Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Winnipeg-Nord.
Je commencerai aujourd’hui en soulignant que nous nous réunissons sur le territoire traditionnel du peuple algonquin.
À l’instar de mes collègues, je profite de l’occasion pour transmettre mes condoléances à la famille et aux amis de Marylène Levesque. Son décès est une tragédie insensée qui n’aurait pas dû se produire. Par contre, je suis heureuse qu’on ait ouvert une enquête approfondie qui comprend la participation de deux conseillers externes. L’enquête et l’examen en cours détermineront les circonstances qui ont précédé ce terrible incident. Les résultats seront rendus publics afin que nous puissions tous tirer des leçons de cet horrible événement et apporter les changements nécessaires pour que cela ne se reproduise plus.
La mort de Marylène Levesque a soulevé des questions quant à la sécurité du corps féminin que nous posons souvent de ce côté-ci de la Chambre. Nous savons que de nombreux Canadiens sont victimes de violence chaque jour en raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre, de leur expression de genre ou de la perception de leur genre. Pour avoir une idée de l’ampleur réelle de ce problème, nous avons financé une enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés dans le cadre de la stratégie de lutte contre la violence fondée sur le sexe. Les constatations sont troublantes. Cette enquête a révélé que les femmes sont près de quatre fois plus susceptibles d’avoir été victimes de comportements sexuels non désirés en public. Selon cette étude, 30 % des femmes ont été agressées sexuellement au moins une fois depuis l’âge de 15 ans, et 29 % des femmes ont été victimes de comportements sexuels inappropriés en milieu de travail. Cela se produit encore et encore. Nous savons que les jeunes femmes, les étudiantes, les femmes bisexuelles et lesbiennes, les femmes autochtones et les femmes handicapées sont plus à risque.
Il y a un contraste frappant entre notre approche à l’égard de la violence fondée sur le sexe et celle de mes collègues qui ont présenté cette motion. Ils ont mis de l’avant un programme de lutte contre la criminalité relative au travail du sexe, espérant qu’il réduira la demande et éradiquera la prostitution, bien que de nombreux critiques nous aient prévenus et continuent de nous dire que, en réalité, cela rend le travail plus dangereux et le pousse encore plus dans la clandestinité.
Selon un article récent de Molly Hayes paru dans le Globe and Mail, Sandra Wesley, directrice générale de Stella, une organisation de travail du sexe de Montréal, a déclaré: « Nous savons d’expérience à quel point les hommes sont souvent violents envers les travailleuses du sexe, et la criminalisation nous empêche de faire quoi que ce soit à ce sujet. Si nous signalons quelque chose à la police, on a tendance à fermer immédiatement nos lieux de travail. Nos collègues et nos clients se font arrêter, nous perdons notre revenu. » Jenny Duffy, présidente du conseil d’administration du Maggie’s Toronto Sex Workers Action Project, a déclaré dans un courriel jeudi qu’elle était heureuse que cette affaire fasse l’objet d’une enquête, en ajoutant toutefois que cela ne protégera pas les travailleuses du sexe.
Mon collègue le député d’Esquimalt—Saanich—Sooke a parlé avec éloquence du travail du sexe et de la nécessité pour le Parlement d’en faire plus pour assurer la sécurité de ces femmes. Je le remercie de ses sages paroles.
Nous devons veiller à ce que nos lois atteignent leurs objectifs et favorisent la sûreté et la sécurité conformément à nos droits et libertés. Le Parlement est en train de créer un comité qui pourra se pencher sur cette question. Cette conversation sera complexe et difficile, mais lorsqu’elle aura lieu, nous devrons nous souvenir de Marylène Levesque et des centaines de travailleuses du sexe qui ont perdu la vie. Soyons clairs: il y a une distinction entre le travail du sexe et la traite des personnes.
Le gouvernement conservateur de Harper a supprimé d’importants programmes auxquels les agents de libération conditionnelle avaient accès, comme le programme spécialisé de lutte contre la violence familiale et l’accès à un chercheur mondialement connu dans le domaine du sexe. Les hommes et les femmes qui travaillent en tant qu’agents de libération conditionnelle font un travail extraordinaire dans notre collectivité pour assurer la sécurité publique. J’en ai rencontré plusieurs qui font tout ce qu’ils peuvent avec les outils dont ils disposent pour assurer la réadaptation et la réinsertion sociale des délinquants. Les conservateurs du gouvernement Harper ont annulé le poste d’agent de liaison avec les services correctionnels communautaires qui jumelait des agents de police aux agents de libération conditionnelle pour appuyer leur travail dans la collectivité.
Ce ne sont pas là les seules coupes qu’a faites le gouvernement Harper. Quand les députés d’en face faisaient partie du gouvernement, ils ont fermé 12 des 16 bureaux régionaux de Condition féminine Canada et ont interdit tout financement de la part de groupes de femmes qui participaient à la défense des droits. Leur récente plateforme était étrangement silencieuse au sujet des politiques et programmes visant à aider les victimes, même s’ils comprennent que des politiques réussies ne sont pas seulement des lois plus sévères. Nous avons besoin de programmes complets adaptés à la culture qui encouragent les victimes à retrouver leur confiance en soi et le contrôle de leur vie. C’est ce fondement que le gouvernement pose.
En fin de compte, la violence fondée sur le sexe ne devrait pas être tolérée au Canada. Je suis fière que notre gouvernement ait lancé la première stratégie fédérale de prévention de la violence fondée sur le sexe. Notre stratégie comprend des programmes de prévention, un soutien aux victimes et à leur famille, ainsi que la promotion de systèmes juridique et judiciaire responsables.
Cette stratégie prévoit de nouveaux investissements de plus de 200 millions de dollars, y compris pour la prévention de la violence dans les fréquentations parmi les adolescents et les jeunes, le soutien aux victimes, ainsi que des interventions et des campagnes de sensibilisation aux droits des survivants et aux mythes sur l’agression sexuelle. Notre stratégie accomplit tout cela tout en améliorant la capacité de répondre d’une façon culturellement sûre. Aussi, nous avons adopté des mesures législatives qui éclaircissent et renforcent la loi sur l’agression sexuelle pour la rendre plus équitable et humaine à l'égard des survivants de la violence sexuelle.
Surtout, nous avons élargi la vérification des antécédents en matière d’armes à feu de sorte que toute la vie du demandeur est examinée, et pas seulement les cinq années précédentes. Je suis particulièrement fière d’avoir travaillé à cette loi et d’avoir ajouté un amendement qui fait en sorte que l’aspect de la violence fondée sur le sexe est pris en compte dans le cadre du processus de demande de permis d’arme à feu. C’est un bon départ pour s’assurer que les partenaires violents ne disposent pas d’armes à feu. Une étude effectuée dans le Canada atlantique a révélé que 70 % des personnes interrogées étaient moins susceptibles de dénoncer la violence contre un partenaire intime quand il y avait une arme à feu dans la maison. Le ministre de la Sécurité publique travaille à élargir davantage ce concept.
Mes collègues d’en face ont voté contre ces deux mesures importantes; or, ce sont eux qui ont présenté la motion d’aujourd’hui.
De ce côté de la Chambre, nous réalisons des progrès dans notre système de justice pénale pour le rendre plus équitable et plus humain pour les victimes d’agression sexuelle; je vais vous donner quelques exemples.
Nous avons éclairci les dispositions sur le consentement, élargi les dispositions sur la protection des victimes de viol et établi des procédures pour les demandes de communication de dossiers de tiers. Nous avons modifié le Code criminel pour interdire la discrimination fondée sur l’identité de genre et fait de la violence fondée sur l’identité de genre un crime haineux. Nous avons écouté les préoccupations des survivants lors d’un récent échange de connaissances. Grâce à cet événement, les voix des survivants ont pu être entendues au côté de celles des experts en criminologie et en droit, ainsi que des organisations communautaires et d’application de la loi. Leurs voix ont été entendues et leur expérience du système judiciaire nous a éclairés.
Cependant, le travail n’est pas terminé. Nous devons en faire davantage pour prévenir la violence fondée sur le genre. La ministre des Femmes et de l’Égalité des genres continue de travailler sans relâche avec le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile pour veiller à ce que toute personne confrontée à la violence fondée sur le genre ait un accès fiable et opportun à de la protection et des services.
Nous avons tous été désolés d’apprendre le décès de Marylène Levesque. Nous devons apporter des changements à nos lois et protocoles pour faire du Canada un endroit sûr pour tous les Canadiens, y compris les travailleuses du sexe comme elle. Je suis convaincue que notre gouvernement présente de véritables solutions, alors que ceux d'en face n'ont ni politique ni substance. J’ai hâte de connaître les résultats de l’enquête pour veiller à ce que les leçons apprises servent à améliorer les lois et à assurer la sécurité de toutes les femmes.