Merci et bonjour, monsieur le président. Bonjour aussi aux députés. C'est un plaisir de me retrouver ici encore une fois et de parler d'un sujet extrêmement important: Radio-Canada et son avenir. M'accompagne aujourd'hui M. Serge Quinty, qui est le directeur des communications de la FCFA du Canada et qui m'aidera ce matin à répondre à certaines de vos questions.
J'aimerais tout d'abord vous remercier de nous avoir invités ce matin à partager nos réflexions sur le mandat de radiodiffuseur public du Canada au XXIe siècle. Comme vous l'avez vu dans le mémoire que nous vous avons soumis et comme vous l'avez sûrement entendu dans les interventions d'autres groupes, Radio-Canada revêt une importance particulière pour toutes les communautés francophones et acadiennes au Canada. Comme vous pouvez vous en douter, ces dernières ont souvent un accès très limité à des contenus radiophoniques et télévisuels locaux dans leur langue. La SRC joue donc un rôle essentiel pour nous, dans la cohésion des communautés, ça va de soi, et la SRC appuie aussi, dans une large mesure, leur capacité de vivre en français.
C'est pourquoi, dans cette comparution, nous nous sommes attardés à trois volets particuliers du mandat de Radio-Canada. Tout d'abord, il y a l'obligation de rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au niveau national que régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions. Ensuite, le service doit être offert en français et en anglais de manière à refléter la situation et les besoins particuliers des deux collectivités de langue officielle, y compris ceux des minorités de l'une ou l'autre langue. Enfin, il doit être offert partout au Canada de la manière la plus adéquate et, évidemment, la plus efficace.
Laissez-moi vous dire d'emblée que pour la FCFA, ces trois éléments du mandat de Radio-Canada sont toujours pertinents. En fait, ils le sont de plus en plus. Nous voulons absolument un diffuseur public dans lequel les francophones, peu importe d'où ils vivent au pays, peuvent se reconnaître; un diffuseur public qui crée des liens, qui encourage le dialogue et, ce faisant, contribue à bâtir un pays plus fort. Nous voulons un diffuseur public qui est l'ambassadeur et la vitrine à l'international de la diversité et de la dualité linguistique comme valeurs fondamentales reflétant la réalité du Canada.
Cette vision de Radio-Canada, reflétée par son mandat, est donc toujours pertinente. Là où un bémol s'impose, c'est au chapitre de la capacité de la société d'État de s'acquitter de son mandat. Premier constat: les compressions budgétaires des années 1990 ont hypothéqué cette capacité. Même si, depuis ce temps, la situation s'est rétablie à plusieurs points de vue, des ressources financières plus restreintes ont amené Radio-Canada à opérer dans une logique de marché, dans un marché concurrentiel et, pour nous comme pour bien d'autres — c'est ce que nous avons entendu un peu plus tôt —, ce ne sont pas là de bonnes nouvelles.
Dans une logique de commercialisation et de rentabilité des productions, les communautés francophones et acadiennes sont toujours perdantes, puisqu'elles ne peuvent fournir des chiffres impressionnants en termes de cotes d'écoute. Pour nous, il est donc clair que des mesures doivent être prises pour assurer que Radio-Canada ne soit plus obligée d'opérer dans une logique de marché. C'est d'ailleurs cet impératif d'opérer indépendamment d'une logique commerciale qui justifie le financement public de grandes chaînes comme la BBC ou encore Radio France.
Ne plus opérer dans une logique de marché n'équivaut pas, cependant, à ne plus rechercher un enracinement auprès de l'auditoire. Sur ce point, je me dois de mentionner l'excellent travail fait par plusieurs stations régionales de Radio-Canada. Dans plusieurs provinces, en particulier dans l'Ouest, les francophones perçoivent très positivement les services de la radio régionale et le souci de bien refléter la réalité et les préoccupations de la communauté. Toutefois, il y a encore quelques bémols, deux en particulier.
D'abord, on nous parle beaucoup de manque de moyens. À notre avis, c'est assurément ce qui hypothèque la capacité de notre télédiffuseur public. À l'Île-du-Prince-Édouard, par exemple, on nous a indiqué que malgré les efforts des animateurs pour offrir un contenu pertinent francophone à la communauté, l'équipe semble sous-outillée, au point où la population doit écouter la radio anglaise pour connaître les éléments de nouvelles qui affectent leur quotidien. Je pense que vous l'avez mentionné plus tôt.
Dans un deuxième temps, il existe toujours, dans bon nombre de régions, une problématique reliée à une faible cote d'écoute de la radio de Radio-Canada. À certains endroits en Atlantique et en Ontario, ce sont les radios communautaires de langue française qui semblent le mieux desservir la population, si l'on se fie aux données des sondages BBM.
De cette réalité découlent deux constats. D'abord, dans une optique d'équilibre du système canadien de radiodiffusion, il est essentiel de mieux appuyer les radios communautaires qui jouent, on le voit, un rôle central dans la vitalité des communautés francophones et acadiennes.
Ensuite, il est très important de renforcer la capacité des stations régionales de Radio-Canada de faire un travail de maillage et d'arrimage avec leurs communautés, dans un souci d'assurer la pertinence de Radio-Canada dans toutes les régions du pays, puisqu'il s'agit, encore une fois, de notre télédiffuseur.
Il nous paraît notamment essentiel d'aller chercher les jeunes, qui représentent notre force de renouvellement pour les communautés, comme pour d'autres communautés, d'ailleurs, et la cote future de la Société Radio-Canada. C'est pourquoi il sera de plus en plus important pour les stations régionales de développer à court et à moyen terme des stratégies visant à offrir un produit de plus en plus dynamique, interactif et arrimé non seulement aux préoccupations, mais aussi à la rétroaction de la communauté desservie. À cet égard, les nouvelles technologies représentent un potentiel prometteur pour faire de Radio-Canada un médium flexible et branché sur la francophonie de chaque région du Canada.
J'aimerais apporter quelques considérations sur la télévision de Radio-Canada et, surtout, sur l'antenne nationale de la société d'État. De façon générale, les communautés francophones et acadiennes estiment que le contenu présenté à l'antenne nationale de Radio-Canada demeure trop centré sur Montréal. D'ailleurs, plusieurs d'entre nous l'appelons Radio-Canada-Montréal, tant pour ce qui est des informations que des émissions de variétés. À cet égard, la société d'État doit relever des défis dans l'optique de véritablement rendre compte de la diversité et des réalités régionales du Canada, et de stimuler un dialogue entre la société québécoise et les communautés francophones et acadiennes. Ceci nous apparaît un élément extrêmement important. Si on veut que les francophones de tout le pays se parlent, se connaissent, on a besoin de faire un tel travail.
Ces défis sont notamment d'assurer un plus grand traitement de l'actualité des communautés aux émissions d'information nationale, d'assurer une meilleure présence de personnalités des communautés dans des émissions de variétés et de favoriser une plus grande présence à l'écran de dramatiques de langue française produites à l'extérieur du Québec.
Un certain nombre de gestes concrets ont été posés à ce chapitre par la société d'État. Je pense notamment à la diffusion nationale de le télésérie Belle Baie produite en Acadie. Je pense également à la nouvelle formule de couverture de l'actualité à RDI, que nous suivons avec beaucoup d'attention.
Je pense enfin aux liens de communication et de collaboration que nous avons établis entre la SRC, les communautés et la FCFA.
Mais la société d'État peut aller plus loin dans l'adoption de mesures positives pour favoriser l'épanouissement des minorités francophones du Canada et appuyer leur développement.
Nous avons recommandé dans notre mémoire le développement d'un cadre d'imputabilité, et en ce sens, encore une fois, nous sommes d'accord sur les propos qui ont été tenus dans le cadre de la dernière comparution de ce matin. Cette question a un lien direct avec un élément identifié par la société d'État elle-même dans son Plan d'action axé sur les résultats de 2006-2007 pour la mise en oeuvre de l'article 41 de la Loi sur les langues officielles.
On y parle, entre autres, d'une meilleure coordination et harmonisation des indicateurs de performance pour l'ensemble des services de Radio-Canada. C'est en ce sens que nous parlons aussi d'un cadre d'imputabilité, d'une responsabilisation, en quelque sorte, qui définira des objectifs clairs accompagnés, évidemment, de mesures de rendement pour un meilleur reflet des régions et, surtout, des minorités de langue officielle à l'antenne nationale.
Ce mécanisme permettrait également à la société d'État de mieux rendre compte des résultats de ses stratégies et, évidemment, de celles de ses stations régionales francophones, visant ainsi un meilleur arrimage entre la communauté et la SRC et un accroissement de l'écoute. Surtout, un tel cadre d'imputabilité tiendrait compte de la nouvelle partie VII de la Loi sur les langues officielles et de l'impératif d'adopter des mesures positives.
Comme je l'ai dit plus tôt, Radio-Canada a déjà posé un certain nombre de gestes à cet égard. Cependant, nous pouvons et nous devons aller beaucoup plus loin parce que les communautés francophones et acadiennes ont besoin de Radio-Canada pour assurer leur vitalité future et parce qu'un Canada fort passe par un diffuseur public reflétant la diversité des réalités de notre pays.
C'est dans ce sens que la FCFA et les communautés qu'elle représente sont déterminées à multiplier les liens de collaboration constructifs avec Radio-Canada pour bâtir un diffuseur public dont nous pouvons tous être fiers et dont le mandat demeure plus pertinent que jamais au XXIe siècle.
Merci, messieurs les députés. Merci, monsieur le président.