Madame la Présidente, c'est pour moi un plaisir de me joindre au débat d'aujourd'hui, qui porte sur la très importante motion dont nous sommes saisis.
Je tiens avant toute chose à saluer l'excellent travail de mon collègue de Charlesbourg—Haute-Saint-Charles. Je sais qu'il s'intéresse de près à tout un éventail de questions liées à la sécurité publique et que c'est en bonne partie grâce à lui si nous avons pu attirer l'attention des Canadiens et des députés sur cette tragédie et si nous cherchons maintenant le moyen d'y donner suite efficacement.
Je vais commencer par circonscrire brièvement le sujet de mon exposé, après quoi je ferai la liste des principales questions auxquelles le Parlement doit répondre dans l'affaire qui l'occupe.
L'affaire en question, c'est celle d'un certain M. Gallese, qui a été reconnu coupable de meurtre. Même si on savait que M. Gallese risquait de récidiver, on lui a accordé une libération conditionnelle de jour, pendant laquelle il avait la permission d'entrer en contact avec des femmes, mais seulement dans un but sexuel. Il a finalement tué une femme, Marylène Levesque, qui était elle-même prisonnière du monde de la prostitution. Elle a été tuée par M. Gallese pendant qu'il était en liberté provisoire.
Quiconque s'intéresse le moindrement à ce dossier a tôt fait de constater que la Commission des libérations conditionnelles a pris une très mauvaise décision, puisqu'une femme en est morte. Maintenant, le Parlement doit débattre des moyens qui s'offrent à lui pour faire la lumière sur cette affaire et y donner suite, et notamment pour rétablir la confiance du public dans le processus décisionnel de la Commission des libérations conditionnelles.
La Commission, nous le comprenons tous, est appelée à prendre des décisions difficiles dans des situations qui le sont tout autant, et elle doit pour ce faire tenir compte d'une foule de critères très pointus. Si elle juge qu'une personne ne risque pas de récidiver et qu'elle est effectivement réadaptée, alors il est dans l'intérêt public qu'elle autorise cette personne à sortir de prison et à réintégrer la collectivité. Or, si elle juge au contraire qu'une personne risque de récidiver et qu'elle constitue un risque pour la société ou si elle juge que cette personne doit respecter une série de conditions bien précises lorsqu'elle est libérée afin de ne constituer un danger pour personne, alors c'est à elle de prendre ses responsabilités et de lui imposer ces conditions.
Nous confions tous notre sécurité et celle de nos familles aux membres de ces audiences de la Commission des libérations conditionnelles qui, nous l’espérons, sont des spécialistes. Ce processus est nécessaire, et nous devons pouvoir faire confiance à ce processus. Nous devons nous assurer que les membres de la Commission des libérations conditionnelles sont capables d’examiner les faits, de tenir compte de l’information reçue et de prendre des décisions éclairées. Autrement dit, nous avons besoin de savoir qu’ils ont l’expérience, le parcours et les qualifications nécessaires.
Lorsque la Commission des libérations conditionnelles rend une décision qui est de toute évidence mauvaise, on peut en déduire qu’on a conseillé au criminel de se livrer à une activité criminelle, à savoir l’achat de services sexuels, et que son plan de libération lui indiquait de façon implicite ou explicite de faire de même. Ce manquement de la Commission des libérations conditionnelles a coûté la vie à une femme.
Si nous voulons parler de la Commission des libérations conditionnelles et de la manière de s'attaquer à ces problèmes, nous devons tenir le gouvernement responsable des décisions qu’il prend relativement aux nominations. Il n’est pas directement responsable de cette décision, mais il est responsable du processus et des nominations à la Commission des libérations conditionnelles qui ont mené à cette décision.
Au sujet des décisions prises par les libéraux relativement aux personnes nommées à la Commission des libérations conditionnelles, est-ce que ce sont des décisions que, tout bien considéré, n’importe qui aurait prises dans les mêmes circonstances? Les libéraux ont-ils omis de tenir compte de facteurs importants? Dans le cadre des nominations qui ont conduit à cette décision, ont-ils pris des décisions qui n’étaient pas dans l’intérêt public?
Comme nous le savons en tant que députés, le personnel qu'on emploie est censé appliquer nos directives. La décision des libéraux de nommer certaines personnes et de suivre un certain processus de nomination a conduit à une politique, soit la libération d’une personne qui n’aurait pas dû être libérée, surtout compte tenu des directives et du contexte où les femmes seraient mises en danger.
La discussion sur le processus et les nominations de la Commission des libérations conditionnelles a été intéressante jusqu'ici dans le cadre du débat d’aujourd’hui. De ce côté-ci de la Chambre, nous avons indiqué qu’une partie du problème réside dans les changements apportés par le gouvernement au processus de nomination. Il y a quelques années, les libéraux ont décidé de ne pas renouveler le mandat de la grande majorité des membres expérimentés de la Commission des libérations conditionnelles du Québec, et de nommer plutôt 14 nouveaux membres sur les 16 que compte cette commission.
Le gouvernement a créé des conditions qui font que la Commission des libérations conditionnelles manque d’expérience. Nous lui avons reproché ce fait. La décision malavisée qui a entraîné une perte de vie s'inscrit dans la foulée de la modification radicale du processus de nomination par le gouvernement qui a retiré de leur poste des personnes d’expérience pour les remplacer par des personnes inexpérimentées. Nous devrions peut-être nous pencher sur le rôle que les changements dans le processus de nomination ont joué dans cette issue tragique.
Le gouvernement a réagi en vantant l'excellence de son processus de nomination. Il a déclaré avoir instauré un processus ouvert et transparent, fondé sur le mérite et qui accroît la diversité; que ce nouveau processus est excellent, meilleur que le précédent qui consistait essentiellement à nommer, dit-on, des valets politiques à ces postes.
Je dirais que toute évaluation du mérite d’une nomination devrait tenir compte de la qualité du travail et des décisions qui sont prises. En d’autres termes, le gouvernement peut prétendre avoir instauré un excellent système de nomination, mais on ne peut en évaluer la qualité qu’en fonction des résultats, en se demandant si les personnes nommées à la Commission des libérations conditionnelles ont pris des décisions qui étaient dans l’intérêt public.
La décision du gouvernement de remplacer des personnes expérimentées par des personnes inexpérimentées au sein de la Commission des libérations conditionnelles et la décision qui s'en est suivi et qui nous occupe ici portent à croire que le gouvernement n’a pas su établir le mérite des nominations aussi efficacement qu’il le prétend. Voilà qui porte à croire qu’il y avait peut-être d’autres éléments en jeu.
J’invite respectueusement le gouvernement à aborder cette question avec un peu d’humilité, à ne pas dire d’emblée que le processus de nomination est satisfaisant et à reconnaître qu’en fait, après le meurtre d’une personne suite à une mauvaise décision de la Commission des libérations conditionnelles, il devrait peut-être revenir en arrière et se demander s’il était judicieux de remplacer tous les membres de la Commission des libérations conditionnelles. Le résultat des nominations faites par le gouvernement devrait servir de mesure pour évaluer la qualité de ces nominations.
L’autre argument que le gouvernement a fait valoir dans le cadre du processus de nomination, c’est qu’il s’agit d’une question de diversité, qu’il veut diversifier ces organisations. C’est peut-être la raison pour laquelle il n’a pas reconduit dans leurs fonctions les personnes qui étaient là auparavant, pour essayer de diversifier cette organisation.
Selon moi, ce genre de discours nuit aux efforts visant à augmenter la diversité au sein des organismes publics, efforts qui sont d'une véritable importance. De ce côté-ci de la Chambre, nous estimons qu'il importe d'assurer la diversité dans les nominations publiques. Toutefois, lorsque la diversité est utilisée comme prétexte pour nommer des personnes sans expérience à 14 des 16 postes de la commission et qu'on se retrouve avec une décision aussi mauvaise, il est nécessaire selon moi de procéder à un examen des politiques et des processus.
Étant donné la situation, nous demandons dans la motion
Que la Chambre: a) condamne la décision de la Commission des libérations conditionnelles [...]
Encore une fois, lorsque la Commission des libérations conditionnelles indique à une personne qui bénéficie d'une libération conditionnelle qu'elle devrait commettre un acte illégal, dans ce cas-ci se procurer des services sexuels, il devient assez évident que le processus qui a mené à la libération de cette personne et les instructions que celle-ci a reçues laissent sérieusement à désirer.
N'importe quel expert, ou quiconque a consacré beaucoup de temps à ces questions, vous dira qu'il faut sérieusement manquer de jugement, de connaissance ou d'expérience pour dire à une personne qui a des antécédents de violence contre les femmes d'interagir avec une femme dans un tel contexte. Ce genre de conseil ne repose pas sur une politique basée sur des données probantes à laquelle on s'attendrait dans cette enceinte.
La motion commence par condamner la décision de la Commission des libérations conditionnelles, puis elle donne instruction au Comité permanent de la sécurité publique et nationale de tenir des audiences sur cette affaire et, notamment, d’examiner la question du processus de nomination. Tel qu’indiqué dans la motion, l’objectif visé est de « recommander des mesures à prendre pour veiller à ce qu’une tragédie de ce genre ne se reproduise plus jamais ».
Pour cela, le gouvernement doit, entre autres, faire beaucoup mieux en ce qui concerne les nominations. Il veut peut-être se débarrasser des anciens commissaires et les remplacer par ses propres candidats, mais quand ces changements entraînent la mort de quelqu’un, le gouvernement doit être tenu responsable de ses décisions en matière de nomination.
En tant que parti de l’opposition, nous demandons au gouvernement de faire beaucoup mieux à l’avenir.