Merci.
J'ai quelques observations à faire. Tout d'abord, je souhaite rappeler à mon collègue, M. Erskine-Smith, que nous sommes en fait un organisme d'enquête. Nous avons assigné des gens à fournir des preuves ou à témoigner, et nous avons saisi des documents. Nous n'avons pas eu peur de manier les pouvoirs dont dispose le Comité, mais notre tâche fondamentale est d'entendre les agents du Parlement et aujourd'hui les libéraux ont voté pour interdire au commissaire à l'éthique de présenter son rapport.
L'un des autres agents du Parlement qui nous soumettent leurs rapports est la commissaire au lobbying. Nous avons eu très peu d'échanges avec Mme Bélanger, la nouvelle commissaire, mais celle qui l'a précédée, Karen Shepherd, a vivement revendiqué la reddition de comptes et j'espère que Mme Bélanger se chauffera du même bois. Je lui ai écrit pour lui faire part de mes grandes préoccupations.
Le parti néo-démocrate a souligné de nombreuses fois le problème de l'écart entre les obligations en matière de conflit d'intérêts et les exigences de la Loi sur le lobbying. Comment se peut-il que le premier ministre puisse être reconnu d'avoir défendu les intérêts d'une société et pourtant, ni la société ni le premier ministre n'ont commis d'infraction liée au lobbying? Nous avons même vu des cas où des lobbyistes individuels ont été reconnus coupables aux termes de la Loi sur le lobbying, mais pas le titulaire de charge publique.
Mme Bélanger doit impérativement mener une enquête, vu que nous n'avons pas pu obtenir des réponses de M. Dion après l'obstruction de la part des libéraux. Il est consternant de voir que la société a pu faire du lobbying intense en exigeant notamment la rédaction d'un projet de loi, tout en étant défendeur dans une affaire. La Loi sur le lobbying est claire. On ne peut mettre un détenteur de charge publique dans une situation compromettante ou de conflit d'intérêts, et pourtant c'est ce qui s'est fait, comme on peut le voir dans la déclaration selon laquelle ils avaient besoin du pouvoir « du centre » afin d'exercer des pressions pour obliger Mme Wilson-Raybould à changer d'avis. Nous devons nous pencher sur la question du lobbying.
J'aimerais maintenant revenir à ce qu'a dit Mme May sur les répercussions internationales. C'est un aspect très important, à mon avis, et je suis heureux qu'elle l'ait soulevé. Dire qu'il était question d'emplois canadiens et de régimes de pension canadiens est d'un ridicule lorsque nous constatons les charges de corruption qui pèsent sur SNC-Lavalin dans de nombreux pays. Il faut vraiment que les actions d'une société soient graves pour qu'elle soit radiée par la Banque mondiale. Ce sont des pays où la primauté du droit est plutôt fluide, c'est le moindre que l'on puisse dire. Les allégations qui ressortent de la Libye sont ahurissantes, et le Canada doit assurer sa crédibilité internationale en respectant la primauté du droit. D'ailleurs, nous savons que le Groupe de travail sur la corruption de l'OCDE a fait un rappel au gouvernement Trudeau après avoir vu la façon dont le gouvernement a tenté d'étouffer l'enquête sur SNC-Lavalin.
Je suis d'accord avec Mme May qui a dit qu'il n'est pas question des emplois des Canadiens, car les travaux de construction doivent se faire. SNC-Lavalin participe à des appels d'offres qui intéressent beaucoup de sociétés. Les ficelles remontent certainement à des gens très puissants qui étaient en poste il y a au moins 20 ans et qui ont des liens serrés avec à la fois les libéraux et l'ancien gouvernement conservateur.
Vous ai-je parlé d'Arthur Porter? C'est un homme qui est mort en prison au Panama. L'ancien premier ministre Harper l'avait nommé au Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. Voilà le pouvoir dont disposent ces gens. Les procès concernant l'implication d'Arthur Porter dans le scandale de l'hôpital McGill doivent encore avoir lieu, mais après avoir étouffé une enquête sur une société canadienne qui a été reconnue coupable de corruption à l'étranger, le Canada est perçu à l'étranger comme un pays qui ne souscrit pas à la primauté du droit international. C'est ce qu'a dit le Groupe de travail sur la corruption de l'OCDE et c'est pourquoi elle a ouvert une enquête.
Ce que nous voyons aujourd'hui, c'est l'obstruction faite à un comité pour empêcher un agent du Parlement de s'acquitter de ses fonctions qui consistent à faire rapport devant un comité sur la culpabilité d'un premier ministre du Canada qui a défendu les intérêts d'une société accusée de corruption, une société qui a été rayée des listes partout au monde en raison de ses délits répétés. C'est très grave et nous voyons bien le bras long de la société.
C'est le pouvoir abusif de l'élite qui lui permet de téléphoner au Cabinet du premier ministre et dire: « Nous voulons que vous nous rédigiez un projet de loi. » C'est le pouvoir abusif de l'élite que de retenir un ancien juge de la Cour suprême et ensuite lui demander de téléphoner à un autre ancien juge de la Cour suprême pour qu'il fournisse des conseils juridiques. Ces gens minaient l'autorité de la procureur générale de notre pays.
Je ne sais pas si c'est nécessaire de le dire, mais M. Iacobucci, qui n'est pas un vieux croûton selon M. Wernick... On n'a pas voulu le vexer. On voulait éviter de le contrarier, et pourtant, il représente un défendeur contre le gouvernement du Canada et le gouvernement libéral l'a également embauché comme représentant dans les consultations sur Trans Mountain.
Il entretient des relations si incestueuses avec les gens riches et puissants qu'il est leur avocat dans une cause qui les oppose au Canada et se permet d'appeler le Cabinet du premier ministre pour demander que l'on change la loi afin d'éviter un procès et, par ailleurs, offrir ses services comme porte-parole dans les négociations avec l'un des intervenants les plus importants, c'est-à-dire les consultations auprès des Premières Nations sur l'expansion de l'oléoduc.
De toute évidence, si l'affaire est entendue, beaucoup de gens ayant énormément de pouvoir politique seront impliqués. C'est cela qui inquiétait le premier ministre; s'il se souciait des emplois des gens, il serait intervenu dans le cas des employés de Sears. Or, il n'a rien fait. Il serait intervenu pour les ouvriers des usines d'automobiles d'Oshawa. Mais non. Cependant, dans le cas des gens riches et puissants ayant des liens avec SNC-Lavalin, une société qui a été trouvée coupable de conduite répréhensible dans de nombreux pays... Il est inacceptable de construire des centres de torture pour Gadhafi et en engranger les recettes. Il y a des conséquences internationales.
C'est la raison pour laquelle je veux que le premier ministre vienne expliquer pourquoi il était si pressé d'adopter le projet de loi. Ce n'est pas un scandale qui disparaîtra parce que les libéraux se présenteront aux élections. La réputation internationale du Canada sera grièvement atteinte si on permet à SNC-Lavalin de disposer de suffisamment de pouvoir pour menacer l'indépendance des poursuites pénales du pays.
Nous devons respecter la primauté du droit et nous devons en fournir la preuve, car le Canada est présent dans bien des endroits au monde et ne peut être perçu comme un pays qui accorde des faveurs quelconques à ses sociétés en violant la primauté du droit et les normes les plus exigeantes en matière d'éthique et de légalité au monde, que ce soit à Montréal avec l'hôpital McGill, ou au Bangladesh ou en Libye. Toutes les sociétés doivent respecter la primauté du droit, tout comme le premier ministre.
Ce que nous avons vu, notamment aujourd'hui, c'est qu'ils ne respectent pas la primauté du droit. Pour eux, il faut seulement donner un coup de main aux gens riches et puissants. Voilà le pouvoir abusif de l'élite et il faut le dénoncer.