Madame la Présidente, c’est vraiment un honneur de prendre la parole aujourd’hui. Je vais faire de mon mieux pour passer à travers mon discours en soutien au projet de loi C‑224. J’ai eu une fin de semaine spéciale et émouvante où j’ai revisité mon passé et j’ai eu de nombreuses conservations avec mes anciens collègues.
Je félicite la députée de Longueuil—Charles-LeMoyne de proposer ce projet de loi. Avant hier, je ne lui avais jamais parlé. Il suffit d’une courte conversation au téléphone pour découvrir la personnalité et le bon cœur d’une personne, et j’ai réalisé à quel point nous nous ressemblons, elle et moi. Je félicite la députée et je la remercie beaucoup non seulement de m’avoir demandé d'appuyer le projet de loi, mais aussi de m’avoir donné l’occasion d’en parler aujourd’hui.
Préparer ce discours m’a rappelé beaucoup de souvenirs. Ce discours devrait être l’un des plus simples à prononcer pour moi, mais c’est l’un des plus difficiles. La première chose que je dirai, c’est que notre service à la Chambre, le fait de servir les gens qui nous ont élus, est tout à fait semblable au service des pompiers pour leurs collectivités: les pompiers se précipitent pour éteindre des feux, tout comme nous le faisons ici à la Chambre. Il s’agit vraiment d’un service et non d’un simple travail.
J'ai été pompier de 1995 à 2002. J'étais le pompier matricule 70. J'ai ce métier dans le sang. Quelques-uns de mes plus beaux souvenirs sont rattachés à la caserne. D'ailleurs, le jour de mon mariage, on m'a amené à l'église en camion d'incendie, et je portais ce même uniforme bleu, mais je mentirais à la Chambre si je disais qu'il n'a pas été un peu ajusté à la taille depuis ce temps.
Lors de la cérémonie, j'étais entouré de bon nombre de mes collègues portant aussi l'uniforme bleu. Je suis on ne peut plus fier d'être ici aujourd'hui, et je n'aurais pas pu me retrouver dans cette enceinte sans le soutien de gens formidables.
Je tiens à saluer le chef Sunderland, qui m'a embauché, le chef adjoint Dawson, qui a été un modèle pour moi, le capitaine de caserne Kratz, le capitaine de caserne Brando, le capitaine Rankin, le capitaine Allsop, le capitaine Carther, le capitaine Stannard, le capitaine Boughazale et bon nombre d'autres pompiers et collègues avec qui j'ai travaillé au service d'incendie.
Je m'en voudrais de ne pas remercier le député de Cariboo—Prince George. Je crois vraiment que son travail soutenu lors de la dernière législature a contribué à faire avancer l'étude de ce projet de loi jusqu'à l'étape actuelle. Je le remercie infiniment de son dévouement et de son excellent travail.
Je veux aussi remercier le député de Barrie—Innisfil, qui a été pompier lui aussi, qui m'a aidé en me donnant l'occasion de parler de ce projet de loi. Bien sûr, je dois saluer l'Association internationale des pompiers, dont les représentants se trouvent à Ottawa cette semaine pour assister à une conférence.
Hier, j'ai discuté avec le chef Quennel, qui est le chef des pompiers de Kingsville, en Ontario. Je lui ai dit: « Monsieur, faites-moi part de vos observations. Expliquez-moi la situation. » Il m'a répondu que les pompiers sont trop fiers pour parler de leur souffrance aux autres. Il arrive donc souvent, surtout lorsqu'il s'agit de cancer, que nous apprenions leur décès tardivement. C'est un fait.
Ce qui leur importe, c'est de savoir que leur famille n'aura aucun souci après leur départ. Il est donc essentiel de faire savoir à ces familles que de l'aide et des prestations leur sont offertes après le décès. Il a aussi parlé précisément de la sensibilisation, qui, comme l'a si bien dit la députée qui a présenté le projet de loi, pourrait porter sur une chose aussi simple que la tenue d'intervention.
En tant que pompiers volontaires, nous gardons notre tenue d'intervention avec nous. Nous la laissons dans notre véhicule. Nos enfants s'amusent à mettre notre casque de pompier, et nous leur enfilons notre veste de pompier sans même penser aux substances cancérigènes qui pourraient s'y trouver.
Parmi les faits saillants de mes années de service comme pompier, je pense à un incendie en particulier, que j'ai combattu avec plusieurs de mes collègues. C'était un feu de matières plastiques. La fumée demeurait au-dessus de nos têtes. Il n'y a avait pas de vent. L'air était stagnant. Certains ont proposé que les pompiers portent un appareil de protection respiratoire autonome pendant les heures consacrées à lutter contre l'incendie, mais c'était impossible, pour être franc.
Les pompiers comprennent les aléas du métier et les conséquences inhérentes à leurs fonctions. Le projet de loi fera cette sensibilisation dont a toujours parlé le chef Quennell.
Je vais maintenant aborder un sujet difficile pour moi, mais je vais y arriver. Je vais parler du pompier Darrell Ellwood. Tout d'abord, je remercie sa famille de me permettre de vous faire part de son histoire.
Darrell Ellwood servait à Windsor après avoir été pompier à Kingsville. Il illuminait chaque pièce où il entrait. Il vivait à la caserne avec son épouse Kelly, qui était répartitrice. Je me souviens des nombreuses soirées passées autour du bateau gonflable, que nous appelions Achille, longtemps après avoir éteint un incendie. Les blagues de Darrell, son rire et son sourire contagieux nous faisaient rire aux larmes.
Samedi dernier, j'ai parlé avec sa fille Jenny. Cette conversation a suscité de vives émotions chez moi. C'est Jenny qui s'est montrée forte. Voici ce qu'elle m'a dit: « Mon père sera avec toi pendant ton discours. J'en suis convaincue. Notre famille a ressenti sa présence depuis son décès. » Si Darrell est ici, je lui souhaite la bienvenue à la Chambre des communes.
Dans le milieu des pompiers, nous avons la règle de la main droite ou de la main gauche. Selon le côté vers lequel une porte s'ouvre, nous suivons la main gauche ou la main droite pour éviter de perdre notre chemin en raison de la fumée épaisse ou de l'intensité des flammes. Selon cette règle, nous plaçons toujours une main sur l'épaule de la personne devant nous. Je sais que la main de Darrell repose aujourd'hui sur l'épaule des pompiers de l'Amérique du Nord et, bien honnêtement, de la planète.
Il adorait son travail, mais, d'abord et avant tout, il aimait ses collègues. Jenny m'a raconté qu'il défendait avec passion les questions de santé et de sécurité. N'est-ce pas ironique? Il est mort d'un myélome multiple le jour de Noël de 2011. Il a été conduit à son dernier repos le 14 janvier 2012. Il n'avait que 50 ans. J'aurai bientôt 46 ans, et ce départ hâtif occupe mes pensées.
Des pompiers de nombreux services se sont réunis pour célébrer sa vie et lui dire adieu. Je le sais parce que j'étais du nombre. Fait paradoxal, ce projet de loi vise aussi à désigner le mois de janvier comme mois de la sensibilisation au cancer chez les pompiers. Darrell a laissé dans le deuil ses parents, Bud et Marie, sa formidable épouse, Kelly, ainsi que ses enfants, Jenny, Ian et Adam. Sa mémoire survit grâce à eux.
Je tiens aussi à souligner le soutien que les pompiers reçoivent de leurs conjoints. J'aimerais conclure avec quelques observations. Lorsque j'ai parlé avec Jenny, samedi, elle m'a dit que son père s'était fait demander s'il aurait quand même fait ce métier en sachant qu'il allait mourir à l'âge de 50 ans. Sa réponse toute simple et pleine d'empathie était oui.
J'aimerais conclure en récitant la prière du pompier:
Lorsque le devoir m'appelle, mon Dieu, et que les flammes sans pitié font rage, Donne-moi la force de sauver des vies, surtout de ne jamais perdre courage, De sauver d'un destin tragique, avant qu'il ne soit top tard, Le petit enfant tout comme le vieillard. Aide-moi à rester alerte et à entendre le moindre cri, À bien éteindre au plus vite cet incendie. Je ferai de mon mieux pour accomplir mon destin, En protégeant mon prochain ainsi que ses biens. Si, par ta volonté, je devais trépasser, Sur mes enfants et mon épouse, je te prie de veiller.
Je tiens à dire à mes confrères et consœurs, ainsi qu'à leurs époux ou conjoints, que nous les remercions, nous les respectons, nous les appuyons, nous les aimons et nous les saluons.