Madame la Présidente, c'est toujours un plaisir d'intervenir au nom de mes concitoyens d'Avignon—La Mitis—Matane—Matapédia, mais aussi au nom du Bloc québécois en tant que porte-parole en matière de sécurité publique.
Les armes à feu, c'est un sujet qui n'est pas simple, qui ne fait pas l'unanimité, qui suscite de fortes réactions chez certaines personnes et qui rappelle de fort mauvais souvenirs chez d'autres. C'est un sujet délicat qui mérite qu'on s'y attarde adéquatement. Bien que cela ne plaise pas à tout le monde et qu'il y ait différentes façons de s'y prendre, nous avons la responsabilité sociale de contrôler les armes à feu pour assurer la sécurité de notre population. C'est notre devoir de le faire, en tant qu'élus.
Je dois dire que nous attendions ce projet de loi sur les armes à feu. Nous l'attendions parce que, pendant leur campagne électorale de 2019, les libéraux s'étaient, clairement et sans équivoque, engagés à contrôler les armes à feu. C'est un engagement ferme qui a suscité une lueur d'espoir chez plusieurs personnes.
J'ai une pensée particulière pour les survivants et les survivantes des tueries que le pays a connues dans les dernières années. J'ai une pensée pour les vies qui ont été fauchées par des armes de poing ou des armes d'assaut de type militaire. J'ai une pensée pour les proches et pour les familles de ces victimes. C'est un peu pour elles que nous nous battons, mais aussi pour nous assurer que des drames comme ceux de la grande mosquée de Québec, de Polytechnique et de la Nouvelle-Écosse, et j'en passe, ne se reproduisent plus jamais. J'en passe, mais il y en a d'autres. En fait, au fil des années, il y en a eu trop, trop de vies perdues à cause d'armes à feu qui n'avaient pas leur place dans nos rues, dans nos maisons, ni dans les mains de personnes violentes et instables.
Nous attendions donc ce projet de loi, mais nous ne nous attendions certainement pas à ce qu'il soit si imparfait. Nous constatons que le Parti libéral n'a consulté personne pour la rédaction de son projet de loi, parce que personne n'est content: ni le lobby des armes à feu, ni les familles et proches des victimes des tueries de masse, ni les propriétaires d'armes respectueux des lois et qui se sentent lésés dans leurs droits.
Malheureusement, ce projet de loi est nettement insuffisant. Il ne fait que pelleter le problème vers l'avant ou dans la cour des autres, comme les municipalités de partout au Québec et au Canada. Le projet de loi ne règle absolument rien. Tout au plus apporte-t-il quelques améliorations aux lois actuelles. Il comporte plusieurs lacunes sur lesquelles je vais revenir, mais avant, pour les raisons que je viens d'évoquer et même si le projet de loi est largement imparfait, je tiens à mentionner que le Bloc québécois est d'accord avec son principe.
Je veux réitérer l'importance de légiférer sur le contrôle des armes à feu. Voter contre le principe de ce projet de loi, c'est le jeter aux poubelles avant même de lui avoir donné la chance d'être amélioré et amendé. Le Bloc québécois est donc disposé à travailler et à collaborer avec le Parti libéral pour rendre le projet de loi plus contraignant sur certains points et plus logique sur d'autres. Malgré nos divergences d'opinions sur la façon de nous y prendre, je pense qu'il est primordial de nous rassembler et de travailler ensemble pour assurer un milieu sécuritaire à nos concitoyens et concitoyennes.
Je crois sincèrement au travail collaboratif. C'est peut-être ma naïveté en mes débuts en politique, mais j'y crois et j'espère ne jamais cesser d'y croire. J'espère ne jamais devenir cynique, parce que le but ultime est — je l'espère et j'en suis convaincue — le même pour tous les parlementaires à la Chambre: assurer la sécurité de nos gens. Nous nous parlons à travers nos idéologies, nos politiques et nos guerres de clocher, mais ce que nous voulons au bout du compte, c'est que les gens que nous représentons soient en sécurité. Or, tant et aussi longtemps que des armes qui ont été spécifiquement conçues pour le champ de bataille seront entre les mains de civils dans nos rues et dans nos maisons, personne ne sera en sécurité, malheureusement.
Je veux remercier les membres de PolySeSouvient, avec qui je communique régulièrement. Je veux les remercier de leur long combat. Je tiens à me faire leur porte-parole pour dire à quel point ils sont épuisés de se battre depuis 30 ans et à quel point ils se sont sentis trahis par le premier ministre du Canada, qui n'a vraisemblablement pas tenu parole. À de nombreuses reprises, le chef du Parti libéral du Canada a regardé les victimes et les proches des victimes dans les yeux et leur a promis qu'il interdirait les armes d'assaut de type militaire.
Malheureusement, ce n'est pas ce qu'il fait avec ce projet de loi. Malheureusement, les armes d'assaut ne sont pas bannies, contrairement à ce que le Parti libéral affirme. Seuls quelques modèles populaires le sont. La plupart de ces modèles ne circuleront plus, mais les propriétaires actuels de ces armes pourront les garder à la maison. Le projet de loi n'empêchera pas donc quelqu'un qui possède déjà l'une de ces armes nouvellement prohibées de commettre un crime. C'est une demi-mesure qui, selon moi, fait suite à une autre demi-mesure en mai dernier, celle de l'interdiction de quelque 1 500 modèles d'armes d'assaut de type militaire, alors que des centaines de modèles similaires sont toujours en circulation.
Fait à noter, il n'existe aucune définition officielle d'arme d'assaut dans le Code criminel, ce qui complique la tâche de l'interdiction.
Par exemple, toutes les armes longues semi-automatiques devraient-elles être considérées comme des armes d'assaut ou seulement les armes longues semi-automatiques avec des chargeurs détachables? La question se pose et mérite un certain éclaircissement.
Le gouvernement a possiblement créé sa liste en fonction des armes utilisées lors des tueries des dernières années afin de marquer un coup médiatique — coup visiblement raté, selon les réactions de différents groupes pour le contrôle des armes d'assaut.
Avec cette interdiction en mai dernier, le gouvernement s'était engagé à déposer un programme de rachat. On a osé croire qu'un programme de rachat des armes d'assaut de type militaire par le gouvernement fédéral aux personnes qui en possèdent de façon légale aurait été obligatoire. C'est ce à quoi on se serait attendu, à l'image de ce qui a été fait en Nouvelle-Zélande, par exemple.
Le programme de rachat lancé par le gouvernement néo-zélandais, pays de 4,8 millions d'habitants, après la sanglante tuerie de Christchurch en 2019, aurait permis aux autorités de récupérer plus de 61 000 armes à feu et plus de 188 000 pièces détachées. Avant l'initiative, la police estimait qu'il y avait entre 55 000 et 240 000 armes à feu nouvellement interdites dans le pays.
Ces armes nouvellement prohibées appartenaient à quelque 32 000 propriétaires d'armes, qui ont reçu des compensations totalisant 100 millions de dollars néo-zélandais — soit environ 87 millions de dollars canadiens — pour s'être conformés à la loi. On voit que le programme a donc relativement porté ses fruits. C'est certainement mieux qu'un programme de rachat volontaire.
Comment avoir la garantie que les propriétaires vont revendre, de bonne foi, leur arme au gouvernement? Les personnes qui se sont procuré des armes de ce type de manière tout à fait illégale ne sont certainement pas celles qui vont lever la main pour gentiment remettre leurs armes au gouvernement, en échange de quelques centaines de dollars.
C'est là où je ne comprends pas la mesure du gouvernement: en ne rendant pas son programme de rachat obligatoire, il le rend complètement facultatif.
Philip Alpers, professeur associé à l'École de santé publique de l'Université de Sydney, en Australie, et expert en contrôle des armes à feu, a étudié les initiatives de rachat. Dans un récent article de Radio-Canada, il soulignait que les programmes optionnels, par opposition aux programmes obligatoires, avaient plus de probabilités de rater leur objectif de renforcer la sécurité dans les communautés. En effet, plusieurs études montrent que les programmes volontaires sont plus susceptibles d'échouer.
Il mentionnait que les programmes de rachat d'armes en Australie et en Nouvelle-Zélande, à titre d'exemple, non seulement interdisaient certaines armes à feu, mais incluaient des sanctions sévères pour ceux qui ne les rendraient pas. Ces programmes, qui intégraient l'émission des sanctions pour ceux qui ne les rendraient pas, ont fait la différence dans les deux pays. À l'heure actuelle, tel qu'il est rédigé, le projet de loi C-21 permettrait aux propriétaires de conserver leurs armes si certaines conditions sont remplies, dont l'entreposage sécuritaire. Cela démontre tout de même concrètement l'importance de rendre obligatoire ce programme de rachat.
En conférence de presse, le ministre de la Sécurité publique a déclaré que le gouvernement canadien ne savait pas combien d'armes de type militaire étaient en circulation au Canada et que c'était pour cette raison qu'il n'avait pas rendu le rachat obligatoire. Cela n'a absolument aucun sens puisque, s'il doute que les gens retournent leurs armes, rien ne dit que ces mêmes personnes les enregistreront.
PolySeSouvient a d'ailleurs réclamé qu'il le soit, en mai dernier, à l'annonce du nouveau décret, parce que « chaque arme détenue des mains privées constitue un risque. » Il faut aussi savoir que la majorité des tueurs de masse au Canada étaient propriétaires légaux d'armes. C'est une information à ne pas négliger lorsqu'on prend la décision de rendre un programme de rachat obligatoire ou non.
En mars dernier, épuisé par la lutte qu'il mène depuis tant d'années, le groupe PolySeSouvient a déclaré que si le premier ministre ne modifiait pas substantiellement son projet de loi, il ne serait plus le bienvenu aux cérémonies de commémoration du drame de Polytechnique. PolySeSouvient y voit « un écran de fumée » qui imposerait un nouveau fardeau aux particuliers; une mesure législative qui cible injustement les propriétaires d'armes à feu responsables, mais non les criminels. Je ne pourrais être plus en accord avec eux.
Le dépôt du projet de loi C-21 était pourtant une belle façon de boucler la boucle de l'interdiction et d'aller de l'avant avec une interdiction législative des armes d'assaut de type militaire, tel que promis par le Parti libéral lors de la campagne électorale de 2019.
Je ne mâcherai pas mes mots. Non seulement cela démontre à quel point les libéraux ne sont pas dignes de confiance dans ce dossier, mais cela démontre à quel point ils manquent de sérieux. D'abord, les libéraux ne tiennent pas parole; ensuite, ils continuent de prétendre qu'un programme de rachat volontaire va réellement endiguer le fléau des armes à feu dans le pays. Il ne faut pas charrier.
Le fait que les armes — si les gens décident de les garder à la maison — n'aient pas besoin d'être rendues inutilisables pour être conservées pose aussi un énorme problème. Il aurait au moins fallu que les armes soient démontées avant d'être entreposées, ce qui aurait rendu leur utilisation immédiate beaucoup plus difficile.
Même si la réglementation empêche les gens d'utiliser leur arme nouvellement bannie, s'ils l'ont à portée de main quand un conflit survient, rien ne les empêcherait de commettre l'irréparable.
Ce n'est pas la seule chose à ne pas avoir de sens, dans ce projet de loi.
En ce qui a trait au contrôle des armes de poing, on se souviendra de la campagne électorale de 2019, au cours de laquelle le chef du Parti libéral répétait à qui voulait l’entendre qu’il était celui qui renforcerait le contrôle des armes à feu au Canada, contrairement à son adversaire conservateur qui, lui, le relâcherait. C’était la promesse du moment, faite pour se dissocier de l’autre grand parti.
Une fois au pouvoir, le Parti libéral a cherché comment il pouvait tenir parole pour, à la fois, ne pas trop perdre d’appuis d'un côté et en satisfaire certains de l'autre. Puis, une idée de génie est apparue aux libéraux. Ils se sont dit que, comme ils s'étaient engagés à contrôler les armes, ils allaient pouvoir déléguer cette tâche aux municipalités. Si cela fonctionnait, ce serait tant mieux, ils auraient fait leur travail. Si non, ce ne serait pas leur problème, ce serait désormais celui des municipalités.
Dans le projet de loi C-21, le gouvernement fédéral demande aux quelque 5 600 municipalités canadiennes de mettre en place leurs propres mesures d’entreposage des armes de poing sur leur territoire, c'est-à-dire l’entreposage à domicile ou à l’intérieur des limites municipales. L’interdiction pourrait aller jusqu’au simple transport des armes en territoire municipal. Cela veut dire que les quelque 5 600 municipalités canadiennes pourraient décider de mettre en place des mesures complètement différentes.
Au Québec, il y a quelque 1 400 municipalités. Dans ma circonscription seulement, Avignon—La Mitis—Matane—Matapédia, il y a 56 municipalités et deux territoires autochtones. Chez nous, en parcourant une quinzaine de kilomètres, on peut partir de Sainte-Angèle-de-Mérici, qui se trouve pratiquement à l'intérieur des terres, et se rendre à Sainte-Flavie, qui se situe sur le bord du fleuve, en passant par le village de Saint-Joseph-de-Lepage et par le centre-ville de Mont-Joli, l'une des quatre plus grosses villes de ma circonscription. C’est donc dire qu’en une quinzaine de kilomètres, il pourrait y avoir quatre réglementations différentes sur les armes de poing.
On dirait que le gouvernement a lancé cette idée sans y réfléchir. Il faut dire que, les budgets municipaux, ce n'est pas ce qu’il y a de plus garni non plus. Le gouvernement est prêt à jeter cela dans leur cours sans leur dire quand, ni comment, ni pourquoi. Il laisserait les autres adopter des milliers de règlements totalement disparates et incohérents. Ce serait un vrai fiasco.
Le gouvernement libéral se déresponsabilise totalement. Le constat est clair: il n’a manifestement pas l’intention de bannir les armes de poing.
La Ville de Montréal a rapidement déploré le fait que le gouvernement ratait une occasion en or de légiférer pour établir des règles claires, harmonieuses et efficaces pour l’ensemble du territoire canadien. La mairesse de Montréal, Valérie Plante, a réitéré sa demande et lancé un appel à l'aide au gouvernement fédéral pour un meilleur contrôle des armes à feu quelques jours après qu'une adolescente de 15 ans ait perdu la vie dans une fusillade, dans l'arrondissement de Saint-Léonard. Il s’agissait d’ailleurs du cinquième homicide de l’année sur le territoire de la Ville de Montréal; une victime collatérale qui s’est retrouvée au mauvais endroit, au mauvais moment, selon ce que les médias rapportent. Du côté de la Ville de Toronto, plus de 462 fusillades ont été dénombrées en 2020. Le problème des armes illégales, qui se promènent et qui se retrouvent souvent entre les mains de jeunes, est rapidement revenu sur la table. C’est un fléau, en particulier dans les grandes villes du pays.
D’ailleurs, le projet de loi C-21 ne vient pas régler ce problème. On promet de lutter contre la contrebande et le trafic d'armes, mais on ne met pas nécessairement plus de moyens aux frontières. Pourtant, on sait que les armes n’arrivent évidemment pas dans les mains des jeunes par magie. Près de 250 armes prohibées ont d’ailleurs été saisies à Dundee, en mars dernier, et un homme de 24 ans a été arrêté. Il s’était procuré une maison située à cheval sur la frontière américaine, un endroit historiquement reconnu pour la contrebande en raison de son emplacement géographique. Dieu sait dans quelles mains d’autres jeunes ces armes auraient pu se retrouver. Cela montre à quel point le trafic et la contrebande sont réels, et pas seulement dans les grandes villes. Cela se passe dans nos régions aussi, comme à Salaberry-de-Valleyfield.
Pour revenir aux armes de poing, on constate donc, encore une fois, que personne n’a été consulté avant le dépôt de ce projet de loi, et certainement pas les villes. L'Union des municipalités du Québec, l'UMQ, a à son tour dénoncé certaines dispositions du projet de loi, notamment le fait de transférer aux villes des responsabilités qui ne leur incombent pas en matière de contrôle des armes de poing. Les villes ne souhaitent manifestement pas avoir à les assumer. L'UMQ ajoutait sa voix à celle de la Fédération québécoise des municipalités, qui avait, elle aussi, déjà dénoncé la manœuvre. D’autres voix s’y sont rapidement ajoutées, dont celle des maires de la Ville de Québec, Régis Labeaume, et de la Ville de Gatineau, Maxime Pedneaud-Jobin, qui se sont dits déçus des intentions d'Ottawa. Ce n'est pas peu dire.
Puis, l'Assemblée nationale du Québec a voté à l’unanimité une motion demandant la délégation de ce pouvoir au Québec plutôt qu’à ces municipalités. L'idée de mettre en place une seule réglementation au Québec, plutôt que des milliers, est relativement bien accueillie. On voit que cela arrangerait bien le gouvernement fédéral qui, dans tous les cas, se défilerait de sa responsabilité. Cela semble donc être la situation idéale.
Il y a cependant un bémol. Le gouvernement du Québec semble avoir accepté la motion à la va-vite et n’est peut-être pas si enclin à s’embarquer de nouveau dans ce genre de débat, après l’intense négociation sur le registre des armes à feu d’il y a quelques années.
Plus encore, le gouvernement du Québec, comme toute autre province, pourrait déjà légiférer ou réglementer les armes de poing sur son territoire s'il le voulait. Le fédéral n'aurait pas nécessairement à lui déléguer ce pouvoir. On constatera que ce n'est pas dans le programme politique du gouvernement du Québec non plus.
Comme députée du Bloc québécois, je serais normalement en faveur de déléguer plus de pouvoirs à Québec. Cette fois-ci, par contre, je suis bien embêtée. J'ai l'impression que le fédéral se défile. C'est lui qui s'était engagé à contrôler les armes de poing, c'est donc lui qui devrait agir au lieu de pelleter cela dans la cour de qui le veut bien. Il s'agit du simple principe de tenir ses promesses.
Je reviens sur la problématique des armes illégales. La plupart des armes de poing utilisées par les gangs et les groupes criminels sont illégales, qu'elles aient été volées ou non à des citoyens. Il faut donc à la fois diminuer l'accessibilité de ces armes ici et lutter à la frontière américaine contre l'importation d'armes à feu illégales.
Laisser aux municipalités ou aux provinces la possibilité d'interdire les armes sur leur territoire ne règle pas le problème. Il aurait fallu qu'Ottawa interdise les armes de poing à la grandeur du Canada pour avoir un certain effet. Or, Ottawa manque de courage politique et préfère déléguer.
Je tiens à préciser que, depuis le début de cette allocution, je parle des armes de poing et des armes d'assaut de type militaire. Les armes de chasse de calibre 12 et 10, par exemple, ne sont pas visées par l'interdiction de mai dernier ni par ce projet de loi. Les chasseurs peuvent continuer de chasser sans crainte. Tuer un animal pour le manger est tout à fait différent d'utiliser une arme qui a la capacité de tirer des dizaines de balles en très peu de secondes et qui est explicitement conçue pour enlever plusieurs vies humaines rapidement.
On parle également des armes qui sont facilement modifiables pour augmenter leur létalité. Ce sont ces armes qu'on veut bannir et, à ce sujet, je suis tout à fait d'accord avec le gouvernement.
Je rappelle que le projet de loi passe à côté du problème. On voulait interdire les armes d'assaut, non pas pour empêcher les tireurs sportifs de les utiliser à des champs de tir, mais bien pour empêcher des tueries. Malheureusement, on constate que ce projet de loi ne fait qu'empêcher les tireurs sportifs d'utiliser sécuritairement leurs armes sans prévenir les massacres.
Je veux aussi toucher à une autre problématique, créée par ce projet de loi. Nous avons constaté avec étonnement que le gouvernement souhaitait restreindre la pratique du paintball et du tir à microbilles — mieux connu sous le nom anglais d'airsoft — par une disposition qui considérerait certaines répliques d'armes utilisées dans ces activités comme étant des armes prohibées.
Encore une fois, l'approche du gouvernement est improvisée et n'a pas été faite en consultation avec les gens concernés, ce que confirment mes discussions avec la Fédération sportive d'airsoft du Québec. Les propriétaires de boutiques d'armes à feu n'ont pas été consultés non plus. Ces derniers vendent souvent leurs produits à certains corps policiers et, du jour au lendemain, se sont retrouvés avec des centaines d'armes nouvellement prohibées sur leurs tablettes sans que le gouvernement leur dise quoi en faire. Le projet de loi a été déposé assez longtemps après l'interdiction de mai dernier. Même quelques mois après sa présentation, les propriétaires de ces boutiques ne savent toujours pas quoi faire de ces stocks valant des centaines de milliers de dollars et qui dorment.
Pour en revenir aux répliques d'armes d'assaut, il faut dire que le désir du gouvernement de les éliminer n'est pas sans fondement. En effet, les policiers risquent de faire un usage mortel de la force s'ils croient avoir devant eux une véritable arme lors d'une intervention, ce qui pose également un risque de dommages collatéraux pour des gens innocents. Nous devons cependant à nos forces policières un appui sans faille.
Or, le gouvernement aurait pu s'inspirer de ce qui se fait ailleurs, comme aux États-Unis, où les répliques d'armes pour le tir à billes doivent avoir le bout du canon peint en orange, par exemple, ce qui facilite l'identification des fausses armes. Un marquage clair de ces répliques serait un compromis adéquat et, lors de l'étude en comité, nous demanderons assurément au gouvernement de se pencher sur cette possibilité plutôt que de bannir du jour au lendemain une activité pratiquée par des centaines de Québécois. Je suis d'accord que le gouvernement doit encadrer davantage la vente de répliques d'armes de paintball et de tir à billes, mais cela peut être fait tout en respectant ceux qui pratiquent ces activités de façon sécuritaire.
Après avoir consulté nos concitoyens de partout au Québec, des groupes pour le contrôle des armes à feu, des groupes de défense des armes, des propriétaires de boutiques d'armes, des chasseurs, des tireurs sportifs, des gens qui pratiquent le paintball et le tir à billes et des propriétaires de champs de tir, le constat est clair: ce projet de loi est absolument imparfait.
Je l'ai dit d'emblée et je le réitère: bien que nous ayons le goût de jeter ce projet de loi à la poubelle et de recommencer, le temps file et nous devons nous donner la chance d'au moins essayer. C'est ce que nous ferons en comité parlementaire. Cependant, je vais faire preuve de transparence: si le projet de loi n'est que très peu ou pas du tout modifié et que le programme de rachat des armes d'assaut de type militaire ne devient pas obligatoire, nous voterons tout simplement contre le projet de loi.
Je rappelle que le Parti libéral s'est engagé à de nombreuses reprises à bannir les armes d'assaut et à restreindre les armes de poing. Avec ce projet de loi dans son état actuel, il ne tient ni l'une ni l'autre de ces promesses. Au Bloc québécois, nous sommes prêts à travailler avec le gouvernement afin d'assurer la sécurité de nos concitoyens et de nos concitoyennes.