Madame la Présidente, comme c’est la première fois que je prends la parole dans le cadre d’un débat, je vais commencer par remercier les gens de ma circonscription, Repentigny, qui m’ont encore une fois accordé leur confiance en octobre dernier. J’espère en être digne.
Je vais aborder deux aspects de ce dossier, soit les producteurs laitiers et, bien sûr, l’aluminium.
Je vais traiter du déficit de considération envers les producteurs laitiers du Québec sous un angle complètement différent, que l’on a peut-être entendu. Cet angle est nécessaire, parce qu’il faut trouver des solutions. Cela s’impose.
Je vais donc commencer par rappeler aux députés que les producteurs laitiers du Québec sont résilients et habités par le métier et qu’ils travaillent sans relâche, 365 jours par année. Ils veillent au bien-être de leur troupeau, ils investissent dans leurs installations et forment une relève. Tout n’est pas évident, cependant, parce que les perspectives économiques sont un peu préoccupantes.
J’invite maintenant les députés à une réflexion, à laisser les chiffres de côté pour une fois et à aborder d’un point de vue humain les conséquences des accords sur une industrie nourricière d’une qualité exceptionnelle.
Le député de Mégantic—L’Érable et le Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire ont fait un triste constat à l’été 2019. Ils ont entendu les témoignages d’artisans et de producteurs agricoles éprouvés et aux portes d'une réelle détresse psychologique. Il faut connaître le monde rural pour savoir que l’entraide et la collaboration en région existent vraiment. Toutefois, quand la pression, les obligations et les contraintes augmentent, mais que les remparts s’effritent, on peut se retrouver devant une inévitable détresse.
Serait-il légitime de croire que, si la ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire a mis sur pied une campagne qui reconnaît cette triste réalité du monde agricole, l’accord devrait aller dans le même sens et ne pas aggraver la détresse qui afflige cette industrie?
Au Québec, depuis 10 ans maintenant, l’organisme Au cœur des familles agricoles joue un rôle à cet égard. Depuis 2016, en collaboration avec l’Association canadienne pour la prévention du suicide et l’Union des producteurs agricoles, cet organisme a formé 1 200 travailleurs de l’industrie pour reconnaître la détresse psychologique des producteurs et les diriger vers des ressources adaptées.
La gestion de l’offre, nous l’avons dit à la Chambre, est un modèle économique qui sied bien au Québec. Cela va bien avec notre culture. Ce modèle économique et commercial est précisément ce qui permet la stabilité et la prévisibilité, deux composantes qui sont, je le rappelle, au cœur des attentes exprimées lors des négociations relatives à cette nouvelle entente.
Les dispositions de l’ACEUM actuel et ses conséquences économiques sur l’industrie laitière québécoise sont préoccupantes. Le Bloc québécois est convaincu de la nécessité de dénoncer l’ensemble des préjudices qui sont causés à nos producteurs laitiers. Nous ne cesserons d’exiger de ce gouvernement et de la Chambre du respect envers le Québec, de la cohérence et de la droiture dans ce dossier.
Cela fait déjà deux mois que nous le faisons, mais je vais maintenant de nouveau rectifier les faits concernant la position de l’industrie de l’aluminium sur l’ACEUM.
Nous nous sommes souvent fait dire à la Chambre que Jean Simard, président et chef de la direction de l'Association de l'aluminium du Canada, était d’accord avec le traité actuel de l’ACEUM. Or, M. Simard s’est exprimé clairement hier devant le Comité permanent des finances de la Chambre des communes. Mon collègue de Joliette lui a demandé sans détour s’il aurait préféré avoir un accord comme celui qui prévaut pour le secteur de l’acier. M. Simard a répondu que c’était ce que l’Association avait demandé et qu’elle était sur le point d’obtenir au moyen des représentations de Mme Freeland et de son équipe. Pourtant, à la fin des négociations, le Mexique a dit oui à l’acier, mais non à l’aluminium, et ce, pour des raisons stratégiques.
M. Simard a fait preuve de candeur devant les membres de ce comité. On sait qu’un comité, cela implique plusieurs intervenants, des questions détaillées et du travail de fond puisqu'on prend le temps d’étudier le sujet débattu par le comité. La franchise de M. Simard démontre clairement que l’industrie de l’aluminium souhaitait avoir les mêmes protections que le secteur de l’acier.
Dans quelle région du Canada peut-on trouver une industrie de l'aluminium dynamique et au potentiel de développement exceptionnel? Dans quelle région crée-t-elle des emplois depuis des décennies, des emplois bien payés qui permettent à des travailleurs de se développer professionnellement, de fonder une famille dans leur région, et, de ce fait, de contribuer au dynamisme économique régional qu'on souhaite tant, à tous les paliers de gouvernement?
Ma foi, cette région, c'est le Québec!
L'ACEUM propose un modèle de libre-échange économique où l'aluminium provenant de la Chine inondera le marché nord-américain via le Mexique. C'est ce que nous répétons depuis des mois.
La fabrication de pièces devra, par traité, s'effectuer sur le territoire d'un partenaire. Par contre, contrairement à l'acier, la provenance du métal utilisé pour la fabrication pourra venir de n'importe où. M. Simard a été clair sur ce point en comité hier.
Ce que nous voulons entendre de la part du gouvernement, ce n'est rien de moins qu'une déclaration du premier ministre qui ira dans le sens de ses propos, le soir de sa victoire électorale.
Voici ce qu'il a dit: « Mes chers Québécois, j'ai entendu votre message ce soir. Vous voulez continuer d'avancer avec nous, mais vous voulez aussi vous assurer que la voix du Québec se porte encore plus à Ottawa. Je vous donne ma parole. Mon équipe et moi serons là pour vous. »
S'agissait-il de propos sans valeur, oubliés aussitôt prononcés?
Le Bloc québécois veut travailler de façon proactive et concrète pour l'industrie de l'aluminium du Québec, et ce, pour avoir des résultats équitables. Nous voulons travailler avec le gouvernement pour aménager des solutions. Nous refusons le constat qui voudrait que ce traité soit considéré comme étant réglé, comme une entente qui doit absolument être signée.
Les conditions actuelles de l'ACEUM, en ce qui concerne cette industrie, causeront des torts importants à des milliers de travailleurs québécois et à l'économie du Québec. Étant donné que je suis la porte-parole en matière d'environnement pour notre parti, je ne peux passer sous silence l'incontournable processus de fabrication des alumineries de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean.
Alcoa et Rio Tinto ont choisi l'aluminerie d'Arvida pour y établir un centre de recherche et de développement appelé ELYSIS — un projet de plus de 550 millions de dollars. On y développera l'ensemble des technologies requises pour éliminer les émissions de gaz à effet de serre provenant de la production d'aluminium, en plus de produire de l'oxygène pur. Le premier ministre se souvient-il du dévoilement de ce projet? Il était présent à son lancement, en 2018.
Non seulement l'industrie de l'aluminium évolue et développe son potentiel avec une source d'énergie propre, renouvelable et nationalisée, mais sa production sera issue d'une technologie à zéro émission, développée chez nous. Combien d'incohérences devrons-nous constater pour que le gouvernement agisse correctement?
Comme je n'ai pas suffisamment de temps, je n'insisterai pas aujourd'hui sur l'importance de poser des gestes concrets afin de favoriser la réduction des gaz à effet de serre. On sait que l'aluminerie est sur un bon chemin, et j'invite les députés de la Chambre à faire le tour de cette question et à être honnêtes envers leur caucus concernant ce que j'exprime maintenant.
Soyons clairs: le Bloc québécois n'est pas contre le libre-échange. Néanmoins, nous considérons que, pour toute relation de nature commerciale ou autre, les parties doivent communiquer, faire preuve d'ouverture, négocier, faire des compromis. Au regard des négociations de l'ACEUM, il serait malhonnête de déclarer que l'économie du Québec n'a pas été mise de côté — j'en ai donné deux exemples. Les élus de la Chambre des communes qui invoqueraient des arguments allant dans ce sens seraient, selon moi, d'une mauvaise foi appuyée ou mal informés sur les clauses du traité.
Nous ne resterons pas passifs devant les constats soulevés par les représentants de l'industrie. Ils sont venus la semaine dernière sur la Colline. Nous avons traversé une période électorale où les Québécois se sont exprimé de manière à avoir une voix qui porterait leurs préoccupations ici, dans cette enceinte. C'est exactement ce que nous faisons et c'est ce que nous continuerons de faire.