Madame la Présidente, c'est un plaisir d'avoir l'occasion de m'exprimer au sujet du projet de loi C-221, qui vise à modifier la Loi de l'impôt sur le revenu et à créer un crédit d'impôt pour la fermeture des puits de pétrole et de gaz.
Je souligne d'ailleurs le travail de la députée de Lakeland, avec qui j'ai la chance de siéger au Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
Je peux sans détour dire que le Bloc québécois est malheureusement contre ce projet de loi, pour une raison bien simple que ma collègue la députée de Repentigny a très bien illustrée avant moi: le projet de loi C-221 ne respecte pas le principe du pollueur-payeur.
Qu'est-ce que ce principe? C'est un principe de base en politique environnementale auquel souscrivent tous ceux et celles pour qui l'environnement est une priorité. C'est donc un principe auquel souscrit entièrement le Bloc québécois. Il stipule que ce sont les entreprises qui doivent assumer les coûts des dégâts environnementaux dont elles sont responsables.
C'est simple: si on cause des dommages environnementaux, on paie pour les réparer. Si c'est impossible à réparer, on paie pour compenser les torts irrémédiables qu'on a causés à la nature. Ce n'est pas au gouvernement ni aux contribuables d'absorber ces coûts. Ce serait injuste et même illogique. Ce serait accepter collectivement de payer pour réparer les erreurs environnementales des opérations pétrolières et gazières, mais sans collectivement bénéficier des profits.
C'est là que le projet de loi C-221 nous pose un problème, au Bloc québécois. S'il était adopté, il permettrait aux entreprises pétrolières et gazières d'obtenir un crédit d'impôt pour prendre leurs responsabilités. Autrement dit, si on dit oui au projet de loi C-221, on dit oui à plus de financement pour une industrie que l'on sait néfaste pour l'environnement, plutôt que d'accroître le financement pour la transition énergétique. En 2021, ce raisonnement ne tient pas la route.
On s'entend que ce n'est pas comme si l'industrie pétrolière et gazière était le parent pauvre du Canada. La preuve, c'est qu'en avril 2020, il y a moins d'un an, le gouvernement fédéral octroyait une aide financière de 1,7 milliard de dollars pour financer les opérations de nettoyage et de fermeture de puits orphelins en Alberta, en Saskatchewan et en Colombie-Britannique.
Cela ne s'arrête pas là: l'Alberta finance déjà la restauration de centaines de puits sur son territoire. Cette province offre des prêts aux entreprises pétrolières et gazières, et les intérêts sont garantis par nul autre que le gouvernement fédéral.
On nous dira que cette aide est justifiée par le contexte de la pandémie et qu'il faut soutenir les travailleurs des provinces de l'Ouest. Nous sommes d'accord pour aider les travailleurs et les travailleuses et les entreprises en temps de crise, mais les contribuables épongent déjà une bonne partie des coûts environnementaux de l'industrie pétrolière et gazière.
Par ailleurs, je commence à trouver que la pandémie a le dos large, beaucoup trop large. La crise environnementale que l'on vit maintenant ne peut être balayée sous le tapis sous prétexte qu'il y a une crise sanitaire. Ce discours ne tient pas non plus la route en 2021.
Les données scientifiques sont trop probantes sur les liens de cause à effet entre le saccage environnemental des décennies passées et la pandémie actuelle. On ne peut plus se permettre de légiférer uniquement pour potentiellement responsabiliser les producteurs pétroliers et gaziers. Nous devons enchâsser dans la loi une obligation d'entamer la transition énergétique. Or le problème, c'est que le projet de loi C-221 aurait l'effet contraire.
Croit-on que les entreprises pétrolières et gazières changeront leurs façons de faire si le gouvernement les dédommage pour leurs gaffes environnementales? J'ai une petite idée: jamais de la vie. Payer avec des fonds publics les coûts environnementaux d'une industrie qui détériore l'environnement, met à risque les communautés et compromet l'avenir climatique, c'est complètement irresponsable.
La députée de Lakeland, qui présente ce projet de loi, dit que ce n'est pas aux contribuables de l'Alberta d'assumer 100 % des coûts de la fermeture des puits orphelins. Elle a tout à fait raison. De plus, elle serait certainement d'accord avec moi que ce n'est pas non plus aux contribuables du Québec de payer ces factures.
Le Bloc québécois reconnaît l'urgence de régler la question des puits orphelins, et nous sommes prêts à appuyer des solutions pragmatiques pour y remédier, mais ces solutions doivent répondre à certaines conditions. Elles doivent respecter le principe du pollueur-payeur, elles doivent contribuer à un effort global en vue d'effectuer la transition énergétique, elles doivent être accompagnées de mesures réglementaires et, finalement, elles doivent contribuer à atteindre les cibles de réduction des gaz à effet de serre que s'est fixées le Canada.
Le Bloc québécois est disposé à discuter pour modifier le projet de loi C-221 afin qu'il réponde aux conditions que je viens d'énumérer. Dans ce débat sur les puits orphelins, il est important d'avoir une conversation plus large et de prendre conscience de l'importance de s'attaquer, sans plus tarder, aux changements climatiques. Les voix s'élèvent de plus en plus pour réclamer que nous, les élus, nous y attardions.
Déjà, en 2017, une étude de l'Institut C.D. Howe démontrait que, parmi les quelque 450 000 puits de pétrole et de gaz enregistrés en Alberta, environ 155 000 n'étaient plus actifs, mais n'avaient pas été entièrement nettoyés. Au printemps 2020, l'Institut Pembina évaluait que la province enregistrait 164 000 de ces puits abandonnés. L'Institut écrivait que ces puits présentaient des risques et des coûts qui n'avaient pas été assumés par les propriétaires, qui ont pourtant largement bénéficié des retombées de ces puits lorsque ceux-ci étaient actifs. Toujours selon cette étude, le coût potentiel du nettoyage de ces puits abandonnés pour les Albertains pouvait atteindre 8 milliards de dollars, et c'était en 2017. On s'entend qu'aujourd'hui, c'est encore plus élevé que cela.
En fait, les estimations officielles du seul organisme de réglementation du développement énergétique de l'Alberta, l'AER, ont fixé les passifs pétroliers et gaziers à plus de 30 milliards de dollars, mais des documents internes de l'AER évaluent plutôt la facture totale du nettoyage de l'industrie du pétrole et du gaz en Alberta, incluant les sables bitumineux, à 260 milliards de dollars. Est-ce aux Albertains de payer le coût du laxisme environnemental de l'industrie pétrolière et gazière? Est-ce à l'ensemble des Québécois et des Canadiens d'éponger cette facture? Poser la question, c'est y répondre.
On sait que le ralentissement économique qui frappe l'Alberta depuis 10 ans a poussé plusieurs compagnies pétrolières à la faillite. La province s'est retrouvée avec des milliers de puits abandonnés par des compagnies qui n'ont pas cru bon de nettoyer leurs dégâts. C'est un problème environnemental important, mais c'est aussi un problème de santé et de sécurité publiques. Ces puits de pétrole abandonnés peuvent contaminer l'eau et le sol, ils peuvent laisser échapper des gaz à effet de serre et mettre les maisons voisines à risque d'explosion. On parle ici d'un problème croissant que les entreprises pellettent dans la cour des contribuables. En matière de bons citoyens corporatifs, on repassera.
Un avocat d'Écojustice, un groupe d'avocats spécialisés en défense des droits environnementaux basé à Vancouver, disait que le meilleur moyen pour la province d'aborder le fléau des puits de pétrole abandonnés, c'est de s'assurer que les entreprises font un dépôt de sécurité avant de commencer à creuser la terre. Ce serait une solution plus porteuse pour l'avenir que ne le serait le projet de loi C-221. Il faut d'abord nettoyer les erreurs du passé.
La question des puits orphelins doit être réglée, mais des conditions strictes s'imposent pour justifier que ce soit le public qui en assume la facture. Tout soutien financier associé aux risques environnementaux, comme la fermeture des puits orphelins, doit être accompagné de modifications aux réglementations environnementales. Cela doit aussi être associé à des mesures préventives pour éviter d'aggraver le problème à perpétuité.
Nous ne pouvons tout simplement pas voter en faveur d'un projet de loi qui favorise la continuité d'une industrie qui est à la source de la détérioration de l'environnement. L'Alberta et les autres provinces productrices de pétrole et de gaz ont le pouvoir d'adopter des réglementations qui imposeraient à cette industrie de s'occuper de ses puits. Elles ne doivent pas utiliser le contexte de la pandémie pour justifier une déréglementation du secteur de la protection de l'environnement. Il existe des moyens pour éviter de se retrouver avec davantage de puits abandonnés sur le territoire albertain. Il existe des moyens pour éviter aux citoyens le paiement de facteurs astronomiques.
Les fiducies environnementales existent justement pour permettre aux producteurs de partager les risques entre eux au cas où l'un d'eux ferait faillite. Les compagnies pétrolières et gazières devraient être obligées de conserver suffisamment d'actifs pour payer les coûts du démantèlement et du nettoyage de leurs installations. En cas de faillite, la loi devrait exiger des entreprises qu'elles s'acquittent de leurs responsabilités environnementales avant de devoir rembourser leurs autres créanciers. Pour éviter les faillites, les gouvernements devraient réformer leurs exigences pour que les compagnies financent en amont la fin de vie des puits. En résumé, les lois et la fiscalité devraient servir à prévenir, et non à guérir.
En conclusion, l'investissement public pour régler la situation des puits orphelins peut être justifiable seulement s'il est conçu comme étant une étape dans un plan global et ambitieux pour la transition énergétique. Si un tel plan existait, l'investissement nécessaire pour fermer ces puits aurait le double effet de protéger l'environnement et de soutenir les familles et les travailleurs du secteur de l'énergie pendant la transition.
Le Bloc québécois a d'ailleurs proposé un plan pour une relance verte, avec des solutions concrètes pour une transition énergétique réussie. Dans ce plan, le Bloc suggère notamment de réacheminer les sommes non dépensées pour le projet d'expansion de Trans Mountain vers des projets d'énergie renouvelable, créateurs d'emplois, dont une large part pourra être réservée à l'Alberta pour soutenir sa transition verte.
Or une stratégie globale pour la relance verte du gouvernement libéral se fait toujours attendre. Sans réglementations environnementales plus strictes, des mesures comme le crédit d'impôt proposé par le projet de loi C-221 se présentent comme une nouvelle forme de subventions à l'industrie des combustibles fossiles.
La politique de relance économique devrait créer des incitatifs puissants pour encourager les entreprises à se détourner des énergies fossiles et à investir dans des technologies propres et renouvelables. Le Bloc québécois ne peut appuyer un projet de loi qui ferait assumer aux contribuables les coûts faramineux de la dépendance canadienne au pétrole. Le Bloc québécois est prêt à être solidaire des contribuables, des travailleurs et des familles de l'Ouest canadien à la condition que soient mis en place des lois et des règlements pour mettre fin à la dépendance de l'économie canadienne aux énergies fossiles du siècle dernier.
Madam Speaker, I am pleased to have the opportunity to speak to Bill C-221, which seeks to amend the Income Tax Act and establish a tax incentive for the closure of oil and gas wells.
I want to acknowledge the work of the member for Lakeland, with whom I am fortunate to serve on the Standing Committee on Public Safety and National Security.
I can say in no uncertain terms that, unfortunately, the Bloc Québécois does not support this bill for one very simple reason that my colleague from Repentigny already pointed out: Bill C-221 is inconsistent with the polluter pay principle.
What is the polluter pay principle? It is a basic environmental policy principle supported by all those who believe that the environment is a priority. The Bloc Québécois therefore wholeheartedly supports it. This principle stipulates that companies need to assume the costs of any environmental damage they do.
It is simple. If a party causes environmental damage, then it must pay to fix it. If it cannot be fixed, then the party pays to compensate for the irreparable harm it has done to nature. It is not up to the government or taxpayers to absorb those costs. That would be unfair and illogical. That would mean collectively agreeing to pay to fix the environmental damage caused by oil and gas companies, while receiving no collective benefit from the profits.
That is the problem the Bloc Québécois has with Bill C-221. If this bill were to pass, oil and gas companies would be given a tax credit for assuming their responsibilities. In other words, if we say yes to Bill C-221, we are saying yes to more funding for an industry that we know is harmful to the environment, rather than increasing funding for the energy transition. That reasoning does not hold water in 2021.
Obviously, it is not as if the oil and gas industry was the poor cousin in Canada. As a matter of fact, in April 2020, less than a year ago, the federal government provided $1.7 billion in financial assistance to clean up and decommission orphan wells in Alberta, Saskatchewan and British Columbia.
It does not stop there. Alberta already funds hundreds of well reclamation projects within its jurisdiction. That province offers loans to oil and gas companies, and the payment of interests is secured by none other than the federal government.
They will say that this support is needed in a pandemic and that workers in western Canada need support. We agree with helping workers and companies in times of crisis, but taxpayers already absorb much of the environmental costs from the oil and gas industry.
Moreover, it seems to me that the pandemic has become an excuse for a lot of things, much too many things. The present environmental crisis cannot be swept under the rug under the pretense that a public health crisis is raging. That kind of rhetoric no longer holds water in 2021 either.
The scientific evidence is too compelling on the cause-and-effect relationship between the destruction of the environment in the past decades and the pandemic we are living through. We cannot afford to legislate only to potentially hold oil and gas producers accountable. We must enshrine in law the requirement to start the energy transition, and yet, Bill C-221 would have the opposite effect.
Do we believe that oil and gas companies would change their ways if the government compensated them for their environmental mistakes? I think I know the answer: not a chance. Using taxpayer money to pay the environmental costs of an industry that damages the environment, puts communities at risk and compromises our climate future is completely irresponsible.
The member for Lakeland, who introduced this bill, says that it is not up to Alberta's taxpayers to assume 100% of the cost of decommissioning orphan wells. She is quite right, but I am sure she would agree with me that it is not up to Quebec taxpayers to pay for it either.
The Bloc Québécois recognizes the urgent need to deal with orphan wells, and we are prepared to support pragmatic solutions to this problem. However, these solutions must meet certain conditions. They must respect the polluter pays principle, they must contribute to an overall effort to make the energy transition, they must come with regulations and, last of all, they must help Canada meet its greenhouse gas reduction targets.
The Bloc Québécois is willing to discuss amendments to Bill C-221 in order for it to meet the conditions I mentioned. In this debate about orphan wells, it is important to have a broader conversation and to be aware of the importance of tackling climate change without further delay. More and more people are insisting that we, the elected members, address this issue.
A 2017 study by the C.D. Howe Institute showed that of some 450,000 listed oil and gas wells in Alberta, about 155,000 were no longer active but had not been completely cleaned up. In the spring of 2020, the Pembina Institute estimated that there were 164,000 abandoned wells in the province. The institute reported that these wells carried risks and expenditures that had not been borne by the owners, even though the owners benefited from the wells when they were active. The same study showed that for Albertans, the potential costs of cleaning up these abandoned wells could be as high as $8 billion, and that was in 2017. Of course, today, the costs would be even higher.
In fact, official estimates by the Alberta Energy Regulator, the only regulatory body for the energy sector in the province, value oil and gas liabilities at over $30 billion. However, internal documents estimate the total cleanup costs of Alberta's oil and gas sector, including the oil sands, at $260 billion. Should Albertans pay the price for the oil and gas sector's environmental carelessness? Should all Quebeckers and Canadians foot the bill? The answer is obvious.
We know that the economic downturn Alberta has faced for 10 years pushed many oil companies to bankruptcy. The province was left with thousands of wells left unattended by companies that did not bother to clean up their mess. That is a huge environmental problem, but it is also a public health and safety issue. These abandoned wells can contaminate the water and the soil, release greenhouse gases and put nearby houses at risk of exploding. It is a growing problem that companies keep sweeping into taxpayers' backyards. So much for being good corporate citizens.
A lawyer from Ecojustice, a Vancouver-based group of lawyers who specialize in environmental law, said that the best way for the province to address the problem of abandoned oil wells is to require companies to make a security deposit before drilling. That would be a more forward-looking solution than Bill C-221. We need to fix the mistakes of the past first.
The issue of orphan wells needs to be addressed, but there need to be strict conditions to warrant having the public cover the cost. Any financial assistance associated with environmental risks, such as the decommissioning of orphan wells, must be done in conjunction with changes to the environmental regulations. Preventive measures must also be taken to stop perpetually aggravating this problem.
We simply cannot vote in favour of a bill that sustains an industry that is causing environmental degradation. Alberta and the other oil- and gas-producing provinces have the power to make regulations that would require the industry to take care of its wells. The pandemic must not be used as an excuse for deregulating the environmental protection sector. There are ways to prevent more orphan wells from popping up in Alberta. There are ways to avoid making the public pay astronomical bills.
Environmental trusts exist precisely to allow producers to share the risk among themselves in case one of them goes bankrupt. Oil and gas companies should be required to maintain enough assets to cover the costs of dismantling and cleaning up their facilities. In the event of bankruptcy, the law should require companies to fulfill their environmental responsibilities before having to pay off their creditors. To avoid bankruptcies, governments should modify their criteria to require companies to finance the end of life of their wells upfront. In short, laws and taxes should be used to prevent problems, not to fix them after the fact.
In conclusion, investing public money to fix the problem of orphan wells would only be justifiable if it were part of a comprehensive, ambitious plan for an energy transition. If such a plan existed, the investment necessary for closing down these wells would have the dual impact of protecting the environment and supporting energy sector workers and their families during the transition.
The Bloc Québécois has proposed a green recovery plan, with concrete solutions for a successful energy transition. In its plan, the Bloc suggests, among other things, that the unused funds from the Trans Mountain expansion project be redirected toward renewable energy projects to create jobs, a large part of which could be earmarked for Alberta to support its green transition.
However, we are still waiting for the Liberal government's comprehensive strategy for a green recovery. Without stricter environmental regulations, measures like the tax credit proposed in Bill C-221 amount to little more than a new kind of subsidy for the fossil fuel industry.
The economic recovery policy should include powerful incentives to encourage companies to move away from fossil fuels and invest in clean and renewable technologies. The Bloc Québécois cannot support a bill that would make taxpayers bear the staggering costs of Canada's dependence on oil. The Bloc Québécois is prepared to stand in solidarity with the taxpayers, workers and families of western Canada on condition that laws and regulations are put in place to end the Canadian economy's dependence on fossil fuels from the previous century.