Monsieur le président, je suis heureux d'avoir l'occasion de participer aujourd'hui à ce débat important. C'est un débat important, car, peu après l'engagement pris par le Canada en vue d'appuyer la résolution 1973, le Parlement a été saisi de cette question à des fins de débat et de vote dès la première occasion. C'est extrêmement important.
Je suis d'accord avec d'autres intervenants qui ont déclaré que la résolution 1973 était aussi une étape extrêmement importante pour la communauté internationale sur le plan de l'élaboration de concepts de droits de la personne ainsi que de coopération et de responsabilité internationales. Évidemment, nous parlons en fait de la responsabilité de protéger. Il ne s'agit pas d'une doctrine en tant que telle, mais plutôt d'une norme qui, grâce à l'aide du Canada, s'est frayé un chemin dans le droit international. Cependant, elle ne fait partie du droit international que lorsqu'on y a recours, et nous avons assisté à une remarquable unité au sein du Conseil de sécurité lors de l'adoption à l'unanimité de la résolution 1970, qui fait partie du processus.
Premièrement, la responsabilité de protéger est vraiment axée sur la prévention et l'interruption de quatre crimes distincts: les crimes de guerre, les génocides, les crimes contre l'humanité et les nettoyages ethniques ou les atrocités de masse. On reconnaît que les États ont la responsabilité de protéger leur population contre ces crimes. Si les États ne peuvent ou ne veulent pas assumer cette responsabilité, la communauté internationale prend la relève en déployant des efforts diplomatiques ou en agissant de manière plus coercitive au moyen de sanctions, ce qui a été fait. La force militaire n'est utilisée qu'en dernier recours.
Bien des gens, moi au premier chef, doutaient que le Conseil de sécurité adopte une telle résolution, craignant notamment que des pays comme la Russie ou la Chine n'exercent leur droit de veto. Mais comme ces deux pays, et quelques autres comme eux, ont préféré s'abstenir au lieu d'exercer leur droit de veto, c'est ce qui a permis que la motion soit adoptée. Je tiens d'ailleurs à préciser qu'il s'agit d'une résolution contraignante, les résolutions prises par le Conseil de sécurité aux termes du chapitre 7 liant d'office tous les pays membres.
C'est loin d'être négligeable, car dès lors qu'une résolution contraignante du Conseil de sécurité met en application le principe selon lequel les citoyens ont le droit d'être protégés, quand bien même ce serait contre leurs propres dirigeants et gouvernement, la question relève du droit international. Il s'agit d'une grande percée pour la gouvernance mondiale et le droit international.
Je le signale au passage, et j'en profite pour féliciter les pays qui ont permis que nous en arrivions là. On voit tout de suite que la communauté internationale est extrêmement préoccupée par les atrocités commises contre les Libyens par leur propre gouvernement, et c'est pour cette raison que mon parti va appuyer cette motion sans réserve et qu'il s'est montré favorable à l'idée que le Parlement discute et débatte de cette question aujourd'hui et qu'il tienne ensuite un vote à ce sujet.
Les députés du NPD ont planché tout le week-end avec des représentants des autres partis, mais plus particulièrement du gouvernement, sur une motion dont la portée serait assez vaste pour englober tous les aspects de la résolution 1973, et pas seulement la question du déploiement de six appareils CF-18 en Libye pour faire respecter les paragraphes 4 et 8 de la résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui portent sur la protection des civils et qui autorisent les États membres à prendre toutes mesures pour protéger les population et les zones civiles menacées d'attaque. En fait, le paragraphe 4 porte sur la protection des civils, tandis que le paragraphe 8 porte sur la zone d'exclusion aérienne.
Les néo-démocrates voulaient que la résolution d'aujourd'hui ratisse assez large pour englober tous les aspects de la résolution 1973. Voilà pourquoi il y est question des aspects humanitaires, des efforts diplomatiques, de l'embargo sur les armes, de l'interdiction de voyager et de tout le reste. Nous voulions également nous assurer que le Canada agissait non pas de concert avec une poignée d'alliés et de partenaires, mais par l'entremise et au nom des Nations Unies. Il est essentiel que l'intervention du Canada se fasse au nom des Nations Unies. Le texte de la résolution 1973 précise que les mesures concrètes qui y sont prévues, y compris celles de nature militaire, devront être coordonnées par les Nations Unies.
Le troisième aspect que nous voulions aborder dans une résolution, c'était le droit de regard du Parlement. Il est important que les députés jouent un rôle substantiel dans la surveillance des mesures militaires prises par le gouvernement du Canada à l'étranger, qu'il s'agisse du gouvernement actuel ou de tout autre gouvernement. Le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international et le Comité permanent de la défense nationale sont saisis de la question de l'intervention canadienne en vertu de la résolution 1973. Il y a lieu de s'attendre à ce que ces comités exigent des détails, des rapports et des preuves de la part du gouvernement sur les activités qui sont menées. La Chambre pourrait être saisie de recommandations, de motions et de résolutions découlant de ces comités afin de formuler des observations et des recommandations sur ce qui se passe.
Le dernier aspect qui nous préoccupe a été soulevé lors de la séance d'information dirigée par notre chef ce matin; il s'agit de la nécessité d'indiquer clairement que l'effort du Canada se limite uniquement à une campagne aérienne et de s'assurer que tout le monde comprend ce message. Le Canada ne déploiera aucune troupe terrestre, même si la résolution appuie une telle éventualité. Elle interdit toute occupation, mais elle n'empêche pas le déploiement de troupes terrestres en Libye. L'intervention du Canada se résume donc à la campagne aérienne. Le gouvernement a accepté de limiter l'intervention canadienne à une campagne aérienne, et il n'enverra aucune troupe terrestre. Nous ne manquerons pas de renvoyer la question au Parlement si jamais le gouvernement envisage d'étendre l'activité du Canada.
Nous sommes ravis de voir ces améliorations. Nous avons entre les mains, ce soir, une résolution très complète qui sera étudiée par la Chambre, et nous avons hâte de nous atteler à la tâche. Nous appuyons les Forces canadiennes, ainsi que les hommes et les femmes qui participent à cette mission. On ne cesse d'entendre l'expression: « Appuyons nos soldats. » Bien entendu, nous les appuyons. Sans tomber dans la rhétorique, nous appuyons les hommes et les femmes qui servent le Canada avec compétence et courage, qui prennent des risques et déploient des efforts pour défendre notre pays et notre intérêt sur la scène internationale.
Je veux parler un peu de certaines choses préoccupantes parues dans les médias internationaux ces derniers jours. Nous devons être très prudents et faire preuve de beaucoup de retenue dans ce que nous disons au sujet des buts de la résolution 1973. Ces buts sont clairs dans les éléments 1, 2 et 3 de la résolution. Il y est question d'un cessez-le-feu, d'efforts diplomatiques garantissant la possibilité de réformes politiques conformes aux aspirations de la population libyenne et de la possibilité d'apporter une aide humanitaire.
Ce sont les objectifs. Tout ce qui se produira au-delà de cela n'est pas un objectif de la résolution 1973 ni un but de l'intervention militaire. C'est extrêmement important. Quelques personnes aujourd'hui sont allées trop loin. Il est inquiétant que cela ait été fait par le ministre de la Défense du Royaume-Uni et par des ministres canadiens. Nous devons éviter ces débordements de langage. Nous devons garder le soutien de la Ligue arabe parce que c'est important.
Des questions se posent également au sujet du commandement de cette mission. Nous devons revenir au fait que la mission doit être coordonnée par l'intermédiaire des Nations Unies. S'il y a des problèmes, que ce soit avec l'OTAN, les États-Unis ou la participation de la Turquie et d'autres pays, il faut retourner devant les Nations Unies et régler les problèmes pour nous assurer de garder le soutien de nos alliés arabes qui appuient la motion. Samedi dernier, les pays arabes ont déclaré à l'unanimité qu'ils appuyaient l'imposition d'une zone d'interdiction de vol et ils ont demandé au Conseil de sécurité de déclarer une telle zone. C'est grâce à cela que la mission peut avoir lieu et nous devrions travailler très fort pour garder le soutien des pays arabes parce que ce sont des civils qui font partie des pays arabes qui sont protégés, en l'occurrence ceux de la Libye, qui faisait évidemment partie de la ligue.
Il y a encore beaucoup de choses à dire sur le sujet et je serai heureux de répondre aux questions ou observations de mes collègues.