Madame la Présidente, j'amorce ce débat le cœur un peu lourd, car c'est une question qui m'est particulièrement chère, et je tiens à répéter ce que je viens d'entendre.
Je viens d'entendre le député de Calgary Skyview militer contre les emplois dans sa propre circonscription, à l'aéroport de Calgary, des emplois liés au transport de chevaux. Il s'agit d'un projet de loi du député de Kitchener—Conestoga.
Il semble que ce soit l'enjeu le plus pressant dans Kitchener—Conestoga. Ce n'est pas l'abordabilité. Ce n'est pas un autre enjeu, comme les garderies, la criminalité ou la violence dans nos collectivités et nos rues, ou le recours aux banques alimentaires; l'enjeu le plus pressant dans Kitchener—Conestoga est apparemment ce que font certains Métis en Alberta et quelques agriculteurs au Manitoba, en Alberta et au Québec, en ce qui concerne les chevaux.
C'est un créneau, je l'admets volontiers, et mes concitoyens l'admettent aussi, mais c'est un enjeu important. Je fais évidemment allusion à l'idée de cibler les chevaux destinés à l'exportation par les agriculteurs. Essentiellement, le gouvernement et ses acolytes au Sénat ont lancé une double attaque. La première est le projet de loi C‑355, dont nous débattons aujourd'hui, et la deuxième est le projet de loi S‑270. Ces deux projets de loi interdiraient l'exportation de chevaux vivants du Canada aux fins d'abattage. La principale différence entre les deux est que le projet de loi C‑355 limiterait cette exportation par voie aérienne uniquement, alors que le projet de loi du Sénat le ferait de façon plus générale.
Comme on ne parle pas souvent de cette question dans le domaine public, sauf dans le cadre de campagnes de désinformation, j'aimerais commencer mon discours d'aujourd'hui par quelques statistiques et quelques renseignements clés sur cette industrie importante.
L'année dernière, soit en 2022, il n'y avait que 347 éleveurs au Canada qui ont exporté des animaux, et ils en ont exporté au total 2 600 en vue de leur abattage. Pour la gouverne de mon collègue de Calgary Skyview, qui vient de prendre la parole et qui a dit que nous en avons déjà exporté 7 000, c'est parce que nous avions auparavant des écuries pour la collecte d’urine de juments gravides, un biotique utilisé pour la fabrication de contraceptifs, et que, pour cette raison, nous produisions beaucoup plus de chevaux. À mesure que nous avons remplacé cette urine par des produits thérapeutiques, le nombre de chevaux a diminué.
Cependant, nous avons encore besoin d'un marché pour ces animaux, mais le député ne le sait pas. Je ne pense pas qu'il y ait beaucoup d'éleveurs de chevaux dans Calgary Skyview, ce qui est fort bien. Je trouve toujours très amusant d'entendre mes collègues libéraux des régions urbaines parler d'agriculture et de constater à quel point ils n'y connaissent manifestement rien. À ce nombre s'ajoutent 10 840 autres chevaux vivants qui sont également exportés, mais pas pour l'abattage. Essentiellement, le ratio de chevaux exportés à des fins autres que l'abattage est de cinq pour un, mais qui peut savoir quels sont les motifs de l'acheteur d'un cheval lorsqu'il est acheté au Canada, puis expédié à bord d'un avion?
Bien que la répartition de cette industrie, comme je l'ai dit, s'étende à tout le pays, le plus grand nombre de ces animaux provient de ma province, l'Alberta, ainsi que de l'Ontario et du Manitoba. Il convient de noter que 25 % de ces chevaux proviennent de troupeaux appartenant à des Autochtones. Je me souviens de l'époque où le gouvernement disait qu'il n'y avait pas de relation plus importante pour lui que sa relation avec les Premières Nations; eh bien, un quart de cette industrie est une source de revenus et de stabilité pour la viabilité économique des Premières Nations, principalement les Métis de l'Alberta.
Le Canada consomme chaque année entre 1 000 et 1 200 tonnes de viande chevaline. Il s'agit principalement du Québec, la belle province. En outre, plus d'un milliard de personnes — 16 % de la population mondiale, soit près de 2 personnes sur 10 — consomment de la viande chevaline, ce qui signifie que près de 20 % des êtres humains de la planète consomment du cheval. C'est un chiffre stupéfiant, mais, apparemment, il ne suffit pas à ceux qui ne connaissent pas l'industrie, qui ne savent rien de l'élevage et qui n'ont jamais représenté quiconque dans le secteur agricole, et ils vont tout simplement mettre un terme à cette industrie.
C'est aussi une viande très saine, avec 20 % plus de protéines que le bœuf, 25 % de matières grasses en moins, 20 % de sodium en moins et deux fois plus de fer qu'une surlonge de bœuf. Je ne comprends donc pas pourquoi mes collègues d'en face protestent autant.
Maintenant que nous avons une idée de ce à quoi ressemble cette industrie dans notre pays, j'aimerais continuer à parler de ce que les libéraux proposent de faire avec le projet de loi C‑355. Ce n'est rien de moins que honteux. Le projet de loi exigerait qu'un processus réglementaire déraisonnable soit entrepris avant qu'un vol ne soit autorisé à partir avec un cheval à bord. Ce processus inclut notamment une déclaration signée, qui doit être approuvée par le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, attestant que les chevaux ne sont pas exportés à des fins d'abattage.
Les députés peuvent-ils croire une chose pareille? Les pilotes disposent d'environ cinq minutes lorsque l'avion est repoussé de la porte d'embarquement pour obtenir leur documentation, faire signer tous les documents, faire reculer l'avion et décoller.
Il faudrait que les pilotes obtiennent une lettre d'approbation du ministre de l'Agriculture juste avant que l'avion ne quitte la porte d'embarquement. Ce serait assurément de la haute voltige administrative. La déclaration devrait être remise aux pilotes de l'avion et à l'agent supérieur des douanes de l'aéroport. En cas de contravention, les conséquences seraient dévastatrices. Dans les pires cas, il pourrait s'agir d'une amende pouvant atteindre un quart de million de dollars, d'une peine d'emprisonnement ne dépassant pas deux ans, ou des deux.
Les conséquences sont moindres pour ceux qui contreviennent à une ordonnance d'interdiction de possession d'arme à feu au Canada. C'est ainsi que les gens d'en face réfléchissent aux questions de ce genre. Apparemment, il n'y a rien de plus dommageable au Canada qu'un agriculteur.
Ce n'est pas que de la spéculation de ma part. La section canadienne de l'Association des pilotes de ligne internationale a exprimé des préoccupations. Elle représente 95 % des pilotes syndiqués travaillant pour 21 compagnies aériennes.
Ce projet de loi aurait comme conséquence d'empêcher le transport aérien des chevaux vers le Canada et hors du Canada pour quelque raison que ce soit. En plus d'imposer un fardeau démesuré aux pilotes et aux exportateurs — puisque ceux-ci ne peuvent pas toujours savoir avec certitude quelle sera l'utilisation finale des chevaux transportés —, il les dissuaderait d'accepter de transporter des chevaux vivants en raison des amendes exagérément punitives.
Comme je l’ai déjà mentionné, le Canada exporte quelque 10 840 chevaux vivants à des fins autres que l’abattage. Par inadvertance, ce projet de loi nuirait aussi à ces éleveurs, car ils auraient plus de mal à trouver des transporteurs aériens qui accepteraient leurs cargaisons.
Cela pourrait, par exemple, entraîner des retards pour ceux qui doivent faire transporter des chevaux participant à des compétitions olympiques ou d’autres compétitions équestres, ou encore des chevaux vendus pour leurs caractéristiques génétiques et utilisés aux fins d’élevage à l’étranger.
Pour ces personnes, ces retards pourraient compromettre leur participation à des compétitions et les empêcher de représenter leur pays sur la scène internationale. Nous perdrions des événements comme le Spruce Meadows et les concours de saut d’obstacles. Il nous serait même difficile de poser notre candidature comme pays hôte des Jeux olympiques, car les athlètes voudraient amener leur cheval ici et le ramener avec eux. Or, les libéraux estiment que cela devrait être impossible au Canada.
J’ajouterai que ce projet de loi ne concerne pas uniquement l’exportation de chevaux. Il s’inscrit dans le problème plus vaste de l’offensive généralisée menée contre les agriculteurs canadiens, déjà accablés par la coûteuse taxe sur le carbone et une réglementation excessive.
Ce mépris pour les agriculteurs s’est encore manifesté récemment, quand les sénateurs indépendants issus des rangs libéraux ont bloqué l’adoption du projet de loi C-234 au Sénat. Lorsqu’ils l’ont finalement adopté, c'était après l'avoir amendé jusqu’à neutraliser son impact. Au lieu de combler le fossé entre les régions urbaines et rurales, le gouvernement continue de le creuser.
Ce débat me touche directement. L'industrie de l'exportation des chevaux occupe une place importante dans Red Deer—Lacombe. Pour preuve, certains commentaires que j'ai reçus de mes concitoyens et de certains intervenants. Comme on peut l'imaginer, dans une circonscription diversifiée et rurale comme la mienne, les répercussions d'une telle mesure législative peuvent prendre une ampleur remarquable. Je pense, entre autres, à une collectivité métisse de l'Alberta.
Je vous cite un extrait d'une déclaration plus générale que ces Métis nous ont adressé: « Il n'y a eu aucune consultation avec les producteurs autochtones et la population à propos du plan visant à interdire l'exportation de chevaux vivants. Historiquement, le gouvernement du Canada ne cesse d'enfreindre les droits des agriculteurs autochtones. »
La Constitution prévoit l'obligation de consulter, mais le gouvernement du Canada ne l'a pas fait dans le cas de ce projet de loi. Je tiens également à souligner que la justification de ce projet de loi, fondée sur une soi-disant volonté de protéger le bien-être des animaux, repose exclusivement sur de la mésinformation et des faussetés.
C'est particulièrement vrai en ce qui concerne les allégations de mauvais traitements et de cruauté envers ces animaux pendant leur transport. Je tiens à dire aux députés que j'ai grandi sur une ferme. À la ferme, les animaux sont ce qu'il y a de plus précieux. Ils font partie de l'entreprise. Les exploitants agricoles doivent les traiter correctement et avec respect parce que leur entreprise et leur gagne-pain dépendent de la santé et de la viabilité de leurs animaux.
Plus de 41 000 chevaux ont été exportés depuis 2013. Le taux de mortalité à toutes les étapes du transport, pas seulement à bord de l'avion, est de 0,012 %. Bref, c'est statistiquement négligeable. Je tiens à souligner qu'aucun décès lié au transport de ces animaux n'a eu lieu depuis 2014.
Il y a des mesures de surveillance vétérinaire. Il y a des règles très strictes en matière de transport des animaux. Il s'agit manifestement d'une campagne menée par des gens mal informés qui veulent simplement faire appel aux sentiments pour tenter de faire disparaître une industrie qu'ils désapprouvent d'un point de vue idéologique.
C'est extrêmement décourageant, non seulement pour les gens de ma circonscription, mais pour tous les agriculteurs. On s'aventure ici en terrain glissant. J'exhorte tous mes collègues de la Chambre à voter contre ce projet de loi.