Je vous remercie.
Monsieur le président, honorables membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité ici aujourd'hui à vous parler du projet de loi C-59, Loi concernant des questions de sécurité nationale. Comme vous l'avez précisé, monsieur McKay, je suis accompagné de Mme Joanne Gibb, qui est la directrice de la Recherche des politiques et des enquêtes stratégiques à la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la Gendarmerie royale du Canada.
Mes commentaires porteront sur la partie 1 du projet de loi, qui vise à mettre sur pied l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, organisme auquel certains pouvoirs et fonctions de la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC seront transférés.
À titre de dirigeant de la Commission, je crois fermement en l’importance de la surveillance et de l’examen par des civils, qu’elle porte sur la sécurité nationale ou, plus précisément, sur des questions générales d’exécution de la loi. L’examen indépendant favorise le changement positif et améliore les organisations, et je crois qu’il s’agit d’un objectif que nous ne devons pas perdre de vue lorsque nous parlons de ces modifications. Par conséquent, la Commission appuie les efforts déployés en vue d’améliorer le cadre d’examen en matière de sécurité nationale.
La confiance des Canadiens et des Canadiennes à l'endroit des organismes responsables de la sécurité publique et de la sécurité nationale est fondée en grande partie sur la responsabilisation et la transparence, dans la mesure où cette transparence est possible. Qu'il soit effectué par le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement ou par des organismes civils d'experts, notamment la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la Gendarmerie royale du Canada, le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité ou le Bureau du commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications, l'examen indépendant complète le cadre de responsabilisation général des organisations chargées de veiller à la sécurité du Canada.
Le gouvernement veut renforcer ce cadre en créant l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement. La Commission s'engage donc à collaborer avec le nouvel organisme d'examen pour faire en sorte que les activités de la GRC puissent faire l'objet d'un examen indépendant approprié.
Créée en 1988, la Commission possède une expérience et une expertise considérables en ce qui concerne la gestion de plaintes et l’exécution d’examens concernant diverses activités de la GRC, notamment les activités de la GRC en lien avec les sommets du G8 et du G20, la saisie d’armes à feu à High River ou la prestation de services de police dans le Nord de la Colombie-Britannique.
La Commission civile d’examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC, telle qu’elle est appelée aujourd’hui, constitue depuis longtemps un élément clé de la structure de responsabilisation de la GRC. En examinant les plaintes de manière indépendante et en formulant des recommandations correctives au besoin, la Commission vise à apporter des changements constructifs au sein de la GRC.
À l'heure actuelle, la Commission effectue un examen de la mise en oeuvre par la GRC des recommandations du juge O'Connor concernant l'affaire Maher Arar. Cette enquête est en cours et devrait être terminée avant la fin de l'année financière. La Commission rédigera alors un rapport exposant les conclusions et les recommandations, s'il y a lieu, relatives aux six secteurs étudiés par le juge O'Connor.
J'espère bien que les conclusions ou les recommandations formulées par la Commission aideront à orienter le nouvel office d'examen dans ses travaux sur les activités de la GRC touchant la sécurité nationale.
Dans son rapport de 2006, le juge O’Connor a souligné qu’il est important que le nouvel Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement soit en mesure de « suivre le fil ». Conformément au projet de loi C-59, c’est exactement le mandat qu’aura le nouvel organisme d’examen : il fournira une approche plus globale aux examens en matière de sécurité nationale. Le juge O’Connor a aussi précisé qu’il faut briser les cloisonnements et que les organismes d’examen spécialisés doivent collaborer davantage. Nous espérons que cela sera un résultat de la nouvelle loi et des nouvelles structures de surveillance.
Puisque la sécurité nationale ne constitue qu’une infime partie du mandat de la GRC, je suis heureux que le projet de loi C-59 permette à l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement de fournir à la Commission des renseignements qu’il a obtenus de la GRC si ces renseignements concernent notre propre mandat. Je crois que ces éléments sont essentiels à l’efficacité globale des organismes d’examen spécialisés.
Par exemple, si, dans le cadre d’un examen touchant la sécurité nationale, l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement est informé d’une question stratégique qui n’est pas liée à la sécurité nationale, cette question pourrait être renvoyée à la Commission en vue d’un examen plus approfondi. C’est la réalité du monde dans lequel nous vivons.
Pour mieux illustrer l'importance de la collaboration et de la coopération, je pense que, si la Commission reçoit une plainte du public qui touche la sécurité nationale et que celle-ci contient aussi des allégations relatives à la conduite d'un membre de la GRC, les deux organismes d'examen devraient pouvoir, tout en respectant le mandat législatif de chacun, unir leurs efforts pour traiter cette plainte. C'est de cette seule façon que les Canadiens ou les Canadiennes qui auraient formulé une plainte recevraient une réponse adéquate à toutes leurs plaintes.
Même si la loi précise que la plainte doit être envoyée à l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, la Commission, en tant qu'organisme d'examen spécialisé en ce qui concerne les activités policières et la conduite des agents, pourrait s'occuper des éléments d'une allégation visant la conduite d'un membre ou des membres. Cela fournirait une approche cohérente et uniformisée de l'examen de plaintes relatives à la conduite des membres de la GRC dans l'exercice de leurs fonctions.
En ce qui concerne les changements apportés au mandat de la Commission dans le projet de loi C-59, certaines ambiguïtés doivent être clarifiées. Le Comité voudra peut-être les prendre en considération. Selon les modifications proposées à la Loi sur la GRC, la Commission doit refuser de traiter une plainte qui concerne une activité étroitement liée à la sécurité nationale et la renvoyer à l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement. Cela signifie que la Commission continuera d’accueillir toutes les plaintes du public liées à la GRC et, par conséquent, elle demeurera le point d’arrivée de ces plaintes. C’est à elle qu’il incombe de déterminer si la plainte, selon le libellé de la loi, est « étroitement liée à la sécurité nationale » avant de décider la façon de la trancher.
En l’absence d’une définition de « sécurité nationale », toutefois, la Commission doit décider si elle renvoie ou non la plainte à l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement. Si ce renvoi est effectué, l’Office doit recevoir la plainte et faire enquête conformément à l’article 19 de la nouvelle loi. Il n’existe aucun pouvoir à l’heure actuelle, cependant, permettant au nouvel Office de renvoyer le dossier à la Commission s’il estime, après l’avoir examiné, que la plainte n’est pas étroitement liée à la sécurité nationale. Il s’agit d’une modification que le Comité pourrait envisager d’apporter.
Par ailleurs, aux termes du projet de loi C-59, bien que la Commission ne puisse pas recevoir de plaintes ou enquêter sur les plaintes qui sont étroitement liées à la sécurité nationale ni examiner une activité de la GRC liée à la sécurité nationale, rien n'interdit au président de la Commission de déposer une plainte concernant la sécurité nationale. Actuellement, en vertu de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, le président peut déposer une plainte s'il est convaincu qu'il existe des motifs raisonnables d'enquêter sur la conduite, dans l'exercice de ses fonctions, d'un membre de la GRC. Conséquemment, puisque le projet de loi C-59 ne modifie pas le paragraphe 45.59(1) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, le président pourrait déposer une plainte étroitement liée à la sécurité nationale. Je propose, avec le respect que je dois au Comité, qu'il se penche sur cette question pour déterminer si cela est conforme aux objectifs visés par la nouvelle loi.
Comme je l'ai mentionné au début de ma déclaration liminaire, je crois en l'importance de la surveillance civile de l'application de la loi, et, à la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC, nous sommes fermement résolus à travailler avec le nouvel Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement.
Pour terminer, j'aimerais remercier le Comité de m'avoir permis d'exprimer mon opinion sur le rôle important de l'examen civil indépendant. Je serai heureux de répondre à vos questions.