propose que le projet de loi C-241, Loi modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu (déduction des frais de déplacement pour les gens de métier), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Madame la Présidente, je vais commencer par dire que c’est un immense honneur. Je me sens incroyablement et complètement privilégié. C’est assez hallucinant, car c’est une chose que de se faire élire, mais c’est autre chose que d’avoir la chance de passer si tôt dans l’ordre des travaux sur les affaires émanant des députés. C’est un jour tout à fait remarquable, non seulement pour moi, mais aussi pour près de 1 million de Canadiens qui sont des gens de métier.
J’aimerais d’abord remercier les gens d’Essex, qui m’ont élu pour les représenter. Sans leur soutien, je ne serais certainement pas ici en train de présenter ce projet de loi d’initiative parlementaire.
Ensuite, je m’en voudrais de ne pas remercier Tomi Hulkkonen, du local 494 de la Fraternité unie des charpentiers et menuisiers, à Windsor. La première fois où je me suis présenté pour devenir député d’Essex, il m’a demandé de présenter ce projet de loi. Apparemment, il travaille à ce projet depuis 11 ou 13 ans.
Je lui ai promis que, si j'étais élu et si j'étais appelé à présenter un projet de loi d'initiative parlementaire assez tôt dans le processus, je présenterais ce projet de loi. Je suis donc fier de le faire. Je suis fier de pouvoir tenir ma promesse envers Tomi.
Mon projet de loi, le projet de loi du peuple, le projet de loi des gens de métier, le projet de loi C-241, vise à modifier la Loi de l'impôt sur le revenu afin d'y ajouter une déduction. Il ne s'agit pas d'un crédit d'impôt, mais d'une déduction visant les frais de déplacement des gens de métier. J'aime aussi l'appeler le « projet de loi équitable pour les gens de métier qui ont à se déplacer ».
Le projet de loi est vraiment très, très simple. Il y est question de trois choses. Il se lit comme suit:
dans le cas où le contribuable a occupé un emploi à titre de personne de métier dûment qualifiée ou d’apprenti lié par contrat pour des activités de construction sur un chantier situé à au moins cent vingt kilomètres de son lieu de résidence habituelle, les dépenses qu’il a effectuées au cours de l’année pour se déplacer entre son lieu de résidence et le chantier, si, à la fois:
(i) il a été tenu de payer ces dépenses aux termes de son contrat d’emploi,
(ii) il n’a reçu, relativement à ces dépenses, aucune allocation non incluse dans le calcul de son revenu pour l’année,
(iii) il ne demande, relativement à ces dépenses, aucune déduction de son revenu ni aucun crédit d’impôt pour l’année au titre des autres dispositions de la présente loi.
Tout au long de ce processus, j'ai parlé avec des représentants et des dirigeants d'un certain nombre d'associations professionnelles et de syndicats, et je n'ai toujours pas trouvé quelqu'un parmi eux qui n'appuie pas entièrement ce projet de loi, ce qui m'indique qu'il y a d'énormes lacunes à combler, et que nous sommes passés à côté d'une occasion d'aider les travailleurs de métier.
D'ici 2025, la province de l'Ontario à elle seule aura besoin de 350 000 travailleurs de métier supplémentaires pour répondre à la demande actuelle. Comme c'est souvent le cas, on peut s'attendre à ce que les travailleurs de métier aient de longues distances à parcourir, loin de chez eux, pour aller d'un lieu de travail à l'autre. Avec un taux d'inflation qui a atteint un sommet jamais vu en 30 ans, et alors que nous sommes toujours aux prises avec une crise du coût de la vie, ce projet de loi est une proposition qui tombe sous le sens pour les travailleurs canadiens.
Quand on y pense, ce projet de loi propose quelque chose de fondamentalement équitable. J'ai promis aux gens de métier de ma circonscription que j'allais proposer cette mesure, et c'est exactement ce que je fais.
Je dirais bien franchement que ce projet de loi est fort simple. J'aimerais raconter la situation des gens avec qui j'ai parlé pendant ce processus, car je crois vraiment que cela soulignera à quel point ce projet de loi serait formidable pour les Canadiens ordinaires et leurs familles.
Tout d'abord, je tiens à parler des syndicats du secteur canadien de la construction. Ils m'ont été d'un précieux soutien pour m'aider à manœuvrer — ou à tricoter, comme diraient probablement les Canadiens qui jouent au hockey — afin de cerner exactement ce qu'il fallait.
Les Syndicats des métiers de la construction du Canada représentent des membres qui travaillent dans plus de 60 métiers et professions et qui génèrent 6 % du PIB du Canada. Cette industrie entretient et répare des actifs valant plus de 2,2 billions de dollars. Ce travail est réalisé sur place, mais aussi dans des installations qui fournissent des modules ou d'autres composants que l'on incorpore à de grandes structures. Une fois ces structures complétées, ces personnes travaillent à la rénovation, à l'entretien et à la réfection.
À la section qui parle de mettre les gens au travail, le document avance un argument important:
Selon les investissements privés et publics, certaines régions offrent plus de possibilités d'emploi que d'autres, selon la période. Ainsi, les travailleurs qualifiés sont forcés de se réinstaller temporairement ou de parcourir de longues distances pour travailler sur des projets répondant aux besoins du marché. Une fois ces projets complétés, les travailleurs retournent à leur résidence permanente.
Avec leur famille à faire vivre, les coûts de réinstallation temporaire peuvent s'avérer trop élevés pour les travailleurs, qui doivent ainsi compter davantage sur des programmes comme l'assurance-emploi, ce qui exacerbe la pénurie de main-d’œuvre dans certaines régions.
À l'heure où l'économie canadienne effectue une transition vers la carboneutralité, le gouvernement fédéral doit mettre en place des mesures d'aide aux déplacements pour les travailleurs du secteur pétrolier et gazier.
Le document suggère aussi de s'attaquer aux inégalités de la Loi de l’impôt sur le revenu en affirmant que dans sa forme actuelle, cette loi constitue une politique fiscale inéquitable. Il avance un argument très important:
Le personnel de vente, les professionnels et des contribuables d’autres secteurs ont droit à une déduction fiscale au titre de leurs frais de déplacement, de repas et d’hébergement alors que les travailleurs et travailleuses de métiers spécialisés embauchés sur des chantiers qui se trouvent dans une région ou une province éloignée de leur principal lieu de résidence n’y ont pas droit.
J'ai quelques témoignages, des cas bien réels, que j'ai reçus par courriel, et que j'aimerais partager.
Voici l'exemple d'un apprenti du nom de Theo. Il m'a écrit ce qui suit: « En tant qu'apprenti charpentier, j'ai dû me déplacer de Windsor à Timmins, en Ontario, pendant plusieurs mois, afin de travailler sur des projets de construction dans des régions éloignées du Nord de l'Ontario. J'ai dépensé des milliers de dollars de mon argent en essence, en repas et en hôtels, et je n'ai reçu aucune aide pour cela. J'ai également parcouru beaucoup de kilomètres avec ma voiture pendant cette période, ce qui l'a beaucoup usée et dépréciée, et cela a affecté ma situation financière. J'ai dû sacrifier beaucoup de temps avec ma famille et mes amis pour pouvoir travailler. Il y a beaucoup de possibilités de travail dans les régions éloignées du Canada et une déduction fiscale sur les frais de déplacement aiderait les apprentis comme moi à se déplacer pour trouver de meilleures possibilités d'emploi. » J'aime beaucoup le mot « possibilités ». Il ajoute: « J'espère que le projet de loi C-241 sera adopté avec l'appui de tous les députés. »
Un autre courriel que j'ai reçu se lit comme suit: « Le Canada offre d'excellentes possibilités aux travailleurs de la construction pour des projets qui sont souvent éloignés de leur foyer. Le Canada a été construit par des gens de métier qualifiés qui ont quitté leur famille et leur collectivité pour se rendre travailler sur des projets qui ne se trouvent pas toujours près de chez eux. Le Canada connaît des pénuries de main-d'œuvre record et il est crucial de donner au pays un atout en éliminant les obstacles à la mobilité de la main-d'œuvre. » Il s'agit des propos de Tomi Hulkkonen, président du Conseil des métiers du bâtiment d'Essex et de Kent. Il ajoute: « Veuillez noter que la section locale 494 du syndicat des charpentiers appuie entièrement ce projet de loi et qu'elle est disposée à prendre la parole sur celui-ci si elle est appelée à comparaître devant un comité. »
En voilà un génial. Il est écrit: « Alors, y a-t-il une pénurie de main-d'œuvre dans ce pays? » C'est un homme dont le prénom est Russ qui l'a envoyé. Voici ce qu'il dit: « À mon avis, il y a actuellement une pénurie de vouloir politique pour assurer l'équité et la mobilité du travailleur qualifié canadien. Tout cela peut changer aujourd'hui si vous votez oui pour appuyer les travailleurs qualifiés du Canada avec ce projet de loi non partisan, que j'appuie entièrement. Vos électeurs vous ont élu pour faire ce qui s'impose pour ce pays et pour contribuer à notre société, sur le plan éthique et moral. Nous ne demandons pas un salaire ni de la charité. Nous demandons simplement justice. Notre pays peut avoir des travailleurs qualifiés, à condition qu'on retire aux travailleurs qualifiés canadiens les menottes qui nuisent à leur mobilité. »
Je voudrais vous raconter deux autres histoires.
Jaret est un électricien de Windsor, père de deux jeunes garçons. Il a été obligé de sillonner le Canada et de quitter l'Ontario, sa province d'origine, pour subvenir aux besoins de sa famille. Au stress que peut causer l'éloignement, déjà bien suffisant, s'ajoute celui de ne pas pouvoir être présent pour accompagner ses enfants qui grandissent. Pour alléger toute cette pression supplémentaire, ce serait de la pure compassion que de permettre aux travailleurs de la construction aux prises avec des épreuves de ce genre de déduire leurs frais de déplacement.
Peter, directeur général de la Construction Labour Relations Association of Manitoba, a affirmé: « Vous savez très bien que pour tous les grands projets de construction d'infrastructure réalisés au Manitoba, des travailleurs viennent toujours d'autres provinces pour s'ajouter aux gens de métiers spécialisés manitobains. La même chose se produit dans toutes les provinces canadiennes. Promouvoir la mobilité en éliminant les dépenses liées aux frais de déplacement que doivent assumer les gens de métier dans le domaine de la construction constitue tout simplement une politique économique cohérente pourvue d'une grande dose de bon sens. Au nom des nombreux employeurs d'entrepreneurs en construction que je représente, je suis résolu à travailler avec vous, Russ et tous ceux qui appuieront cet incitatif national vital et providentiel. »
Je pourrais vous faire part d'autres témoignages, mais je sais qu'il ne me reste plus beaucoup de temps.
Nous l'avons entendu aujourd'hui à la Chambre, le prix du carburant, le prix des chambres d'hôtel, le prix de la nourriture et l'inflation pèsent lourd sur les épaules des gens de métier qui ont bâti et qui continuent de bâtir le pays. Leur faire subir ce fardeau supplémentaire est absolument injuste.
Ce projet de loi est juste, il laissera plus d'argent dans les poches des gens de métier et il redorera le blason des métiers spécialisés, qui ont été ignorés depuis de nombreuses années. Ces travailleurs doivent traverser le pays pour aller construire nos ponts, nos routes et les maisons qui, nous le savons tous, font l'objet d'une pénurie nationale, ainsi que pour garder le réseau électrique fonctionnel. Vraiment, nous ne devrions pas avoir à y réfléchir très longtemps avant de décider d'au moins renvoyer le projet de loi au comité pour qu'il y soit étudié.
Un des aspects intéressants de ce projet de loi, c'est qu'il couvre les gens de métier d'un océan à l'autre, de St. John's, à Terre‑Neuve, et de partout ailleurs au Canada. Il n'aidera pas une seule région, mais l'ensemble du pays. Ce qui me fait sourire aujourd'hui, c'est bien sûr la joie de présenter un projet de loi d'initiative parlementaire, mais j'ai une autre raison: nous avons une occasion exceptionnelle de prendre une mesure de taille pour les Canadiens et les talentueux gens de métier d'ici. Nous pouvons leur offrir le soutien qu'ils méritent et dont ils ont besoin.
Alors que mon temps de parole s'achève, je voudrais soulever deux derniers points auprès des députés. S'il y a un moment où tous les partis doivent s'unir, renoncer à la partisanerie et être convaincus que nous faisons la bonne chose, c'est bien maintenant. Certes, le projet de loi doit être étudié, mais savoir que nous faisons la bonne chose me donne envie de sourire.
J'en arrive à mon dernier point. Je ne connais aucun député qui ne se fait pas rembourser ses frais de déplacement ou qui ne les déduit pas de ses revenus. Si c'est bon pour les députés, ce devrait évidemment l'être aussi pour les gens de métier.