Monsieur le Président, j’interviens aujourd’hui pour parler de la motion présentée par le chef de l’opposition. Il la présente dans l’intention de lancer des attaques personnelles et partisanes plutôt que de se concentrer sur nos militaires qui servent dans les Forces armées canadiennes. Comme moi, il est un ancien combattant, et je m’attends à mieux.
Je ne vais pas, et j’insiste, je ne vais pas passer sous silence le fait que l’équipe de la Défense traverse une période très difficile, surtout les survivantes et survivants de harcèlement ou d’agression de nature sexuelle et d’abus de pouvoir. En tant qu’employeur le plus important et le plus diversifié du Canada, l’équipe de la Défense est un microcosme de notre société canadienne. Nous voyons dans nos organisations se refléter les mêmes problèmes que dans d’autres secteurs de notre société.
Nous avons dû composer avec l’inégalité, le racisme systémique, l’inconduite sexuelle et l’abus de pouvoir. C’est inconfortable. C’est douloureux et c’est incompatible avec nos idéaux en tant que Canadiens et qu’êtres humains.
Le vécu des victimes de harcèlement et d’agression sexuels dans les Forces armées canadiennes dont nous avons entendu le récit est consternant. À chaque membre des Forces armées canadiennes et à chaque membre du personnel du ministère de la Défense nationale qui a été touché par le harcèlement et la violence sexuels, je suis sincèrement désolé. Que ce soit récemment, il y a 10 ans, 20 ans ou 30 ans, nous n’étions pas là pour les soutenir.
Ayant moi-même revêtu l’uniforme, je sais que les Forces armées canadiennes et le ministère de la Défense nationale doivent faire mieux. Nous devons tous faire mieux. Je sais que nos systèmes de dénonciation actuels ne sont pas suffisants. Trop souvent, les gens ne se sentent pas capables de signaler une inconduite par crainte de représailles et de sanction. Cela doit changer, et cela va changer.
C’est pourquoi j’ai demandé à Mme Louise Arbour, ancienne juge de la Cour suprême, de mener un examen externe indépendant et complet de nos politiques et de notre culture institutionnelles. Au cours des prochains mois, nous attendons de Mme Arbour qu’elle formule des recommandations concrètes sur la façon dont les Forces armées canadiennes et le ministère de la Défense nationale peuvent mettre sur pied un système de dénonciation externe indépendant pour les membres de l’équipe de la Défense, un système qui comble les besoins des personnes touchées par l’inconduite sexuelle.
Nous savons que nous avons encore beaucoup à faire pour gagner la confiance de nos membres. Nous sommes résolus à apporter un changement durable, un changement qui élimine les valeurs, pratiques et politiques toxiques et désuètes à l’origine de préjudices pour nos gens.
Cette motion du chef de l’opposition ne vise pas à soutenir nos membres. En fait, l’opposition a eu l’occasion à maintes reprises au cours de la présente législature de faire partie de la solution. Ils ont plutôt systématiquement choisi de faire obstacle au progrès.
Au cours des dernières semaines, le chef de l’opposition et son parti ont voté contre l’octroi de près d’un quart de milliard de dollars dans le budget 2021 pour aider à éliminer l’inconduite sexuelle dans les Forces armées canadiennes. Ils ont voté contre le financement de services de pair à pair. Ils ont voté contre l’augmentation de l’accès au Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle pour les membres des Forces armées canadiennes. En fait, le chef de l’opposition officielle et son parti ont voté contre notre engagement à mettre en place de nouveaux mécanismes de surveillance externe afin d’assurer une plus grande indépendance au processus de dénonciation et de règlement des cas d’inconduite sexuelle au sein des forces armées.
C’est une hypocrisie stupéfiante de la part du chef de l’opposition et du Parti conservateur, ce qui ne devrait pas nous étonner de la part des conservateurs. Ils l’ont fait chaque fois. Si les conservateurs veulent parler d’avions de chasse, parlons du bilan des conservateurs en matière d’avions de chasse.
Après des années de coupes de la part des conservateurs, l'aviation canadienne n’avait pas assez d’aéronefs en état pour respecter les obligations du Canada à la fois à l’égard de l'OTAN et du NORAD. Nous nous sommes engagés à nous procurer 88 chasseurs perfectionnés pour montrer à nos amis et alliés que nous serons là pour eux lorsqu'ils feront appel à nous, et nous avons pris des mesures en ce sens. Comment on en est arrivé au nombre de 65, je ne le sais pas, mais j’imagine qu’on a dû couper dans les dépenses pour équilibrer le budget.
Pour ce qui est de notre contribution à la lutte contre Daech, notre travail aux côtés de nos partenaires de la coalition a porté ses fruits. Je ne présenterai pas d’excuses pour la position du gouvernement et les opérations que nous avons menées avec nos alliés. En augmentant notre présence sur le terrain, ainsi que celle de nos partenaires et alliés, les coalitions ont pu réduire l’emprise territoriale de Daech de plus de 98 % sur place.
Alors que les conservateurs sont restés les bras croisés, les libéraux sont intervenus. Nous avons travaillé en collaboration avec les États‑Unis, l’OTAN, des partenaires régionaux et des alliés pour renforcer la paix et la stabilité dans la région. Il y a quelques mois à peine, nous avons annoncé que nous allions redoubler d’efforts au Moyen-Orient en déployant jusqu’à 850 militaires des Forces armées canadiennes en appui à la coalition internationale, à la mission de l’OTAN en Irak et aux activités de renforcement des capacités en Jordanie et au Liban parce que nous savons qu’il s’agit d’un problème régional. Le Canada continuera d’être un partenaire fiable dans les opérations multinationales menées dans le monde.
Si le chef de l’opposition veut crier à l’opération de camouflage, qu’il commence par balayer devant sa porte. Nous voulons parler d’empêcher des choses de se produire. Nous avons appris dans les médias que le chef de l’opposition officielle était lui-même au courant d’allégations d’inconduite sexuelle concernant le général Vance avant qu’il soit nommé chef d’état-major de la Défense; il s'agissait en fait d’une allégation remontant à la période que le général avait passée à Gagetown, d’après la presse. Or, le chef de l’opposition officielle a déclaré qu’il avait fait enquêter sur cette allégation.
L’ancien conseiller à la sécurité nationale, Richard Fadden, a déclaré à un comité parlementaire que ce n’est pas vrai. Je me permets de citer ses propos. En parlant de l’époque où le général Vance était en poste à Naples, il a déclaré: « J'ai mené une petite enquête sur ce qui s'est passé avec une dame qui, par la suite, est devenue sa femme. Voilà l'étendue de ma participation. »
Après cette non-enquête, il semble que le Service national des enquêtes des Forces canadiennes a fait l’objet de pressions politiques afin qu’il mette fin à son enquête sur le général Vance, enquête qui a pris fin, comme par hasard, juste avant sa prestation de serment comme chef d’état-major de la Défense sous le gouvernement conservateur.
Le chef de l’opposition continue de dire qu’il a fait part des allégations d’inconduite sexuelle visant le général Vance le 15 juillet. Il continue d’affirmer qu’elles ont été examinées, malgré la preuve du contraire. Je le demande à la Chambre, comment l’histoire du chef de l’opposition peut-elle être crédible si le général Vance a été nommé après que les faits dont le chef avait connaissance n’ont pas donné lieu à une enquête? Presque aussitôt après que les allégations ont été formulées, des pressions ont été exercées et l’enquête a soudain été abandonnée.
Contrairement aux conservateurs, je sais combien les membres des Forces armées canadiennes sont importants. C’est pourquoi ils sont au cœur de notre politique de défense. C'est ce que dit le chapitre un.
Des femmes travaillent sans relâche pour créer une culture de dignité, de respect et d’inclusion pour tous les militaires, pour faire en sorte que l’organisation soit vraiment aussi diversifiée que le Canada qu’elle sert, et pour être l’employeur privilégié de Canadiens de toute origine, et non seulement de quelques-uns comme certains députés le souhaitent. Notre politique de défense, « Protection, sécurité, engagement », nous engage à promouvoir la diversité et l’inclusion comme valeurs institutionnelles fondamentales.
Nous avons pris plusieurs mesures pour accroître la représentation des femmes et d’autres populations non représentées à tous les niveaux de l’organisation. À l’heure actuelle, la lieutenante-générale Carignan est la cheffe de la déontologie et de la culture de l’organisation. Elle et son équipe unifieront et coordonneront les efforts en cours et en évolution en vue de créer un changement positif et durable au sein de l’équipe de la Défense.
Au Commandement des Forces alliées interarmées de l’OTAN à Naples, nous avons le lieutenant-général Joe Paul, un membre de la nation huronne-wendate, comme commandant adjoint. Pendant son séjour, il aidera à préparer, planifier et mener des opérations militaires afin de préserver la paix, la sécurité et l’intégrité territoriale de tous les membres de l’OTAN. Il s’agit là d’un message fort à l’intention de la communauté autochtone de notre alliance.
Au cours des prochaines semaines, la lieutenante-générale Fran Allen deviendra la première femme vice-cheffe d’état-major de la Défense au Canada. Tous ces membres méritent d’occuper ces postes importants et ils contribuent à bâtir un état-major plus représentatif des Canadiens qu’ils servent chaque jour.
Nous avons également incorporé l’analyse comparative entre les sexes plus dans l’ensemble de nos politiques, programmes et services afin d’éliminer les obstacles à l’inclusion et de mieux soutenir notre personnel. Nous nous attaquons à toutes les formes de comportement haineux dans nos organisations par des efforts de lutte contre le racisme et le harcèlement. Voilà pourquoi, l’an dernier, j’ai formé un groupe consultatif sur le racisme et la discrimination systémiques, composé du capitaine Door Gibson, du sergent Derek Montour, de la majore Sandra Perron et du major-général Ed Fitch, tous retraités.
Ils ont eux-mêmes subi de la discrimination, de l’antisémitisme et des préjugés contre les Autochtones et ils s’emploient à bâtir des Forces armées canadiennes et un ministère de la Défense nationale plus accueillants et inclusifs pour nos membres. Leurs recommandations permettront de garantir que les personnes au sein des forces armées, y compris les instructeurs, soient mieux soutenues et à l’abri de la discrimination, du racisme et de comportements préjudiciables, qu’il s’agisse de femmes, de Noirs, d’Autochtones et de personnes de couleur, de lesbiennes, de gais, de bisexuels, de transgenres, de queers, de bispirituels, de membres de la communauté LGBTQ ou de membres d’une minorité religieuse.
De concert avec le Secrétariat de lutte contre le racisme, ce travail aidera l’équipe de la Défense à éliminer toutes formes de racisme, de préjugé, de partialité, d’antisémitisme, d’islamophobie et de suprématie blanche au sein de notre organisation.
Là où le gouvernement précédent n’a pas fait grand-chose pour améliorer la situation pour ceux qui portent l’uniforme, en plus de supprimer la formation, la formation pointue qui existait, nous avons pris des mesures. En 2019, nous avons reçu la sanction royale pour le projet de loi C‑77, une mesure législative historique visant à faire évoluer le système de justice militaire en l’harmonisant avec le système de justice civil à des égards importants, tout en restant sensibles aux besoins propres à nos Forces armées canadiennes. La loi enchâsse les droits des victimes dans le code de discipline militaire. Nous travaillons avec nos membres pour que le règlement d’application de cette loi réponde aux besoins des survivants, plutôt qu’à ceux des Forces armées canadiennes et du ministère de la Défense nationale.
Plus tôt ce mois-ci, nous avons déposé un troisième examen indépendant de la Loi sur la défense nationale par Morris Fish, ancien juge de la Cour suprême. Il s’agit de l’un des examens indépendants du système de justice militaire les plus complets depuis une décennie. Les recommandations du juge Fish constituent l’une des plus importantes réformes de la Loi sur la défense nationale et du système de justice militaire canadien de mémoire récente.
J’ai accepté en principe les 107 recommandations. En ce moment même, nous avons déjà commencé à donner suite à 36 de ces recommandations afin d’améliorer encore le système de justice militaire et de renforcer la confiance de nos membres, qui portent la feuille d’érable à l’épaule.
Tout ce travail s’ajoute à l’examen externe indépendant complet que l’ancienne juge Louise Arbour mène pour nous aider à renforcer et à peaufiner nos efforts en vue de contrer et de prévenir l’inconduite sexuelle dans nos organisations. Au cours des prochains mois, Mme Arbour formulera des recommandations concrètes sur la façon dont les Forces armées canadiennes et le ministère de la Défense nationale pourraient mettre sur pied un système de dénonciation externe indépendant pour les membres de l’équipe de la Défense qui répond aux besoins des personnes touchées par l’inconduite sexuelle.
Ce système doit être axé sur les personnes touchées par l’inconduite, être sensible à leurs besoins et se situer hors de la chaîne de commandement et du ministère de la Défense nationale. Nous ne pouvons accepter moins et nous n’accepterons pas moins.
Mme Arbour et son équipe fourniront des orientations importantes sur la façon dont nous devons évoluer pour aider les personnes touchées, et la façon dont nous pouvons nous assurer que chaque incident est dûment traité. Une partie de ce travail consiste aussi à examiner les structures des Forces armées canadiennes, du ministère de la Défense nationale et du Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle pour voir comment nous pourrions les renforcer afin de donner davantage confiance aux personnes qui ont besoin de soutien.
Nous examinerons aussi le système de promotion et d’évaluation du rendement dans les Forces armées canadiennes en mettant l’accent sur la façon dont les dirigeants sont sélectionnés et formés. Cet examen portera également sur les politiques, les procédures et les pratiques du système de justice militaire pour déterminer comment nous pourrions le rendre plus sensible aux besoins des personnes qui ont été victimes d’inconduite tout en tenant les auteurs responsables. À mesure que Mme Arbour mènera ces travaux importants, elle pourra faire des recommandations provisoires aux Forces armées canadiennes ou au ministère de la Défense nationale et nous nous engageons à y donner suite sur-le-champ.
Tout en poursuivant notre travail avec l’équipe de la Défense, nous avons créé une nouvelle organisation de la conduite et de la culture professionnelles sous la direction de sa cheffe, la générale Carignan. Cette organisation sera chargée de mener à bien la transformation culturelle et de créer les conditions favorables à sa réalisation en unifiant, en intégrant et en coordonnant les efforts en cours dans l’ensemble du ministère de la Défense nationale.
Leur objectif est de s’assurer que nos actions et notre comportement reflètent les meilleures parties de nos organisations de la société canadienne. Leurs efforts s'aligneront sur le travail effectué par l’examen externe et s’inspireront des pratiques exemplaires, ainsi que des experts, des défenseurs et des personnes qui ont vécu de telles situations, à l’intérieur et à l’extérieur de nos institutions, à tous les niveaux.
Nous sommes déterminés à créer un changement culturel dans l’ensemble de l’équipe de la Défense, un changement qui est durable et qui répond aux besoins des victimes de harcèlement sexuel et de violence. La motion que le chef de l’opposition a présentée n’aide en rien les membres des Forces armées canadiennes. Elle s’apparente davantage aux attaques personnelles et aux jeux mesquins, ce à quoi, hélas, je suis beaucoup trop habitué. Ce n’est pas grave.
C’est décevant, cependant, mais ce n’est pas surprenant de la part d’un parti qui s’attache davantage à attiser les flammes de la division, un parti qui a refusé de reconnaître le racisme structurel, comme l’a fait le chef de l’opposition en septembre de l’année dernière, ou au milieu d’une pandémie lorsque la Dre Theresa Tam, qui est l’administratrice en chef de la santé publique du Canada, a vu sa loyauté envers notre pays remise en question par un député conservateur, à cause de son nom et de la couleur de sa peau. C’est un parti qui a voté contre une motion visant à condamner l’islamophobie.
Le chef de l’opposition a fondé toute sa campagne de leadership sur le slogan « Reprenons le Canada ». De qui?
Cette motion est en‑dessous de la dignité de la Chambre, mais il est clair que c’est exactement le genre de politique de division tendancieuse sur lequel l’opposition conservatrice s’appuie.