Monsieur le Président, je suis assez honorée de prendre la parole sur cette motion si chère et si importante à mes yeux. Si les personnes qui nous regardent à la télévision se demandent pourquoi je porte un ruban vert, c'est simplement qu’au Québec nous célébrons et soulignons les Journées de la persévérance scolaire. Les députés du Bloc québécois qui prennent la parole aujourd’hui sont fiers de soutenir ces Journées de la persévérance scolaire qui sont si importantes pour notre nation.
Comme je l’ai dit à plusieurs reprises, je suis travailleuse sociale de profession. Avant d’être députée, je travaillais dans un CLSC. J’étais au service des gens les plus vulnérables comme les gens malades et les gens qui ont besoin de soutien. C’est donc avec fierté que je raconte aujourd’hui un peu l’histoire de ma pratique, parce qu’elle renforce mon soutien à cette motion si importante.
Quand on est travailleuse sociale dans le réseau de la santé au Québec, on a la chance d’avoir un bon emploi, un emploi syndiqué, sécurisé, un emploi avec une assurance collective permettant, en cas de maladie, d’être rémunéré. C’est une police d’assurance négociée par le syndicat. Cela permet de se faire soigner et de revenir rapidement au travail.
Aujourd’hui, je peux dire qu'au cours de ma pratique j’ai rencontré plusieurs personnes qui n’ont pas ce privilège d’être assurées et d’avoir un emploi qui leur offre tout ce qu’il faut pour faire face à des moments difficiles de leur vie.
Les personnes dont nous parlons aujourd’hui et qui seront touchées par cette motion, si jamais le gouvernement nous donnait son appui, c’est le genre de personnes qui n’ont pas ce bonheur, ce privilège d’avoir un emploi qui leur garantit une couverture d’assurance collective, en cas de grandes difficultés personnelles. Ce sont des travailleurs qui aiment leur emploi et qui par malheur tombent malades. Quand on leur parle de chimiothérapie et de radiothérapie, la première chose qu’ils se demandent, c’est comment ils feraient pour payer leur loyer, si les traitements se poursuivaient ou si on leur annonçait un deuxième cancer. Je ne parle pas ici d’hypothèque, parce que les gens qui ont une maison prennent souvent une assurance hypothécaire qui couvre les paiements en cas de malheur. On parle de gens qui ont un emploi précaire, qui vivent dans un appartement, qui n’ont pas de maison et qui tombent malades. On parle de gens qui doivent se battre pour vaincre cette maladie grave et revenir rapidement au travail.
Dans l’exercice de ma pratique professionnelle, j’ai rencontré des gens qui vivaient cette situation, qui travaillaient dans cette précarité, des bons travailleurs, des femmes et des hommes qui voulaient travailler et qui payaient leurs cotisations à l’assurance-emploi, qui honoraient toutes leurs responsabilités de travailleurs, mais qui tombaient malades. Cette motion, cette modification à la Loi sur l’assurance-emploi que le Bloc québécois porte depuis de nombreuses années, vise à répondre aux besoins de ces gens, de ces travailleurs en particulier.
J’entends le gouvernement nous dire que c’est exagéré de demander 50 semaines, alors qu’on passe de 15 semaines à 26 semaines. Il dit que l’opposition veut toujours avoir le maximum. C’est une bien drôle de façon de voir les choses. Comme l’a dit ma collègue de Thérèse-De Blainville, quand on est victime de cette maladie grave et qu’on doit recevoir des traitements qui empêchent de travailler, quand on est le numéro, la statistique qui dépasse la 15e semaine ou la 26e semaine, ce n’est pas une question d’exagération, c’est une question de compassion, de compréhension et d’inclusion. Il s'agit d’un filet social que le Québec et l’ensemble des provinces veulent offrir à leurs travailleurs qui tombent malades.
Regardons maintenant les 26 semaines qui sont offertes aux proches aidants. Les gens qui sont dans la mi-cinquantaine comme moi se retrouvent souvent parents, grands-parents, mais aussi aidants naturels. Comme la société change et fait que les gens vivent plus vieux, les gens de ma génération doivent soutenir leurs enfants, leurs petits-enfants et leurs parents.
Dans le fond, la Loi sur l'assurance-emploi a été modifiée pour rendre justice et pour pallier cette nouvelle réalité de notre société en majorant les prestations spéciales à 26 semaines pour les proches aidants. C'est très bien.
Ayant travaillé dans un CSLC, je peux dire très sincèrement que cette mesure a vraiment aidé, particulièrement dans la direction du soutien à domicile pour les personnes âgées d'un territoire. Elle permet à des personnes âgées ou à des personnes très malades de quitter ce monde en toute dignité et en étant entourées de leurs proches.
Maintenant, il n'est pas normal de se retrouver sans revenu si on tombe malade parce que les traitements exigent une absence du travail de plus de 15 semaines. De toute évidence, la dernière chose à laquelle on a envie de songer est la manière dont on va honorer ses obligations financières si les traitements doivent se poursuivre.
Quand une personne a un cancer et qu'elle vit dans une région rurale, en plus de subir la maladie, elle doit avoir les moyens financiers de payer le transport qui l'amène aux traitements. Ces traitements sont souvent dans des grandes régions urbaines. Par exemple, si une personne part de Salaberry-de-Valleyfield, dans ma circonscription, cela lui prendra une heure ou une heure et demie en voiture pour se rendre à Montréal et cela lui coûtera en moyenne de 45 $ à 50 $ pour se rendre à son traitement de chimio ou de radiothérapie.
Dans le fond, les personnes ne reçoivent que 15 semaines d'assurance-emploi, alors qu'elles ont souvent des emplois peu rémunérés leur permettant tout juste d'honorer leurs obligations financières. Ces personnes doivent sortir de l'argent de leur poche pour payer leur transport et recevoir leur traitement.
Les libéraux prétendent que le Bloc québécois est un peu gourmand parce qu'ils ont déjà promis de faire passer la durée des prestations de 15 à 26 semaines. Ils disent que c'est déjà beaucoup et qu'il ne faut pas crier au loup. Ils proposent que l'on continue de réfléchir et qu'une modification de la Loi comme celle d'augmenter les prestations à 50 semaines pourra être présentée un peu plus tard.
J'ai été témoin d'une situation. Un membre de ma famille a eu un diagnostic de cancer et il s'est battu contre le cancer. Sa guérison et ses traitements se sont prolongés sur plus de 15 semaines. Il était très heureux, et nous aussi, de pouvoir compter sur une assurance collective pour être capable d'honorer ses engagements.
Nous, au Bloc, avons du mal à comprendre pourquoi il serait si compliqué de modifier la Loi sur l'assurance-emploi et d'augmenter la durée des prestations à 50 semaines. Nous savons qu'une modification à une loi si importante ne se fait pas à toutes les législatures et, comme le dit ma collègue de Thérèse-De Blainville, nous avons une grande occasion de régler une fois pour toutes cette question d'iniquité et d'injustice.
Il n'est pas question pour nous d'abdiquer et de nous contenter de 26 semaines. Nous voulons appuyer ces gens qui doivent, jour après jour, se battre pour leur vie, recouvrer la santé, passer à travers leur maladie et retourner au travail.
Dans le cadre des débats à la Chambre, on ne parle pas assez de ces travailleurs et de ces travailleuses qui vivent cette situation. Je ne sais pas s'il y a des députés à la Chambre qui sont aussi des actuaires, mais cela ne prend pas la tête à Papineau pour savoir que ce ne sont pas 100 % des travailleurs malades qui profiteront des 50 semaines pour arriver à la guérison.
Je crois que nous en avons les moyens. Nous avons une occasion en or et j'espère que les députés du gouvernement appuieront notre motion et seront inspirés par nos arguments. Il s'agit de travailleurs et de travailleuses qui ont des emplois précaires et qui sont les plus vulnérables de notre société. Ils ont le droit d'avoir une loi qui les protège mieux qu'à l'heure actuelle.