Dans son intervention, le député de Sherwood Park—Fort Saskatchewan a évoqué plusieurs incidents survenus pendant la réunion 80 du Comité, commencée le 30 octobre 2023. Bien qu’elle avait été suspendue à plusieurs reprises, cette réunion ne s’est ajournée que le 13 décembre 2023.
La première préoccupation soulevée par le député de Sherwood Park—Fort Saskatchewan concernait des incidents se rapportant au député de Peace River—Westlock. En effet, ce dernier avait demandé à participer aux délibérations, bien qu’il ne soit pas membre du Comité. Sa deuxième préoccupation concerne le fait que le président du Comité, après avoir rendu une décision, avait donné la parole à un autre député alors qu’il aurait dû lui permettre de continuer à s’exprimer, car c’est lui qui avait la parole avant que la décision soit rendue.
Le député a avancé que ces deux incidents avaient limité le débat sur la question examinée par le Comité. En conséquence, il estime que le président du Comité a contrevenu à l’article 116(2) du Règlement et que le Président de la Chambre devrait ordonner l’annulation de toutes les délibérations qui ont suivi.
L'article 116(2) du Règlement prévoit ce qui suit:
a) Sauf si une limite à la durée d’un débat a été adoptée par le comité ou par la Chambre, le président d’un comité permanent, spécial ou législatif ne peut mettre fin à un débat alors que des membres présents souhaitent encore y participer. Une décision du président à cet égard ne peut faire l’objet d’un appel au comité.
b) Une infraction de l’alinéa a) du présent paragraphe peut être portée à l’attention du Président de la Chambre par un député et le Président peut décider de la question. Si, de l’avis du Président, une telle infraction est survenue, le Président peut ordonner que toutes les délibérations ultérieures en relation avec ladite infraction soient annulées.
Le premier élément que j’aimerais aborder concerne la procédure. Le député de Sherwood Park—Fort Saskatchewan a choisi de soulever ses préoccupations au moyen d’une question de privilège, mais s'agit en fait d'un rappel au Règlement, dans la mesure où le député demande à la présidence d’appliquer une certaine disposition du Règlement. Par conséquent, je peux déjà conclure qu’il n’y a pas, à première vue, matière à question de privilège.
Je vais tâcher d’examiner séparément les points soulevés par le député, en commençant par la question entourant le rôle de la présidence dans l’application de l’article 116(2) du Règlement.
Dans une décision rendue le 1er avril 2019, à la page 26 496 des Débats, le Président Regan a expliqué l’objet de l’article 116(2) en déclarant:
Essentiellement, le président estime que ce nouvel article vise à protéger les débats en comité contre « une manœuvre procédurale » qui mettrait définitivement fin au débat sur une motion.
Afin de déterminer si la question dont la Chambre est saisie correspond à l’une des situations que l’article 116(2) du Règlement visait à régler, la présidence a examiné les bleus des délibérations du Comité permanent des ressources naturelles.
D’après ce que la présidence comprend, lorsque la Chambre a été saisie de la question, le débat sur la motion au sujet de laquelle le député voulait intervenir était toujours en cours et celui-ci a pu y participer de nouveau. Étant donné que le débat sur la motion n’était pas terminé quand le député a soulevé la question et que les députés pouvaient encore se voir accorder la parole, la présidence ne peut que conclure qu’il n’y a pas eu violation du Règlement.
En ce qui a trait à l’affirmation du député selon laquelle le député de Peace River—Westlock n’a pas été autorisé à prendre la parole durant les travaux du Comité, j’attire l’attention de tous sur l’article 119 du Règlement, qui est ainsi libellé, et je cite:
Tout député qui n’est pas membre d’un comité permanent, spécial ou législatif peut, sauf si la Chambre ou le comité en ordonne autrement, prendre part aux délibérations publiques du comité, mais il ne peut ni y voter ni y proposer une motion, ni faire partie du quorum.
Un député n’a pas besoin d’agir à titre de membre substitut pour participer aux délibérations d’un comité, à moins que le comité en question n’ait adopté une motion limitant la participation, comme il en a le droit. Je crois comprendre, après avoir examiné la situation, que la décision du président du Comité a été contestée, puis qu’elle a été maintenue par la majorité des membres. La présidence peut donc confirmer que cet élément n’a rien à voir avec les conditions énoncées à l’article 116(2) du Règlement en vertu desquelles le Président interviendrait normalement.
Comme l’ont souligné d’anciens Présidents à maintes occasions, l’autorité du Président ne s’étend habituellement pas aux affaires des comités, sauf si un comité juge opportun de faire rapport d’une question à la Chambre. Voici ce qu’on peut lire aux pages 152 et 153 de La procédure et les usages de la Chambre des communes, troisième édition:
La présidence a toujours eu pour politique, sauf dans des circonstances extrêmement graves, de n’accueillir des questions de privilège découlant de délibérations de comités que sur présentation, par le comité visé, d’un rapport traitant directement de la question et non lorsqu’elles étaient soulevées à la Chambre par un député.
Le 23 mars 2015, l'un de mes prédécesseurs a renchéri en disant, à la page 12 180 des Débats, et je cite:
Cela ne veut pas dire pour autant que la présidence soit privée du choix d'intervenir dans les affaires des comités, mais il s'agit plutôt de reconnaître que de telles interventions sont extrêmement rares et ne sont justifiables qu'advenant des circonstances procédurales, et non politiques, très exceptionnelles.
Malgré les préoccupations exprimées par le député, en l'absence d'un rapport du Comité, il n'appartient pas au Président de la Chambre d'intervenir dans cette affaire dont la gestion relève du Comité.
Je remercie les députés de leur attention.