Madame la Présidente, je veux tout d'abord souligner que le Parlement du Canada est situé sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe. Nous débattons d'un projet de loi qui est très pertinent non seulement pour ces groupes de Premières nations, mais aussi pour toutes les Premières nations, les Métis et les Inuits du Canada.
Avant de passer à la substance de mon discours, je souligne que le projet de loi C-29 prévoit la constitution d'un conseil national de réconciliation. Cette mesure fait suite aux appels à l'action contenus dans le rapport de la Commission de vérité et réconciliation, en particulier les appels à l'action nos 53 et 56. Essentiellement, le conseil national de réconciliation serait une organisation permanente, indépendante et dirigée par des Autochtones qui surveillerait et appuierait les progrès de la réconciliation au Canada, y compris la mise en œuvre complète des appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation.
Je veux prendre quelques instants pour expliquer comment nous sommes arrivés là où nous sommes, car certains insinuent à la Chambre que les Autochtones n'ont pas mené le processus et n'ont pas pris les décisions concernant l'aspect et l'évolution de la nouvelle mesure législative. Or, rien ne saurait être plus faux.
En tant que députée représentant une importante population de survivants des pensionnats et en tant que fille d'une mère ayant survécu à un pensionnat, je n'ai pas besoin d'expliquer à qui que ce soit à quel point ce projet de loi est important pour ma famille, pour mes concitoyens et pour de nombreux Canadiens autochtones dans ce pays. Il serait totalement fallacieux et erroné d'affirmer que ce projet de loi est présenté à la Chambre sans leur soutien total, leur pleine participation et leur rôle prépondérant dans la rédaction de tous les articles de ce projet de loi.
Il y a tellement de choses dont je pourrais parler en ce qui concerne la Commission de vérité et réconciliation. C'est un sujet qui me tient à cœur depuis de nombreuses années. Il est également important que j'explique à mes collègues le travail que le gouvernement a accompli pour en arriver là où nous en sommes aujourd'hui. Nous avons travaillé très dur pour renouer nos relations avec les populations autochtones. Il suffit de remonter à 2015, lorsque nous sommes entrés en fonction, pour s'en rendre compte. L'une des premières choses que nous avons faites a été de commencer immédiatement à mettre en œuvre les appels à l'action. En fait, nous étions le seul parti, et je crois qu'à ce jour, nous sommes toujours le seul parti au Canada à avoir dit que nous étions prêts à mettre en œuvre les 94 recommandations de la Commission de vérité et réconciliation.
Quand nous avons entrepris l'élaboration de cette mesure législative, nous avons d'abord commencé à consulter les dirigeants et les membres des communautés autochtones. Nous savions qu'ils seraient une partie intégrante de ce processus. À toutes les étapes, ils ont été consultés et inclus, et ils ont été à l'origine de ce qui s'est produit dans cette enceinte. Le processus a été mené par les dirigeants autochtones du conseil d'administration provisoire du conseil national de réconciliation.
Je vais parler un peu du conseil d'administration provisoire, ainsi que du comité de transition qui a été créé ultérieurement, mais je dirais que les deux étaient des organismes indépendants. Ils étaient composés de membres des Premières Nations, d'Inuits et de Métis, qui ont tous contribué au mieux de leurs capacités en apportant leurs conseils et leur expérience, et ils reflétaient une très grande variété de voix et d'opinions provenant de partout au pays.
Je veux aussi saluer le travail monumental qu'a accompli la Commission de vérité et réconciliation, ce qui a vraiment permis de jeter les bases de ce projet de loi et de lui donner sa forme actuelle.
Comme beaucoup de députés s'en souviendront, la commission a établi une voie vers la réconciliation pour amorcer le processus de guérison nécessaire en ce qui concerne les traumatismes intergénérationnels et les séquelles que les pensionnats ont causés.
L'énorme travail historique de la Commission de vérité et réconciliation a joué un rôle déterminant dans l'établissement des bases de cette mesure législative, comme je l'ai dit plus tôt, et le conseil national de réconciliation était prévu dans les appels à l'action nos 53 et 56. Il s'agit de 2 des 94 appels à l'action que nous sommes en voie de mettre en œuvre.
En vue de la rédaction du rapport final, le conseil a adopté une approche très inclusive qui était pleinement dirigée par des Autochtones. Il a écouté la voix des peuples autochtones. Il a entendu le témoignage de survivants de ces établissements, ainsi que de leurs familles et des membres de leur communauté.
Le gouvernement s'est efforcé d'honorer cette approche en mettant pleinement en œuvre les appels à l'action et un conseil national de réconciliation, ainsi qu'en invitant et en soutenant le leadership autochtone tout au long du processus, lequel a abouti à l'élaboration du projet de loi.
Ce processus a été mené par les commissaires de la Commission de vérité et réconciliation, les survivants des pensionnats, les Autochtones qui ont participé au processus de la commission et tous ceux qui ont pensé qu'un organisme national de surveillance, indépendant et dirigé par des Autochtones, était la voie à suivre.
Les commissaires ont pensé à un conseil national qui préparerait un rapport annuel sur l'état de la réconciliation, auquel le gouvernement du Canada donnerait une réponse publique décrivant ses plans pour faire avancer la réconciliation.
En élaborant ce projet de loi, notre gouvernement a écouté ces diverses voix. Les dirigeants autochtones et les membres des communautés ont eu le courage de raconter au pays leurs expériences et d'expliquer comment elles les ont perturbés de même que leur famille tout au long de leur vie. N'oublions pas que, malgré les conséquences personnelles et tragiques que cela a eues sur eux, ce sont leurs voix qui nous guident dans la bonne direction pour aider les communautés, pour aider les futures générations d'Autochtones et pour nous aider à entreprendre un parcours de guérison au Canada pour tous les Autochtones. Il est remarquable que ceux qui ont le plus souffert soient à la tête du processus de guérison aujourd'hui.
Après que la Commission de vérité et de réconciliation a rempli son mandat, le gouvernement fédéral a répondu à ses appels et il a créé un conseil national pour la réconciliation. Ce faisant, nous avons créé un conseil d'administration provisoire qui a aidé à assurer la transition vers les étapes suivantes. Il a formulé des recommandations sur la portée et le mandat de ce conseil. C'était la première étape.
Puis, le gouvernement fédéral a nommé les membres du conseil d'administration provisoire en 2018. Ce conseil était composé de six dirigeants autochtones qui ont été choisis pour représenter les Premières Nations, les Inuits et les Métis, y compris un ancien membre de la Commission de vérité et de réconciliation, le Dr Wilton Littlechild, qui connaît bien les peuples autochtones du Canada.
Ce conseil indépendant était chargé de conseiller la ministre des Relations Couronne-Autochtones sur la création du conseil national de réconciliation. Tous les membres étaient autochtones.
Le conseil provisoire a tenu son processus de participation peu après, en avril 2018, et a consulté divers organismes autochtones et intervenants non autochtones partout au Canada. Dans le cadre du mandat du conseil, les membres se sont penchés sur le projet de loi, sur la portée du conseil national de réconciliation et, de façon plus générale, sur la réconciliation à long terme.
Le conseil provisoire a étudié attentivement tout ce qu'il a entendu lors de ses consultations auprès de divers peuples et organismes autochtones et non autochtones et lors d'une consultation organisée à Ottawa, et il a élaboré un rapport final. Comme je l'ai dit, un groupe très diversifié d'intervenants ont été consultés dans le cadre du processus, c'est-à-dire des membres de la communauté, des universitaires, des propriétaires d'entreprises, des artistes, des professionnels de la santé et d'autres parties intéressées. Chaque membre du conseil provisoire a communiqué avec d'autres personnes pour leur demander leur avis sur la création du conseil national de réconciliation.
En plus d'inclure toutes ces personnes d'origine autochtone qui occupent différentes fonctions partout au pays, le gouvernement a aussi obtenu le point de vue de personnes non autochtones. En effet, on a créé une plateforme en ligne pour obtenir le point de vue des Canadiens au sujet de la création du conseil. Les gens y ont fait part de leurs réflexions sur le mandat du futur conseil national de réconciliation et les premiers gestes qu'il devrait poser. Je peux dire aux députés, en toute sincérité, que les commentaires fournis étaient très positifs.
Le dialogue établi avec les organismes autochtones nationaux a marqué un autre pas en avant. Le conseil provisoire, qui est un conseil d'administration autochtone, a communiqué directement avec l'Assemblée des Premières Nations, l'Inuit Tapiriit Kanatami et le Ralliement national des Métis pour connaître leur point de vue à propos du mandat du conseil. Cette étape du processus a permis à des membres des communautés autochtones, ainsi qu'à des dirigeants politiques, d'exprimer leur point de vue sur la création du conseil. Je précise que les dirigeants politiques en question étaient autochtones.
Il était important et nécessaire que toutes les étapes du processus soient menées par des Autochtones. Ce n'est qu'après avoir entendu des Autochtones de tous les horizons que le conseil d'administration provisoire a produit son rapport final en tenant compte des témoignages entendus.
En 2018, il a présenté le rapport, qui contient des recommandations concernant la vision, la mission, le mandat, la structure, la composition, le financement, les exigences en matière de reddition de comptes et le cadre législatif ayant trait au conseil national de réconciliation. Le rapport indique également que le conseil sera indépendant, permanent et apolitique, et qu'il sera un catalyseur qui nous fera sortir des sentiers battus en matière de réflexion, de dialogues et de gestes novateurs.
Le conseil d'administration provisoire a aussi fait des recommandations sur la façon dont le gouvernement devrait répondre à ces priorités particulières, indiquant notamment que le gouvernement devrait mettre sur pied un comité de transition pour mettre en œuvre les prochaines étapes. Il a aussi recommandé au gouvernement d'élaborer le cadre législatif en suivant les conseils et les recommandations des membres du comité de transition. J'ai entendu des députés mentionner cela aujourd'hui. Ils n'ont pas été tendres à l'égard de ce processus, mais s'ils avaient lu les recommandations du rapport provisoire concernant les peuples autochtones, ils auraient constaté que la mise sur pied d'un comité de transition faisait partie des recommandations faites au gouvernement.
Le conseil d'administration provisoire a aussi recommandé d'accroître les efforts de sensibilisation et de mobilisation. Le ministère de la Justice s'est donc fondé sur le travail du conseil d'administration provisoire pour élaborer un cadre législatif que l'on pourrait utiliser aux fins de consultation. Je pense qu'il est important d'accorder une attention particulière à cet aspect.
On constate vraiment que les communautés autochtones sont au cœur du projet de loi. Une fois le travail du conseil d'administration provisoire terminé, la prochaine étape consistait, conformément à la recommandation de celui-ci, à former un comité de transition, qui a été créé en décembre 2021 et dont les membres ont été nommés par le ministre des Relations Couronne-Autochtones. Le comité a examiné l'ébauche du cadre législatif et a songé à des façons de l'améliorer afin de créer un conseil fort et efficace.
Les activités de mobilisation du conseil provisoire ont eu lieu de 2018 jusqu'à la création du comité de transition, qui a ensuite dialogué davantage avec les communautés et les peuples autochtones. Les membres du comité ont rencontré des experts autochtones et non autochtones, notamment des avocats, des spécialistes des données et des experts en finances et en réconciliation. Ils ont recueilli des commentaires et des conseils dans des domaines tels que la réconciliation, le droit, les données, les finances organisationnelles, l'échange de renseignements, la gouvernance et la reddition de comptes, et s'en sont servis pour formuler leurs recommandations.
En fait, c'est tout le travail que ce processus a permis de réaliser ces quatre dernières années qui nous a permis d'en arriver à la mesure législative dont nous sommes saisis aujourd'hui. Le comité de transition a émis des recommandations sur la façon de renforcer et rédiger le cadre législatif tout en conservant la vision, le but et le mandat que le conseil avait exprimés dans la vision qu'il avait présentée.
Aujourd'hui, à la Chambre des communes, le ministre des Relations Couronne-Autochtones a présenté le projet de loi C‑29, dont nous débattons en ce moment, avec l'inclusion et la participation pleines et entières des peuples et des communautés autochtones ainsi que d'experts de partout au pays. Tout cela a lieu après la tenue de vastes consultations auprès des peuples et des organismes autochtones. Leurs dirigeants ont collaboré à l'élaboration du processus législatif et veillé à ce que la mesure dont nous sommes saisis aujourd'hui soit au cœur de ce que les Autochtones du pays ont demandé.
Je ne le répéterai jamais assez, chacune des étapes du processus a été menée par des Autochtones, depuis les recommandations de la Commission de vérité et réconciliation jusqu'au projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui à la Chambre des communes. J'ai confiance dans le fait que tout cela a permis d'obtenir une mesure législative solide qui, si elle est adoptée, sera très bénéfique aux peuples autochtones et aux Canadiens d'un bout à l'autre du pays au cours des années à venir.
Je sais à quel point les survivants des pensionnats autochtones sont traumatisés par les séquelles du passé. Je sais que, chaque jour, ils cherchent des solutions pour bâtir des partenariats plus solides entre eux et avec les gouvernements et les Canadiens. Par ailleurs, je sais qu’ils pavent la voie vers la guérison et que c’est un très long processus. Nous pouvons contribuer à rendre leur périple plus facile, et ce que nous faisons aujourd’hui y est favorable. Nous répondons à leur demande. Nous leur avons donné la possibilité de diriger le processus, de participer conjointement à l'élaboration de la mesure législative et d’avoir un rôle à jouer pour la suite des choses.
Avant de prononcer meegwetch, nakurmiik, marsi, j’aimerais proposer une motion. Conformément à l’article 26(1) du Règlement, je propose:
Que la Chambre continue de siéger au-delà de l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien afin d’étudier le projet de loi C‑29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation.