Merci beaucoup, monsieur le président.
Bonjour à tous mes collègues. C'est un honneur de me présenter devant vous pour discuter de mon projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C‑275, loi modifiant la Loi sur la santé des animaux.
Il est très semblable à un autre projet de loi qui vous a déjà été soumis, le projet de loi C‑205. Il s'agit en fait d'ériger en infraction le fait de « pénétrer, sans autorisation ou excuse légitime, dans un lieu où se trouvent des animaux, lorsque ce fait peut avoir comme conséquence d’exposer les animaux à une maladie ou à une substance toxique susceptible de leur nuire ou de les contaminer. » Autrement dit, les pénalités déjà prévues dans la Loi s'appliqueraient à quiconque fait intrusion dans une exploitation, une propriété ou une installation agricole où des animaux sont gardés. On propose en outre de doubler le montant des amendes prévues pour les groupes et les organisations qui encouragent les comportements illégaux mettant en péril la biosécurité de nos fermes et le gagne-pain de nos agriculteurs.
Chers collègues, il y a un point sur lequel je dois vraiment insister, car je sais que vos bureaux ont sans doute tous reçu des courriels et des appels téléphoniques à ce sujet. Afin de contrer en partie la désinformation découlant de certaines campagnes qui sont menées, je tiens à vous rappeler les objectifs que ce projet de loi ne cherche pas à atteindre. Ce projet de loi n'a aucunement pour but de restreindre le droit de chacun de manifester pacifiquement dans un lieu public. Il ne vise pas non plus à empêcher les dénonciateurs de s'exprimer lorsqu'ils sont témoins de pratiques mettant en péril notre sécurité alimentaire, la salubrité des aliments ou le bien-être des animaux.
Les agriculteurs et les éleveurs canadiens ont l'obligation morale et légale de bien s'occuper de leurs animaux. C'est aussi simple que cela. Ainsi, les agriculteurs et leurs employés sont tenus de signaler tout acte répréhensible dont ils sont témoins au sein de l'environnement fortement réglementé dans lequel ils évoluent. Ils doivent en effet suivre des codes de conduite stricts afin d'assurer la santé, la sécurité et le bien-être de tous les animaux de ferme.
Lors de ma dernière comparution devant vous concernant le projet de loi C‑205, j'ai traité longuement des enjeux de santé mentale associés à une mesure semblable. J'inviterais donc les nouveaux membres du Comité à prendre connaissance des observations que j'ai faites à ce moment‑là. Je n'en dirai pas plus aujourd'hui à ce sujet, d'autant plus que vous allez recevoir tout à l'heure une experte en la matière.
Lors du débat sur ce projet de loi pendant la dernière législature, des députés de tous les partis ont fait état de situations s'étant produites dans leurs circonscriptions respectives. Il y a une chose qui m'inquiète particulièrement. Depuis ces échanges que nous avons eus il y a quelques années, les défenseurs des droits des animaux sont devenus de plus en plus effrontés, à un point tel qu'ils mettent maintenant en danger non seulement la vie des animaux de ferme, mais aussi, dans certains cas, la population et le gagne-pain de nos agriculteurs. Nous avons ainsi vu certains militants accrocher des carcasses de porcs à un viaduc montréalais. Nous avons entendu parler de cet éleveur de porcs ontarien qui a été ciblé par un rançongiciel, des militants lui demandant d'admettre les mauvais traitements qu'il infligeait à ses bêtes, des accusations bien évidemment mensongères.
Tout cela tire son origine d'un incident dont a été victime la famille Tschetter qui élève des dindons en liberté dans ma circonscription. Cette famille s'est réveillée un bon matin avec 40 militants qui avaient installé leur campement dans son étable. Il a fallu de cinq à six heures pour désamorcer la situation et faire partir ces manifestants. Cependant, la famille touchée en ressent encore aujourd'hui les répercussions. Elle se demande pourquoi elle a été ainsi ciblée et ce qu'elle a fait de mal, car elle respecte toutes les règles en place. Je vous rappelle qu'il s'agit d'un élevage de dindons en liberté à Fort Macleod.
Les opposants à ce projet de loi vont soutenir qu'il n'est pas nécessaire parce que rien n'indique que les intrus introduisent des maladies dans les exploitations agricoles.
Premièrement, j'estime que l'on fait ainsi totalement fausse route quant à l'objet de ce projet de loi, car un seul problème peut faire toute la différence. Voilà donc un argument malavisé ayant pour but de justifier des comportements illégaux. Deuxièmement, et chose plus importante encore, cette prétention est totalement fausse. Nous sommes au fait d'au moins deux incidents de la sorte. L'un d'eux s'est produit au Québec alors qu'une éclosion de rotavirus a suivi le passage de manifestants dans une ferme porcine. On n'avait pas détecté de rotavirus au Québec depuis plus de 40 ans. L'autre incident a touché un élevage de visons en Ontario alors que des intrus ont relâché des milliers de bêtes, ce qui a entraîné une éclosion de la maladie de Carré.
Certaines provinces nous ont emboîté le pas avec des mesures semblables, mais la vaste majorité des gouvernements — sept provinces et trois territoires — n'ont pas adopté de loi en la matière.
En terminant, j'aimerais seulement vous rappeler les répercussions que peut avoir l'éclosion d'une maladie ou d'un virus à transmission animale dans nos exploitations agricoles, aussi bien pour les familles directement concernées que pour notre économie dans son ensemble. Il est absolument essentiel de protéger l'approvisionnement alimentaire du Canada. C'est l'un des piliers du travail de ce comité. Des virus comme ceux de la grippe aviaire, de la peste porcine africaine et de la fièvre aphteuse sont autant de menaces sérieuses pour l'agriculture canadienne.
En 2014, 10 exploitations agricoles de la vallée du Fraser ont été frappées par une flambée de grippe aviaire qui a forcé l'euthanasie de plus de 200 000 oiseaux d'élevage. La plus grave éclosion de grippe aviaire au Canada a également eu lieu dans la vallée du Fraser en 2004 pour mener à l'abattage de 17 millions d'oiseaux d'élevage. Avant que l'éclosion ait pu être finalement maîtrisée, les pertes économiques ont dépassé les 380 millions de dollars. Après cela, on a apporté différents changements touchant notamment la quarantaine volontaire, les protocoles de biosécurité, la surveillance et les tests en laboratoire.
La plus récente éclosion au Canada a touché 7,6 millions d'oiseaux de basse-cour dans les provinces de l'Ouest du pays, ainsi qu'en Ontario et au Québec, la Colombie-Britannique étant la plus durement affectée.
Il y a aussi la question de la peste porcine africaine… Heureusement, aucun cas n'a encore été détecté au Canada. Le tout premier cas a été détecté en Chine en 2018. La maladie s'était déjà répandue dans toutes les provinces chinoises en 2019, et on a depuis signalé des cas en Asie-Pacifique, en Asie centrale, en Europe de l'Est et plus récemment en République dominicaine. Son introduction au Canada serait dévastatrice. Les répercussions économiques seraient de l'ordre de 24 milliards de dollars.
J'en arrive maintenant à ma conclusion. Comme je l'ai déjà indiqué, ce projet de loi n'a pas pour but d'interdire les manifestations pacifiques. Le problème, c'est que bon nombre des manifestants ne sont pas au fait des protocoles de biosécurité très stricts en vigueur dans nos exploitations agricoles, de la raison d'être de telles mesures ou du fait que leur intrusion sur une ferme peut avoir des conséquences catastrophiques pour nos agriculteurs, notre sécurité alimentaire et, bien sûr, notre économie.
Je sais que les membres du Comité sont tout à fait conscients de l'urgence d'agir ainsi que de l'importance de ce projet de loi pour nos agriculteurs, nos éleveurs et nos producteurs agricoles. Je serai ravi de répondre à toutes les questions que mes collègues voudront bien me poser.
Je vous remercie de votre attention.