Madame la Présidente, c’est un honneur pour moi de prendre la parole à la Chambre aujourd’hui. Je vais partager mon temps de parole avec la secrétaire parlementaire et députée d’Oakville Nord—Burlington. J’ai hâte d’entendre ses commentaires.
Le projet de loi C‑21 marque vraiment une étape importante pour le Canada. Nous voulons utiliser cette mesure législative, entre autres, pour éliminer la violence armée au Canada. Si elle est adoptée, ce sera la plus importante réforme des lois canadiennes sur les armes à feu depuis une génération.
J’aimerais d’abord remercier les intervenants qui ont contribué à la préparation de ce projet de loi, en particulier ceux de ma circonscription, Guelph, dont les commentaires judicieux se reflètent dans les mesures proposées dans le projet de loi. Nous continuons d’échanger avec eux.
Même si les consultations avaient en grande partie été menées relativement à des projets de loi antérieurs, je suis très heureux de constater que ces commentaires sont intégrés depuis mars 2021, quand l’ancien ministre de la Sécurité publique a consulté les services de police de la région de Guelph, les élus municipaux et les organismes de Guelph voués à la lutte contre la violence armée. Tous craignaient que les propositions antérieures laissent les administrations municipales libres d’appliquer ou de ne pas appliquer les mesures de contrôle des armes à feu, ce qui aurait créé un ensemble disparate de règlements à l’échelle du pays, ce qui n’aurait pas été aussi efficace que le projet de loi dont nous sommes saisis ce matin. Ce projet de loi règle le problème et, s’il est adopté, il rendra illégaux l’achat et la vente d’armes de poing n’importe où au Canada.
Dans le contexte actuel, cette mesure est extrêmement importante pour les résidants de ma circonscription parce que durant de nombreuses années, Guelph a été considérée comme l’endroit le plus sûr au Canada. Bien qu’elle compte encore parmi les villes plus sûres, Guelph a connu une hausse de la violence armée qui inquiète tous ses habitants. Selon les données du Service de police de Guelph, les crimes commis avec des armes à feu ont plus que doublé sur son territoire depuis 2020. Huit accusations ont été portées pour utilisation d’armes à feu lors de la perpétration d’un crime, ce qui représente une hausse par rapport aux trois accusations portées l’année précédente.
Ce n’est pas l’orientation que nous voulons prendre, et même si le gouvernement a fourni plus de ressources à l’Agence des services frontaliers du Canada et à d’autres organismes pour prévenir les crimes commis avec des armes à feu, la réalité, c’est que nous devons d’abord empêcher la vente d’armes de poing. Un seul crime commis avec une arme à feu qui aurait pu être évité est un crime de trop. Des députés d’en face ont dit que le trafic illégal d’armes à feu est préoccupant. C’est une préoccupation, mais nous pouvons aujourd’hui nous attaquer au problème des armes à feu dans notre collectivité en veillant à assurer la légalité du mouvement de ces armes.
C’est important, surtout quand on considère les données que nous fournissent les chercheurs de l’Observatoire canadien du féminicide pour la justice et la responsabilisation, à l’Université de Guelph. Elles montrent que près de 6 femmes sur 10 sont assassinées par leur conjoint ou leur ex-conjoint, et que seulement 6 % de ces femmes sont tuées par un étranger. Un peu plus du tiers du nombre total de féminicides sont commis par un agresseur armé d’une arme à feu, plus que par tout autre moyen, tandis que la probabilité qu’une femme soit tuée au moyen d’une arme à feu grimpe à 42 % pour les femmes vivant dans les régions rurales.
Ce projet de loi semble s’attaquer à cette réalité alarmante. Il permettrait aux autorités de révoquer un permis d’armes à feu en cas de violence familiale ou de harcèlement criminel lorsqu’une ordonnance de protection a été émise contre un titulaire de permis ou lorsqu’une ordonnance de signalement est émise. Je suis encouragé de voir que les auteurs des modifications visant à protéger l’identité de la personne qui invoque devant un tribunal le mécanisme de l'ordonnance de signalement ont tenu compte des avis des organismes représentant les femmes et les survivantes. Ce n’est là qu’un exemple de rétroaction des collectivités touchées par la violence liée aux armes à feu ayant été intégrée dans ce projet de loi.
De même, ce projet de loi vise à mieux protéger les Canadiens qui vivent des crises de santé mentale. Plus de 80 % des morts par armes à feu sont des suicides, une réalité déchirante. Les répercussions se font sentir non seulement sur les disparus, mais aussi sur leurs familles et sur des collectivités entières. En fait, encore la semaine dernière, j’ai rencontré un ancien combattant de la guerre en Afghanistan, et il m’a parlé du grand nombre de ses camarades qui se sont suicidés depuis leur retour de la guerre. Ces suicides sont commis au moyen d’armes à feu.
L’un des aspects les plus déchirants de cette situation nous frappe quand nous parlons aux familles de personnes qui ont vécu cette perte. Elles nous rappellent que ces drames auraient pu être évités si les armes à feu avaient été retirées de l’équation. Ce sont pourtant des armes à feu achetées légalement.
Grâce à ce projet de loi, la possibilité de faire un signalement accroîtrait les chances qu’une telle tragédie puisse être évitée. Comme dans d’autres cas où c'est justifié, un contrôleur des armes à feu pourrait suspendre le permis d’une personne pour une période maximale de 30 jours si un membre du public, comme un membre de la famille ou un voisin, communique avec le contrôleur des armes à feu pour lui signaler un titulaire de permis qui est à risque. Cela permettrait à une personne de se rétablir ou de se faire traiter sans avoir la possibilité d’acheter ou d’acquérir des armes à feu.
L’urgence de ce projet de loi est évidente, mais depuis que le gouvernement a annoncé son intention d’adopter le projet de loi C-21, nous avons malheureusement constaté une augmentation du nombre de ventes d’armes de poing au pays. En instaurant des règlements supplémentaires, le gouvernement prévient une augmentation des achats d’armes de poing d’ici à ce qu’il soit adopté, ce qui est la bonne approche pour s’assurer que le projet de loi ne vise pas une cible en mouvement.
Ce projet de loi repose sur une prémisse et sur un raisonnement solides. Il reconnaît que les armes de poing sont l’arme de prédilection des criminels et que l’interdiction de leur vente accroît la sécurité de la population. Non seulement la fréquence des crimes commis avec une arme à feu augmente à Guelph, comme je l’ai mentionné, mais depuis 2009, les crimes violents commis avec une arme à feu ont augmenté de 81 %. De plus, 47 % des Canadiens affirment que la violence commise avec une arme à feu constitue une grande menace dans leur collectivité.
Il suffit de regarder ce qui se passe de l’autre côté de la frontière pour constater que, si nous continuons dans la même voie, la situation ne fera qu’empirer, et il deviendra beaucoup plus difficile de la corriger. Nous devons tirer des leçons de ce que nous observons au Canada ainsi que du nombre de crimes commis avec des armes à feu dans d’autres pays. Nous ne pouvons pas balayer du revers de la main les fusillades de masse en prétendant qu’elles ne se produisent habituellement pas au Canada. Nous devons agir tout de suite, et ce projet de loi adopte une approche sensée pour réaliser l’ambitieux objectif de réduire la violence liée aux armes à feu tout en respectant les propriétaires d’armes à feu qui se conforment aux lois, comme les agriculteurs.
Il est vraiment malheureux que certains collègues ici aient tenté à plusieurs reprises, quoique sans succès, de prétendre que ce projet de loi peut cibler les propriétaires d’armes à feu respectueux des lois. Ce n’est tout simplement pas le cas. Ce projet de loi ne vise aucunement les propriétaires légitimes d’armes à feu. En fait, son seul but est de créer des collectivités plus sûres pour tous les Canadiens. Ce projet de loi ne causera aucun préjudice indu aux propriétaires d’armes à feu qui respectent la loi. De toute évidence, ils n’utilisent pas une arme de poing pour lutter contre les ravageurs ou pour tirer un chevreuil.
Je vais maintenant répondre à la préoccupation soulevée par certains collègues au sujet de la source des armes de poing utilisées pour commettre des crimes au Canada. Certains ont affirmé que, de toute façon, les armes de poing ne sont jamais obtenues légalement. En réalité, la majorité des crimes commis avec des armes à feu en 2020 impliquaient des armes obtenues légalement et provenant du Canada. Nous pouvons retracer plus du 50 % de ces armes.
Pour lutter contre les crimes commis avec des armes de poing obtenues à l’étranger, le gouvernement a investi 350 millions de dollars afin de renforcer la capacité de la GRC et de l’ASFC à intercepter les armes qui traversent nos frontières. Nous savons que cette initiative s’est avérée efficace. En fait, l’an dernier, la GRC et les services frontaliers ont intercepté près de deux fois plus d’armes à feu que l’année précédente.
Nous allons dans la bonne direction. Nous sommes plus sévères envers ceux qui font la contrebande d'armes à feu en faisant passer la peine maximale d’emprisonnement de 10 à 14 ans. Nous envisageons d'investir davantage dans la lutte contre les armes à feu et les gangs grâce au Fonds pour des collectivités plus sûres. Les dispositions contenues dans le projet de loi C‑21 renforcent notre travail dans le domaine de la santé mentale et du contrôle de l'accès aux produits pouvant être préjudiciables aux Canadiens.
Je suis prêt à répondre aux questions.