Monsieur le Président, je suis certaine de ne choquer personne, à la Chambre, en annonçant que le Canada est aujourd’hui l’un des pays où les forfaits cellulaires sont les plus chers au monde. Cela devrait nous faire réagir. Nous sommes en 2019, dans l’une des plus grandes puissances économiques du monde, et le Canada est membre du G7, mais nous sommes souvent le dindon de la farce.
Les consommateurs canadiens paient parfois leur abonnement en télécommunications jusqu’à plusieurs dizaines de fois plus cher qu’en Europe ou en Asie. Au moins, on devrait avoir accès à des services de qualité. Dans certains secteurs du Saguenay—Lac-Saint-Jean, comme à Lamarche, situé entre Saint-Fulgence et Sainte-Rose-du-Nord, sur la route 172 en direction du Lac-Saint-Jean, il est parfois nécessaire de stationner sa voiture et de souhaiter que la communication ne coupe pas en plein milieu d’une conversation.
L’accès au cellulaire et à un service Internet à haute vitesse abordable est aujourd’hui devenu une nécessité, que ce soit pour le travail ou à la maison. C’est un enjeu économique incontournable dans une grande région comme le Saguenay—Lac-Saint-Jean.
Les citoyens et les citoyennes méritent d'avoir accès à des services de télécommunications fiables, sans avoir à payer 20 $, 30 $ ou 40 $ de plus que dans d’autres pays de l’OCDE pour un même abonnement.
Pensons à ceci: pour le même prix, un consommateur canadien abonné à un forfait incluant deux gigaoctets par mois pourrait obtenir un forfait de données illimitées dans plusieurs dizaines de pays. L’argument longtemps mis en avant par les lobbys des télécommunications, soit que les prix sont justifiés par d’importants coûts d’entretien en raison de la géographie canadienne, ne tient pas la route. Par exemple, l’Australie fait face à défis géographiques encore plus importants que le Canada. Pourtant, elle est aujourd’hui en mesure d’offrir des vitesses de connexion plus rapides et des forfaits moins coûteux que chez nous.
Il est temps que les libéraux bougent, qu'ils votent en faveur de la motion du NPD et qu'ils aient enfin le courage de tenir tête aux géants canadiens en matière de télécommunications, afin d'offrir à nos citoyens des forfaits de qualité à un prix abordable.
La marche à suivre est claire: il est inadmissible que, en 2019, dans un pays du G7, plusieurs portions de notre territoire ne disposent toujours pas d’une connectivité Internet et cellulaire performante à un prix raisonnable. Cette situation apparaît d’autant plus inacceptable qu’il est prouvé qu’en comparaison à de nombreux pays, les entreprises canadiennes de télécommunications génèrent des revenus indécents pour des services moindres. Les fournisseurs canadiens empochent un revenu 23 fois plus élevé qu’en Finlande, par gigaoctet consommé, et 70 fois plus élevé qu’en Inde.
Cette situation dissuade bien évidemment de nombreuses entreprises pour qui la croissance est directement liée à l’abordabilité et à la qualité des services nationaux de télécommunications d'investir au pays. Finalement, nous perdons des investisseurs qui préféreront se concentrer sur les pays où les coûts des services sans-fil et Internet à haute vitesse sont moins élevés. Il faut que cela cesse.
Pourtant, pendant ce temps, les libéraux publient, dans le plus grand calme, un rapport proclamant qu’il n’y a rien qui cloche dans les prix des forfaits, tandis que les conservateurs crient sur les toits qu’il faut se fier aux forces du marché pour tout arranger. Finalement, rien ne bouge.
C’est pour mettre fin à cette situation ridicule que le NPD présente aujourd’hui une motion visant à rendre nos services sans fil et à large bande plus abordables et plus accessibles.
Notre proposition comporte cinq éléments. Premièrement, nous demandons au gouvernement d’instaurer un plafonnement des prix, afin d’alléger les factures, en particulier celles concernant les forfaits cellulaires. En Ontario, le forfait de 85 gigaoctets de Rogers est disponible pour 415 $ par mois. Franchement, pour dix fois moins, en Europe, on trouvera un abonnement à vie avec des données quasi illimitées. C’est n’importe quoi.
Deuxièmement, nous demandons l’abolition des plafonds de données pour Internet à large bande et l’obligation des entreprises de créer des forfaits de données illimitées à des tarifs abordables. Combinés, le plafonnement et l’obligation des fournisseurs de créer des forfaits de données illimitées renverseraient les grilles de prix actuelles, grâce à des forfaits plus abordables et plus performants.
Chaque fournisseur disposerait alors enfin d'un plan de base bon marché comparable à ce que l'on retrouve dans les pays de l'OCDE. Ce n'est pas tant demander.
Troisièmement, nous demandons l'élaboration d'une déclaration des droits du consommateur de services de télécommunications afin d'éliminer certaines pratiques de vente et de service inacceptables. Cette proposition s'inspire de précédentes recommandations du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes visant à réglementer l'industrie.
Non seulement l'élaboration d'une telle charte communiquant clairement les droits des consommateurs aiderait tout un chacun à prendre des décisions d'achat plus éclairées, mais elle serait surtout un levier efficace contre certaines pratiques de vente et de service scandaleuses. Les ententes entre opérateurs pour faire grimper les prix, les hausses de prix arbitraires ou encore les rabais à la tête du client, cela ne va plus.
Quatrièmement, il est urgent de réviser le système de vente aux enchères de spectre de bandes de fréquence pour s'assurer que les Canadiens et les Canadiennes ordinaires profitent au maximum des revenus. À l'heure actuelle, de nouveaux spectres sont périodiquement mis aux enchères par le gouvernement canadien. La banque de 600 mégahertz est, par exemple, particulièrement prisée par les opérateurs pour sa capacité à traverser les édifices en béton, en zone urbaine.
Le problème est que ce ne sont pas les Canadiens et les Canadiennes ordinaires qui tirent des profits de ces ventes aux enchères. En 2001, ce sont des milliards et des milliards de dollars qui ont été octroyés en licences à des entreprises de télécommunications qui font un lobbyisme énorme. Aucune de ces ventes aux enchères n'a pour mandat d'assurer la protection des consommateurs, de faire baisser les prix ou de faire grimper les investissements afin que les Canadiens et les Canadiennes vivant dans les régions rurales et éloignées aient accès à des services abordables et de qualité. Cela doit changer.
Enfin, cinquièmement, nous demandons au CRTC d'annuler sa politique de mise en œuvre de services à large bande dans les régions rurales et éloignées. Une décision prise cet automne réduit de moitié les débits annoncés par le gouvernement en 2016 pour les régions rurales et éloignées. Mettre en place une telle politique condamnerait ces régions à des années de service inférieur aux normes. Chez nous, au Saguenay, cela fait des années que je tire la sonnette d'alarme pour préserver la compétitivité de la région en lui donnant accès à la téléphonie cellulaire et à Internet haute vitesse, mais rien n'est fait pour rendre ces services plus accessibles ni abordables.
Depuis 2015, j'enchaîne les rencontres avec les élus locaux de Lamarche et de Labrecque pour faire avancer le dossier de la téléphonie cellulaire dans la région. Les libéraux ont toujours fait la sourde oreille. Le maire de Labrecque, M. Éric Simard, annonçait, il y a quelques mois, qu'environ la moitié de sa population continuait d'éprouver des problèmes de connexion. Cela est inadmissible.
Il faut se rendre à l'évidence: le plan de connectivité du gouvernement ne répond pas aux besoins du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Rien, dans le dernier budget du gouvernement, ne donne enfin accès à des services de télécommunications abordables et fiables aux communautés rurales et éloignées. Le gouvernement préfère donner toujours plus d'argent aux riches compagnies afin qu'elles puissent étendre l'accès à Internet haute vitesse, mais, au Saguenay, on sait bien que les géants des télécoms ne feront jamais rien pour répondre aux besoins des milieux ruraux. Ils préfèrent investir dans les secteurs urbains, plus rentables.
Il est temps que le premier ministre arrête de trouver des milliards de dollars uniquement pour subventionner ses amis du secteur privé. Il est temps que le premier ministre ait le courage de se tenir debout face aux grandes entreprises de télécommunications et qu'il les mette au pas. À Jonquière, cela fait des années qu'on attend un programme pour construire des tours cellulaires.
Quand pourrons-nous bénéficier d'un réseau cellulaire digne du XXIe siècle?
Le problème ne s'arrête pas aux frontières de ma circonscription. Dans l'ensemble du pays, pas moins de 63 % des ménages ruraux n'ont toujours pas accès à des services à large bande haute vitesse. On atteint même 0 % dans les Territoires du Nord-Ouest, au Yukon et au Nunavut, là où encore plus de 70 % des routes et des grands axes routiers n'ont toujours pas accès à des services de téléphonie corrects.