Monsieur le Président, je vais partager le temps dont je dispose avec la députée d'Abitibi—Témiscamingue.
C'est vraiment avec plaisir que je me lève à la Chambre pour parler de la nomination des juges à la Cour suprême. C'est si important que j'ai même déposé un projet de loi demandant que les juges de la Cour suprême soient bilingues. Je vais donc pouvoir en parler dans ce discours.
La motion demande qu'on n'oublie pas les différences régionales lors de la nomination des juges à la Cour suprême et qu'on respecte la représentation régionale, comme c'est la coutume; je pense que tout le monde à la Chambre des communes en convient, et je suis du même avis.
L'annonce qu'a faite le premier ministre du Canada cet été a causé beaucoup de déceptions. Bien sûr, nous sommes contents qu'un comité soit mis sur pied pour analyser les compétences des juges sur le plan juridique et pour s'assurer que les juges sont bilingues et qu'ils comprennent très bien les deux langues officielles. Tout le monde était très heureux, et des éloges sont venus de partout pour souligner cette annonce du premier ministre du Canada.
Par contre, mon chef, le leader du NPD, s'est présenté au Comité permanent de la justice et des droits de la personne pour vérifier auprès de la ministre ce que signifiait être un juge bilingue. Est-ce que cela voulait dire qu'on était capable de s'exprimer dans les deux langues officielles? La ministre de la Justice a répondu vaguement qu'elle ne savait pas exactement ce que cela signifiait, et qu'il s'agissait peut-être de les comprendre mais pas nécessairement de les parler. C'est très décevant, et ce n'est pas du tout le bilinguisme qu'on attend d'un juge de la Cour suprême.
À cet égard, nous sommes très préoccupés par cette intervention de la ministre de la Justice. J'espère que le secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice va corriger cette situation, parce que c'est inacceptable. Il faut voir ce que le commissaire aux langues officielles a demandé; il a demandé que les juges aient des compétences linguistiques leur permettant non seulement de comprendre le français et l'anglais et de s'exprimer en ces langues, mais aussi de comprendre le vocabulaire juridique nécessaire pour être un juge à la Cour suprême.
Comme les conservateurs, nous sommes d'avis qu'il faut maintenir la coutume de la représentation régionale, et présentement, cela concerne les provinces de l'Atlantique. Nous sommes aussi d'avis qu'il faut absolument que les juges soient bilingues et que ce soit intégré dans une loi. Je vais en parler dans quelques instants. Surtout, il ne faut pas faire les mêmes gaffes que les conservateurs ont faites.
En effet, il y a malheureusement eu deux nominations de juges unilingues anglais. Il y a même eu la nomination d'un agent du Parlement unilingue anglais et d'autres erreurs de la sorte. Les libéraux ont aussi fait de telles erreurs en nommant notamment un leader parlementaire à la Chambre unilingue anglophone; ils avaient aussi nommé un Président du Sénat unilingue anglophone. Il y a donc eu des difficultés chez les libéraux, qui ne sont pas toujours allés dans la bonne direction.
Par conséquent, je vais parler de mon projet de loi, le projet de loi C-203, qui modifie la Loi sur la Cour suprême et qui crée une nouvelle condition de nomination des juges à la Cour suprême en vertu de laquelle les juges qui seront nommés comprendront les deux langues officielles selon les compétences linguistiques décrites par le commissaire aux langues officielles.
C'est extrêmement important parce que, en matière de nomination des juges à la Cour suprême, il faut parler de la représentation régionale, mais il ne faut pas oublier que la Loi sur les langues officielles mentionne que ces deux langues sont à égalité. L'une n'est pas supérieure à l'autre; elles sont toutes les deux sur un même pied d'égalité.
Lorsqu'on se retrouve devant la justice, et encore plus lorsqu'il s'agit du plus haut tribunal au pays, il est tout à fait normal que les deux langues officielles soient à égalité. Or ces deux langues ne sont pas à égalité si les juges ne sont pas bilingues.
Des histoires ont été rapportées, et je vais raconter une anecdote, un fait réel, qui est assez préoccupant.
Il y a quelques années, un juge a commencé à faire son plaidoyer en français devant les juges présents. Tout à coup, la présidente des juges de la Cour suprême lui a demandé s'il pouvait ralentir le débit de son plaidoyer parce que les interprètes n'arrivaient pas à le suivre. Or il faut mentionner qu'on a un temps limité pour faire un plaidoyer. Si on ne peut pas faire son plaidoyer à une vitesse normale et régulière, ou s'il faut commencer à ralentir, alors on comprend très bien qu'il peut y avoir des problèmes.
Les interprètes font un travail merveilleux. Je veux souligner leur travail, parce que je sais qu'ils sont en train de travailler à la Chambre des communes. D'ailleurs, nous avons eu une étude sur le Bureau de la traduction et je souligne que ce Bureau, au grand complet, fait un excellent travail, tout comme les interprètes. Toutefois, comme le nom le dit, c'est parfois une interprétation de ce qui est dit. Donc on fait du mieux qu'on peut pour bien interpréter le message, mais cela ne peut pas être une traduction mot à mot, de tous les éléments d'une même phrase. De toute façon, cela n'aurait pas de sens. L'interprétation est un art magnifique, mais c'est bien sûr un art qui interprète le message.
Alors lorsqu'on se retrouve avec un événement si important qu'il aboutit à la Cour suprême du Canada, c'est-à-dire un événement d'une gravité et d'une importance capitale pour le pays, on ne peut se permettre aucune petite erreur ni aucune petite différenciation entre le message qui est dit et celui qui est compris. C'est pourquoi il est extrêmement important que tous les juges comprennent les deux langues officielles.
À cet égard, je veux mentionner que j'ai déposé le projet de loi C-203 qui modifie la loi quant à la nomination des juges pour qu'ils soient bilingues. Avant cela, tout un travail a été fait de la part du NPD. Mon cher collègue, Yvon Godin, est très connu par tous ceux qui sont à la Chambre des communes depuis quelques années. Il s'est battu pendant plusieurs années pour s'assurer que les juges nommés soient bilingues. D'ailleurs, il avait déposé un projet de loi en juin 2008. Il a recommencé en novembre 2008 et, en 2010, il a déposé le projet de loi C-232, très bien ficelé. C'était à peu près le même projet de loi que j'ai déposé. Ce projet de loi a été accepté par la majorité des députés de la Chambre des communes, parce que les libéraux avaient voté en sa faveur. Il s'est retrouvé au Sénat, mais malheureusement, les sénateurs conservateurs ont fait traîner tout le processus jusqu'à ce que ce soit l'ajournement de la Chambre et qu'on passe à une prochaine élection. Le projet de loi est malheureusement mort au Feuilleton à cause de cela.
Or le projet de loi avait été adopté à la Chambre des communes. Les élus l'avaient adopté. Présentement, les libéraux sont au pouvoir et ils sont en train de chercher dans leurs poches pour trouver toutes les défaites imaginables et possibles pour dire qu'ils ne peuvent pas adopter ce projet de loi, parce qu'il serait peut-être inconstitutionnel.
Pourquoi les libéraux et mon collègue, le secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice et procureure générale du Canada, n'envoient-ils pas ce projet de loi à la Cour suprême pour leur demander un avis? Ce projet de loi est-il constitutionnel ou non? On a juste besoin de demander un avis à la Cour suprême qui va répondre.
Tous les spécialistes à qui on a demandé si le projet de loi serait inconstitutionnel ou non ont dit qu'il était impossible de le dire. Il faut demander un avis à la Cour suprême.
On sait que dans le passé, les conservateurs n'ont malheureusement pas toujours nommé des juges bilingues. Alors si on veut la pérennité du bilinguisme des juges à la Cour suprême, il faut absolument adopter un projet de loi et c'est pourquoi celui-ci doit être adopté. J'espère que les libéraux vont prendre ce projet de loi au sérieux et l'adopter pour que, enfin, non seulement on respecte la représentation régionale, mais aussi qu'on s'assure que les deux langues officielles sont à égalité. Il faut qu'elles soient toutes les deux au même niveau, pas une supérieure à l'autre. Il faut que tous les Canadiens et Canadiennes, peu importe qu'ils parlent français ou anglais au Canada, puissent être respectés à égalité devant la loi, d'autant plus que la Cour suprême est le plus haut tribunal du pays.