Monsieur le Président, tout d’abord, j’aimerais vous dire que je vais partager mon temps de parole avec l’honorable députée de Repentigny.
Si j’avais un titre à donner à mon intervention, ce serait « autopsie d’un échec ». Retournons en arrière, avant de parler du discours du Trône. Retournons à la situation du printemps dernier. Je rappelle qu’au printemps dernier, on était en pandémie. De l’autre côté, il y avait un député. Je le dis souvent, parce que je n’en reviens pas. Il y avait le député de Kingston et les Îles. Tous les autres députés du Parti libéral étaient dans le sous-sol ou à peu près. Ils avaient peur de la pandémie. Ils tremblaient au‑dessous du bureau. Une fois, de temps en temps, le premier ministre venait faire un tour. Je me rappelle que, quand on le voyait arriver, on faisait le saut. On s'étonnait de voir qu'il y avait d’autres libéraux dans ce parti-là. Il arrivait de temps en temps et il répondait aux questions.
Puis, la situation s’améliore. Au Québec, on commence à se déconfiner. On se dit qu'à un moment donné ils finiraient par comprendre le bon sens. On en parle à leur leader et à leur whip. Ils disent qu’ils ne peuvent pas venir à la Chambre, que c’est épouvantable, que c'est encore la pandémie, qu’ils sont encore cachés sous leurs bureaux dans les sous-sols. Ils disent qu’ils ne peuvent pas faire cela, qu'en plus la lumière est dangereuse pour les yeux, qu’il faut qu’ils s’adaptent.
Cela n’avait pas de sens. C’était la situation des libéraux. Ils avaient peur de la pandémie.
On dit bien des choses, mais le premier ministre est un homme très bon pour convaincre les gens. Il a convaincu ces gens qu’il était temps de déclencher des élections. Même si on était dans une quatrième vague de la pandémie, il les a convaincus que l’heure était arrivée. Même si c’était à peine deux ans après les élections précédentes, l’heure était à la rencontre des citoyens. Il fallait déclencher des élections, l’heure était grave, il y avait urgence dans la demeure.
Au bout du compte, tour à tour, les députés du Parti libéral ont été appâtés par les élections. Ils se disaient qu’ils allaient se promener, rencontrer les gens, serrer des mains. Un peu plus, ils faisaient des pyramides humaines. Ils étaient contents, ils étaient enfin sortis.
Ils disent alors aux gens qu’ils déclenchent des élections et qu'il faudra aller faire la ligne pour aller voter. On est dans la quatrième vague de la pandémie, mais que ce n’est pas grave. Ils disent qu’ils ne peuvent pas faire rouler le Parlement à cause de leur situation minoritaire, que ça ne va pas bien et que l’opposition n’a pas de bon sens. Ils ont tous dit cela.
Je suis leader du Bloc québécois à la Chambre depuis 2019 et je me rappelle que tout allait bien. L’opposition apportait sa contribution. Il y avait des discussions, et c'est tant mieux. Les projets de loi étaient améliorés parce nous travaillions tous ensemble. Moi, je dirais que le principal problème durant cette période était plus le manque d’organisation du gouvernement libéral dans l’élaboration de sa stratégie parlementaire et de son calendrier législatif que l’opposition des partis de l’opposition.
Il y avait des projets de loi sur la table et le travail avançait bien. Le projet de loi C‑10 s’est rendu jusqu’au Sénat. Au Québec, on attendait depuis des années que les géants du Web contribuent au secteur de la culture. Le projet de loi est mort au Sénat à cause de l’élection. Le projet de loi C‑216 faisait en sorte que la gestion de l’offre soit protégée contre les futures ententes commerciales. C’était en chemin, tout allait bien. Le projet de loi C‑6 sur les thérapies de conversion était presque réglé. Les libéraux reviennent sur cela maintenant avec un autre projet de loi.
Le projet de loi qui prévoyait que les retraités soient les premiers créanciers quand une compagnie fait faillite avançait bien aussi. Celui qui faisait en sorte qu’une personne souffrant d’une maladie grave ait droit à l’assurance-emploi pendant 50 semaines avançait. C’est quelque chose d’évident, c’est normal, mais ils ont décidé de détruire tout cela et de déclencher des élections, car l'heure était grave.
Le premier ministre a regardé les gens dans les yeux et leur a dit que c’était urgent, que le gouvernement avait besoin de leur opinion parce que la suite des choses serait épouvantable. Les gens ont voté, et les mêmes députés sont presque tous revenus, excepté quelques changements.
La population a dit d’arrêter les niaiseries, d’arrêter les élections et de retourner au travail. Elle a dit de retourner au travail, puisqu’on est en pandémie. C’est cela qu’elle leur a dit. La population leur a dit d’arrêter les niaiseries et de retourner au Parlement.
Là, ils reviennent au Parlement. Ils voulaient un gouvernement majoritaire, mais finalement cela a fait patate. Ensuite, ils disent qu’il faut prendre le taureau par les cornes, que c’est extrêmement important, que c’est urgent.
Nous avons niaisé deux mois. Nous avons attendu qu’on rappelle le Parlement pendant deux mois. Nos vêtements n’étaient plus à la mode quand nous sommes revenus ici.
Ils sont revenus en disant que le discours du Trône serait aussi spectaculaire qu’un kangourou sur un trampoline et qu’il fallait attendre de voir cela. Les gens se disaient que cela allait être extraordinaire, que ce serait le moment de la décennie.
Pourtant, on lit le texte et il n'y a rien là-dedans. Les gens du gouvernement devraient être gênés d'avoir accouché d'une souris. Ce n'est même pas une souris, c'est une puce, et il faut prendre un microscope pour voir ce qu'il y a dedans. On lit et on lit, mais il ne se passe rien.
Nous avons cependant fini par trouver quelque chose. Nous avons découvert que ce gouvernement n'aime pas ses champs de compétence, mais qu'il aime tripoter ceux des provinces. Le gouvernement s'est demandé ce qu'il pourrait bien faire pour mettre les pieds dans les champs de compétence des provinces et du Québec. Quelqu'un de plus intelligent que les autres a dit que si le gouvernement se mettait les pieds dans la santé, les provinces et le Québec feraient le saut.
Le gouvernement parle de la santé, mais ce n'est pas pour dire que ça fait plus de 20 ans que les provinces sont sous-financées dans le domaine de la santé parce que ça fait plus de 20 ans que le gouvernement fédéral les asphyxie. Le gouvernement fédéral dit qu'il va arrêter de donner de l'argent aux provinces comme elles le méritent et qu'il va les asphyxier bien tranquillement. À un moment donné, par contre, ça va péter de partout. C'est ce moment-là que le gouvernement fédéral choisira pour dire que les provinces ne savent pas gérer la santé et qu'il y a plein de problèmes dans ce domaine.
Pourtant, ça fait 20 ans que le gouvernement fédéral asphyxie les provinces et le Québec dans le domaine de la santé. Ce n'est pas compliqué, il faudra lui dire d'augmenter les paiements comme il devrait le faire, de faire passer les transferts à 35 % des coûts pour tout le monde au Canada et au Québec. Ce pourcentage est unanime, sauf pour le gouvernement fédéral, qui ne le comprend pas. Le gouvernement fédéral se dit donc qu'il va déclarer que les provinces ne font pas leur travail comme il faut, ce qui lui permettra de s'ingérer dans leurs champs de compétence.
Le gouvernement fédéral est solide et il n'aime pas ses champs de compétence. La crise ferroviaire relevait de sa compétence, mais il a laissé les provinces s'arranger avec ce dossier. Pour les armes à feu, il dit qu'il laisse la Ville de Montréal et le Québec gérer cette question. Quand quelque chose relève de sa compétence, il n'en veut pas, mais il ira tripoter les champs de compétence du Québec et des provinces. Si le premier ministre avait voulu diriger le gouvernement d'une province, il n'avait qu'à se présenter en Colombie‑Britannique. Cependant, il est premier ministre du Canada.
Le gouvernement fédéral s'est dit qu'il allait en faire une bonne en annonçant qu'il a besoin d'un ministre délégué à la santé mentale, un domaine qui relève pourtant du Québec et des provinces. Cependant, le gouvernement fédéral s'est dit que ce n'était pas grave et que ce serait drôle. Il l'a fait.
Ce matin, malgré que j'étais bien assis, je suis tombé en bas de ma chaise quand le chef de l'opposition officielle a dit que c'était une bonne idée d'avoir un ministre délégué à la santé mentale. Depuis des années, en effet, les conservateurs disent de ne pas vouloir toucher aux champs de compétence des provinces et du Québec. Pourtant, ce matin, le chef de l'opposition officielle s'est dit déçu et a voulu la chicane. Or, on ne peut pas à la fois respecter les champs de compétence des provinces en laissant ces dernières tranquilles et être en faveur d'un ministre délégué à la santé mentale. Cela ne fonctionne pas, mais c'est ce que les conservateurs ont fait et ils trouvent cela amusant. Ensuite, ils reviennent en disant que c'est parce que le gouvernement n'est pas bon. Je dis que l'origine du problème n'est pas que le gouvernement n'est pas bon, c'est qu'il ne fait pas son travail fondamental.
Les Québécois envoient la moitié de leurs impôts à Ottawa dans le but de se faire soigner, en pleine pandémie qui exacerbe le problème. Ce que le Québec et les Québécois veulent, c'est que l'argent qu'ils envoient à Ottawa retourne là où ils en ont besoin: en santé. Étant donné que le gouvernement fédéral n'a pas la compétence pour gérer la santé, qu'il ne l'a jamais fait, qu'il n'a jamais payé un médecin ou une infirmière et qu'il n'a à peu de choses près jamais géré un hôpital, il faut qu'il envoie cet argent à ceux qui connaissent ce domaine, mon gouvernement, le gouvernement du Québec. Au Bloc québécois, voilà ce que nous demandons.
Nous pensons aussi aux aînés, qui ont été frappés d'isolement, qui ont été les plus touchés par la pandémie en matière de santé, qui ont un revenu fixe et qui sont maintenant asphyxiés économiquement par l'inflation. La seule chose que le gouvernement fédéral a faite a été de les diviser en deux classes. Il s'est dit qu'il allait aider les aînés âgés de 75 ans et plus, mais que les aînés âgés de 65 à 75 ans devraient attendre.
À la Chambre, trois ministres ont dit que si les aînés âgés de 65 à 75 ans n'avaient pas les moyens de vivre confortablement, il fallait qu'ils retournent travailler. Bonjour, mon colonel! Le gouvernement fédéral libéral veut envoyer travailler des gens âgés de 65 à 75 ans. Ce gouvernement est déjà usé et il n'a que deux mois d'existence. Une chance qu'il a passé deux mois à se reposer, sinon il serait mort.
Étant donné un tel discours du Trône, je pense que l'opposition va avoir beaucoup de travail à faire.