Je voudrais d'abord remercier tout le Comité d'être venu dans le Nord. Je sais que vous avez sillonné tout le nord et l'ouest du pays, mais il est vraiment agréable de pouvoir vous parler ici, en personne, au lieu de le faire seulement à distance, en vous envoyant des mémoires par écrit.
Tout d'abord, pour nous situer un peu, OpenNWT est une organisation de la société civile sans but lucratif mise sur pied pour promouvoir l'ouverture et la transparence du gouvernement dans le Nord. Nous nous sommes surtout intéressés aux moyens numériques d'accroître l'accès à l'information gouvernementale. Par exemple, nous avons une version territoriale de openparliament.ca. Nous avons conçu quelques systèmes pour favoriser l'accès à l'information financière du gouvernement et rechercher des renseignements électoraux, toute une série de systèmes de ce genre qui sont disponibles gratuitement sur la toile.
Pour ce qui est de moi-même, j'ai déjà présenté ma candidature aux élections territoriales et j'ai donc également une certaine expérience sur ce plan-là. Certaines des choses dont je voudrais parler aujourd'hui se rapportent aux questions que le Comité a soulevées.
Premièrement, l'amélioration du processus électoral au Canada est un sujet très important et les réformes doivent tenir compte de l'opinion de tous les Canadiens, et pas seulement de ceux qui viennent assister à la réunion d'un comité permanent. Il s'agit probablement d'un nombre limité de personnes. Il n'y a pas tellement de gens qui se sentent très à l'aise dans ce genre de situation.
Par le passé, il y a eu, par exemple, des changements concernant l'identité des électeurs et un certain nombre de choses qui ont fini par priver des Canadiens du droit de vote. Bien entendu, ce n'était pas leur but, mais si vous prenez les régions du Canada qui sont éloignées, les problèmes n'y sont probablement pas les mêmes que dans un grand nombre d'autres régions.
Lorsque nous parlons d'apporter des réformes, nous avons trop souvent tendance à jeter le bébé avec l'eau du bain. Nous cherchons comment démanteler le système. Comment faire les choses de façon entièrement différente plutôt que de chercher les améliorations graduelles, les ajustements et autres améliorations que nous pouvons apporter au système. Ce que nous avons fait présente certainement des avantages et il y a un certain nombre de choses que nous pourrions faire, mais je crois important de tenir compte de tout cela.
Par ailleurs, nous constatons souvent, lorsque nous parlons à des gens du sud, qu'ils ont tendance à considérer le Nord comme une entité s'étendant d'est en ouest et qu'il y a nombreux liens d'un bout à l'autre du Nord. En réalité, les territoires du Nord ont généralement des liens plus forts avec le sud. C'est surtout pour une question de logistique, de coût, de choses de ce genre. Même sur le plan culturel, les territoires ont tendance à avoir beaucoup de liens et de similarités avec les provinces au sud. Il y a davantage de vols directs, par exemple.
On a mentionné, plus tôt, qu'il coûte très cher, dans le Nord, de voyager en avion d'est en ouest. Souvent, il coûte moins cher de se rendre à Ottawa que d'aller en avion jusqu'au Nunavut. Jusqu'à récemment, il n'y avait pas de vols directs pour le Yukon. Une ligne a été établie l'année dernière, ce qui est une excellente chose, mais ces liens n'existent pas toujours. Lorsque nous parlons de la représentation du Nord, il y a vraiment une différence sur le plan de la culture et des gens qui doivent assurer cette représentation.
J'aurais plusieurs questions générales à aborder. L'une d'elles est la modernisation du processus électoral. Le Comité a, je le sais, entendu d'autres témoins dire qu'il y a beaucoup à faire pour moderniser la façon dont les élections se déroulent: l'envoi de la carte électorale par la poste, la liste des candidats normalisée quand vous allez voter. Toutes ces choses posent des problèmes du point de vue logistique. C'est complexe. Dans le Nord, vous pouvez même avoir de la difficulté à trouver du personnel pour tenir les élections.
L'année dernière, il y a eu un certain nombre d'élections. Nous en avons eu trois en l'espace de deux mois. Pour chacune d'elles, on a eu de la difficulté à recruter du personnel. Il est difficile de régler toutes ces questions en même temps et il y a de nombreuses façons dont la technologie peut servir à améliorer les choses. De toute évidence, la loi est désuète compte tenu de son origine.
En ce qui concerne la modernisation des élections, il a été beaucoup question du vote en ligne et je sais que le Comité l'a envisagé. Une des questions qu'il faut se poser à ce sujet est quel problème cela permet-il de résoudre. Il vaut la peine d'examiner cette possibilité, car elle présente certainement des avantages. Encore une fois, cela aiderait à moderniser les scrutins. Comme vous l'avez déjà entendu dire dans le Nord, la connectivité pose un sérieux problème. Même Yellowknife n'a qu'une seule connexion avec le sud. Dans le Nord, nous avons des collectivités entières qui ont l'équivalent d'un modem câble lent pour 1 000 personnes.
Il y a un certain nombre d'obstacles de ce genre qui créent des problèmes. En fait, nos collectivités les plus petites sont probablement celles du Nord où le taux de participation aux élections est le plus élevé. Les gens de ces petites localités semblent avoir un grand sens du devoir civique, ce qui est fantastique, et ils l'ont souvent plus que dans les grandes villes, même au Canada, où il y a parfois un manque de participation aux élections.
Un des problèmes, au Canada, ce n'est pas qu'il est trop difficile de voter. C'est assez facile d'aller voter le jour du scrutin. Il y a des bureaux de scrutin à chaque coin de rue. Il y a des dizaines de groupes qui vous signalent que les élections ont lieu demain ou qu'elles ont lieu aujourd'hui. On peut vous emmener voter en voiture; vous pouvez obtenir toutes sortes de choses. Si vous voulez voter de bonne heure, si vous voulez le faire plus tard, il y a toutes sortes de possibilités. Si elles sont offertes, ce n'est pas seulement pour une question de commodité, mais pour améliorer le processus électoral.
Une question connexe est celle du vote obligatoire. C'est un concept intéressant. Je crois que beaucoup de gens ont du mal à accepter cette idée, car cela semble les forcer à faire quelque chose.
En principe, je ne suis pas contre l'idée du vote obligatoire, mais il faut que le système permette aux gens de ne pas voter. Si vous allez aux urnes, cela ne veut pas dire que vous devez voter pour un candidat inscrit sur le bulletin. Nous devrions sans doute avoir cette possibilité, de toute façon. Je sais que dans un certain nombre de provinces canadiennes, les électeurs ont déjà la possibilité de déposer un bulletin blanc et c'est un message important qu'il faut pouvoir envoyer.
En même temps, nous devons souligner l'importance des élections et leur caractère festif. J'en parlerai un peu plus, mais nous oublions trop souvent de célébrer l'importance d'aller voter. Ce n'est pas qu'il soit nécessaire de festoyer à cette occasion. Ceux qui participent au scrutin de très près le font, mais il faut trouver un moyen d'amener le reste de la population à comprendre qu'il s'agit d'une occasion importante. Nous devons nous réjouir d'aller voter pour élire le gouvernement. Si cela entraîne un changement radical et des changements mineurs, c'est important et chaque personne qui va voter y contribue. Tout le monde peut compter.
Dans de nombreux pays, le vote obligatoire donne lieu à un jour férié. Cela devient une célébration collective et c'est une chose qu'il vaudrait la peine d'envisager, peut-être pas isolément, mais avec un certain nombre d'autres éléments. Cela aurait peut-être une certaine validité. Plus nous pourrons montrer aux Canadiens que chaque vote influe sur le système, même avec le système actuel, mieux cela vaudra. Même si vous êtes dans une circonscription où 80 000 personnes votent, cela ne veut pas dire que quelques votes n'auront pas un effet décisif sur le résultat des élections. Le phénomène est un peu amplifié dans le Nord où nous avons des élections territoriales. Au cours des dernières élections, la marge a été de trois votes dans certaines circonscriptions. C'est à une échelle quelque peu différente, mais c'est quand même sidérant; les gens ne comprennent pas toujours que leur vote compte. Quand vous voyez ce genre de chiffres, comment contacter tout le monde pour le faire savoir? Si ce n'est pas possible, nous devons trouver d'autres moyens de le faire.
La question fondamentale… une bonne partie des discussions d'aujourd'hui portait sur le pouvoir individuel des députés et de l'équilibre des pouvoirs entre les partis. J'ai entendu le premier groupe qui a beaucoup parlé de donner des pouvoirs aux députés et aux gouvernements minoritaires, et du fait que la RP favorise les petits partis et amène davantage les députés à travailler ensemble. Je crois que c'est important, mais pourquoi ne pas chercher des moyens de donner plus de pouvoirs aux députés à compter d'aujourd'hui? Je sais qu'on a cherché à le faire sous l'ancien gouvernement. Le projet de loi de Michael Chong prévoyait quelques mesures.
Au cours des dernières années, le pouvoir a été centralisé dans les partis; il a été centralisé au Bureau du premier ministre et un certain nombre d'autres facteurs ont créé un environnement dans lequel les députés n'ont peut-être pas le sentiment d'avoir de l'influence. Plus nous pouvons augmenter les pouvoirs des députés, mieux c'est. Je ne pense pas que l'adoption de la RP et l'élection des petits partis régleront forcément le problème, mais plus nous pourrons renforcer les pouvoirs des députés, plus nous renforcerons le Parlement, ce qui est la chose la plus importante à faire.
Les listes des partis — je sais qu'on a discuté d'autres modèles — ne renforcent pas forcément la responsabilisation. Si les gens votent pour un parti et reçoivent un représentant qu'ils ne connaissent pas et pour qui ils n'ont pas voté, je ne pense pas que cela va forcément les avantager. Les comptes qu'un député a à rendre à ses électeurs sont un principe solidement enraciné dans notre système. Je pense que nous devrions trouver un moyen de préserver ce principe.
Pour ce qui est des modes de scrutin, on a bien sûr proposé un certain nombre de systèmes et de changements. Je pense qu'un des principes les plus importants, et que d'autres ont mentionnés, est que dans le Nord, il ne faut surtout pas enlever les pouvoirs du député d'un territoire ou d'une province, bien que cela ne pose pas particulièrement de problèmes dans les provinces. Nous n'avons qu'un député et qu'un sénateur par territoire. Il est bien d'avoir cette représentation, mais il est important de n'apporter aucun changement qui nous l'enlèverait. Le rééquilibrage doit préserver la possibilité pour les territoires d'avoir au moins une voix au Parlement pour les représenter.
Nous sommes dans une situation constitutionnelle unique dans les territoires, mais il est important que nous ayons une représentation unique. Je sais que certains modèles de RP nous l'enlèveraient ou l'aboliraient et je ne pense pas que ce soit acceptable pour le Nord. Ce n'est tout simplement pas juste ou équitable pour les Canadiens.
Le nord offre déjà un paysage merveilleux. Un seul député de l'un ou l'autre des territoires ne pourrait jamais réussir à visiter toutes les collectivités en une seule journée et aurait même de la difficulté à le faire en une semaine sans noliser un avion. Je ne voudrais pas les voir faire cela ou devoir couvrir un territoire plus vaste.