Monsieur le Président, je remercie mon honorable chef d'avoir bien voulu partager son temps de parole avec moi.
Avant de commencer, je veux saluer les gens d'Avignon—La Mitis—Matane—Matapédia et les remercier de la grande résilience dont ils font preuve en ce temps de crise. C'est grâce à leur respect des mesures mises en place par les différentes instances de santé publique que la situation est relativement stable pour l'instant au Bas-Saint-Laurent et en Gaspésie.
Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui pour débattre de ce projet de loi de mesures de soutien pour les étudiants en tant que porte-parole du Bloc québécois en matière de jeunesse. Ne pas laisser les étudiants de côté, le Bloc québécois en avait fait la demande insistante auprès du gouvernement. Notre demande a été entendue.
Le gouvernement nous a entendus et a mis en place la Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants dans le but d'offrir un soutien aux étudiants et aux nouveaux diplômés qui ne sont pas admissibles à la Prestation canadienne d'urgence ou à l'assurance-emploi — ou encore, qui ne sont pas en mesure de travailler à cause de la COVID-19.
C'est une prestation de 1 250 $ par mois versée aux étudiants admissibles, ou encore de 1 750 $ pour ceux qui prennent soin d'une personne avec un handicap. Qu'on me comprenne bien: c'est une très bonne nouvelle pour les jeunes qui sont incapables de reprendre leur emploi d'été régulier pour différentes raisons. Peut-être sont-ils malades, peut-être doivent-ils s'occuper d'une personne malade ou, par exemple, peut-être l'entreprise pour laquelle ils travaillaient l'année dernière ne peut pas rouvrir ses portes. Peu importe la raison, cette prestation d'urgence est la bienvenue.
Elle est bienvenue, cependant, dans la mesure où elle est perçue telle qu'elle est, c'est-à-dire une mesure d'urgence. Ayant moi-même été étudiante il y a très peu de temps, je ne peux faire autrement que de présumer que les étudiants seront les premiers à vouloir prêter main-forte dès que la situation le leur permettra. Ils le font déjà.
J'en discutais hier avec les présidents de l'Union étudiante du Québec et de la Fédération étudiante collégiale du Québec. On me dit que plusieurs de leurs membres ont déjà envoyé leurs CV par centaines pour travailler dans les CHSLD du Québec, dans les fermes et les entreprises qui offrent des services essentiels.
Le Bloc québécois reconnaît l'apport des jeunes à notre société. On sait que la grande majorité d'entre eux ne demanderont pas la prestation avant même d'avoir fait l'effort de trouver un emploi.
Cependant, on a entendu plusieurs critiques au cours des derniers jours quant à cette mesure. Le secteur économique québécois craint que les étudiants et les étudiantes ne fassent pas l'effort nécessaire de trouver un emploi avant de toucher le chèque qui est émis par Ottawa.
On comprendra que la Prestation canadienne d'urgence régulière a créé, en quelque sorte, deux classes de citoyens, ou plusieurs classes de citoyens, avec ses différents critères d'admissibilité, d'où la création de cette fameuse prestation spécifiquement pour les étudiants.
Cependant, les étudiants sont des citoyens comme les autres. Eux aussi ont des factures à payer. Un étudiant qui déménage de Gaspésie pour se rendre à l'Université du Québec à Montréal doit débourser autour de 3 600 $ le premier mois. Par la suite, chaque mois, il paie un montant d'environ 1 200 $ pour ses frais fixes, soit pour payer son loyer, sa nourriture, son transport, l'Internet et le téléphone. Pour certains étudiants d'autres régions métropolitaines du Canada, ces coûts sont encore plus élevés.
C'est vrai, certains d'entre eux ont la chance de recevoir l'aide de personnes tierces, comme les membres de leur famille, mais bon nombre d'entre eux ont besoin de nous. Ils ont besoin de l'aide du gouvernement.
Mme la ministre parlait tout à l'heure de Félix. J'ai envie de parler de Thomas. Thomas a appelé mon bureau dans les derniers jours. Il étudiait à l'Université Laval en génie civil. Compte tenu de la charge de travail de ses cours, il ne peut pas se permettre de travailler pendant l'année scolaire. Hier, il a passé son dernier examen de la session. Or, au lieu de diminuer après ce moment stressant, son niveau d'anxiété a augmenté.
Il sait que, après-demain, il devra payer son loyer, son téléphone, sa facture d'Internet, mais il ne sait pas comment il va y arriver. Lundi, il devait commencer son stage, stage qui a été annulé compte tenu de la crise que nous vivons tous. On aura deviné qu'il n'y a pas que Thomas qui vit ce genre de situation. Il n'y a pas que Félix, non plus. Des milliers d'étudiants et d'étudiantes de partout au Québec et au Canada la vivent.
Pour plusieurs étudiants, la période estivale est le temps pour eux de se préparer financièrement à la prochaine année scolaire. Toutefois, ce n'est pas juste une question d'argent. Ces emplois estivaux sont, oui, une source de revenus, mais ils permettent aussi d'acquérir de l'expérience. Pour d'autres, il s'agit simplement d'exigences à leur programme scolaire. Les étudiants sont donc eux aussi dans une situation hors du commun dans cette période de crise.
Je reviens donc à ces personnes qui, au cours des derniers jours, se sont prononcées sur leur mécontentement quant à la prestation modulée par le gouvernement pour les étudiants. Certains d'entre eux ont comme argument principal le mythe de la paresse des étudiants québécois et canadiens.
Pour casser ce mythe et pour changer ce qui pourrait être perçu comme un facteur dissuasif à l'emploi, le Bloc québécois a eu envie de proposer un compromis. Ce compromis serait bon pour tout le monde, mais, surtout, il augmenterait le pouvoir d'achat des étudiants et permettrait à l'État de réaliser des économies importantes pour les finances publiques.
Nous avons proposé que cela soit modifié pour que les jeunes puissent garder une part accrue de leur salaire avant d'être pénalisés. Nous avons proposé cela parce que nous pensons que la PCUE est en quelque sorte injuste. Elle est injuste pour les étudiants qui vont prendre la peine de trouver un emploi et qui ne pourront pas toucher la prestation pour chaque dollar gagné en plus des 1 000 $ qui font qu'un étudiant est admissible.
Nous savons que la PCU de base a été mise en place dans un contexte de confinement. Celle pour les étudiants sera mise en place dans un contexte tout autre, celui du déconfinement, nous le présumons. Ce changement est fondamental dans l'application de la mesure dans le sens où plusieurs entreprises rouvriront leurs portes dans la mesure du possible, mais de façon restreinte pour plusieurs. Je pense aux restaurateurs qui décideront d'ouvrir, par exemple, uniquement les soirs de fin de semaine plutôt que tous les jours au dîner et au souper. Cela fera que plusieurs emplois seront disponibles à temps partiel seulement. Ni les employeurs ni les employés ne seront avantagés lorsque l'étudiant devra refuser de faire les quelques heures supplémentaires de peur de perdre l'accès à sa prestation ou, comme le disait ma collègue, de perdre l'entièreté des 1 250 $. Nous trouvons tout simplement injuste que ceux qui veulent travailler soient pénalisés.
La crise touche particulièrement la santé de notre économie, et le besoin de main-d’œuvre est criant dans plusieurs domaines, notamment dans le secteur agricole. Chez nous, plusieurs producteurs doivent faire appel à de l'aide supplémentaire parce qu'ils ne pourront pas compter sur la contribution des travailleurs étrangers temporaires cet été, pour des raisons que nous connaissons tous.
Ainsi, nous croyons que la vaillance des étudiants en temps de crise n'est pas la question. La Prestation canadienne d'urgence est nécessaire pour soutenir les étudiants et les étudiantes, mais elle peut certainement être améliorée. Je salue les négociations qui ont été faites dans les dernières heures pour que nos demandes soient entendues en vue de l'adoption de ce projet de loi, soit que le gouvernement mette en place des incitatifs financiers et des mesures de soutien pour les étudiants et les jeunes aux différents emplois disponibles, notamment dans le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire, afin d'assurer la stabilité économique des régions et la production alimentaire pendant la crise.
Ce que nous voulons tous et toutes, c'est que le gouvernement s'assure que les différentes mesures financières mises en place sont offertes de manière à remplir leurs objectifs principaux, tout en incitant à l'emploi en toutes circonstances.