propose que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.
— Madame la Présidente, je me sens toujours privilégié d'être à la Chambre, et encore plus d'y être pour parler du projet de loi C-206, qui est évidemment mon projet de loi d'initiative parlementaire. En fait, je devrais plutôt dire qu'il s'agit du projet de loi des agriculteurs, car ils sont au cœur de cette mesure.
Nos agriculteurs sont extraordinaires. Ils produisent des aliments qui sont parmi les meilleurs au monde. Ils travaillent tellement fort jour après jour. Ils se lèvent tôt, se couchent tard, et accomplissent leur fantastique travail entre les deux.
Nous avons bien entendu tous été frappés par la pandémie, et les agriculteurs n'ont pas été épargnés. Ils ont persévéré malgré la pandémie. Malgré tous les défis et les obstacles dus à la pandémie, ils ont continué de faire les semailles, de s'occuper de leurs récoltes et de prendre soin de leurs animaux afin que nous puissions toujours manger à notre faim au Canada. Si, pendant la pandémie et, en fait, ces dernières années, les agriculteurs et les Canadiens n'ont jamais eu à se soucier de l'approvisionnement alimentaire, c'est bien parce que nous avons les meilleurs agriculteurs au monde.
En parlant de l'importance de l'agriculture, ce secteur représente plus de 7 % de notre PIB. De plus, les agriculteurs constituent vraiment le cœur de nos collectivités. Ils sont le moteur de notre économie. Près d'un Canadien sur huit travaille dans le domaine de l'agriculture et de l'agroalimentaire. C'est une statistique non négligeable. Voilà le genre d'incidence qu'a cette industrie. En tout, elle emploie plus de 2,3 millions de Canadiens.
Le Canada est l'un des plus importants producteurs de graines de lin, de canola, de légumineuses et de blé dur au monde. Notre bœuf, notre volaille et notre porc sont parmi les meilleurs au monde. Ces produits viennent d'ici, du meilleur pays au monde: le Canada.
Toutefois, les agriculteurs n'ont pas la tâche facile. En fait, en 2019, ils ont connu une récolte désastreuse en raison de l'humidité et des précipitations. Cette année-là les a vraiment éprouvés. À un certain moment, ils devaient faire fonctionner leurs séchoirs à grains pratiquement 24 heures sur 24 pour sauver le plus possible leurs produits.
En 2019, les pluies dans l'Ouest ne sont pas les seules intempéries auxquelles les agriculteurs ont dû faire face. Cette année-là, un ouragan a dévasté des champs au Canada atlantique. Au Québec, des champs ont reçu une quantité sans précédent de pluie pendant le temps des récoltes et des semailles. Avant cela, la neige a recouvert des champs dans l'Ouest. Au Manitoba, la situation était urgente. L'Alberta et la Saskatchewan ont dû composer avec la sécheresse.
Dans ma circonscription, Northumberland—Peterborough-Sud, qui est magnifique, et dont je pourrais dire que c'est peut-être la plus belle du monde, nous avons connu une période de gel tardive presque sans précédent. D'habitude, après le 24 mai, il n'y a plus de gel, mais il y en a eu dans ma circonscription et dans d'autres régions du Sud de l'Ontario. Les agriculteurs qui avaient fait leurs semailles à ce moment-là ont dû aussi composer avec ce problème. Comme nous pouvons le constater, le travail agricole n'est pas sans difficultés.
Il n'y a pas que les conditions météorologiques à surveiller. Les agriculteurs doivent aussi composer avec des problèmes liés au commerce international. Actuellement, divers problèmes commerciaux font en sorte que les agriculteurs canadiens ne sont pas traités convenablement et de façon équitable. Ils sont souvent les plus désavantagés au sein d'une industrie fortement subventionnée. Elle est subventionnée presque partout dans le monde, y compris dans l'Union européenne et aux États-Unis. Pendant la pandémie, l'Union européenne et les États-Unis ont appuyé leurs agriculteurs. Ils leur ont donné des millions de dollars, voire des milliards, pour les aider à traverser cette crise.
J'aimerais pouvoir dire qu'il en a été de même au Canada, mais ce n'est pas le cas. Malheureusement, le gouvernement actuel a repris sa bonne vieille habitude de faire une annonce, puis de faire échouer la politique ou le programme correspondants, avant de refaire une annonce similaire. Le gouvernement recycle continuellement les mêmes annonces qui n'ont mené à rien de concret et les agriculteurs se retrouvent le bec dans l'eau comparativement à ceux des autres pays.
En gros, c'est pour cette raison que je suis aussi passionné au sujet du projet de loi C-206. Essentiellement, il vise à donner aux agriculteurs canadiens un traitement équitable, pour qu'ils aient les mêmes possibilités que ceux des autres pays. La taxe sur le carbone canadienne ne s'applique pas ailleurs dans le monde et elle représente donc un obstacle propre aux agriculteurs canadiens.
Le projet de loi C-206 accorderait aux agriculteurs un traitement équitable et leur donnerait la possibilité d'être concurrentiels à l'échelle internationale. Que prévoit-il pour y arriver?
Actuellement, la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre comporte une exemption absolue pour certains types de carburants, comme l'essence et le diésel, mais pas le gaz naturel ou le propane. Dans l'esprit d'Équipe Canada et de la collaboration non partisane, je suis prêt à accorder au gouvernement le bénéfice du doute; peut-être s'agit-il simplement d'un oubli. Le gouvernement aurait ici l'occasion de se racheter. D'ailleurs, je l'invite à le faire.
Rien ne justifie que le gaz naturel et le propane ne soient pas exemptés, alors que l'essence et le diésel le sont. Les premiers sont des carburants plus propres que les seconds. D'ailleurs, à mon avis, le gaz naturel et le propane font plutôt partie de la solution.
Si nous convertissions par exemple toutes les centrales au charbon de la Chine en centrales au gaz propane, la réduction des gaz carboniques émis qui s'en suivrait serait beaucoup plus importante que si le Canada atteignait la carboneutralité, et donc plus utile pour l'environnement.
Le gaz naturel et le propane font partie du problème, bien qu'ils soient sans doute plus propres que les carburants fossiles équivalents bénéficiant d'une exemption, c'est-à-dire le diésel et l'essence.
Si le gaz naturel et le propane ne bénéficient pas d'une exemption, qui est pénalisé? Cette situation pénalise une grande variété d'agriculteurs, particulièrement les producteurs de grain. Comme je l'ai dit, le Canada est l'un des principaux producteurs de grain dans le monde. Les prix de ces denrées dépendent des marchés internationaux.
Le projet de loi à l'étude donnerait un répit aux producteurs de grain. L'association des sociétés et foires agricoles de la Saskatchewan, celle des sociétés et foires agricoles du Manitoba, et la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante ont chacune leurs chiffres, tout comme le directeur parlementaire du budget, mais ces chiffres font état de coûts pour les agriculteurs qui vont de milliers de dollars à des dizaines de milliers de dollars. Je les ai vus. Les gens m'ont envoyé par courriel des montagnes de reçus qui mentionnent la taxe sur le carbone et correspondent, au total, à des dizaines de milliers de dollars. Le comble, c'est que les agriculteurs doivent aussi payer de la TPS sur la taxe sur le carbone.
Quand je siégeais au comité des comptes publics, j'ai demandé au sous-ministre adjoint des Finances comment le gouvernement pouvait justifier de facturer de la TPS sur la taxe sur le carbone, une taxe déjà assez punitive par elle-même. Il a répondu que la TPS n'était pas facturée, mais il avait tort. Le gouvernement n'est même pas conscient de tous les torts qu'il cause aux agriculteurs. C'est une situation vraiment nuisible et éprouvante selon moi.
Quand nous examinons ce qui se passe, nous voyons que les agriculteurs ont à cœur, tout comme moi, de lutter contre les changements climatiques. Y aurait-il une solution plus écologique, une meilleure option que d'utiliser du gaz naturel et du propane?
Nous avons tenu de multiples audiences avec des témoins experts. À leur avis, malgré les technologies naissantes et l'idée qu'on pourra peut-être, un jour, utiliser des biocarburants ou d'autres formes d'énergie et de carburants écologiques, ces meilleures options n'existent pas pour le moment. Comme l'a dit un représentant des Grain Farmers of Ontario, « à l'heure actuelle, il n'y a pas d'autres options technologiques abordables pour le séchage des grains. Il est essentiel de sécher les grains pour les vendre ».
Ces témoins nous ont appris que les agriculteurs se soucient beaucoup de l'environnement. Pour les gens qui ne vivent peut-être pas dans un milieu agricole, comme c'est mon cas, une différence de température d'un degré peut faire la différence pour une saison. Toute une année, qu'elle soit rentable ou non, peut dépendre des gelées. Une différence d'un degré peut tout changer.
Personne n'est plus sensible aux changements environnementaux et aux préoccupations environnementales que nos agriculteurs. Les témoins l'ont répété à maintes reprises. L'impact environnemental, dont je vais parler brièvement, les touche vraiment.
Je dormais chez moi et il était 6 heures du matin. Je loue ma propriété à un agriculteur. Étant donné qu'ils travaillent considérablement plus fort que les politiciens, les agriculteurs ne sont évidemment plus au lit à 6 heures du matin. J'ai entendu frapper à la porte et je suis descendu en pyjama pour répondre. C'était l'agriculteur qui loue mon champ. Il a dit qu'un arbre était tombé et m'a demandé si j'avais une scie à chaîne. Je lui ai dit de me donner cinq minutes pour que je puisse me changer et aller chercher ma scie à chaîne. Nous sommes allés couper l'arbre. J'ai ainsi eu l'occasion d'entamer une conversation avec un agriculteur de la région, qui est un gars formidable.
Les députés se demandent peut-être de quoi nous avons parlé. Avons-nous parlé du fait que c'était l'année des Maple Leafs et qu'ils allaient certainement remporter la série? Non. Nous avons peut-être parlé du Canadien de Montréal et évoqué la possibilité que ce soit son année. Non. En fait, nous avons parlé du GPS dans son tracteur et des deux différentes options qui lui avaient été offertes. Il a sélectionné le GPS de 1 pouce au lieu de celui de 5 pouces. Il a été calibré à 1 pouce, et l'agriculteur a dit qu'il avait fait ce choix parce que cela augmentait la productivité de ses fermes et de ses champs et qu'il ne voulait pas utiliser une once de plus de produits chimiques ou d'engrais qu'il était nécessaire. Cela montre à quel point les agriculteurs canadiens se soucient de l'environnement. Je ne pense pas que la plupart des gens en soient vraiment conscients.
Bien sûr, les agriculteurs comptent parmi les premiers gardiens de nos terres, dont ils sont de grands protecteurs. Ils utilisent aussi d'autres technologies, comme la culture sans labour, l'agriculture de précision et l'agriculture par satellite. Les agriculteurs désirent bien faire les choses. Ils souhaitent faire tout en leur pouvoir pour préserver ces terres parce que, en toute franchise, leur gagne-pain et celui des générations futures en dépendent.
J'ai aussi d'excellentes nouvelles concernant les agriculteurs. Ils ont une bonne longueur d'avance sur tout le monde. Ce qu'on entend de la majorité des autres industries, même de l'industrie pétrolière et du gouvernement, c'est qu'il faut atteindre la carboneutralité d'ici 2050, ou 2060 ou 2040, ou, si on est vraiment ambitieux, d'ici 2030. Certes, il s'agit d'un objectif louable auquel toutes les industries doivent aspirer, mais pourquoi ne pas atteindre la carboneutralité dès maintenant? Les agriculteurs ont réussi à le faire. Ils sont carboneutres maintenant. Ils plantent des millions de petits appareils formidables qui captent le carbone, que j'appelle affectueusement des « plantes ». Les agriculteurs plantent des millions d'appareils de la sorte chaque année, et ils séquestrent le carbone. C'est incroyable. Il s'agit d'une avancée scientifique remarquable. Le carbone est séquestré dans les champs. J'en conviens, les agriculteurs utilisent des combustibles fossiles pour faire fonctionner leurs tracteurs, pour sécher le grain ou pour chauffer leurs granges, mais dans l'ensemble, ils ont à tout le moins atteint la carboneutralité, et ils cherchent même à faire davantage.
C'est un sujet qui me passionne vraiment. J'espère au moins avoir le temps de terminer la moitié de mon discours. Je pourrais parler de ce projet de loi d'initiative parlementaire toute la journée.
Quand on regarde la situation dans son ensemble, on constate que les agriculteurs veulent faire la bonne chose. On constate que les Canadiens veulent faire la bonne chose et protéger l'environnement, mais il faut aussi respecter le gros bon sens économique. Premièrement, il faut faire en sorte que les agriculteurs demeurent concurrentiels sur les marchés mondiaux, et qu'on ne leur impose pas un fardeau indu, contrairement à d'autres industries et pays dans le monde. Deuxièmement, les agriculteurs veulent faire la bonne chose. Le défi tient au fait que l'agriculture a toujours été un secteur sous-financé de notre économie — et c'est plus vrai que jamais aujourd'hui. L'une des personnes qui a témoigné devant le comité de l'agriculture a déclaré que si elle avait assez d'argent, elle se procurerait dès demain de l'équipement à haute efficacité pour son exploitation céréalière. Cette personne n'a tout simplement pas le capital nécessaire. La situation financière des agriculteurs est plus précaire que jamais, voilà pourquoi.
Le but de la taxe sur le carbone est d'augmenter le coût des solutions les plus néfastes pour l'environnement afin de privilégier spontanément, dans un système de libre marché, les solutions plus respectueuses de l'environnement. Cependant, dans cette situation, l'inverse est aussi vrai. En effet, les agriculteurs veulent choisir les options qui sont les plus écologiquement responsables. Les députés peuvent me croire sur parole parce que j'ai parlé aux agriculteurs de ma circonscription samedi matin. Ils veulent privilégier les solutions écologiques, mais ils n'en ont pas les moyens financiers. Par conséquent, quand on alourdit leur fardeau financier — cela peut représenter de dizaines de milliers de dollars —, ils n'ont pas d'argent à investir.
Les agriculteurs veulent faire la bonne chose. Nous voulons tous faire la bonne chose. Nous devons tous collaborer. Votons pour l'adoption du projet de loi d'initiative parlementaire C-206.