Monsieur le Président, au cours du dernier mois, le monde a changé de manière spectaculaire. Jeudi, nous avons appris que 1 million de Canadiens ont perdu leur emploi. Ce n'est pas seulement une statistique, ce sont des familles qui peinent maintenant à mettre du pain sur la table, à payer leur loyer et à joindre les deux bouts. Le gouvernement a pris des mesures pour répondre à cette crise, mais dans de nombreux cas, elles se sont trop fait attendre.
Au début du mois de mars, nous avions deux suggestions: premièrement, que le gouvernement accorde une aide financière directe à tous les Canadiens, et deuxièmement, qu'il mette en œuvre une subvention salariale d'au moins 75 % pour que les gens puissent continuer à travailler et pour que les entreprises puissent garder leurs employés.
Nous avons déjà appuyé la motion demandant le consentement unanime des députés et plus tard aujourd'hui nous appuierons le projet de loi visant à concrétiser cette subvention salariale. Toutefois, je prie instamment le gouvernement de profiter du fait que nous sommes à Ottawa pour confirmer que tous les Canadiens qui ont besoin d'aide en obtiennent.
La Prestation canadienne d'urgence ne couvre tout simplement pas tous les Canadiens et les Canadiennes qui ont besoin de cette aide. Trop nombreux sont ceux et celles qui risquent de passer entre les mailles du filet.
Je pense aux histoires que j'ai entendues au cours des dernières semaines à propos de gens qui ont désespérément besoin d'aide, mais qui ne peuvent pas en obtenir parce qu'ils ne répondent pas à tous les critères.
Je pense aux gens qui doivent avoir plusieurs emplois pour arriver à joindre les deux bouts parce qu'ils ne travaillent presque plus et qui ne savent pas comment ils vont faire pour payer leur facture d'épicerie. Ces gens devraient pouvoir demander de l'aide.
Je pense aux travailleurs indépendants et contractuels qui ont perdu la majeure partie de leurs revenus et qui utilisent leurs cartes de crédit jusqu'à leur limite pour payer leurs factures. Ces gens devraient pouvoir demander de l'aide.
Je pense aux étudiants qui dépendent des emplois d'été pour payer leur loyer et, dans certains cas, pour subvenir aux besoins de leur famille. Maintenant, ils ne peuvent plus le faire. Ces gens devraient pouvoir demander de l'aide.
Je pense aux artistes, aux travailleurs autonomes et aux gens qui se trouvent dans une situation précaire. En fait, il y a tellement d'exemples, et c'est ça le problème.
Au cours des derniers jours, les néo-démocrates ont collaboré avec le gouvernement pour corriger les lacunes, et cela se reflète dans la motion qui a été présentée et dans le travail qui sera fait.
Je tiens à remercier le premier ministre et les ministres en général pour leur esprit de collaboration et leur attitude constructive. Nous sommes toutefois encore loin du but. Les règles actuelles découragent les gens qui ont besoin d'aide et ils hésitent à s'inscrire, que ce soit parce qu'ils ont encore un revenu ou parce qu'ils ne remplissent pas tous les critères.
Hier, la ministre a confirmé que tous ceux qui demanderont la Prestation canadienne d'urgence vont l'obtenir, alors j'ai demandé au premier ministre aujourd'hui d'annoncer que tous les critères seront abandonnés et de dire aux gens: « Si vous avez besoin d'aide, faites-en la demande et vous en obtiendrez. » Faisons cela simplement. Faisons en sorte que les travailleurs qui ont besoin d'aide sachent qu'ils en recevront s'ils en demandent.
C'est en prenant soin les uns des autres que nous pourrons traverser cette crise. C'est la seule façon. Nous sommes tous unis à notre prochain, et nous n'abandonnerons pas la lutte tant que tous les Canadiens n'auront pas l'aide dont ils ont besoin.
De nombreux héros se sont démarqués depuis le début de la crise de la COVID-19, et je tiens à saluer tous les travailleurs de première ligne qui continuent à nous alimenter et à nous soigner. C'est toutefois navrant de constater qu'ils n'ont pas toujours l'équipement requis pour se protéger et éviter d'infecter leurs proches. Je tiens à remercier tout particulièrement les travailleurs de la santé, qui dorment souvent dans leur voiture ou dans une tente pour ne pas propager la maladie ni contaminer les membres de leur famille. Nous devons en faire plus pour eux. Tous les travailleurs doivent avoir l'équipement de protection nécessaire pour assurer leur sécurité, et c'est à nous d'y voir.
Je crois également qu'il est important de dire très clairement que les sociétés qui profitent des gens désespérés n'ont pas leur place pendant la crise actuelle. Nous devons nous servir de tous les pouvoirs du gouvernement fédéral pour empêcher les compagnies de cartes de crédit et d'autres compagnies d'imposer des taux d'intérêt supérieurs à 10 %. Les banques continuent d'imposer des intérêts, ce qui pénalise davantage les gens qui bénéficient d'un report des paiements hypothécaires. En réalité, les banques profitent de la crise.
Je sais que le ministre des Finances s'est entretenu avec les banques, mais, de toute évidence, cela ne suffit pas de leur parler gentiment. Les banques sont réglementées spécifiquement par le gouvernement fédéral. Le gouvernement libéral doit être prêt à utiliser les pouvoirs dont il dispose pour imposer un congé de paiement d'intérêts et mettre fin à ce qui se passe. En fait, nous devons aussi faire suspendre les paiements hypothécaires afin de pouvoir, en collaboration avec les provinces, faire suspendre le paiement des loyers, y compris les loyers commerciaux, ce qui aiderait grandement les PME.
Je sais qu'au cours des prochaines semaines, nous allons commencer à discuter de la forme que prendrait une reprise des activités, de la façon dont les Canadiens retourneront au travail. Lors de l'élaboration de ces mesures, j'ai exhorté le gouvernement libéral à ne pas commettre les mêmes erreurs qu'auparavant. Chaque dollar des deniers publics dépensés doit aller aux travailleurs, et non pas aux PDG. Les primes aux dirigeants, les rachats d'actions et la protection des profits des actionnaires ne contribuent ni au maintien ni à la création d'emplois.
Nous pouvons stimuler l'économie et faire les choses qui peuvent transformer notre nation et lutter contre la crise climatique: nous pouvons construire des logements; investir dans le transport public; faciliter l'utilisation des énergies renouvelables pour les Canadiens et les Canadiennes; rendre nos maisons et nos bâtiments aussi efficaces que possible sur le plan énergétique; et investir dans des services de garde d'enfants que toutes les familles peuvent se permettre et qui donnent à nos enfants l'éducation de grande qualité qu'ils méritent.
Je veux aussi parler des communautés autochtones en particulier.
Au cours du mois dernier, je me suis entretenu avec des dirigeants autochtones de partout au pays, qui s'inquiètent vivement du fait que leurs communautés sont mal préparées pour faire face à l'épidémie de la COVID-19. En raison d'injustices historiques et persistantes, ces communautés ne sont pas dotées d'infrastructures essentielles. Il y est souvent impossible de se laver les mains avec de l'eau propre. Le manque de logements de qualité et le surpeuplement empêchent la distanciation physique. L'accès aux soins de santé est gravement limité, à tel point que, dans beaucoup de communautés, il faut prendre l'avion pour avoir accès au ventilateur le plus proche.
Je sais que le gouvernement a offert de l'argent, mais on m'a exprimé deux préoccupations bien précises: le montant est insuffisant et bon nombre de communautés autochtones ont de la difficulté à accéder au financement.
Le virus représente une plus grande menace pour les Autochtones, étant donné la négligence et le racisme qu'ils subissent de longue date. Nous devons faire mieux, d'autant plus que beaucoup de communautés seront aux prises avec des inondations au cours des prochaines semaines et des feux de forêt au cours de l'été. Il nous faut un plan précis pour évacuer ces gens de manière sécuritaire et une stratégie claire pour faire en sorte que ces communautés disposent des ressources nécessaires pour répondre à la COVID-19. La vie des Autochtones compte et nous devons être préparés.
Je crois que les décisions que nous prendrons au cours des semaines et des mois à venir compteront parmi les plus importantes de nos vies, parmi les plus importantes qu'un gouvernement canadien ait eu à prendre.
Nous croyons à la solidarité. Nous croyons à l'entraide.
Bien des gens se demandent quand les choses reviendront à la normale. Personnellement, j'estime que nous devons faire en sorte que la situation soit bien meilleure qu'à la normale. La normalité c'est que certains travailleurs ne bénéficient pas de congés de maladie payés, que certaines familles qui vivent avec le salaire minimum tirent le diable par la queue, que certains travailleurs dont la contribution est essentielle pour la santé et le bien-être des Canadiens ne touchent pas un salaire suffisant pour subvenir à leurs besoins, que le système de soins de santé est gravement sous-financé et que l'ordre social n'est ni juste ni résilient. On ne peut pas revenir à ce genre de normalité.
Les Canadiens font preuve de compassion. Ils expriment le désir de prendre soin les uns des autres. Nous devons exiger la même chose du gouvernement. Il faut exiger que le gouvernement libéral souscrive aux mêmes valeurs.
Ne revenons pas à la situation que nous connaissions précédemment. Bâtissons une nouvelle réalité qui permettra aux Canadiens de mieux s'occuper les uns des autres et de mettre en place un filet de sécurité sociale qui améliorera le sort de l'ensemble de la population. Bâtissons un Canada juste et résilient. Les Canadiens comptent sur nous. Ils espèrent que nous tirerons de cette crise des leçons qui nous aideront à bâtir un Canada meilleur pour l'ensemble des Canadiens.