Je voudrais simplement reprendre certains arguments avancés par mes collègues, avec lesquels je suis d'accord pour la plupart.
Il serait important de faire comparaître M. Morneau et M. Ben Chin. Nous avons tenté de le faire au comité de la justice, mais bien sûr, ce fut impossible et je réfute entièrement les propos de M. MacKinnon qui a dit que les réunions ont été exhaustives et que le comité de la justice a recueilli suffisamment de témoignages. C'est tout le contraire. Nous avons tenté maintes fois de citer d'autres personnes à comparaître, car, bien franchement, nous ne disposons toujours qu'une seule version des faits. Il me semble que l'un de mes collègues d'en face a dit que Mme Wilson-Raybould avait affirmé ne plus rien avoir à dire. C'est parce qu'elle s'est exprimée selon les paramètres qui lui ont été imposés. Elle avait certainement plus de choses à dire et je crois que nous en sommes tous persuadés maintenant.
J'aimerais également me faire l'écho de ma collègue et dire que le premier ministre devrait s'excuser auprès de Mme Wilson-Raybould, Mme Philpott et des Canadiens. Le premier ministre a répété qu'il ne perçoit pas les choses comme étant de l'ingérence politique, et pourtant, en lisant le rapport du commissaire à l'éthique, nous apprenons qu'à partir de la mi-août 2018, Ben Chin intervenait auprès de Jessica Prince, qui lui a tout de suite dit que ses interventions pourraient être perçues comme de l'ingérence politique. Dès le début de cette affaire, on évoquait la possibilité d'ingérence politique.
Je ne pense pas que M. Chin agissait de son propre chef en s'adressant au personnel de la procureure générale. Je crois qu'il l'a fait sous les ordres de son ministre, M. Morneau. Si M. Chin venait témoigner, on lui poserait sans doute la question. Quelles directives a-t-il reçues pour ses conversations avec Jessica Prince? À la mi-août 2018, nous avons déjà deux employés qui parlent d'ingérence politique. En avançant dans le rapport, nous apprenons que le 19 septembre, Jody Wilson-Raybould est allée voir M. Morneau à la Chambre et lui a dit en termes on ne peut plus clairs que ses employés devaient arrêter d'intervenir auprès de son bureau sur le dossier, car ils allaient à l'encontre des principes fondamentaux de la démocratie et de l'indépendance du procureur.
Encore une fois, M. Morneau est dans le portrait et on le remet en garde contre l'ingérence politique. Tente-t-on de me dire que le ministre des Finances, lorsque la procureure générale et ministre de la Justice lui dit qu'il frise l'ingérence, ne va pas en parler avec le premier ministre? Nous devons faire la lumière là-dessus. Nous devons savoir et comprendre ce qui a été dit au Cabinet, car les acteurs sont de toute évidence nombreux et ils risquent d'avoir signifié au premier ministre que sa conduite devenait dangereuse et qu'il devait arrêter. Me dit-on que personne du Cabinet, comme M. Morneau, dont on voit les traces et celles de ses employés partout dans le rapport, a prévenu le premier ministre qu'il agissait mal? J'ai du mal à me le figurer.
Que le premier ministre répète qu'il ne croit pas avoir agi de la sorte, qu'il ne voit pas comment on pourrait qualifier ainsi sa conduite, etc., dépasse l'entendement. Comment peut-il dire qu'il accepte le rapport et une certaine responsabilité sans comprendre ce dont on l'accuse, alors que bien des personnes de son entourage étaient au courant et étaient tenues de le lui dire.
Nous sommes en novembre 2018. Le 20 novembre, le BCP fait circuler une note de service lui indiquant de ne pas rencontrer M. Bruce ou un autre représentant de la SNC pour discuter de l'affaire afin d'éviter toute perception par le public d'ingérence politique. Cette fois-ci, c'est le BCP qui tente de le mettre en garde. J'espère que c'était son intention, car c'est bien son devoir, et pourtant, le premier ministre en fait fi. On y fait référence encore une fois le 22 novembre. Cette fois-ci, ce sont des employés du CPM, Bouchard et Marques. Devrais-je croire que ces employés agissaient de leur propre chef et ne rendaient pas de comptes au premier ministre et au ministre et que le ministre des Finances ne communiquait pas avec le premier ministre du Canada? Il y aurait alors de graves défaillances dans le système.
Je sais que nous n'obtiendrons aucune réponse, car nous ne pourrons pas entendre le commissaire à l'éthique. Je souhaite vivement faire comparaître tous les acteurs, dont M. Morneau.
Je vais m'arrêter là.
Mon raisonnement est solide. Je ne comprends pas comment le ministre des Finances de notre pays peut prétendre qu'il ne se souvient pas. Il donne des instructions à ses employés qui parlent avec des gens sans lui en faire rapport. Cela soulève un tas de questions.
Nous voulons notamment demander au commissaire à l'éthique s'il pense que M. Morneau a agi de façon irrégulière. Les Canadiens ont le droit de le savoir et notre comité devrait s'efforcer d'obtenir une réponse.
C'est tout.