propose:
Qu’une instruction soit donnée au Comité permanent de l'industrie et de la technologie portant qu’il soit habilité, dans le cadre de son étude du projet de loi C‑27, Loi édictant la Loi sur la protection de la vie privée des consommateurs, la Loi sur le Tribunal de la protection des renseignements personnels et des données et la Loi sur l'intelligence artificielle et les données et apportant des modifications corrélatives et connexes à d'autres lois, à diviser cette mesure législative en deux projets de loi:
a) le projet de loi C‑27A, Loi édictant la Loi sur la protection de la vie privée des consommateurs et la Loi édictant la Loi sur le Tribunal de la protection des renseignements personnels et des données, contenant la partie 1, la partie 2, et l'annexe à l'article 2;
b) le projet de loi C‑27B, Loi édictant la Loi sur l'intelligence artificielle et les données, contenant la partie 3.
— Monsieur le Président, je suis très déçu que nous ne parlions pas de logement et de la possible fusion de la Banque Royale du Canada et de la Banque HSBC à la Chambre aujourd'hui. Après huit ans, le Canada connaît la pire crise du logement de son histoire. Il suffit de parler à n'importe quel électeur pour voir exactement ce qui se passe.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je dois dire que je partagerai mon temps de parole avec la députée de Calgary Nose Hill.
Lorsqu’on parle de logement, il est absolument scandaleux qu’il y ait des familles, en ce moment, qui ne puissent pas payer leur hypothèque, même si elles peuvent s’estimer chanceuses d’avoir un logement, et il est tout aussi scandaleux que les locataires voient le prix des loyers doubler. Partout dans nos collectivités, nous entendons dire que le nombre de sans-abri a doublé. J’ai rencontré le chef de la police et le maire de ma ville la semaine dernière, et nous avons parlé des centres de désintoxication. La crise du logement n’est pas la seule cause de l’itinérance; de plus en plus de personnes souffrent de toxicomanie et de troubles mentaux et se retrouvent, de ce fait, dans des situations très précaires dont ils finissent trop souvent par perdre le contrôle. Nous avons eu 66 surdoses en une semaine à Belleville, en Ontario. La situation est hors de contrôle.
Nous faisons face à une grave crise du logement, et il faudrait le reconnaître officiellement. Car finalement, après quatre années de discussion, après huit années de pouvoir libéral, le logement est dans une situation catastrophique. Bien sûr, on espère que la concurrence sera une solution. Tous les pouvoirs publics comptent là-dessus. Mais jusqu’à présent, les résultats arrivent au compte-gouttes. On a adopté une mesurette par-ci, une réformette par là, mais il n’y a toujours pas de véritable concurrence. Le projet de loi propose, pour l’essentiel, que les services bancaires soient davantage axés sur les consommateurs, ce qui signifie qu’un grand nombre d’entreprises de technologies financières pourraient offrir davantage d’options aux consommateurs. Il propose aussi d’essayer d’empêcher les mauvaises transactions qui se sont produites avec l’actuelle Loi sur la concurrence.
La concurrence est loin d’être saine à l’heure actuelle. C'est un oligopole qui contrôle le secteur bancaire. Six banques assurent 93 % de tous les services bancaires et gèrent 87 % de toutes les hypothèques au Canada. Les taux de HSBC sont actuellement de 81 points de base inférieurs aux taux de RBC. Ce matin, HSBC offrait un taux variable de 6,14 % pour une hypothèque sur cinq ans, alors que RBC offrait un taux de 6,95 %. Nous voyons bien ce que cela signifie en matière de concurrence.
Le Bureau de la concurrence est en fait un organisme de contrôle, d’application de la loi, et il n’est pas censé lancer des poursuites. Nous avons tous regardé le feuilleton La loi et l’ordre. Je ne me souviens plus de leurs noms, mais les deux détectives sont censés trouver les coupables, et ensuite, c’est bien sûr le système judiciaire qui s’en occupe.
Le droit de la concurrence évolue à 100 kilomètres à l’heure environ, alors que la concurrence dans le secteur du logement devrait évoluer à la vitesse d’une zone scolaire, entre 15 et 20 kilomètres à l’heure. Nous cherchons donc à ralentir le rythme, en bloquant les fusions telles que l’achat de la HSBC par la RBC, qui, en achetant la septième plus grande banque, deviendrait la plus grande banque au Canada.
Mon projet de loi sur la mise en œuvre d'un système bancaire axé sur les clients, s’il devait pousser le gouvernement à présenter une mesure législative à la Chambre, garantirait que la Loi sur les banques serait modifiée pour que les données personnelles des clients, qui devraient leur appartenir, puissent être communiquées, avec leur consentement, à d’autres institutions bancaires. Cela ouvrirait la voie à une réelle concurrence dans le secteur bancaire.
C’est exactement ce qui est proposé dans le projet de loi C‑27. En effet, le projet de loi C‑27 porte sur la protection des données. Il concerne les données personnelles des Canadiens. J’ai beaucoup parlé de ce sujet à la Chambre, de la façon dont les données de nos enfants ne sont pas protégées à l'heure actuelle. Nos enfants finissent tous par avoir un iPad, un Fire Stick d'Amazon ou un téléphone personnel. La protection des données est actuellement si faible au Canada que toutes ces données peuvent être collectées et devenir la propriété non pas des enfants, mais bien des entreprises, qui les vendent ensuite à d’autres entreprises.
Évidemment, nous n'avons même pas parlé du fait qu'au Canada, la Loi sur la protection des renseignements personnels n’a pas été actualisée depuis 1987, une époque bien antérieure à l’iPod. C’était bien avant l’avènement des technologies et de l’Internet, avec son explosion spectaculaire, qui mettent à risque les données de nos enfants.
Or, il arrive que le gouvernement, dans sa précipitation et en oubliant de respecter les limites de vitesse, fasse des déclarations et des annonces à toute vitesse, mais c’est une tout autre affaire dès qu’il s’agit de passer à l’action. Il a fallu un an pour que le projet de loi C‑27 soit renvoyé au comité — où il se trouve actuellement — après son dépôt à la Chambre. Le plus gros problème, en qui concerne le projet de loi et la vitesse infernale avec laquelle le gouvernement fait des annonces et des déclarations au lieu d’agir, c’est que les libéraux ont intégré un projet de loi sur l’intelligence artificielle au projet de loi C‑27. Le ministre de l’époque a déclaré que c’était ce que les libéraux devaient faire et que nous serions le premier pays du monde à le faire. Le hic, c’est qu’ils se sont empressés de faire cette annonce au lieu de s'empresser de passer à l’acte. Ils n’ont même pas organisé de consultations publiques. Nous n’avons pas eu la possibilité de procéder à des consultations publiques lorsque la Loi sur l’intelligence artificielle et les données a été intégrée au projet de loi C‑27 en tant que troisième partie.
À ce jour, nous avons eu neuf ou dix réunions de comité au sujet du projet de loi C‑27. Jusqu’à présent, tous les témoins ont déclaré, pour l’essentiel, que la Loi sur l’intelligence artificielle et les données, la troisième partie du projet de loi, est aussi faible que médiocre. Le projet de loi n’aurait pas les effets escomptés, puisque nous n’avons pas tenu de consultations publiques. Nous n’avons pas fait preuve de toute la diligence nécessaire dans l’examen d’une mesure législative qui aurait dû faire l’objet de consultations publiques. Nous n'avons pas recueilli les commentaires du public, ce qui aurait permis d’entendre les points de vue de l’industrie.
L'intelligence artificielle au Canada est assez effrayante, car nous ne pouvons pas suivre le rythme de son évolution. Elle n'est pas assez effrayante, toutefois, pour nous obliger à mettre en place une loi provisoire et à aller encore plus loin en intervenant autrement. Non, mais elle fait suffisamment peur pour nous amener à faire les choses correctement, ce qui signifie que nous devons ralentir sa progression. D'après les témoignages entendus jusqu'à maintenant et compte tenu de l'importance de la question et des lacunes de la Loi sur l’intelligence artificielle et les données, le fait que cette loi soit intégrée au projet de loi C-27 retardera la mise en œuvre de la majeure partie du projet de loi, soit les deux premières parties, qui traitent de la mise à jour des dispositions législatives concernant la protection de la vie privée, la charte numérique et le tribunal.
Le tribunal, qui fait encore l'objet de discussions, reprend un processus mis en place par la Loi sur la concurrence. Ainsi, dans l’éventualité où un commissaire à la protection de la vie privée rendrait une décision ou ferait une recommandation contre un particulier ou une société, ce tribunal donnerait, en définitive, à ce particulier la possibilité de demander un deuxième examen. Le problème est que le tribunal prévu par la Loi sur la concurrence n'est pas non plus très efficace, comme nous l'avons vu lors de la fusion de Rogers et Shaw. En effet, le Tribunal de la concurrence a été saisi de la fusion de Rogers et Shaw, mais la décision qu’il a rendue a été rejetée par le Bureau de la concurrence. Le Tribunal de la concurrence est censé être composé de trois experts en droit de la protection des renseignements personnels, trois seulement, ce qui suscite de nombreux débats.
Les deux premières parties du projet de loi sont très complexes. La troisième partie sème la confusion totale. La recommandation que nous formulons est la même que celle que nous avons déjà faite. Toutefois, après avoir entendu des témoignages en comité, nous avons recommandé de séparer la troisième partie du projet de loi, qui doit dans les faits être supprimée parce qu'elle est très boiteuse. La recommandation concernant le projet de loi serait de procéder à un vote séparé. L'argument le plus important en faveur de cette recommandation est probablement qu'elle permettrait de sauver les deux premières parties du projet de loi, parce que nous devons mettre à jour les dispositions législatives sur la protection des renseignements personnels.
En ce qui concerne la partie la plus importante, à savoir la propriété des données, je vais revenir sur la raison pour laquelle elle est si importante dans le contexte de la concurrence entre les banques. À l'heure actuelle, le seul moyen pour une banque concurrente d'obtenir les données des cartes de crédit et des relevés bancaires de quelqu’un est une méthode appelée « grattage d'écran », qui consiste à lui faire donner son mot de passe pour accéder à son compte bancaire et voir ses informations. Cette méthode est mauvaise. Le Royaume-Uni et l'Australie ont interdit cette pratique parce qu'elle est absolument répréhensible, mais nous l'autorisons au Canada. Avec des services bancaires gérés par les consommateurs mêmes, les personnes resteraient propriétaires de leurs données et transféreraient leurs données à d’autres établissements concurrents, selon leur bonne volonté. Ces derniers pourraient alors les enregistrer et fournir un meilleur service, à moindre coût, parce qu’il y aurait une meilleure concurrence au Canada.
Nous devons donc séparer la troisième partie du projet de loi. L'intelligence artificielle est terrifiante. C’est extrêmement important. Je sais que la députée qui prendra la parole après moi va en parler de manière très approfondie. Elle est experte en la matière.