Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais remercier chaleureusement l'ensemble de mes collègues autour de la table qui me permettent de formuler cette demande.
D'abord, je vais vous donner un peu de contexte. Nous ne voulions pas en arriver à cette demande, mais, en cheminant dans le dossier lié à l'exercice de la pêche au capelan dans notre coin de pays, nous constatons que la pêche à la fascine n'a pas eu la chance d'être bien intégrée dans la réflexion du ministère, de la ministre et de ses fonctionnaires. La pêche à la fascine est un legs des Autochtones et elle fait partie du patrimoine immatériel. Il n'y a que deux pêcheurs qui pratiquent cette technique de pêche dans tout l'Est du pays. Les Premières Nations ont cette science d'aller puiser dans la ressource sans l'altérer, de sorte qu'il s'agit là d'une pêche inoffensive pour la ressource. Nous avons déposé des avis scientifiques, nous avons demandé que les pêcheurs soient consultés et nous avons fait des représentations auprès de la ministre et de ses fonctionnaires. Vous avez été témoins des questions que j'ai posées à cet égard à ce comité lorsque j'en ai eu l'occasion.
Je vais vous présenter les faits et vous expliquer la situation pour que vous la compreniez bien. La pêche à la fascine se fait sur le bord de la rive du Saint‑Laurent. On pratique cette technique de pêche à Saint‑Irénée, dans Charlevoix, et à l'Isle‑aux‑Coudres, l'île où je suis née. On utilise un grillage en forme de « L » qui s'avance vers l'eau, qui part donc de la berge et qui s'avance doucement dans le fleuve. Dès que les glaces disparaissent, le capelan vient frayer dans le Saint‑Laurent à la marée montante. Après que les mâles ont frayé, ils perdent la vie sur la rive. Plutôt que de les laisser sécher sur la rive, les pêcheurs les recueillent. De toute façon, les poissons meurent après avoir assuré leur progéniture.
Cette pêche est très populaire dans notre secteur. Tout le monde attend sa platée de capelan. Quand le premier capelan roule sur les berges du Saint‑Laurent, c'est la fête au village, c'est le printemps qui s'annonce. Tout le monde mange du capelan. Ce n'est pas compliqué, personne ne se demande ce qu'il y aura au menu pour le souper, ce sera du capelan.
Maintenant, je vais vous parler du problème. Chaque jour compte pour les pêcheurs. L'année passée, parce que l'on avait établi que l'ouverture de la pêche se ferait le 1er mai, une date qui était inadéquate, ils ont perdu plus de 50 % de leur pêche. C'est pourquoi nous faisons des représentations depuis un an dans le but d'ouvrir cette pêche plus tôt.
Compte tenu des changements climatiques et des saisons qui s'allongent ou qui se raccourcissent, les pêcheurs souhaitent pouvoir pêcher quand le capelan arrive. Chaque jour compte, parce que le capelan est pêché en petites quantités, puisque l'on doit le transformer frais. On ne peut pas dire que ce n'est pas grave et que l'on pêchera trois tonnes de plus la semaine suivante. Cela ne fonctionne pas comme cela. On en pêche de petites quantités chaque jour. C'est ce qu'il est important de faire comprendre à la ministre et aux fonctionnaires. La ressource de Charlevoix et du Saint‑Laurent n'a rien à voir avec la ressource de Terre‑Neuve‑et‑Labrador. Les pêcheurs dont nous parlons pêchent de 0,35 % à 0,5 % du quota total qui est alloué à ce type de pêche. Alors, chaque jour compte.
Les pêcheurs sont prêts à pêcher. Ils n'attendent que le signal de la ministre, qui pourrait, à tous égards, offrir un moratoire et leur permettre de pêcher plus tôt que le 1er mai. Ils aimeraient être invités à la table de consultation pour bien faire comprendre la situation et, au terme du processus de consultation, que la date d'ouverture de cette pêche soit révisée.
J'espère que je me suis bien fait comprendre et que le gros bon sens de cette demande prendra toute la place dans vos considérations.
Je suis consciente que je vous demande d'être présents, idéalement de manière virtuelle, parce que ce sont des semaines très chargées dans nos circonscriptions et auxquelles nous tenons beaucoup. Je suis consciente de tout cela, mais, en même temps, je ne peux pas me coucher le soir et fermer les yeux en me disant que je n'ai pas tout fait pour sauver ce patrimoine immatériel, ce legs autochtone dont l'activité précieuse pour l'ensemble de la population charlevoisienne ne demande que le gros bon sens pour pouvoir être exercée. C'est un emblème pour tout le Québec et, j'en suis certaine maintenant que vous le connaissez mieux, pour chacun et chacune d'entre vous.
À cet égard, j'invite l'assemblée ici présente à tenir compte de ma demande, et aussi du fait que ce que je vous demande, à vous ainsi qu'à la ministre, est conforme à la lettre de mandat de cette dernière, soit assurer une pêche responsable et une consommation locale, prendre soin des ressources naturelles et ne pas les altérer.
À cette fin et conformément au paragraphe 106(4) du Règlement, je soumets la motion suivante au Comité:Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité invite à témoigner Madame Joyce Murray, la Ministre des pêches et des océans accompagnée de ses fonctionnaires, ce, pour une rencontre de (2) deux heures, tenue au plus tard le 13 avril 2022 afin d'informer le Comité des démarches entreprises par le ministère sur cet enjeu depuis le printemps 2021 et des démarches qui seront entreprises par la ministre, ainsi que le délai envisagé pour corriger la situation en tenant compte des particularités de la pêche à la fascine dans la région de Charlevoix au Québec, et à Terre‑Neuve‑et‑Labrador.
Je vous remercie de votre attention.