Madame la Présidente, hier se sont terminées les audiences publiques entourant le décès tragique de Mme Joyce Echaquan, survenu le 28 septembre dernier. Nous attendons avec impatience le rapport de la coroner.
Hier, des milliers de personnes se sont rassemblées à Trois-Rivières pour réclamer justice, pour que cela ne se reproduise plus jamais. Les Atikamekws de Manawan, de Wemotaci et d'Opitciwan, les autres Premières Nations ainsi que les Blancs se sont tous réunis pour dire « plus jamais ».
Le chef de la communauté atikamekw de Manawan, M. Paul-Émile Ottawa, a rappelé ce qui suit: « Sans cette vidéo [prise par Joyce Echaquan], cette mort aurait été comptabilisée comme un décès parmi tant d'autres. Elle est morte parce que les gens ont voulu qu'elle meure. Elle est décédée parce que les gens ont été malveillants à son endroit. Mais justice sera rendue. Justice sera faite ».
Le conjoint de Joyce Echaquan, M. Carol Dubé, a affirmé: « Ce n'est qu'un début. Je veux qu'il y ait des changements et j'ai espoir ».
Nous, les politiciens, avons un devoir de solidarité et une obligation de résultat. À ce sujet, toujours lors du rassemblement d'hier, le chef de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, M. Ghislain Picard, a déclaré ce qui suit: « Plusieurs sont d'avis que ce n'est pas assez rapide et que les gouvernements réussissent trop facilement à faire du pelletage par en-avant et c'est malheureusement le cas. Et pour moi, je trouve que le rassemblement d'aujourd’hui, qui coïncide avec la fin des audiences de la coroner, est l'occasion de faire ce rappel-là ».
Nous avons une obligation de résultat. Oui, il faut reconnaître l'injustice et le racisme. Oui, il faut les dénoncer, mais il faut surtout faire des gestes concrets, comme adopter des politiques, pour que tout cela s'arrête et que les choses changent. C'est la partie qui nous incombe, et nous avons une obligation de résultat. Cela commence par changer la vieille et raciste Loi sur les Indiens, dont le titre même est raciste. Cela commence par mettre en œuvre, pour vrai, les recommandations du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation.
La découverte des restes de 215 enfants sur le site de l'ancien pensionnat autochtone à Kamloops me laisse sans mot. Cela révèle une histoire d'horreur. C'est d'une tristesse tellement grande que je n'ai pas les mots pour la nommer. Bien humblement, je partage la douleur des familles éplorées. Bien humblement, je tiens à offrir mes plus sincères condoléances à la nation Secwépemc ainsi qu'à tous les peuples autochtones du Québec et du Canada, qui se rejoignent dans le deuil et la souffrance.
Comme plusieurs personnes, je crains aussi que la découverte de ces 215 petites victimes ne soit que le début d'une longue suite de tragédies innommables. Cette nouvelle tragédie nous rappelle la triste histoire du Canada, celle des pensionnats autochtones, en activité pendant plus d'un siècle, soit de 1892 à 1996. C'est la pierre d'assise du régime d'assimilation imposé aux Premières Nations.
Plus de 150 000 enfants auraient été arrachés à leur famille, à leurs amis, à leur communauté. On les a forcés à fréquenter ces institutions et à oublier leur langue, leur culture et leur identité. On leur a fait ressentir de la honte d’être qui ils sont. En anthropologie, on appelle cela un ethnocide ou un génocide culturel, ce qui signifie de faire disparaître un peuple. Le but ultime des pensionnats était de tuer l'Indien dans l'enfant. Une fois enlevés et vulnérables, les enfants ont été victimes de gestes violents, sans compter toutes les agressions sexuelles et tous les meurtres qui ont été perpétrés. Combien y a-t-il eu de meurtres gratuits, criminels et impunis dans ces pensionnats?
Le Canada a un devoir de mémoire à cet égard. L’histoire du Canada est sombre et triste. C'est une histoire inspirée par l'impérialisme et le colonialisme, un héritage de l'Empire britannique. Le Père de la Confédération, Sir John A. Macdonald, a les mains souillées par l'injustice et par le racisme. Mus par la logique marchande du profit et du capital qui doit s'étendre sans cesse, l'Empire britannique et le Canada ont écrasé les premiers peuples et leurs droits, afin de mettre la main sur leurs terres et leurs ressources. C'est dans cet esprit qu'ont été mis en place les pensionnats autochtones et toute leur horreur. C'est dans cette logique que le Canada en est venu à reléguer les premiers peuples à une sous-classe d'humains et à banaliser leur misère et les gestes faits envers eux.
Je pense entre autres à la banalisation des enlèvements et des assassinats des femmes, des filles et des enfants autochtones. Je pense à l'histoire qu'un membre de la communauté atikamekw de Manawan m'a racontée. Pendant longtemps, le surintendant de la communauté était généralement un militaire retraité qui y faisait régner un climat de terreur.
Par exemple, devant le refus d’un Atikamekw d'autoriser la coupe de bois sur son territoire familial par une grosse compagnie forestière, le surintendant lui a faussement diagnostiqué la tuberculose et l’a forcé à s’exiler pendant deux ans dans un sanatorium. À son retour, son territoire avait été rasé et il avait, entretemps, contracté la maladie.
Trop de traumatismes laissent des traces et engendrent la méfiance.
Pour se donner meilleure conscience face au pillage des ressources, le Canada a réduit les Premières Nations à une sous-classe d’humains. Ainsi, les sévices paraissaient plus acceptables. Tout cela s'est avec la complicité des Églises, une en particulier, dont j’ai particulièrement honte. Portant un message d’amour, celles-ci ont porté la haine, l’horreur et la tristesse en se faisant complices de cette logique impérialiste, en disant vouloir « civiliser ». C'est dégueulasse.
Toute cette horreur n’a malheureusement rien d’unique. Cela a été et c’est la façon de faire des empires partout sur la planète: en Afrique, en Asie, en Océanie et dans les Amériques. Chaque empire a sa façon de détruire les peuples et les cultures minoritaires pour étendre son hégémonie. Le Canada n’y échappe pas. L’histoire du Canada aurait pu être une histoire de respect, de collaboration et de partage entre les différents peuples. Cela a plutôt été celle de la lutte des peuples, avec les Premières Nations comme premières victimes.
Celles-ci ont subi des préjudices innommables. L’injustice perdure encore aujourd’hui. La situation des Premières Nations en témoigne. Je pense à Joyce. Je demande justice. Je pense à toutes ces communautés où l’accès à l’eau potable demeure un enjeu, et où il n’y a toujours pas d’égalité dans la qualité des services entre les Autochtones et les autres citoyens. L’injustice perdure. C’est malheureusement encore banalisé, parce que, malheureusement, la notion de sous-classe a tellement été inculquée pendant longtemps qu’elle perdure. Il faut continuer à briser ce préjugé historiquement inacceptable. Il faut que cela change.
Le chemin de la réconciliation sera long et laborieux, mais nous, les politiciens, avons ici aujourd’hui un rôle crucial à jouer. Il faut agir dès maintenant pour que cela change. Cela fait six ans que le rapport de la Commission de vérité et réconciliation a présenté ses recommandations. Cela traîne toujours. Ottawa agit à la vitesse du lièvre pour porter des discours et des intentions, mais à la vitesse de la tortue pour agir, faire des gestes concrets pour véritablement changer la situation.
En terminant, je tiens encore une fois à rappeler toute la douleur des familles éplorées. Bien humblement, je la partage et j’offre encore mes plus sincères condoléances à la nation secwepemc, ainsi qu’à tous les membres des communautés des Premières Nations.
Ma formation politique est évidemment en faveur de chacun des éléments de la motion. Ottawa doit abandonner dès maintenant ses recours judiciaires contre les enfants autochtones et doit appliquer le principe de Jordan de façon intégrale.
Il s’agit d’une proposition raisonnable pour en arriver à un règlement à l'amiable. Il est épouvantable que le gouvernement dépense des millions de dollars en frais judiciaires pour éviter d'indemniser les victimes du pensionnat de Sainte-Anne. Ma formation presse le gouvernement d’agir rapidement afin de réaliser notamment les appels à l’action 71 à 78 de la Commission de vérité et réconciliation.
Comme l’a indiqué la Commission dans son rapport, « le fait d’aider les familles à découvrir le sort des enfants qui sont morts dans les pensionnats, de localiser les tombes anonymes et d’entretenir, de protéger et de commémorer les cimetières de pensionnat est essentiel à la guérison et à la réconciliation. »
Comme le faisait remarquer la Commission, il est d’autant plus urgent de réaliser ces appels à l’action, car, au fur et à mesure que le temps avance, les traces de cimetières disparaissent et les survivants qui peuvent offrir des témoignages de leur expérience vieillissent sans pouvoir retrouver la trace de leurs frères, de leurs sœurs ou de leurs parents.
D’ailleurs, le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme a rappelé encore dernièrement qu’il est essentiel que le Canada accomplisse ce travail. Évidemment les victimes, les survivantes et les survivants, leurs familles et leurs communautés ont droit aux ressources nécessaires pour les aider à surmonter les traumatismes émotionnels, physiques, spirituels, mentaux et culturels causés par les pensionnats.
Enfin, il est impératif qu’un suivi approprié et rapide soit fait quant à l’état d’avancement des appels à l’action de la Commission, pour une véritable justice, pour que plus un seul Autochtone soit discriminé, et pour que Joyce Echaquan obtienne justice.
Madam Speaker, yesterday marked the end of the public hearings regarding the tragic death of Joyce Echaquan on September 28. We anxiously await the coroner's report.
Yesterday, thousands of people gathered in Trois-Rivières to demand justice so that this never happens again. The Atikamekw of Manawan, Wemotaci and Opitciwan, other first nations and white people all gathered to say “never again”.
The chief of the Atikamekw Council of Manawan, Paul-Émile Ottawa, said, “Without that video [taken by Joyce Echaquan], her death would have been considered just one of many. She is dead because people wanted her to die. She is dead because people did her wrong, but justice will be done. Justice will prevail.”
Joyce Echaquan's husband, Carol Dubé said, “This is just the beginning. I want changes to be made, and I am hopeful that they will be.”
As politicians, we have a duty to show solidarity and an obligation to get results. On that subject, at the same gathering yesterday, Ghislain Picard, chief of the Assembly of First Nations of Quebec and Labrador, stated, “Many people think that things are not going fast enough and that it is too easy for governments to offload responsibility onto future governments, which is unfortunately the case. I think that today's gathering, which coincides with the end of the coroner's hearing, is the right time to remind the government of that.”
We have an obligation to get results. Yes, we need to acknowledge injustice and racism. Yes, we must condemn injustice and racism, but what we really need to do is to take concrete action, adopt policies to make sure that all this stops and that things change. That is our job, and we have an obligation to get results. That begins with changing the old, racist Indian Act. Even the name is racist. It starts by really implementing the recommendations in the Truth and Reconciliation Commission's final report.
The discovery of the remains of 215 children on the site of the former residential school in Kamloops leaves me speechless. It is a horror story. It is so tragic that I cannot find words for it. In all humility, I share the pain of the grieving families. In all humility, I would like to offer my sincerest condolences to the Secwépemc nation and to all indigenous peoples in Quebec and Canada, joined in mourning and suffering.
Like many people, I also fear that the discovery of these 215 small victims is only the beginning of a long series of unspeakable tragedies. This new tragedy reveals Canada's sad history, the history of residential schools, in operation for more than a century, from 1892 to 1996. The residential school system was the cornerstone of the assimilationist regime imposed on first nations.
More than 150,000 children were torn from their families, their friends, their community. They were forced to attend these institutions and to forget their language, their culture and their identity. They were made to feel ashamed of what they were. In anthropology, this is referred to as ethnocide or cultural genocide, which means to eradicate a people. The ultimate aim of the residential schools was to kill the Indian in the child. Once taken from their homes and made vulnerable, the children were subjected to violence, sexual assault and murder. How many gratuitous, criminal and unpunished killings took place in these schools?
Canada has a duty to remember what happened. Canada's history is dark and sad. Its history is one of imperialism and colonialism, a legacy of the British Empire. The hands of the father of Confederation, Sir John A. Macdonald, are soiled by injustice and racism. Compelled by a desire for the never-ending accumulation of profit and capital, the British Empire and Canada crushed the first peoples and rode roughshod over their rights so they could get their hands on the first people's lands and resources. That was the world view behind the creation of residential schools and the ensuing horror. That was the philosophy that enabled Canada to view the first peoples as an underclass of humanity and their misery and everything that was done to them as unimportant.
Canada has trivialized the disappearance and murder of indigenous women, girls and children. A member of the Atikamekw of Manawan community told me a story. For years and years, the community superintendent was usually a retired soldier who created a climate of terror.
An Atikamekw man refused to allow a large forestry company to cut down trees on his family land. The superintendent falsely diagnosed him with tuberculosis and forced him to go to a sanatorium for two years. When he returned to the community, his land had been cleared and he had contracted tuberculosis
So much trauma leaves scars and breeds mistrust.
To make itself feel better about pillaging resources, Canada reduced the first nations to a sub-class of humans, making the abuse seem more acceptable. All of this was done with the complicity of the church, one in particular I am especially ashamed of. The church believed it was spreading a message of love, but by aligning with imperialism they brought in hatred, horror and sadness, all in the name of “civilizing” the indigenous peoples. It is disgusting.
Unfortunately, there is nothing new about all this horror. This was and is the modus operandi of empires around the world, whether in Africa, Asia, Oceania or the Americas. Every empire has its own way of destroying minority peoples and cultures to expand its dominance. Canada is no exception. The history of Canada could have been a history of respect, collaboration and sharing among the various peoples. Instead it was a history of struggle, and the first nations were the primary victims.
They suffered unspeakable harm. The injustice persists to this day. The situation of first nations is proof of that. I am thinking about Joyce. I am calling for justice. I am thinking about all the communities that still do not have access to clean drinking water, and where there is still no equality in services to indigenous peoples and other Canadians. The injustice persists. Unfortunately, it is still downplayed, because the concept of subclass has been inculcated in our society for so long that it is still alive and well. We need to end this historically unacceptable prejudice. It has to stop.
The road to reconciliation will be a long and difficult one, but we as politicians have a key role to play today. We need to act now to effect change. Six years have passed since the Truth and Reconciliation Commission presented its recommendations. We still have not done anything. The federal government is quick to make speeches and express its intentions, but is slow to take concrete action to really change the situation.
In closing, I would like once again acknowledge all the pain felt by the grieving families. In all humility, I share in it and once again offer my sincerest condolences to the Secwépemc nation as well as to all first nations people.
My political party is obviously in favour of every item in the motion. The federal government needs to immediately drop its legal case against indigenous children and apply Jordan's principle across the board.
This is a reasonable proposal with a view to reaching an amicable settlement. It is appalling that the government is spending millions of dollars in legal fees to avoid compensating the victims of St. Anne's residential school. My party is urging the government to act quickly to implement the Truth and Reconciliation Commission's calls to action 71 to 78.
As the commission indicated in its report, “assisting families to learn the fate of children who died in residential schools; locating unmarked graves; and maintaining, protecting, and commemorating residential school cemeteries are vital to healing and reconciliation.”
As the commission pointed out, it is all the more urgent to implement these calls to action because, as time passes, cemeteries are disappearing bit by bit, and the survivors who are able to testify to their experience are getting older and still have no idea of what happened to their brothers, sisters and other relatives.
The Office of the United Nations High Commissioner for Human Rights recently declared that it is essential that Canada address the issue. Obviously, the victims and survivors and their families and communities are entitled to the resources they need to help them overcome the emotional, physical, spiritual, material and cultural trauma inflicted by the residential schools.
Lastly, it is imperative that there be an appropriate and timely follow-up of the progress of the implementation of the commission's calls to action in order to ensure true justice, and to see that indigenous people are no longer discriminated against and that Joyce Echaquan obtains justice.