Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir au sujet de l'Accord Canada—États-Unis—Mexique.
Je me réjouis qu'au terme d'un processus long et pénible, les choses aient enfin abouti. Les parlementaires ont maintenant la possibilité d'étudier le nouvel accord et de faire en sorte que le libre-échange avec nos partenaires du continent profite toujours à tous les Canadiens.
Des centaines de milliers d'emplois au Canada dépendent du commerce international, dont l'Accord de libre-échange nord-américain constitue un élément essentiel. En fait, un Canadien sur cinq qui occupe un emploi au Canada doit son emploi à cet accord.
Toutefois, nous avons intérêt à mettre à jour périodiquement des accords comme l'ALENA. Les choses évoluent constamment, ce qui nous oblige à revoir et à adapter les accords existants. Toutefois, en ce qui concerne la plus récente renégociation, le premier ministre s'est montré un peu trop empressé lorsqu'il s'est dit tout à fait disposé à renégocier l'ALENA avec le nouveau président Donald Trump.
J'ai été quelque peu surpris quand le premier ministre a choisi d'engager le Canada dans cette renégociation, alors que tout le monde savait que les États-Unis étaient surtout préoccupés par leur relation avec le Mexique. Le Canada s'est soudain laissé entraîner dans ce qui a donné lieu à plusieurs années de négociations particulièrement longues et houleuses. Heureusement, il semble que nous soyons arrivés vers la fin de cette étape.
Je suis conscient que les membres de l'équipe de négociation ont consacré de longues heures à cette tâche, et je tiens à remercier nos fonctionnaires pour les efforts qu'ils ont déployés. Je me rends compte qu'ils sont menottés et qu'ils ne peuvent pas travailler dans l'environnement qui leur convient ni utiliser les outils dont ils ont besoin. Toutefois, je suis convaincu qu'ils ont travaillé sans relâche et qu'ils ont fait de leur mieux pour obtenir le meilleur accord pour le Canada.
Fait particulièrement décourageant, pendant ce processus, nombre d'erreurs graves nous ont rendu la tâche encore plus difficile. Par exemple, le premier ministre est allé à New York, la ville natale du président Trump, pour donner un discours dans le cadre de la cérémonie de collation des grades d'une université. Naturellement, il a pris le temps de poser pour des photos. L'une des photos prises pendant cette visite s'est retrouvée sur la couverture du magazine Rolling Stone. Je pense que je ne ferai jamais la couverture de ce magazine, mais je suis sûr que c'est tout un exploit. Pire encore, l'article du Rolling Stone présentait le premier ministre comme un adversaire du président, ce qui donnait l'impression que le voyage n'était qu'une occasion de faire affront au président des États-Unis. Pourquoi le premier ministre a-t-il couru le risque d'insulter le président pendant que le Canada menait des négociations difficiles avec son pays et que des emplois canadiens étaient en jeu?
J'ai eu l'occasion de négocier bien des ententes commerciales. Au fil des années, j'ai appris que la meilleure façon de conclure une bonne entente est de créer des liens avec la personne avec qui on fait affaire, de bâtir une relation fondée sur la confiance et le respect mutuels, et de ne pas croire qu'on peut obtenir un accord juste et équitable en énervant et en intimidant l'autre personne.
Sans surprise, les faux pas et les difficultés qui ont marqué cette renégociation se sont traduits par certains reculs dans l'accord. Je parle du fait que les libéraux ont laissé tomber les agriculteurs soumis à la gestion de l'offre et les producteurs d'aluminium d'ici. Il y a aussi eu des occasions manquées: aucune avancée pour régler le conflit sur le bois d'œuvre, pour répondre à la disposition privilégiant l'achat de produits américains ou pour mettre à jour la liste des professionnels admissibles à des permis temporaires afin de refléter l'économie du XXIe siècle. Ce ne sont là que quelques exemples.
La semaine dernière, au moment de la signature à la Maison-Blanche, le président Trump a affirmé qu'il s'agissait de l'accord commercial le plus important, le plus juste, le plus équilibré et le plus moderne jamais obtenu. Au Canada, les libéraux n'ont pas utilisé les mêmes qualificatifs. À mon avis, ils sont loin d'être aussi sûrs d'avoir signé un accord aussi juste, équilibré et moderne qu'ils l'auraient souhaité. La façon dont ils parlent de cet accord en particulier le montre bien.
Malgré tout, compte tenu du ralentissement et de la vulnérabilité de l'économie canadienne, un accès limité aux marchés américains ne ferait qu'affaiblir davantage les exportations et les investissements commerciaux. Le libre-échange avec notre voisin du Sud ouvre des débouchés pour l'ensemble des Canadiens, et nous devons en tirer parti tout en travaillant à résoudre les problèmes que les libéraux ont créés avec cet accord.
De ce côté-ci de la Chambre, au Parti conservateur, nous sommes fiers de représenter le parti des échanges commerciaux. C'est, bien sûr, un gouvernement conservateur qui a élaboré le premier accord de libre-échange avec les États-Unis, à l'origine d'une activité économique accrue et de la création d'emplois au cours des dernières décennies.
Les échanges commerciaux bilatéraux transfrontaliers entre le Canada et les États-Unis s'élèvent à environ 2 milliards de dollars par jour, ce qui signifie que les États-Unis sont notre plus important partenaire commercial. Ces échanges représentent 75 % de toutes les exportations canadiennes. De fait, depuis la mise en œuvre de l'ALENA d'origine, plus de cinq millions d'emplois ont été créés. Si on inclut le Mexique, les échanges entre les trois pays ont quadruplé pour atteindre 1,2 billion de dollars par an. Les conservateurs sont donc convaincus qu'un bon accord est synonyme de croissance, d'investissements et de prospérité potentiels en permanence.
Comme tous les Canadiens, je veux le meilleur accord qui soit pour nos familles, nos travailleurs et nos entreprises. Il est important d'avoir un bon accord de libre-échange en place, mais il doit être dans l'intérêt des Canadiens. Le fait est que l'incurie dont les libéraux ont fait montre dans le dossier de l'Accord Canada—États-Unis—Mexique va coûter cher aux contribuables. Nous devons maintenant nous assurer que les entreprises, les industries et les secteurs de notre économie qui ont été négligés par cet accord fassent un atterrissage en douceur.
J'aimerais parler brièvement des secteurs assujettis à la gestion de l'offre, à savoir les industries du lait, du poulet, des œufs et des produits dérivés des œufs, de la dinde et des œufs d'incubation de poulet à chair.
Dans ma circonscription du Manitoba, il y a la plus forte concentration d'agriculteurs soumis à la gestion de l'offre de toute la province. Il va sans dire que ces personnes ne sont pas que de simples agriculteurs. Ils sont des piliers des collectivités du Sud-Est du Manitoba. Ils participent activement à leurs collectivités. Ce sont des employeurs. Ce sont eux qui font de ma circonscription, Provencher, la plus généreuse de tout le Canada, après Abbotsford, si l'on en croit les chiffres de Statistique Canada sur les dons de bienfaisance. Nous en sommes très fiers.
Le succès de cette circonscription, considérée comme très charitable, s'explique en partie par le fait que notre secteur de la gestion de l'offre y contribue grandement. Cependant, le gouvernement libéral a malheureusement laissé tomber les habitants de cette région. Dans ce nouvel accord, les libéraux ont convenu d'ouvrir 3,6 % du marché canadien afin d'accroître les importations de produits laitiers. C'est plus que ce qui était prévu dans le Partenariat transpacifique.
En ce qui concerne la gestion de l'offre, il ne faut pas oublier qu'en vertu du Partenariat transpacifique, les États-Unis faisaient partie de cet accès au marché canadien. Au lieu de faire marche arrière lorsque les Américains se sont retirés du Partenariat transpacifique et que nous avons finalement signé l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste, le Canada a conservé l'accès au marché canadien pour les pays asiatiques. Maintenant, en plus de tout cela, les Américains se prévalent d'un accès élargi au marché, à raison de 3,6 %, ce qui prive les producteurs canadiens d'un débouché pour leurs produits. Je suis persuadé que les secteurs assujettis à la gestion de l'offre ne considèrent pas que le nouvel ALENA est une amélioration.
Aux termes de l'Accord Canada—États-Unis—Mexique, le Canada adoptera des contingents tarifaires qui procureront aux producteurs laitiers des États-Unis un accès au marché des produits laitiers au Canada. Cela s'applique au lait, au lait concentré, au lait en poudre, à la crème et à la crème en poudre, au babeurre et même à la crème glacée. L'Accord prévoit également des seuils précis pour les concentrés de protéines de lait, le lait écrémé et les préparations pour nourrissons. Lorsque les seuils d'exportation de ces produits sont dépassés, le Canada sera tenu d'ajouter des droits aux exportations dépassant les seuils, ce qui haussera encore plus le prix de ces produits.
Les producteurs laitiers du Canada prévoient des pertes annuelles de 190 millions de dollars et que le plafonnement des exportations leur coûtera 50 millions de dollars supplémentaires. De surcroît, les transformateurs de produits laitiers canadiens estiment qu'ils subiront des pertes annuelles de 300 millions à 350 millions de dollars. C'est non négligeable. C'est beaucoup d'argent qu'il faudra trouver ailleurs pour compenser.
Les producteurs canadiens de poulet aussi seront négativement touchés. Aux termes du nouvel accord, le Canada laissera 47 000 tonnes métriques de poulet en provenance des États-Unis entrer au pays libres de droits de douane, et ce, dès la première année suivant la ratification. Par la suite, ce volume augmentera à près de 63 000 tonnes métriques par année.
Malgré tout cela, les conservateurs sont un parti de libre-échange et demeurent résolus à trouver une solution. La plupart des grandes associations d'industrie souhaitent que la Chambre ratifie l'accord. Personne ne réclamait vraiment ces changements, mais ils font partie de la réalité à laquelle nous devons faire face. J'examine certainement l'Accord Canada—États-Unis—Mexique avec lucidité. Toutefois, vu l'importance du libre-échange pour tant d'industries et tant d'emplois au pays, nous ne pouvons tout simplement pas nous en passer.
Les conservateurs seront là pour exiger des comptes des libéraux et veiller à ce que ceux qui sont négativement touchés par cet accord aient les outils dont ils ont besoin pour survivre aux conséquences.