— Monsieur le Président, j'aimerais d'abord préciser que je vais partager mon temps de parole avec l'honorable député de Toronto—Danforth, qui va faire la deuxième partie de mon discours.
Il s'agit quand même d'une situation historique. Avant de présenter mes arguments pour appuyer notre motion, je vais prendre quelques minutes pour parler de ce qui est arrivé le 31 octobre dernier.
Puisque nous parlons d'une situation qui se produit rarement à la Chambre, en fait, d'une situation sans précédent, je crois qu'il serait utile de commencer ce débat important sur la question en faisant état des diverses infractions dont le député de Peterborough a été reconnu coupable vendredi dernier.
Premièrement, le député de Peterborough a été reconnu coupable d'avoir payé personnellement des dépenses électorales et d'avoir ainsi dépassé volontairement le plafond de contributions prévu aux paragraphes 405(1), 497(3) et 500(5) de la Loi électorale du Canada. J'aimerais citer ces paragraphes importants, et plus précisément le paragraphe 405(1), qui dit explicitement ceci:
Il est interdit à tout particulier d'apporter des contributions qui dépassent :
a) 1 000 $, au total, [...] au cours d'une année civile;
a.1) 1 000 $, au total, à l'ensemble des associations enregistrées, des candidats à l'investiture et des candidats [...] au cours d'une année civile;
Toute personne qui contrevient sciemment à ces paragraphes est coupable d'une infraction visée aux articles 481 et 482.
Deuxièmement, le député de Peterborough et son agent officiel ont été reconnus coupables d'avoir délibérément fait des dépenses électorales dépassant le plafond permis, en contravention des paragraphes 443(1), 497(3) et 500(5) de la Loi électorale du Canada. Le paragraphe 443(1) précise ceci.
Il est interdit au candidat, à l’agent officiel ou au mandataire visé à l’article 446 d’engager des dépenses électorales dont le total dépasse le plafond des dépenses électorales établi pour la circonscription au titre de l’article 440.
C'est une partie importante de la Loi électorale du Canada. Le député a été reconnu coupable d'une infraction extrêmement grave à cette loi.
Troisièmement, le député de Peterborough a été reconnu coupable d'avoir fourni un compte de campagne électorale contenant des renseignements faux ou trompeurs en omettant de rendre compte d'une contribution et de dépenses électorales, en contravention des alinéas 463(1)a) et 497(3)v) et du paragraphe 500(5). Je répète, le paragraphe 463(1) dit clairement ceci:
Il est interdit au candidat ou à son agent officiel de produire auprès du directeur général des élections un document visé aux paragraphes 451(1) ou 455(1): a) alors qu’il sait ou devrait normalement savoir que tel document contient des renseignements faux ou trompeurs sur un point important; [...]
Enfin, le député de Peterborough a été reconnu coupable d'avoir fourni un compte de campagne qui ne contient pas, pour l'essentiel, tous les renseignements exigés en omettant de rendre compte d'une contribution et de dépenses électorales, en contravention des alinéas 463(1)b) et 497(3)v) et du paragraphe 500(5).
La dernière des trois accusations a été suspendue à la demande du ministère public, à la suite de la déclaration de culpabilité.
Chacune des trois accusations dont le député de Peterborough a été reconnu coupable est assortie d'une amende maximale de 2 000 $, d'une peine d'emprisonnement d'un an ou des deux.
C'est loin d'être un événement banal à la Chambre des communes. Il s'agit d'une condamnation criminelle grave aux termes de trois dispositions de la Loi électorale du Canada. La juge a affirmé que la preuve présentée par le député de Peterborough était peu crédible et pleine d'incohérences, et que le député avait à maintes reprises cherché à brouiller les cartes.
La juge Lisa Cameron a très clairement expliqué son verdict de culpabilité prononcé contre le député de Peterborough à l'égard des trois chefs d'accusation. Comment le député a-t-il réagi? Je l'ai entendu à la radio. Le député de Peterborough a dit que c'était l'opinion de la juge.
Il ne s’agit pas d’une opinion. Il s’agit du fait que le député de Peterborough n’a pas respecté la loi. La Chambre est maintenant saisie de la question et elle doit prendre une décision pour la suite des choses. Il ne fait pas de doute que la question concerne une violation grave de la Loi électorale du Canada et qu’il faut la traiter avec sérieux.
Hier, nous avons appris comment le gouvernement entend réagir à cette affaire grave concernant des condamnations pour violation de la Loi électorale. Je ne vais certainement pas reprocher au leader parlementaire du gouvernement d’avoir été très clair quant aux intentions du gouvernement, mais il est important, je crois, de noter que le gouvernement a déclaré très clairement qu’il ne désirait rien faire. Les conservateurs veulent reléguer l'affaire aux oubliettes et renvoyer le dossier au comité de la procédure et des affaires de la Chambre.
De ce côté-ci de la Chambre, nous croyons que des mesures importantes s’imposent pour sévir contre les manquements graves dont le député s’est rendu coupable. Voilà pourquoi nous présentons une motion voulant très clairement que la Chambre suspende immédiatement le député.
Telle est notre vision des choses. Toutefois, le gouvernement ne semble pas du même avis. Il semble tout simplement vouloir enterrer l'affaire et la renvoyer au comité de la procédure et des affaires de la Chambre. Or, nous nous opposons totalement à cela. Nous croyons que ces violations graves de la loi exigent des mesures énergiques de la part de la Chambre des communes.
Étant donné les antécédents du gouvernement, on ne s’étonnera pas que les conservateurs veuillent, en fait, renvoyer le cas au comité de la procédure et des affaires de la Chambre pour reléguer l'affaire aux oubliettes. Toutefois, considérant la façon dont ils ont vu les conservateurs se comporter de façon systématique, les députés commencent sans doute à comprendre pourquoi nous craignons que le gouvernement charge un comité de se pencher sur les violations très graves de la loi et sur un verdict de culpabilité très clair prononcé à l'égard de trois chefs d’accusation, au lieu de s’y attaquer lui-même. Nous estimons qu’il faut prendre des mesures importantes et non tout faire pour que la question tombe dans l’oubli.
Pour ce qui est du comportement passé du gouvernement conservateur, les trois dernières campagnes électorales fédérales ont révélé, je crois, une certaine diminution de la confiance de la population à l'égard de la façon dont le gouvernement traite les violations de la Loi électorale du Canada.
En 2006, lors de la première campagne électorale qui a mené les conservateurs au pouvoir, nous avons été témoins du scandale des transferts de fonds. Par la suite, un certain nombre d'agent du Parti conservateur ont été reconnus coupables d'avoir violé les règles d’Élections Canada. Les conservateurs ont dû payer des amendes de plus de 52 000 $. Les contribuables, pour leur part, ont dépensé plus de 2,3 millions de dollars pour l’enquête, qui a donné lieu à une bataille de cinq ans devant les tribunaux.
Au cours de la campagne électorale de 2008, il y a la condamnation dont nous venons de parler. Le député de Peterborough a été reconnu coupable sous trois chefs d’accusation.
En 2011, il y a eu les appels robotisés. Un ancien employé du parti conservateur a été reconnu coupable à cet égard. Par surcroît, l’ancien député de Labrador et ancien ministre a très clairement trop dépensé et il a estimé que la Loi électorale du Canada ne s’appliquait pas dans son cas.
On note une tendance systématique à enfreindre la Loi électorale du Canada.
Or, la Loi électorale du Canada constitue une valeur canadienne fondamentale. Elle établit des règles du jeu égales pour tous les candidats. Elle établit les règles de notre démocratie. Étant donné les violations systématiques dont la Loi électorale a fait l’objet au cours des dernières années, nous estimons que la Chambre doit déclarer que le cas dont elle est actuellement saisie constitue une violation grave de la loi. Ces trois chefs d’accusation sont graves et la Chambre des communes devrait donc agir immédiatement et suspendre le droit du député de siéger ou de voter ici, de siéger à un comité et de toucher des indemnités parlementaires.
J’aimerais formuler deux dernières observations.
Tout d’abord, le comité de la procédure et des affaires de la Chambre accuse maintenant un retard de neuf mois dans son étude de la motion M-428.
Enfin, comme nous l’avons vu aujourd’hui et comme le leader de l’opposition officielle l’a mentionné, nous avons vu le gouvernement aller de l’avant, avec le projet de loi C-518, pour retirer de la Loi électorale du Canada une série de violations qui conduisaient à la cessation des allocations parlementaires. De ce côté-ci de la Chambre, nous n’approuvons pas cette mesure et le député de Toronto—Danforth se prononcera sur le sujet.