Monsieur le Président, c'est un honneur de prendre la parole au sujet de cette excellente motion de l'opposition, et je tiens à remercier le chef de l'opposition de l'avoir présentée.
Beaucoup de choses se sont produites au cours des deux ou trois dernières années qui nous ont amenés là où nous sommes aujourd'hui, soit à nous concentrer tout particulièrement sur l'application ArriveCAN. Nous devons faire montre de respect pour l'argent des contribuables, ce qui revient, plus fondamentalement, à respecter les droits de nos concitoyens.
Une partie essentielle du rôle du Parlement consiste à demander des comptes au gouvernement pour ses dépenses et ses décisions stratégiques, quel que soit le parti au pouvoir. Voilà exactement l’objet de la motion, rien de plus. Il faut espérer que tous les députés de tous les partis à la Chambre souscrivent à cette idée, y compris les libéraux, qui siègent du côté du gouvernement. Nous devrons attendre le résultat du vote, car la question en jeu concerne l'application controversée « ArnaqueCAN ».
La motion consiste à demander à la vérificatrice générale de procéder à une vérification de gestion, ce qui est différent de l’approbation ou du rejet par la Chambre d’une politique gouvernementale précise. Ce n’est même pas une étude par un comité. Ce serait plutôt un examen indépendant, mené à l’abri des débats partisans entre le gouvernement et l'opposition.
Cette vérification permettrait dans une certaine mesure d’obtenir des comptes, comme il se doit, parce que nous ne pouvons pas prétendre que rien ne s'est réellement passé avec l'application ArriveCAN au cours des deux dernières années. Si les députés ministériels sont convaincus d'avoir pris les bonnes décisions depuis le début, ils ne devraient avoir aucune objection à appuyer la motion. Au bout du compte, la vérification confirmerait leur choix sans problème; j'espère que cet argument a été clairement compris.
Nous sommes ici aujourd'hui, un mois après que le gouvernement a finalement décidé d'abandonner l'utilisation obligatoire de l'application ArriveCAN, mais les problèmes n’ont pas tous été résolus pour autant. Nous ne connaissons pas toute l'histoire, et bon nombre des questions que se posent les Canadiens restent sans réponse.
Pourquoi le gouvernement fédéral a-t-il mis l’application obligatoire en premier lieu? Pourquoi les citoyens canadiens devaient-ils télécharger et utiliser une application pour entrer dans leur propre pays? Pourquoi y a-t-il eu une telle rigidité, un tel manque de souplesse? Pourquoi a-t-il fallu tant de temps pour que le gouvernement abandonne finalement l’application? Pourquoi sa mise en place a-t-elle coûté 54 millions de dollars, alors qu'il a été démontré depuis qu'elle aurait pu être réalisée pour seulement 250 000 dollars? Il était initialement prévu qu'elle ne coûterait que 80 000 $. Qui exactement a profité de tous ces millions de dollars? C'est ce que tous les députés doivent savoir au nom de leurs concitoyens partout au pays.
Dans ce débat, nous ne pouvons pas non plus oublier toutes les répercussions que cette application obligatoire a eues sur les Canadiens. Le gouvernement a essayé de prétendre qu'il s'agissait en quelque sorte d'une question de vaccination, cherchant à faire porter le blâme à ceux qui n'avaient pas reçu les vaccins pour la COVID. Or, nous avons vu comment cette obligation a eu des répercussions sur différentes personnes, indépendamment de leur état de santé. En fait, ArriveCAN a ajouté aux problèmes créés par la vaccination obligatoire pour le travail et les voyages. Il a créé un autre obstacle pour de nouveaux groupes de personnes dans notre société, à cause de la technologie utilisée.
Si les libéraux veulent défendre cette décision en la ramenant à la question des vaccins, ils lèvent au moins un peu le voile sur l’infortunée vérité en le faisant. Ils ont essentiellement admis que leur intention était de punir les personnes non vaccinées, en laissant entendre à la population générale que cela mettrait fin à la transmission. Cela a peut-être fonctionné pour trouver des boucs émissaires et diviser les gens pendant et après une campagne électorale surprise, mais l’application obligatoire n’a pas donné le résultat attendu. Bien sûr, il est vrai que l'application faisait manifestement partie d'une politique plus large qui sapait et violait le droit des Canadiens à la protection des renseignements médicaux. Quel a été le résultat?
Bien que le premier ministre ne comprenne peut-être pas cela, les gens ordinaires ont de nombreuses raisons de voyager autres que pour des vacances luxueuses. Les mesures obligatoires ont fait grand tort aux carrières et aux relations humaines. Certaines personnes n’étaient pas vaccinées, tandis que d'autres n'ont pas révélé qu'elles l’étaient pour des raisons de confidentialité, car c'était de cela qu’il s’agissait. Le gouvernement a choisi de maintenir l’application en place alors qu'il devenait de plus en plus évident, au fil du temps, que l’excuse invoquée à cet égard ne tenait pas la route.
Encore une fois, l'application obligatoire ArriveCAN a porté tout cela à un autre niveau. Elle a rendu la situation plus compliquée et plus absurde. Certaines personnes pouvaient montrer leurs papiers, mais leur situation personnelle ne leur permettait pas d'utiliser ArriveCAN. Certains ne disposaient pas de la bonne technologie. D'autres n'étaient tout simplement pas en mesure de l'utiliser ou n'y avaient pas facilement accès pour des raisons pratiques. Pour de nombreuses personnes âgées ou issues des minorités, le gouvernement ajoutait un obstacle arbitraire dans ses exigences de vaccination.
Ce sont nos concitoyens qui vivent dans nos circonscriptions, y compris dans celles des députés libéraux, et il ne fait pas de doute qu'ils ont entendu des histoires semblables chez eux.
Par exemple, quelqu'un m'a contacté par téléphone depuis l'une des nombreuses collectivités huttériennes. Ces personnes n'utilisent pas la technologie, n'ont pas accès à des ordinateurs et n’ont pas beaucoup d’autres options pour communiquer. Or, cet homme avait été vacciné, mais à son retour au Canada, après un déplacement aux États-Unis, il a été obligé de se mettre en quarantaine simplement parce qu'il n'utilisait pas l'application ArriveCAN; en fait, il n'avait même pas les moyens d'avoir l'application. Cela n'avait aucun sens pour lui, et j'étais d'accord avec lui.
Un certain nombre de personnes âgées dans une situation semblable ont été forcées de se mettre en quarantaine, même si elles pouvaient prouver autrement leur statut vaccinal selon les règles. Les conséquences ont été plus qu'un simple désagrément. Des gens ont été confinés chez eux.
Dans le cas du concitoyen dont j’ai parlé, le mode de vie de la communauté à laquelle il appartient est basé sur l'agriculture et la production alimentaire. Sa capacité à contribuer au type de travail important qui doit être effectué a été entravée. En fait, cet homme était allé aux États-Unis pour obtenir les pièces dont il avait besoin pour ses machines agricoles, ses outils agricoles, afin de pouvoir effectuer ce que le gouvernement de l'époque considérait comme un service essentiel, mais on lui a dit qu'il devait quand même rester chez lui pendant 14 jours.
Les agriculteurs savent qu'ils ne peuvent pas se permettre de perdre jusqu'à deux semaines de temps précieux. Comme nous le savons tous, ils effectuent un travail isolé par nature. Il faut une seule personne pour conduire une machine. Les éleveurs sont dehors pour contrôler leur bétail et leurs troupeaux. Il n'y a aucun risque pour les communautés qui les entourent. Voilà un autre exemple qui montre que les libéraux ne comprennent rien à la vie dans les régions rurales du Canada.
Puis les choses ont en quelque sorte empiré. Non seulement l'application était intrusive, mais elle présentait également des ratés. Si les gens se conformaient et utilisaient ArriveCAN, ils n'étaient toujours pas à l’abri de problèmes. Certaines personnes étaient capables et désireuses d'utiliser l'application, mais elles se voyaient quand même infliger à tort une période de quarantaine. À un moment donné, l'Agence des services frontaliers du Canada a déclaré que ces notifications incorrectes avaient été envoyées à plus de 10 000 personnes. C'est un désastre aussi embarrassant que déroutant. Il allait de pair avec l'incapacité du gouvernement à fournir des passeports aux Canadiens et avec les perturbations notoires des vols dans nos aéroports, mais les libéraux ont conservé l’application malgré les appels lancés par les collectivités frontalières, les groupes touristiques, les syndicats d’agents de douane et la population. Lorsqu'ils ont abandonné l’application, la saison des voyages était déjà presque terminée.
Ma circonscription se trouve le long de la frontière que nous partageons avec les États-Unis, et le tourisme est un élément important de notre économie locale. C’est une région rurale, ce qui ajoute certaines limites dans les circonstances. De ce point de vue, je peux vous assurer tous que ces politiques malavisées ont causé de réels préjudices à ces collectivités. Ce qui est pire, c'est que nous savions, c’était une question de bon sens, que le fardeau supplémentaire que constituait cette mesure pour le tourisme, l'agriculture et d'autres industries locales, une mesure extrêmement difficile à appliquer, n’était pas nécessaire.
Des Canadiens de tous les milieux ont payé le prix pour que le premier ministre et le gouvernement libéral puissent sauver la face ou marquer des points politiques. Heureusement, les libéraux ne pouvaient plus ignorer la pression croissante et ont abandonné cette exigence à la frontière, ce qui était la bonne chose à faire. Il reste encore quelques problèmes à régler pour nos concitoyens et les communautés frontalières. Par exemple, les heures d'ouverture ne sont toujours pas revenues à la normale.
Un concitoyen de ma circonscription devait faire un aller-retour de deux heures aux États-Unis pour emmener des bêtes chez le vétérinaire. Or, ce voyage lui a pris 14 heures parce qu'il n'a pas été autorisé à retraverser la frontière. Il existe au Canada un règlement qui limite la durée pendant laquelle les animaux peuvent rester dans une remorque, et cette simple décision l'a mis en danger. Il a dû passer encore plus de temps sur la route loin de chez lui, mettant en danger la santé de ses animaux pendant le déplacement.
Les Canadiens peuvent à nouveau exercer pleinement leur droit, selon l’esprit de la Charte, de demeurer au Canada, d'y entrer ou d'en sortir. Nous n'empêchons plus les voyageurs étrangers de venir au Canada, mais les États-Unis ont toujours une obligation vaccinale à leur frontière pour nos concitoyens. C'est à eux de prendre cette décision. Le gouvernement du Canada ne peut évidemment pas le faire à leur place. Toutefois, le premier ministre a-t-il à cœur de défendre les Canadiens qu'il a diabolisés et marginalisés au cours des deux dernières années?
Les libéraux ne reconnaissent pas leurs torts. Ils n’ont pas encore exprimé des regrets ou présenté des excuses. Une façon pour eux de montrer un peu de bonne volonté serait d’appuyer cette motion. Il y a beaucoup d’opinions fortes sur ces questions, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du Parlement, mais si nous nous mettions au moins d’accord sur cette motion, nous pourrions commencer à obtenir davantage les faits sur une politique qui a suscité la division.
C’est quelque chose que le vérificateur général pourrait fournir. Nous pourrions avoir une meilleure idée de ce qui s’est passé et apprendre à faire mieux à l’avenir. Les Canadiens pourraient voir une certaine unité et un certain leadership au-delà des lignes de parti dans cette enceinte. Ce serait un bon exemple à donner et une façon de commencer à surmonter les divisions qui nous affligent au pays.