Madame la Présidente, l'économie du Canada, qui figure parmi les 10 plus prospères au monde, a été bâtie en partie grâce à la richesse offerte par les ressources naturelles. Le secteur des ressources naturelles fournit des dizaines de milliers d'emplois bien rémunérés aux Canadiens de la classe moyenne qui travaillent fort d'un océan à l'autre.
Nous savons par ailleurs que la lutte mondiale contre les changements climatiques pour protéger les milieux naturels et la biodiversité est l'une des questions les plus urgentes auxquelles les êtres humains doivent trouver une solution. Les changements climatiques constituent la menace existentielle de notre époque. La question nécessite des mesures efficaces et durables ainsi que des politiques claires et pragmatiques qui permettront de réduire de façon mesurable les émissions de gaz à effet de serre du Canada dans les années à venir.
Les Canadiens reconnaissent de plus en plus l’ampleur de la crise climatique.
Les Canadiens avisés comprennent que, à l'avenir, le progrès économique devra se faire dans un contexte d'environnement durable. Bien sûr, dans le cas du secteur pétrolier et gazier, les investisseurs nous disent que la croissance et la prospérité futures exigeront la réduction des émissions de carbone et de l'empreinte environnementale dans son ensemble.
Selon le dernier rapport scientifique publié par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, les activités de l'homme ont déjà provoqué un réchauffement mondial de un degré Celsius au-dessus des niveaux préindustriels. Si les émissions mondiales continuent d'augmenter au taux actuel, la planète pourrait se réchauffer de trois degrés Celsius d'ici 2100.
Les répercussions en sont bien réelles. En moyenne, le Canada se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète. Un climat plus chaud intensifiera certains phénomènes météorologiques extrêmes, occasionnant la hausse du niveau de la mer et réduisant la quantité de neige, de glace et d'eau douce. Les canicules vont s'intensifier, contribuant aux périodes de sécheresse et aux feux de forêt.
Il n'est pas étonnant que les jeunes du monde en aient assez de voir notre génération faire fi des avis scientifiques et qu'ils remettent en question la possibilité d'un avenir où ils pourront eux-mêmes songer à avoir des enfants.
Lors des élections de 2019, les Canadiens ont voté en grande majorité pour des partis qui présentaient des plans ambitieux pour lutter contre les changements climatiques.
La communauté internationale s'est également ralliée à cette cause, 77 pays s'étant engagés à atteindre la cible de zéro émission nette d'ici 2050. Le programme électoral des libéraux tenait compte des préoccupations environnementales. Pendant la campagne, nous nous sommes engagés à mettre en œuvre deux politiques climatiques clés: dépasser, d'ici 2030, notre cible de 30 % par rapport aux niveaux de 2005, et atteindre la cible de zéro émission nette d'ici 2050.
Nous avons fait beaucoup de progrès depuis 2015. Pour la première fois depuis, nos émissions de gaz à effet de serre diminuent.
Au début de notre mandat, nous avons élaboré un cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, le premier véritable plan de lutte contre les changements climatiques de l'histoire du pays. Il renfermait plus de 50 mesures distinctes, comme l'élimination progressive du charbon, des investissements majeurs dans les transports en commun et dans les infrastructures pour les voitures électriques et l'efficacité énergétique des industries et des bâtiments.
Nous avons investi plus de 3 milliards de dollars pour développer progressivement des technologies propres et mettre en place la tarification nationale de la pollution, parce qu'un plan de lutte contre la pollution ne peut pas être crédible si on peut polluer en toute liberté.
Dans les provinces et les territoires où le système fédéral de tarification est en place, les recettes sont remises directement aux gens, ce qui profite à 80 % des familles.
Les possibilités en matière d'innovation constituent sans doute l'impact le plus important de la tarification de la pollution. En effet, celle-ci incite les ingénieurs et les propriétaires d'entreprises à trouver des solutions pour réduire la pollution.
Bien que le cadre prévoie des réductions d'émissions à hauteur de 200 mégatonnes, nous devons trouver 77 mégatonnes additionnelles pour atteindre la cible actuelle de 2030.
L'atteinte de la cible de 2030 est en soi un défi, mais c'est un défi que le Canada est prêt à relever.
Il sera encore plus difficile d'élaborer un plan fondé sur la science pour atteindre la cible de zéro émission nette d'ici 2050, étant donné notre vaste territoire, notre climat nordique et notre dépendance envers une économie de ressources. Toutefois, cela nous amène à entamer une conversation avec les provinces, les entreprises et d'autres intervenants sur les moyens de réaliser notre objectif, ce qui est passionnant.
Atteindre nos objectifs climatiques nécessite un leadership qui transcende la partisanerie dans toutes les régions du pays. Il faut un consensus national, un réel d’effort d’équipe.
Le véritable ennemi, ce sont les changements climatiques et non les autres Canadiens.
Le consensus national doit inclure le secteur canadien du pétrole et du gaz. Il doit inclure les provinces et les territoires. Il doit inclure les compagnies énergétiques, les exportateurs, les explorateurs et leurs employés. Il doit inclure les millions de Canadiens qui utilisent des combustibles à base de carbone pour chauffer leur maison et faire rouler leur voiture. Il doit inclure chacun d'entre nous.
Comprenez-moi bien: le gouvernement du Canada demeure résolu à défendre les intérêts du secteur canadien des ressources naturelles en vue de créer de bons emplois pour la classe moyenne. Nous reconnaissons que, dans un monde moderne, une économie forte et un environnement sain vont de pair.
Certains diront que ces objectifs sont irréconciliables. Je ne suis pas d'accord. Lors de mes discussions avec des dirigeants du secteur des ressources naturelles et des leaders politiques occidentaux, j'entends de plus en plus parler de l'importance pour le Canada de bâtir son image de marque en tant que fournisseur de matières premières le plus propre afin de demeurer concurrentiel dans une ère où le monde fait la transition vers un avenir carboneutre. Je suis d'accord avec eux.
Dans un communiqué diffusé hier, la chambre de commerce de Calgary énonçait clairement ce qui suit:
Pour que notre province et notre pays soient prospères, nous pouvons et nous devons jouer un rôle de chef de file dans le secteur de l'exploitation des ressources naturelles et trouver des solutions aux changements climatiques au moyen de l'innovation. Les entreprises canadiennes le savent, et le marché mondial le demande. Pourtant, le discours des leaders politiques a mis un frein considérable à tous progrès futurs.
Ce sont les familles qui travaillent à la sueur de leur front qui en paient le prix.
Dans sa lettre adressée à mon intention, Teck nous demande d'élaborer un cadre qui concilie la croissance économique et la protection environnementale comme la seule voie à suivre. Dans cette lettre, Teck reconnaît que le Canada est « dans une position unique », avec ses richesses naturelles abondantes, pour devenir « un fournisseur mondial de ressources climato-intelligentes ».
Les Canadiens possèdent le génie innovateur et le savoir-faire requis pour offrir les ressources les plus écologiquement et socialement responsables au monde, et c'est ce à quoi nous devons aspirer.
Nos entreprises du secteur de l'énergie sont parmi les plus innovatrices au monde, et elles peuvent tracer la voie. Un certain nombre de sociétés pétrolières et gazières, y compris Shell, Cenovus, CNRL et MEG Energy, se sont déjà engagées à devenir carboneutres, tout comme des entreprises d'autres secteurs, notamment Microsoft.
Pour atteindre la cible de zéro émission nette, il faudra amorcer une transformation économique et environnementale et mobiliser énormément de capitaux privés. Le gouvernement du Canada est déterminé à travailler avec l'Alberta, la Saskatchewan et le secteur des ressources pour assurer la mise en œuvre des meilleurs projets afin de créer des emplois et promouvoir une croissance durable et écologique.
Les meilleurs projets sont ceux qui présentent le plus faible taux de pollution par unité de production, qui prévoient une feuille de route pour atteindre la cible de zéro émission nette et qui permettent d'atténuer les effets sur la biodiversité et l'environnement naturel. En 2020, ces conditions sont de plus en plus non négociables. Pour des chefs de file de la gestion financière et de l'investissement comme BlackRock, la durabilité et les risques climatiques sont des facteurs essentiels à considérer dans leur stratégie d'investissement. Ils cessent d'investir dans des projets risqués sur le plan environnemental pour réinvestir cet argent dans des projets durables.
Nous sommes très préoccupés par la période difficile que le secteur des ressources et l'Alberta doivent traverser à cause des conditions du marché. Ne nous méprenons pas, le gouvernement est prêt à appuyer les travailleurs de l'Alberta et à soutenir les travailleurs du secteur des ressources dans toutes les régions du pays. C'est pourquoi nous mettons en œuvre le projet d'expansion de l'oléoduc Trans Mountain. Ce projet offre maintenant de l'emploi à près de 3 000 Albertains, et on atteindra un sommet de 5 500 emplois à court terme, ce qui est important pour l'Alberta ainsi que pour tous les Canadiens.
Nous comprenons aussi — et je crois que tous les Albertains en sont aussi conscients — qu'il est temps que les Canadiens entament une discussion beaucoup plus profonde et détaillée sur la façon d'assurer la compétitivité du secteur canadien de l'énergie dans un monde qui cherche à atteindre la cible de zéro émission nette d'ici 2050. Voilà comment nous allons protéger les emplois bien rémunérés du secteur des ressources et créer les débouchés de l'avenir.
Le statu quo ne fonctionne plus. Les consommateurs et les investisseurs exigent du changement, tout comme les chefs de file de l'industrie, et ce changement doit aller en s'accélérant.
Personne n'a un guide d'instructions pour arriver à zéro émission. Nous devons travailler avec les Canadiens et les experts pour trouver des moyens d'y arriver.
Chose certaine, le fait de mettre l'accent sur les technologies propres sera un aspect essentiel d'un tel plan.
Espérer que les technologies nous évitent de faire les choix difficiles qui s'imposent pour réduire les émissions, ce n'est pas un plan de lutte contre les changements climatiques. Cependant, une approche réfléchie des technologies propres est essentielle à une stratégie efficace pour atteindre la cible de zéro émission. C'est particulièrement le cas pour nous aider à décarboniser les secteurs névralgiques de l'économie canadienne. Par exemple, des travaux très prometteurs ont lieu dans le secteur pétrolier et gazier. Ils portent notamment sur le captage du carbone, mais aussi sur les façons d'extraire de l'énergie des ressources naturelles sans pollution par le carbone.
Le Canada doit devenir la source la plus propre de ressources dans cette transition vers un avenir à faibles émissions de carbone. Les projets en cours doivent aussi se concentrer sur l'amélioration continue. Les partenariats avec l'industrie sur le développement et la commercialisation des solutions de technologies propres créeront d'énormes débouchés pour stimuler les exportations et la création d'emplois.
Avec les bons investissements, le Canada peut être un leader en technologies propres. En fait, nous le sommes déjà.
Les marchés mondiaux de biens et services à faibles émissions de carbone génèrent déjà des billions de dollars de revenus. Le secteur des technologies propres emploie plus de 180 000 personnes ici, au Canada. En plus de prendre des mesures à l'échelle nationale, nous croyons que le Canada doit collaborer avec des pays aux vues similaires pour faire preuve de leadership sur la scène internationale.
La somme colossale de travail qui nous attend exige que des gens de tous les horizons et de toutes les allégeances politiques avancent dans la même direction afin de laisser à nos enfants un monde sain et durable.
Les changements climatiques ne devraient pas être une question partisane, mais une question scientifique. Nous avons tous un rôle à jouer pour éliminer la partisanerie de ce dossier. Il y a une génération, le libre-échange divisait profondément les Canadiens. Pourtant, aujourd'hui, il y a un consensus national sur le bien-fondé du libre-échange en Amérique du Nord et avec nos partenaires ailleurs dans le monde. Ce consensus nous offre un modèle et un exemple à suivre.
J'invite mes collègues d'en face à travailler avec nous pour relever les plus grands défis de notre époque.