont incarcérés.
Il est vrai que la Chine a dépassé les bornes à plusieurs reprises. En tant que gouvernement, en tant que corps législatif, la Chambre des communes a bel et bien un rôle crucial à jouer. La question est toutefois de savoir si nous pensons que ce rôle revient aux comités permanents du Parlement ou si nous allons laisser à la Chambre la possibilité de passer outre les comités permanents quand elle le veut soi-disant parce qu'elle ne pense pas qu'un comité permanent donné accordera la priorité à la question. Est-ce donc la Chambre qui va déterminer quel sujet sera étudié? Allons-nous également à présent leur dire qui ils doivent convoquer comme témoins? Cette motion indique clairement que l'opposition veut que des personnes bien précises comparaissent devant ce comité.
À mon avis, en tant que parlementaires et législateurs, nous avons une excellente occasion de faire quelque chose de positif en ce qui concerne les comités permanents. La situation de gouvernement minoritaire est propice à l'établissement d'un consensus et au travail d'équipe.
Je trouve toujours intéressant de constater que si les débats peuvent être assez animés à la Chambre des communes et donner lieu à des envolées partisanes, en revanche, lorsque nous nous rendons à certains de ces comités permanents et que nous écoutons le dialogue qui s'y déroule, nous constatons souvent que les membres agissent en parlementaires plutôt qu'en représentants d'un parti politique.
J'aimerais croire que nous représentons tous d'abord nos électeurs et que nous voulons toujours faire ce qui est dans l'intérêt du Canada, mais souvent ce n'est pas le cas. Si nous voulons vraiment nous pencher sur cette question, qui est d'une importance capitale, je dirais que la meilleure tribune pour le faire est en fait le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. D'autres comités permanents pourraient aussi s'en saisir, comme le Comité du commerce international. J'y reviendrai, mais on entend souvent dire que d'autres comités permanents pourraient se pencher sur cette question.
La Chambre a l'occasion de donner un vote de confiance à l'égard de ce que souhaitent les Canadiens. Je crois qu'ils veulent une plus grande coopération. Ils veulent que la Chambre des communes assume une plus grande responsabilité en ce qui concerne les mesures à prendre.
Les conservateurs, les députés de l'opposition et certains autres députés disent que la question doit être étudiée par un comité spécial et, bien franchement, ils sont peut-être dans la majorité aujourd'hui. J'exhorte les députés à reconnaître que nous pouvons accomplir davantage dans le débat d'aujourd'hui en reconnaissant l'importance des comités permanents.
Constituons le Comité permanent des affaires étrangères. Faisons en sorte que les membres du Comité ainsi que du sous-comité ou du comité directeur se réunissent et rendent une décision. Voudront-ils se pencher sur la question? Je soupçonne que oui. Le Comité fixe ses propres heures. Si les membres veulent se réunir six heures par jour, cinq jours par semaine, pendant les douze prochains mois, ils peuvent le faire. Il dispose d'une grande marge de manoeuvre, particulièrement dans une situation où le gouvernement est minoritaire.
Ce n'est ni juste ni approprié de parler de ce qui s'est déroulé au cours des 4, des 6 ou des 10 dernières années. Des gouvernements majoritaires ont été au pouvoir pendant les huit dernières années, et, maintenant, c'est un gouvernement minoritaire qui l'est. Les personnes qui se décrivent comme des parlementaires qui croient à l'excellent travail accompli par le Parlement devraient réfléchir à ce qui est, à mon avis, l'épine dorsale de l'institution parlementaire, soit les comités permanents.
À bien des égards, lorsqu'il est question de tendre la main aux collectivités d'un océan à l'autre et de faire appel aux experts nécessaires aux parlementaires pour prendre collectivement de bonnes décisions éclairées, une bonne partie de ce travail préparatoire pourrait être accompli par les comités permanents.
Lorsque j'écoute le débat, je me rends compte qu'il sera difficile de faire rejeter cette motion, alors, si elle est adoptée, eh bien, soit ainsi. Je vais l'accepter. Après tout, nous sommes dans un contexte de gouvernement minoritaire, et je vais l'accepter. Toutefois, oui, je serai plutôt déçu parce que j'estime que nous avons raté l'occasion d'accorder notre confiance de façon très concrète aux comités permanents. À mon avis, c'est une occasion ratée.
Cela dit, j'aimerais parler de la Chine.
La Chine est une dictature. Nous le savons tous. Nous avons tous de graves préoccupations, et nous ne sommes pas les seuls parlementaires à en avoir. Cela remonte à aussi loin qu'à l'époque de la Confédération, lorsque nous nous sommes unis en tant que pays il y a de cela plus de 150 ans. La Chine est une dictature, et tous les problèmes liés à une dictature feront éventuellement surface à un moment ou à un autre de notre histoire.
Pierre Elliott Trudeau a fait beaucoup pour adoucir la relation entre le Canada, un pays démocratique, et la Chine, une dictature. Toutefois, il n'a pas été le seul. Les États-Unis d'Amérique en faisaient tout autant, tout comme les premiers ministres qui lui ont succédé, tels que Brian Mulroney et Pierre Trudeau.
Je me souviens que Jean Chrétien a dirigé une mission d'Équipe Canada en Chine. Je crois que c'était en 1993 ou en 1994. Des libéraux, des conservateurs et probablement aussi des néo-démocrates se sont rendus en Chine pour tisser des liens plus sains et plus solides avec ce pays et pour régler des problèmes qui n'étaient pas simplement de nature économique. Stephen Harper a poursuivi la tradition. La Chine ne donne pas des pandas à un pays qu'elle n'aime pas; elle le fait lorsqu'elle croit qu'elle entretient des liens avec le pays en question. C'est ce qu'elle a fait lorsque Stephen Harper était au pouvoir.
Est-ce à dire qu'il n'y avait aucun problème à l'époque où Jean Chrétien et Stephen Harper étaient premiers ministres? Les députés peuvent me croire: il y avait des problèmes. Il y avait des problèmes liés aux droits de la personne et à la primauté du droit. Des enjeux de cette nature étaient déjà présents dans les années 1990 et au cours des 10 années où le gouvernement dirigé par Stephen Harper a été au pouvoir. Les relations entre le Canada et la Chine sont toujours marquées par des tensions, car la Chine est une dictature, alors que le Canada est une démocratie. Nous croyons en la primauté du droit. Nous croyons aux droits de la personne.
C'est le Parti libéral qui a fait adopter la Charte des droits et libertés. Nous savons à quel point la primauté du droit, la liberté d'expression et tous les autres principes démocratiques sont importants. Éprouvons-nous des inquiétudes? Tout à fait. Sommes-nous satisfaits de la tournure des événements? Certainement pas.
Je viens des Prairies, et l'industrie du porc est importante dans la province du Manitoba, où il y a plus de cochons que d'habitants. Cette industrie dépend beaucoup des exportations en Asie. Il s'agit d'une industrie très importante au Manitoba, tout comme celle du canola et d'autres produits agricoles. Comme d'autres l'ont dit, il n'est toutefois pas question de brader le Manitoba pour une poignée de dollars. Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'il doit y avoir un équilibre.
La question des droits de la personne est toujours un sujet brûlant dans le caucus libéral. Je suppose d'ailleurs que c'est la même chose dans tous les partis politiques. J'aime imaginer qu'il y a un équilibre à maintenir, mais certains députés estiment que le balancier oscille trop d'un côté ou de l'autre et qu'il faut le régler. Cet équilibre change un peu selon la personne à qui s'adresse le député. C'est même ce que je constate en écoutant certaines interventions aujourd'hui. Au bout du compte, tous s'entendent sur le fait que le Canada doit agir.
Je tiens à préciser que le Canada a bel et bien pris des mesures. Il y a des conséquences aux agissements de la Chine. Des pays comme l'Australie, la France, l'Allemagne, les États-Unis, le Royaume-Uni, les pays de l'OTAN et bien d'autres ont tous reconnu l'injustice dont fait preuve la Chine à l'égard du Canada et font front commun avec lui sur la question. Si la situation persiste, la Chine et la place qu'elle occupe dans le monde continueront d'en subir les contrecoups. Le Canada et le gouvernement, avec l'appui des députés, peuvent s'assurer que nous avons un juste équilibre en protégeant les droits de la personne et en veillant à ce qu'ils demeurent une priorité pour la Chambre des communes à Ottawa.
En terminant, j'ose espérer que les députés de toute allégeance conviendront de l'importance de la question et que nous avons au sein de notre institution l'occasion d'accorder un vote de confiance à nos comités permanents. Il est à espérer que l'un d'eux acceptera de jouer ce rôle, car il ne s'agit pas d'un enjeu ponctuel, mais qui demeurera présent pendant les années à venir.