Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec le député de Vaughan—Woodbridge.
J'interviens contre cette motion. C'est une motion totalement fondée sur des principes idéologiques. Elle causerait beaucoup de tort aux Canadiens. La majorité des économistes et des chercheurs sur les politiques considèrent qu'une taxe sur le carbone est l'outil le plus simple et le plus efficace pour limiter les émissions de dioxyde de carbone. Elle est fondée sur la prémisse du pollueur-payeur, qui est la base de la plupart de nos systèmes justes. Ceux qui causent un tort paient pour ce tort. On taxe les pollueurs.
La tarification de la pollution n'est pas une idée nouvelle. La Norvège a instauré une taxe sur le carbone en 1991, taxant 80 % de toutes ses émissions provenant de combustibles. Depuis ce temps, sa consommation de combustibles et ses émissions de gaz à effet de serre ont diminué de 25 %. La Suède et d'autres pays scandinaves ont fait de même en 1997. En 1991, la Suède a instauré une taxe sur le carbone équivalant à 177 $ canadiens la tonne. C'est six fois plus que ce que nous payons au Canada en ce moment. D'autres pays, comme le Danemark et la Finlande, ont instauré des taxes sur le carbone en 1991. Les émissions de gaz à effet de serre ont diminué considérablement, et leurs économies et leurs niveaux d'emploi se sont améliorés.
Je ne veux pas seulement parler de ce qui se passe ailleurs dans le monde. Je veux attirer l'attention de la Chambre sur ce qui se passe chez nous. Je veux parler de ma province, la Colombie‑Britannique, et du fait qu’elle a instauré une taxe sur le carbone en 2007. Depuis, les émissions de gaz à effet de serre ont diminué de 15 %, sans nuire à l’économie. En fait, l’économie de la Colombie‑Britannique est l’une des plus florissantes au Canada. Sept ans après avoir instauré sa taxe sur le carbone, le PIB de la province avait augmenté de 12,4 %.
Lors de la récession de 2008, quand les conservateurs étaient au pouvoir, le PIB de la Colombie‑Britannique a surpassé la moyenne canadienne, avec une hausse de 12,4 %. En fait, la Colombie‑Britannique affiche un des taux d’émissions de gaz à effet de serre les plus faibles au Canada et son économie est florissante et ne cesse de croître.
Elle a créé 123 000 emplois dans le secteur des technologies vertes. Ces emplois paient en moyenne 90 000 $ par habitant. C’est pas mal d’argent. La Colombie‑Britannique attire beaucoup de jeunes qui veulent travailler dans le domaine des technologies vertes. À l’heure actuelle, 300 nouvelles entreprises de partout dans le monde ont décidé d’investir en Colombie‑Britannique. Pourquoi? À cause du principe de la taxe sur le carbone, une initiative fédérale sans incidence sur les recettes qui est réinvestie sous forme de remises. Ces remises et la neutralité fiscale ont permis à la Colombie‑Britannique de réduire les impôts de certains secteurs économiques et industriels, de réduire l’impôt sur le revenu des particuliers et de rediriger des fonds publics vers les segments de la population à revenu faible ou moyen. Ce sont des Canadiens qui récupèrent plus d’argent qu’ils n’en paient en taxe sur la consommation de carburant.
Ce qu’il faut comprendre, c’est que le faible taux d’imposition du revenu des particuliers et des entreprises a convaincu 300 entreprises d'investir en Colombie‑Britannique.
La Colombie-Britannique a aussi investi dans les technologies vertes, comme le fait le gouvernement fédéral, ce qui a créé des emplois bien rémunérés. Les personnes à revenus modestes ou moyens, les agriculteurs et les entreprises bénéficient de cette fiscalité allégée ainsi que des remboursements. Les familles, les entreprises et les agriculteurs en ressortent gagnants.
Je sais que la Banque mondiale et les Nations unies ont dit que la Colombie-Britannique a la meilleure taxe au monde et qu’elle est un modèle à suivre. Cependant, je sais également que ce parti-là ne tient pas la Banque mondiale en haute estime et qu’il aimerait que le Canada quitte les Nations unies. J’ai entendu dire que c’était un de ses projets. Je citerai donc une autre source que les conservateurs trouveront peut-être plus crédible: l’OCDE. Selon l’OCDE, la taxe sur le carbone de la Colombie-Britannique est un « cas d’école » de mise en œuvre réussie.
Prenons donc ce que fait la taxe, la façon dont elle aide les gens et ce qu’elle a fait pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et comparons tout cela à ce que le comité sénatorial affirme dans son rapport intitulé « Remettre à flot : L’impact et la réponse aux inondations de 2021 en Colombie‑Britannique ».
Quel est le coût de l'inaction? Combien nous coûtent les changements climatiques? Apparemment, chaque année, les dommages causés par les changements climatiques coûtent 700 $ à chaque Canadien, en raison de l'argent dépensé pour remédier aux problèmes que nous avons vécus par rapport aux incendies et aux inondations. En fait, cela fait maintenant six ans que l'on a des feux de forêt en Colombie‑Britannique. L'année dernière, deux de ceux-ci ont coûté 720 millions de dollars en pertes assurées, ce qui en fait l'événement météorologique extrême assuré le plus coûteux que la province a jamais connu.
Au cours des 50 dernières années, le coût des tempêtes, des inondations et des feux de forêt au Canada est passé de dizaines de millions de dollars à des milliards de dollars par année. Qui paie la note? Qui tend la main? C'est le gouvernement fédéral. Cela nous coûte donc de l'argent. Cela représente des milliards de dollars. En fait, en 2019 et en 2010, les pertes assurées pour les catastrophes se sont élevées à plus de 18 milliards de dollars. En ce qui concerne les coûts des soins de santé, on a démontré que l'an dernier, ils s'élevaient à 770 millions de dollars en Ontario seulement, à cause des incendies dans cette province.
Lors des inondations qui se sont produites enColombie‑Britannique, les agriculteurs — des gens dont les conservateurs disent se soucier — ont perdu des millions de dollars à cause des dommages qu'ont subis les terres agricoles et le bétail. Le gouvernement a alors dû les aider. Le gouvernement fédéral et celui de la Colombie‑Britannique ont dû verser des fonds pour aider les agriculteurs à surmonter leurs difficultés. L'an dernier, un millier de fermes de la Colombie‑Britannique ont été touchées par les inondations; une inondation a eu, à elle seule, une incidence sur 15 000 hectares de terres et 2,5 millions de dollars de bétail.
La Colombie‑Britannique tente d'évaluer les pertes que le secteur du tourisme a subies à cause des feux. Les conservateurs n'expliquent aucunement comment ils composeraient avec les coûts astronomiques que les gouvernements doivent assumer ni avec tous les problèmes auxquels nous sommes confrontés dans ces situations.
Selon le professeur Tombe, un économiste qui enseigne la politique publique à l'Université de Calgary, si on éliminait la taxe, comme ces gens le réclament constamment, ce changement profiterait aux personnes les mieux nanties du Canada et toucherait particulièrement durement une grande proportion de familles et d'entreprises à revenu faible ou moyen.
Je terminerai sur une citation de Mark Twain: « Ne laissez jamais la vérité gâcher une bonne histoire. » J'ajouterais, dans ce cas-ci, ne la laissez pas non plus gâcher un bon slogan d'autocollant de pare-chocs. Il faut parler des faits, et c'est ce que je me suis employée à faire. Laissons de côté l'idéologie et faisons vraiment les calculs: nous verrons clairement que l'exemple de la Colombie‑Britannique illustre à merveille ce que peut faire la taxe sur le carbone.