Madame la Présidente, c'est avec des sentiments partagés que je prends la parole aujourd'hui, car, d'une part, la dernière fois que j'ai eu l'honneur de faire une déclaration à la Chambre, je croyais que nous aurions pu faire mieux pour les Canadiens. Au cours du débat, alors que nous examinions comment nous allions procéder pendant l'été, j'ai essayé de présenter ce qui, à mon avis, constituait des arguments convaincants pour faire en sorte que nul ne soit laissé pour compte au pays.
D'autre part, en tant que néo-démocrate, je suis fier que nous ayons réussi à convaincre le gouvernement libéral de retirer du projet de loi C-20 les pénalités liées à la Prestation canadienne d'urgence pour les gens qui ont du mal à joindre les deux bouts et d'accroître, à tout le moins, l'aide pour les personnes handicapées en ajoutant le Programme de prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada aux dispositions traitant des personnes handicapées.
Je suis fier qu'on nous ait accordé un certain délai de grâce pour permettre à plus de gens de demander le crédit d'impôt pour personnes handicapées parce que, à presque toutes les étapes du processus, il semble que le gouvernement s'obstine inutilement à fonder l'admissibilité sur les ressources plutôt que d'offrir une aide universelle, et ce faisant, il continue d'abandonner à leur sort des gens importants.
Je suis ici pour représenter les citoyens d’Hamilton-Centre. J’ai déjà dit que ma circonscription arrive au troisième rang parmi celles où le revenu moyen des ménages est le plus faible. Nous avons aussi un nombre disproportionné de personnes qui vivent avec un handicap et qui ont du mal à joindre les deux bouts. Dans l’évolution des mesures de soutien que nous avons eues durant la COVID-19, la première réponse du gouvernement libéral a été de proposer un régime d’assurance-emploi morcelé qui abandonnait bien des gens à leur sort. La panique dans cette crise, à la perspective d’arriver à la fin du mois sans pouvoir payer le loyer, n’a pas seulement été ressentie par les personnes vivant dans la pauvreté, mais par des personnes qui étaient confrontées à la pauvreté peut-être pour la première fois.
Nous nous souvenons que les libéraux ont essayé de lier le crédit d’impôt pour personne handicapée à un programme qui ne se serait appliqué qu’à 40 % de la population vivant avec un handicap. Voilà qui laisse de côté la grande majorité des citoyens de ma circonscription. J’ai maintenu ici que j’avais une obligation morale, et que nous avions tous un impératif moral, de veiller à ce que les personnes les plus vulnérables du pays ne soient pas abandonnées à leur sort, peu importe leur citoyenneté, leur capacité à travailler, la durée de leur séjour ici ou l’endroit où ils ont vécu.
Cependant, nous voici de retour pour étudier le projet de loi C-20. Le projet de loi a été légèrement amélioré, mais il laisse encore pour compte beaucoup trop de personnes vulnérables. La définition même du handicap dans le crédit d’impôt pour personnes handicapées est beaucoup trop restrictive. Il s’agit d’un crédit d’impôt non remboursable, et les personnes handicapées les moins nanties ne font pas assez d’argent pour en bénéficier.
Dans la discussion sur les personnes vivant avec un handicap, l’approche envers les personnes âgées m’a semblé injuste. L’argument servi par les libéraux et les conservateurs était: « Qu’ont-elles perdu, en ce qui concerne leurs revenus? » Je dis que c’était injuste, parce qu’il est flagrant maintenant que les personnes les plus vulnérables avaient absolument le plus à perdre.
J’ai dit hier que ce ne sont pas seulement les personnes infectées par la COVID-19 qui sont touchées. Je pense à mon ami, Michael Hampson, qui, à 58 ans, a vécu la dernière partie de sa vie aux prises avec des handicaps, à essayer d’obtenir un soutien du revenu en Ontario. Pour un bref moment, il a eu de l’espoir grâce au revenu de base garanti. Pour la première fois de sa vie, il aurait dit qu’il pouvait vivre dans la dignité parce qu’il ne vivait pas dans la pauvreté imposée par le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées. Les taux du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, qui ont été fixés par les conservateurs et les anciens gouvernements libéraux en Ontario, condamnent bon nombre des personnes que je représente à vivre dans la pauvreté.
Nous avons l'audace de prendre la parole à la Chambre des communes et de demander ce qu'ils ont perdu, alors que certains de ces gens ont littéralement perdu la vie. On a forcé des personnes âgées à vivre dans des établissements de soins de longue durée inadéquats. Nous savons que la grande majorité des personnes qui ont succombé à la COVID-19 avaient un rapport avec ces établissements.
Lorsque nous débattons du projet de loi, il est important de ne pas seulement parler des éléments qu'il contient, mais aussi des éléments qu'il ne contient pas. Quelles personnes oublions-nous toujours? Pourquoi privilégions-nous encore cette approche fragmentaire et graduelle qui, comme l'a admis l'intervenant précédent, a été conçue pour aider le plus de personnes possible, mais pas tout le monde?
Pourquoi ne pas mettre en place des mesures de soutien universelles? Comment se fait-il que le gouvernement d'un pays aussi prospère que le Canada ne soit pas en mesure d'aider tous les habitants du pays?
Parlons des 740 millions de dollars qui serviront à couvrir les coûts ponctuels engagés au cours des six à huit prochains mois pour les mesures de contrôle et de prévention des infections dans les établissements de soins de longue durée où il y a de plus en plus de cas de la maladie. Nous ne sommes pas sortis du bois. Nous ne faisons que commencer. Cette somme de 740 millions de dollars témoigne de la réticence du gouvernement libéral à donner l'exemple sur la scène nationale dans le dossier des soins de santé offerts aux personnes âgées dans les établissements de soins de longue durée. Voilà la véritable tragédie de la crise.
Cette crise a donné lieu à plusieurs scandales. Je dirais qu'avec l'organisme UNIS, nous sommes devant un scandale, mais ce n'est pas le véritable scandale, qui demeure la manière inefficace dont le gouvernement libéral a livré et géré l'approvisionnement de la réserve nationale d'urgence. Nous aurions dû avoir des millions d'articles d'équipement de protection individuelle essentiels qui auraient protégé les Canadiens au début de cette crise. Au début, nous avons suivi les directives des professionnels de la santé selon lesquelles les masques n'étaient pas nécessaires. Dans mon for intérieur, je me suis questionné sur cette recommandation. Par ailleurs, le gouvernement libéral s'est débarrassé de millions d'articles d'équipement de protection individuelle essentiels. Je soulève ce point aujourd'hui parce que nous n'allons pas siéger à nouveau pendant un certain temps et que nous ne sommes pas sortis de cette crise.
Alors que les provinces poursuivent le déconfinement des entreprises, les libéraux, eux, ouvrent la porte à une seconde vague de la maladie. J'ai parlé de l'impératif moral de planifier pour l'avenir. Il y aura dorénavant une nouvelle normalité. La COVID ne disparaîtra pas. Des gens continueront d'être infectés et de mourir. Néanmoins, certaines questions demeurent. Que sommes-nous disposés à faire face à cette situation? Que pouvons-nous faire pour éviter que, la prochaine fois, des gens comme mon ami Michael Hampson ne soient pas trouvés dans leur appartement quatre jours après leur décès? Comment pouvons-nous garantir que le système de soins de santé offre assez de soutien pour qu'il soit possible de vérifier la situation des personnes les plus vulnérables?
Nous avons la capacité de prendre les mesures qui s'imposent. Le Canada possède la richesse nécessaire pour veiller au bien-être de l'ensemble des Canadiens. L'approche ne doit pas être fragmentaire. Force est de reconnaître que la pandémie affecte les éléments les plus vulnérables de la société et qu'un paiement unique de 600 $ à un nombre très limité de personnes handicapées n'est franchement pas suffisant.
Compte tenu du contexte actuel, au cours des prochaines semaines, j'appuierai cette mesure législative parce que c'est le mieux que le gouvernement est disposé à proposer, mais j'estime que nous méritons mieux. Les gens d'Hamilton-Centre méritent mieux. Nos concitoyens condamnés à la pauvreté par les lois méritent mieux. Voici la question qui revient constamment: qu'est-ce qu'un gouvernement néo-démocrate aurait fait différemment?
Qu'aurions-nous fait différemment? Nous aurions réalisé tout ce que nous avions promis au départ. Nous aurions aidé les prestataires de l'assurance-emploi. Nous aurions fourni des logements aux gens et nous aurions procédé à une transition juste et équitable pour tous dans cette nouvelle économie. Nous aurions vécu une reprise équitable.
Ce n'est pas du tout ce qui s'est produit. Même s'il ne faut que quatre jours au gouvernement libéral pour verser 750 milliards de dollars à Bay Street, nous voici encore pris à la Chambre à discuter des scandales du gouvernement. Comme bien des Canadiens, j'aimerais pouvoir me concentrer sur les choses importantes, soit les vies qui ont été perdues, pendant que je suis ici. C'est pour ces vies perdues que je suis ici. C'est pour cette raison que je suis ici. Lorsque les libéraux prennent des décisions en matière de politiques, j'invite ceux d'en face, ceux qui détiennent tout le pouvoir, à ne pas sciemment laisser des gens pour compte. Ces 600 $ qui seront versés de façon ponctuelle vont laisser pour compte 40 % de la population, des personnes parmi les plus vulnérables et ayant le revenu le plus faible.
J'invite mes collègues des deux côtés à me poser des questions afin que nous puissions déterminer comment la Chambre pourrait aider l'ensemble de la population à traverser cette crise et à passer à l'étape suivante.