Je vous remercie beaucoup. Je suis enchanté de témoigner devant le Comité aujourd'hui pour traiter du projet de loi C-208.
Ce projet de loi vise à aider les petites entreprises, mais avant d'entrer dans le vif du sujet, je tiens à remercier le président et le Comité de se réunir aujourd’hui, pendant une semaine de relâche, pour nous permettre d'adopter cet important projet de loi, que soutiennent de nombreux acteurs dans plusieurs industries du pays. D'après ce que je comprends, tous les partis l'appuient également. L'opposition et certains membres du parti au pouvoir ont voté en faveur de cette mesure législative à l'étape de la deuxième lecture. Je suis enchanté de pouvoir vous présenter ce projet de loi aujourd'hui. Je ferai d'autres remerciements plus tard.
Je dirai aujourd'hui pour commencer que ce projet de loi nous permet de travailler de concert pour soutenir les causes de ceux et celles pour qui le temps est venu, si je puis dire. Je veux également remercier M. Guy Caron, du NPD. C'est cet ancien chef par intérim du NPD qui a présenté le projet de loi à la Chambre précédemment. J'ai pu reprendre la mesure grâce au tirage au sort que prévoit la procédure parlementaire afin de la présenter, essentiellement mot pour mot, pour m'assurer qu'il existe du soutien pour les petites entreprises ou les sociétés agricoles ou de pêche familiales possédant des actions admissibles. Je tiens à remercier particulièrement M. Caron à cet égard.
L'essence du projet de loi C-208 est assez simple. Il permettra aux propriétaires de petite entreprise ou de société agricole ou de pêche familiale de bénéficier, quand ils vendent leur entreprise à un membre de leur famille, du même taux d'imposition qui s'appliquerait s’ils la vendaient à un tiers. À l'heure actuelle, quand quelqu'un vend son entreprise à un membre de la famille, la différence entre le prix de vente et le prix initial est considérée comme un dividende, alors que s'il la vend à une personne qui n'est pas membre de la famille, on considère qu'il s'agit d'un gain en capital. C'est un fait assez simple. Le gain en capital est imposé à un taux inférieur, ce qui permet au vendeur de se prévaloir de l'exonération à vie liée au gain en capital. Ainsi, il est complètement inacceptable qu'il soit plus avantageux financièrement pour un parent de vendre sa ferme ou sa petite entreprise à un parfait étranger que de la vendre à un membre de sa propre famille, à ses enfants, à son fils, à sa fille ou à ses petits enfants.
Je veux vous donner deux exemples précis illustrant la manière dont de projet de loi aidera les familles à transférer leur entreprise quand ils décident de faire le saut.
Je peux imaginer une boulangerie exploitée par un couple pendant 30 ans. Ce couple est maintenant mûr pour la retraite, et une autre entreprise lui a indiqué qu'elle aimerait racheter son entreprise. La fille du couple lui a toutefois fait savoir qu'elle aimerait reprendre l'entreprise familiale. Dans bien des cas, des membres de la famille ont travaillé pour l'entreprise familiale et l'ont aidée à survivre, à prospérer et à poursuivre ses activités.
Comme c'est le cas pour de nombreux propriétaires de petite entreprise et d'agriculteurs, ces gens n'ont pas eu les moyens de déposer beaucoup d'argent dans leurs REER ou de faire des économies, puisque tous les fonds excédentaires ont été réinvestis dans l'entreprise. Ce couple dépendra donc de la vente de sa boulangerie pour assurer sa retraite. Il fait appel à son comptable pour envisager divers scénarios de planification. Ce comptable leur indique que s'ils vendent leur boulangerie à l'autre entreprise plutôt qu'à leur fille, ils bénéficieront d'un taux d'imposition effectif de 10 % grâce à l'exonération à vie sur le gain en capital. Il ajoute toutefois que s'ils la vendent à leur fille, ils seront obligés de rembourser leur prêt avec leur propre agent frappé d'impôt.
Voilà qui constitue une pénalité substantielle en regard de ce que ce couple devra payer s'il vend sa boulangerie à l'autre entreprise, puisque le taux d'imposition effectif est de loin supérieur. Fort de cette information, le couple convoque une réunion familiale pour discuter des options. Il envisage maintenant sérieusement de vendre son commerce à l'extérieur de la famille pour éviter d'imposer à leur fille une obligation fiscale qui nuira à sa capacité de gagner sa vie et de faire croître l'entreprise avec succès comme il l'a fait pendant 30 ans.
En ce qui concerne les actions dans le cadre de la vente de la boulangerie, dans un mode idéal, ce couple devrait pouvoir les vendre indifféremment à leur fille ou à l'autre entreprise. Leur fille ne devrait pas être pénalisée parce qu'elle achète des actions de ses parents et devrait pouvoir financer cet achat avec les fonds de l'entreprise, comme si elle achetait le commerce d'un tiers.
Si cette modification est apportée, la prochaine génération pourrait devenir propriétaire d'entreprise; la propriété de l'entreprise resterait donc à l'échelle locale ou dans la famille.
Le projet de loi C-208 nous permettrait de remédier à cette injustice une fois pour toutes. À l'heure actuelle, de nombreuses entreprises éprouvent des difficultés, particulièrement pendant cette pandémie. De notre vivant, peu d'événements ont entraîné autant de bouleversements. La pandémie frappe partout au pays, aucune collectivité n'est à l'abri.
Les entrepreneurs qui nous écoutent d'où ils sont, en ce moment, sont leur propre patron. Ils comprennent que cette prise de risque s'accompagne d'une énorme responsabilité et de beaucoup de stress, mais le projet de loi que nous examinons aujourd'hui leur envoie le message qu'il ne sera plus avantageux du point de vue fiscal de transférer une entreprise ou une ferme familiale à un étranger plutôt qu'à ses enfants.
L'autre exemple que je voulais donner est celui d'un agriculteur qui doit prendre sa retraite dans les années à venir et qui étudie les choix qui s'offrent à lui en matière de succession. L'agriculteur voudrait que son fils reprenne son exploitation, mais il veut aussi obtenir la juste valeur marchande de sa ferme pour financer sa retraite. Si un tiers demandait à acheter des parts de l'exploitation agricole, il pourrait le faire par l'entremise d'une société.
En vendant sa ferme à un tiers, l'agriculteur pourrait se servir de l'exemption sur les gains en capital de 1 million de dollars pour sa ferme, ce qui donnerait un taux d'imposition effectif de 13,39 %. Toutefois, si l'agriculteur vend sa ferme à son fils, cette vente sera enregistrée sous forme de dividende, plutôt que comme gain en capital, et il devra payer 47,4 % d'impôt, ce qui représente 34 % de plus, monsieur le président. Je pense que nous pouvons tous convenir qu'il est totalement injuste que le taux d'imposition soit considérablement plus élevé lorsque l'agriculteur vend son exploitation agricole à son fils plutôt qu'à un tiers qui, plus souvent qu'autrement, est un parfait étranger, comme je l'ai déjà dit.
Le projet de loi C-208 envoie un message d'espoir aux jeunes agriculteurs qui souhaitent prendre les rênes d'une entreprise fondée par leurs parents. Il y a quelque chose de particulier dans le fait d'être lié à la terre et de récolter ce que l'on sème, comme c'est le cas pour toute petite entreprise, pas seulement dans les domaines de l'agriculture et de la pêche, monsieur le président.
Au Manitoba et dans d'autres provinces, on décerne des prix pour les fermes centenaires, pour rendre hommage aux familles d'agriculteurs qui ont maintenu une production continue pendant 100 ans et parfois même plus de 125 ans. J'ai assisté à de nombreuses cérémonies organisées pour fêter le centenaire d'une ferme, comme beaucoup de mes collègues des régions rurales qui siègent à ce comité et à la Chambre, j'en suis sûr, et en observant le visage des membres des familles concernées, j'ai réalisé à quel point ce jalon est important pour eux.
Les familles d'agriculteurs sont confrontées à des pressions exceptionnelles pour mener leurs activités avec succès, notamment en raison de l'augmentation du coût des terrains, de l'âge moyen des exploitants agricoles et des besoins en capitaux des jeunes qui entrent dans la profession agricole. L'adoption de ce projet de loi permettrait d'éliminer les taux d'imposition inéquitables qui rendent difficile pour une famille de céder son exploitation agricole à ses descendants.
Monsieur le président, pour terminer, j'aimerais demander aux députés membres du Comité de réfléchir un peu à l'importance d'aider les petits entrepreneurs du pays, tous ceux qui ont des parts dans ce type d'entreprise, pour qu'ils puissent transférer leur exploitation aux membres de leur famille immédiate. Ce n'est pas tous les entrepreneurs qui feront ce choix, mais c'est là une occasion très importante pour les familles qui souhaitent investir dans leur propre avenir, avec fierté, pour que leur famille puisse continuer de bâtir sur la base de ce que les générations précédentes ont déjà bâti toute leur vie, en y mettant tout leur cœur et toute leur âme.
Pour conclure, j'aimerais également remercier M. Caron et vous-même d'avoir permis à ce projet de loi d'aller de l'avant. Je remercie également M. Waugh, député de Saskatoon—Grasswood, qui m'a permis de consacrer une deuxième heure, en deuxième lecture, à ce projet de loi au début février, afin qu'il puisse parvenir là où il en est aujourd'hui, au Comité. Sur ce, j'exhorte mes collègues membres de ce comité de permettre à ce projet de loi d'aller de l'avant, afin qu'il soit renvoyé à la Chambre pour une troisième lecture.
Merci, monsieur le président.