Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité.
Dans un souci de brièveté et d'efficacité, je renonce à faire une déclaration de 10 minutes pour simplement vous entretenir quelques minutes, à la bonne franquette, du projet de loi C-98. Je suis accompagné de MM. Evan Travers et Jacques Talbot, du ministère de la Sécurité publique, qui pourront m'aider à m'y retrouver dans les méandres de la loi et répondre à vos questions. Ils pourront aussi vous aider à clarifier le témoignage d'autres témoins, en ce qui concerne la signification ou la raison d'être de la loi.
Mesdames et messieurs, vous savez que le projet de loi C-98 vise à combler la dernière lacune importante qui existe dans l'architecture des dispositions régissant la surveillance, l'examen et le contrôle des activités de certains de nos principaux organismes chargés de la sécurité publique et nationale. Cette lacune existe depuis près de 18 ans.
Le problème s'est posé au lendemain du 11 septembre, quand, partout dans le monde, on a sensiblement corrigé le mode de fonctionnement des organismes de sécurité. À l'époque, l'Agence canadienne des douanes et du revenu a été subdivisée, les Douanes allant s'unir au ministère de la Sécurité publique et devenant finalement l'Agence des services frontaliers du Canada. L'Agence canadienne du revenu s'est alors retrouvée seule.
Dans la réorganisation des responsabilités qui a suivi le 11 septembre, beaucoup de groupes de pression, de parties prenantes et d'observateurs de la politique publique ont fait remarquer que la nouvelle Agence des services frontaliers du Canada ne possédait pas en propre d'organe d'examen qui jouerait un rôle de chien de garde analogue à celui du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, le CSARS, à l'endroit du Service canadien du renseignement de sécurité ou à celui du commissariat, à l'endroit du Centre de la sécurité des télécommunications.
Vous vous rappellerez que le Sénat a proposé une solution pour combler cette lacune. Le sénateur Willie Moore a déposé le projet de loi S-205, qui s'inspirait d'un modèle qui confiait la surveillance de l'Agence des services frontaliers à un inspecteur général. Pendant ce temps, à la Chambre des communes, nous proposions le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, à la faveur du projet de loi C-22, et le nouvel Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, qui fait l'objet du projet de loi C-59.
Au milieu du nouveau comité des parlementaires et du nouvel office susmentionnés, nous avons essayé de faire de la place à l'idée du sénateur Moore, mais ça nous a semblé tellement compliqué que nous avons jugé impossible de récupérer son idée et de la transformer en un modèle fonctionnel. À la place, nous avons proposé le projet de loi C-98.
Le comité des parlementaires et l'office de surveillance susmentionnés examinent les fonctions de l'Agence des services frontaliers du Canada en matière de sécurité nationale. Mais ce sont les activités de l'Agence qui ne concernent pas la sécurité qu'on laisse de côté. À qui peut se plaindre la personne qui, par exemple, se présente à la frontière et y subit une expérience désagréable, embarrassante ou difficile? À l'Agence, qui fera une enquête complète et qui lui répondra. Mais, d'après les experts, en sus de ce que l'Agence peut faire dans le cadre de sa politique interne, il faut un mécanisme indépendant d'examen pour le volet non sécuritaire du travail de l'Agence. Ce volet, contrairement au volet sécuritaire relevant du comité des parlementaires et du nouvel office chargé de la sécurité, sous le régime du projet de loi C-59, n'est pas visé. Comment, alors, créer l'organisme qui s'en chargera?
Nous avons étudié deux solutions de rechange. La première était de créer un organisme autonome pour le charger de ces responsabilités; sinon, existait-il un organisme fédéral d'examen déjà capable de s'en acquitter? Notre choix s'est fixé sur la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes qui s'occupe exactement de ces fonctions pour la GRC.
Le projet de loi propose la réorganisation de cette commission pour en élargir la compétence à l'Agence des services frontaliers et accroître ses capacités et ressources pour la rendre capable de ce travail. Il dote le nouvel organisme qui en sortira d'un président et d'un vice-président et lui donne le nom de Commission d'examen et de traitement des plaintes du public. Elle s'occuperait de la GRC et de l'Agence, qui seraient du ressort du président et du vice-président, pour les faire bénéficier d'une attention de premier ordre — pour que nous ne déshabillions pas Pierre pour habiller Paul et que chacune, dans la nouvelle structure, reçoive l'attention appropriée. Notre analyse a montré que, en réorganisant l'ancienne commission, nous irions plus vite et serions plus efficaces que si nous créions un organisme à partir de zéro.
Voilà le projet de loi que vous avez sous les yeux. La nouvelle commission pourra recevoir les plaintes du public, lancer les enquêtes qu'elle jugera appropriées. Le ministre pourrait demander à l'organisme d'enquêter ou d'examiner une question s'il le jugeait nécessaire. Le projet de loi C-98 encadrera toutes ces fonctions.
Voilà la raison d'être du projet de loi. Je suis très reconnaissant à votre comité de sa volonté, à cette étape de notre vie parlementaire, d'examiner cette question de façon très efficace. Merci.