Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec la députée de Nunavut.
Je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C‑23, Loi sur les lieux historiques du Canada, qui vise à moderniser la Loi sur les lieux et monuments historiques. En résumé, cette nouvelle mesure législative vise à moderniser le cadre de protection et de préservation des lieux historiques et à inclure les peuples autochtones dans le processus de désignation de ces lieux.
Les Canadiens accordent de l'importance aux lieux qui font partie de leur patrimoine historique et culturel collectif. Toutefois, pendant la plus grande partie de l'histoire du pays, l'histoire des peuples autochtones n'a pratiquement pas été prise en considération dans la désignation des lieux et des monuments historiques. Ce projet de loi est un premier pas dans la bonne direction pour inclure les peuples autochtones dans le processus de désignation et d'aménagement de ces lieux.
La députée de Nunavut fournira plus de détails à cet égard, mais j'aimerais donner comme exemple deux lieux importants pour les Autochtones qui se trouvent dans ma circonscription.
Dans la région du Sud de l'Okanagan, il y a deux parcs provinciaux qui sont populaires chez les campeurs, mais qui sont aussi d'importants lieux culturels pour les Syilx.
Contrairement à la plupart des lieux historiques non autochtones, ces lieux ne contiennent aucun édifice emblématique, mais ils ont été d'importants lieux de rassemblement pendant des millénaires.
L'un de ces parcs est le parc provincial sw̓iw̓s. C'est une belle péninsule étroite, qui coupe presque en deux le lac Osoyoos. Le terme « nsyilxcən » signifie une partie peu profonde d'un lac qu'on peut traverser à pied ou à cheval.
Le nom « sw̓iw̓s » a été changé pour celui d'« Osoyoos » par le juge Haynes, un colon et le premier juge de paix. C'est maintenant devenu le nom de la localité et du lac.
Selon la légende, le juge Haynes a ajouté le « o » initial en raison de ses origines irlandaises.
Paradoxalement, la longue péninsule a pris le nom de « Haynes Point », puis est devenue le parc provincial Haynes Point. En 2015, le nom du parc a été changé pour « parc provincial sw̓iw̓s ». Le parc est maintenant géré et exploité par la bande indienne d'Osoyoos.
Il y a un cas similaire un peu plus au Nord, à Okanagan Falls. Dans des rapides rocheux, où la rivière Okanagan prend sa source dans le lac Skaha, on trouve depuis des millénaires un lieu de rassemblement sacré pour les Syilx. Il est sacré parce que c'était un endroit où on capturait du saumon rouge et du saumon quinnat alors qu'ils remontaient le courant pour aller frayer.
Comme dans le cas du parc sẁiẁs, dont je viens de parler, cet endroit aussi a été désigné parc provincial, le parc provincial Okanagan Falls, mais en 2015, lui aussi a été rebaptisé et il est géré depuis par la bande indienne d'Osoyoos. Il s'appelle maintenant le parc provincial sx̌ʷəx̌ʷnitkʷ, un nom nsyilxcən qui signifie « petites chutes ». Cela fait référence à Kettle Falls, dans l'État de Washington, sur la rivière Kettle.
Le nom nsyilxcən de Kettle Falls est sx̌ʷnitkʷ, qui signifie « grandes chutes ». Ces deux chutes comptaient parmi les lieux de pêche importants du territoire traditionnel de la nation Okanagan.
Le site de Kettle Falls a été inondé par le barrage de Grand Coulee il y a près d'un siècle, et même si cela s'est produit sur le territoire des États‑Unis, c'est le reflet d'un manque total d'égard à l'endroit des lieux qui revêtaient une importance capitale pour les peuples autochtones lors de la colonisation de l'Amérique du Nord.
Le terrain de camping du parc provincial sx̌ʷəx̌ʷnitkʷ est fermé chaque année pendant la troisième fin de semaine de septembre en raison de la fête du saumon tenue par l'Alliance des Nations de l'Okanagan. Il s'agit d'une activité de sensibilisation à l'histoire et à la culture de la nation Okanagan, ainsi qu'aux efforts de cette dernière pour revitaliser et restaurer les stocks de saumon rouge dans la rivière Okanagan.
Tout le monde peut participer aux célébrations, et je recommande vivement à tous d'y aller. Il s'agit d'une activité merveilleuse.
Il y a un lieu historique national officiel dans ma circonscription, le Miners' Union Hall, à Rossland, qui a ouvert ses portes en 1898, au plus fort du boom minier dans Kootenay‑Ouest. Les mineurs de la région avaient créé la première section locale canadienne de la Western Federation of Miners, en 1895, et chacun d'entre eux avait versé une journée de salaire pour faire construire cet immeuble.
Cette section locale a contribué à faire adopter bon nombre des premières lois du travail en Colombie‑Britannique et au Canada, notamment en ce qui concerne la semaine de travail de cinq jours, la journée de travail de huit heures, la sécurité en milieu de travail ainsi que — c'était la première loi du genre — l'indemnisation des travailleurs.
Après la construction de l'immeuble, des tensions constantes au sein des camps miniers ont amené le gouvernement du Canada à envoyer Roger Clute, éminent avocat de Toronto, à Rossland, en 1899. Celui-ci a conclu que l'imposition d'un processus d'arbitrage serait moins efficace que l'adoption de mesures de conciliation. Après un autre voyage à Rossland, ses rapports ont mené à la mise en place d'une loi fédérale, l'Acte de conciliation de 1900, qui a favorisé la création du ministère du Travail et du régime canadien de relations du travail.
Ce qui s'est passé à Rossland a contribué à l'établissement de notre régime de relations de travail, partout au pays, et l'édifice Miners' Hall a été au centre de cette effervescence. La rumeur veut même que Joe Hill, le légendaire syndicaliste des États‑Unis, ait vécu dans le grenier de l'édifice alors qu'il se cachait des autorités américaines. Le Miners' Union Hall de Rossland peut donc véritablement être considéré comme l'un des plus importants lieux historiques du Canada et il occupe toujours une place de choix dans la vie communautaire de cette localité et des environs.
Le bâtiment a été abandonné après la fermeture des mines, à la fin des années 1920, et d'importants travaux de rénovation étaient nécessaires pour le remettre en état. Des travaux récents ont commencé en 2015, et les tentatives initiales d'obtenir du financement fédéral à cette fin ont échoué. Je suis toutefois heureux de signaler que les derniers travaux de rénovation ont finalement reçu du financement de tous les ordres de gouvernement. En 2020, l'édifice Miners' Hall de Rossland a été désigné lieu historique national, et j'ai été ravi de participer à la cérémonie qui a été tenue à cette occasion.
Je voulais raconter l'histoire du Miners' Hall pour bien montrer que les lieux historiques ont besoin d'être entretenus et rénovés en permanence et que ceux qui n'appartiennent pas au gouvernement fédéral, dont le Miners' Hall, en ont tout autant besoin que ceux qui lui appartiennent.
En 2017, le Comité permanent de l'environnement et du développement durable a recommandé de porter le financement fédéral annuel du programme de partage des frais pour les lieux historiques à au moins 10 millions de dollars par an, mais seulement 2 millions de dollars sont disponibles pour le prochain cycle. En 2018, le vérificateur général a signalé qu'aucune ressource n'est allouée aux nouveaux lieux historiques nationaux et que ces lieux précieux s'effondrent littéralement. Lorsqu'il s'agit d'entretenir le patrimoine, qui tient à cœur aux Canadiens, nous devons faire mieux.
En terminant, j'aimerais parler d'un autre lieu historique au Canada qui ne bénéficie pas encore d'une désignation ou d'une protection fédérale: le SS Sicamous. Le SS Sicamous est un navire à vapeur historique muni de roues à aubes, qui voguait sur le lac Okanagan au début des années 1900. Il permettait des déplacements vitaux dans l'ensemble de la vallée, avant la construction de routes. Ce navire est amarré de façon permanente à Penticton, tout comme le saloon qui se trouvait à l'arrière du SS Okanagan, un navire plus vieux à bord duquel mes grands-parents ont traversé le lac après qu'ils ont quitté l'Angleterre pour venir s'établir au Canada en 1910. Ce parc sur l'histoire maritime abrite aussi le SS Naramata, un vieux remorqueur à vapeur et un autre remorqueur à moteur diésel historique du Chemin de fer Canadien Pacifique, qui poussait des trains de barges sur le lac Okanagan quand j'étais jeune.
Ces navires historiques occupent une grande place dans notre histoire, et ils méritent une désignation nationale. Comme dans le cas de l'édifice Miners' Hall de Rossland, l'entretien et la rénovation de ces navires coûtent très cher. Il y a un grand groupe de bénévoles très talentueux et enthousiastes qui travaillent sur ces navires chaque jour, mais ils ont besoin de fonds pour le matériel afin de les aider avec leur travail.
Ce projet de loi est attendu depuis longtemps, et le NPD l'appuiera. Cependant, nous devons faire plus pour nous assurer que les Autochtones et les lieux qui leur sont chers prennent la place qui leur revient dans nos lieux historiques nationaux. Nous devons veiller à ce que suffisamment de fonds soient prévus en vue de sauver ces lieux précieux pour les générations futures de Canadiens.