Madame la Présidente, il est très difficile de se concentrer sur les travaux de la Chambre aujourd'hui après avoir eu, cette fin de semaine, une autre preuve désastreuse que le gouvernement libéral est incapable de maintenir la paix, l'ordre et une bonne gouvernance.
L'entreprise Teck Resources Limited s'est retirée d'un projet de 20 milliards de dollars qui avait déjà franchi plusieurs évaluations environnementales. Le projet bénéficiait de l'appui enthousiaste des communautés autochtones auxquelles seraient revenue une bonne partie des retombées économiques et des quelque 7 000 emplois en construction et 2 500 emplois du côté de l'exploitation. Le projet avait de plus le soutien des gouvernements provinciaux, des entreprises et de l'industrie, puisqu'il aurait injecté 70 milliards de dollars dans l'économie du pays. L'entreprise s'est retirée parce que le gouvernement libéral s'empêtre dans des politiques contradictoires à propos de l'environnement et du développement des ressources, et ne pouvait pas garantir que cette anarchie ne nuirait pas au projet. C'est un coup dur pour l'économie de l'Alberta, l'économie canadienne et le concept du maintien de la paix, de l'ordre et d'une bonne gouvernance.
Cela dit, je passe maintenant au projet de loi à l'étude.
C'est pour moi un honneur d'intervenir à la Chambre pour parler de l'importance, en fait du caractère sacré, du serment que prêtent les nouveaux citoyens de notre merveilleux pays, le Canada. Le serment actuel est une promesse à la fois courte, concise, simple et profonde, par laquelle les nouveaux citoyens s'engagent à observer fidèlement toutes les lois du Canada. C'est une déclaration de patriotisme et de loyauté.
Il m'apparaît pertinent, dans le cadre de notre étude du projet de loi C-6, de revenir un peu sur l'histoire.
Bien que le Canada ait 152 ans, ce n'est qu'en 1931 qu'il est devenu largement indépendant du Royaume-Uni, sous le gouvernement conservateur de R. B. Bennett. Les citoyens du Canada sont tout de même demeurés des sujets britanniques, et les gens qui venaient d'un autre pays du Commonwealth n'avaient pas à prononcer le serment d'allégeance. En 1946, les députés du Parlement canadien ont adopté la Loi sur la citoyenneté canadienne alors qu'ils se trouvaient dans l'édifice du Centre, cet édifice situé tout près d'ici et qui est actuellement en rénovation.
Vers la fin de la Seconde Guerre mondiale, c'est-à-dire quelques années avant l'entrée en vigueur de la Loi sur la citoyenneté canadienne en 1947, je suis arrivé au Canada au Quai 21, à Halifax, avec ma mère, une infirmière de l'armée canadienne, à bord d'un navire-hôpital de la Croix-Rouge circulant en convoi, le Lady Nelson. Mes parents étaient tous les deux Canadiens: mon père était capitaine dans l'armée canadienne et ma mère était infirmière lieutenante affectée à l'équipe de chirurgie plastique du Service de santé de l'Armée royale canadienne. Je suis né dans un hôpital de l'armée canadienne à Bramshott, dans le Sussex.
Dans le cadre de toutes ces circonstances, j'ai passé mon enfance et le début de ma vingtaine à croire que j'étais un citoyen canadien. J'ai servi dans la Marine royale canadienne, pour une très courte période seulement, à mon grand regret, puis dans la Réserve de l'Armée canadienne, et j'ai prêté à chaque fois le serment de loyauté à la Reine et au Canada. De plus, j'ai voté à deux élections canadiennes. Ce n'est qu'en 1966, lorsque j'ai demandé mon premier passeport afin de pouvoir me rendre au Vietnam à titre de journaliste pigiste, que j'ai découvert que je n'avais pas droit à un passeport canadien puisque, n'étant pas arrivé au Canada avant 1947, je n'étais pas citoyen canadien.
Heureusement, dans les années 1960, ce type de naturalisation pouvait se faire très rapidement. Après un très bref délai, j'ai pu enfin prêter officiellement le serment d'allégeance et devenir ainsi officiellement un citoyen canadien. J'ai reçu un passeport et j'ai pu commencer à reprendre ma vie.
Le serment de citoyenneté n'a été inscrit dans la loi qu'en 1977, à la suite d'une modification à la Loi sur la citoyenneté. Pour la première fois, la reine Elizabeth fut citée comme étant la reine du Canada, conformément au statut de monarchie constitutionnelle du pays.
Madame la Présidente, je vous assure que je vais arriver bientôt aux modifications proposées aujourd'hui au serment de citoyenneté, modifications qui ont été proposées à diverses occasions par des gouvernements libéraux depuis 1977. Ces changements ont toujours été jugés controversés et soit ils ont été abandonnés, soit ils sont morts au Feuilleton.
Au milieu des années 1990, le ministre libéral de la Citoyenneté et de l'Immigration, Sergio Marchi, a chargé un groupe d'écrivains canadiens de composer un nouveau serment qui aurait outrageusement éliminé toute référence à notre monarque constitutionnel, la reine Elizabeth. Heureusement, le premier ministre libéral, Jean Chrétien, dans un moment de lucidité exceptionnelle, a dit au ministre Marchi de mettre en veilleuse cette proposition, qui a été abandonnée.
Toutefois, comme les députés le savent, les libéraux adorent remanier les mesures législatives. Pas conséquent, quelques années plus tard, Lucienne Robillard, une autre ministre libérale, a essayé de se débarrasser de l'allégeance non pas à la reine cette fois, mais à ses héritiers et successeurs, ce qui a amené de nombreux Canadiens à croire que notre monarchie constitutionnelle pourrait prendre fin à sa mort. Ce projet de loi, le C-63, est mort au Feuilleton du Sénat lorsque des élections ont été déclenchées. Deux autres mesures semblables, les projets de loi C-16 et C-18, n'ont pas connu davantage de succès. En fait, le projet de loi C-18 n'a jamais franchi l'étape de la deuxième lecture à la Chambre.
Ce qui nous amène au projet de loi C-6 dont nous sommes saisis aujourd'hui et qui vise encore une fois à modifier la Loi sur la citoyenneté.
La lettre de mandat du ministre comprend 12 tâches précises, dont certaines ont donné du fil à retordre à ses deux prédécesseurs au cours de la dernière législature.
Le ministre a reçu pour instruction de remédier au flux continu d'immigrants illégaux à la frontière sud du Canada — plus de 16 000 l'an dernier —, et d'inviter les États-Unis à combler les lacunes de l'entente sur les tiers pays sûrs. Alors que l'arriéré des demandes d'asile, dont la plupart sont susceptibles d'être rejetées, approche les 90 000 cas et ne cesse d'augmenter, le ministre s'est vu confier la mission de réduire les délais de traitement. En outre, le premier ministre a demandé au ministre de faire progresser les réformes concernant le système d'octroi de l'asile, et de mettre en œuvre un processus spécial de détermination du statut de réfugié destiné à offrir un refuge aux personnes en danger, qu'il s'agisse de défenseurs des droits de la personne, de journalistes ou de travailleurs humanitaires. Alors que les provinces, les collectivités, les chambres de commerce, ainsi que les entreprises et les industries partout au pays réclament un traitement plus rapide et plus efficace des immigrants permanents, le ministre a été chargé de fournir son aide dans ce domaine également.
La lettre de mandat du ministre contient d'autres instructions, mais son premier projet de loi se trouve en fin de liste des lettres de mandat. Le projet de loi C-6 est pratiquement le même projet de loi que le projet de loi C-69, incorporé dans le processus législatif au cours des derniers jours de la dernière législature, en juin. À l'époque, il n'y avait pas de temps pour en débattre, ou pour amorcer une étude en comité. Ce projet de loi n'avait absolument aucune chance d'être adopté lors de cette législature; il s'agissait simplement d'un engagement électoral.
Nous sommes maintenant saisis du projet de loi C-6. Voici le serment de citoyenneté dans sa forme actuelle, tel que je l'ai entendu prononcé à maintes reprises au fil des ans lorsque j'ai assisté à des cérémonies de citoyenneté à titre de journaliste et de député:
Je jure (ou j'affirme solennellement) que je serai fidèle et porterai sincère allégeance à Sa Majesté la Reine Elizabeth Deux, Reine du Canada, à ses héritiers et successeurs, que j'observerai fidèlement les lois du Canada et que je remplirai loyalement mes obligations de citoyen(ne) canadien(ne).
Comme je l'ai indiqué au début de mon intervention, ce serment est une promesse relativement courte, concise et simple, mais profonde que font les nouveaux citoyens d'observer fidèlement les lois du Canada, sans exception.
Une fois modifié tel que le propose le ministre, le serment serait libellé comme suit:
Je jure fidélité et sincère allégeance à Sa Majesté la Reine Elizabeth Deux, Reine du Canada, à ses héritiers et successeurs et je jure d'observer fidèlement les lois du Canada, y compris la Constitution, qui reconnaît et confirme les droits — ancestraux ou issus de traités — des Premières Nations, des Inuits et des Métis, et de remplir loyalement mes obligations de citoyen canadien.
Le gouvernement affirme que l'ajout de ces 23 mots fait suite à une recommandation de la Commission de vérité et réconciliation. En fait, la commission a uniquement recommandé l'ajout de 9 mots au serment de citoyenneté, plus précisément « y compris les traités conclus avec les peuples autochtones ». Bref, que 9 ou 23 mots soient ajoutés au serment, voyons les personnes qui prononceraient ces mots, en l'occurrence les nouveaux Canadiens qui prêteraient ce nouveau serment plus long qui est proposé dans le projet de loi.
Je suggère à mes collègues ici présents à la Chambre de fermer les yeux pendant un instant, si je ne les ai pas déjà plongés dans un état de somnolence. Je suis persuadé qu'ils peuvent imaginer une scène familière. Imaginons un groupe de 40 à 60 hommes, femmes et enfants, accompagnés d'autant d'amis et de parents, regroupés dans une salle de conseil municipal, une salle d'audience ou une salle de réunion dans un édifice historique ou dans un parc national.
Un juge de la citoyenneté entre dans la salle, souvent accompagné d'un ou deux membres de la Gendarmerie royale du Canada et, depuis quelques années, très souvent, par un représentant autochtone de la région ou de la province. On chante l'hymne national du Canada, peut-être avec un peu plus d'enthousiasme qu'à d'autres occasions. Certains versent quelques larmes de joie par anticipation.
Il y a peut-être une cérémonie traditionnelle de purification où l'on brûle de la sauge, du cèdre, du tabac ou d'autres plantes afin de purifier l'événement. Des paroles inspirantes sont prononcées par le juge de la citoyenneté qui préside la cérémonie et par d'autres personnes importantes. Ils parlent de l'importance de l'événement, de l'histoire du Canada, peut-être de leurs propres expériences, et du serment que tous s'apprêtent à prononcer ensemble.
Imaginons un instant les visages pleins d'espoir des participants qui représentent des races, des religions, des cultures, des communautés et des pays plus ou moins éloignés qui sont venus au Canada dans toute une variété de circonstances. Ce sont peut-être des migrants économiques ou des réfugiées venus rejoindre des membres de leur famille arrivés avant eux. Ce sont peut-être des travailleurs ou des étudiants étrangers qui sont tombés amoureux du Canada et qui ont décidé d'y rester pour y bâtir leur vie en tant que citoyens.
Toutefois, devenir citoyen ne se résume pas à une cérémonie d'une heure ou à une seule journée. On n'y arrive pas du jour au lendemain. La cérémonie est la culmination de plusieurs années de préparation, y compris le temps nécessaire pour accumuler le nombre d'années exigées pour obtenir la résidence permanente, pour apprendre l'une ou l'autre des langues officielles du Canada et pour étudier les documents et les données dans le manuel Découvrir le Canada ou les fichiers audio connexes, accessibles sur le site Web.
Ce guide est une mine de renseignements sur l'histoire du Canada, les responsabilités et les obligations liées à la citoyenneté, les droits inscrits dans la Constitution et l'importance de la primauté du droit. Ce manuel est une lecture essentielle pour les nouveaux Canadiens, non seulement pour le contenu historique, mais aussi pour les exemples de questions d'examen qu'il fournit afin de les aider à se préparer à l'examen pour la citoyenneté.
Le guide offre des informations détaillées sur les Premières Nations du Canada. Comme l'explique la section sur les peuples autochtones, les ancêtres des Premières Nations « sont venus d’Asie il y a plusieurs milliers d’années ». Il explique que les peuples autochtones étaient établis ici « bien avant l’arrivée des premiers explorateurs européens en Amérique du Nord. Les cultures vivantes et diversifiées des Premières Nations étaient enracinées dans des croyances religieuses liées à leur relation avec le Créateur, avec leur milieu naturel et avec les autres Autochtones ».
Le guide présente également, d'une manière facile à comprendre, les informations suivantes:
Les droits autochtones et les droits découlant de traités sont énoncés dans la Constitution canadienne. Les droits territoriaux ont été garantis pour la première fois par la Proclamation royale de 1763, du roi George III, qui établissait les bases de la négociation des traités avec les nouveaux arrivants — traités qui n’ont pas toujours été respectés.
Le guide traite des conséquences des maladies transmises par les Européens sur la culture autochtone ainsi que de la façon dont l'arrivée des négociants en fourrures, des missionnaires, des soldats et des colons européens a modifié à jamais le mode de vie autochtone.
En se préparant à l'examen, les futurs citoyens découvrent Joseph Brant, un militaire loyaliste mohawk et dirigeant politique durant la Révolution américaine, le chef Tecumseh et les Shawnees qu'il a dirigés aux côtés des forces britanniques durant la guerre de 1812, le combat de Louis Riel pour les droits des Métis, de même que son procès et son exécution en 1885.
Le manuel raconte presque deux siècles d'injustice et de mauvais traitements infligés aux enfants dans les pensionnats autochtones, ainsi que la violence physique et l'oppression culturelle qu'ils ont subies. Le manuel rappelle au lecteur qu'en 2008, à Ottawa, le gouvernement fédéral, alors dirigé par le premier ministre conservateur Harper, a présenté des excuses officielles aux anciens élèves. En outre, le manuel définit les trois groupes distincts qui composent les peuples autochtones du Canada.
Le Parti conservateur appuie pleinement les droits issus des traités et le processus de réconciliation avec les peuples autochtones du Canada. Les conservateurs appuient les mesures concrètes qui favorisent la réconciliation avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis du Canada, et qui visent à leur offrir de l'eau potable, des logements sûrs, une éducation, des services de santé et des possibilités économiques, et à modifier la Loi sur les Indiens, laquelle empêche de nombreuses Premières Nations de décider elles-mêmes de leur avenir.
Le Parti conservateur respecte pleinement les traités, qui sont inscrits dans le corpus législatif du Canada. Le Parti conservateur appuie le règlement des obligations issues de traités qui n'ont pas été respectées dans le processus de réconciliation avec les peuples autochtones du Canada.
Depuis que le gouvernement a proposé de nouveau de modifier la Loi sur la citoyenneté, il y a une semaine, j'ai reçu des messages d'habitants de ma circonscription, et de bien plus loin, qui soutiennent que cette initiative est une mesure purement symbolique des libéraux qui, comme d'habitude, veulent se donner une image vertueuse et faire de la politicaillerie. Ces gens réclament le rejet de cette mesure législative.
Je ne peux pas me prononcer sur les motifs du gouvernement libéral parce que les incohérences et les contradictions caractérisent le processus législatif et décisionnel en matière de politique publique. Toutefois, je peux dire que je me suis fréquemment élevé à la Chambre contre des propositions — émanant très souvent du gouvernement libéral — qui avaient comme effet d'alourdir des articles de la loi, du Code criminel, clairement rédigés en y ajoutant des précisions inutiles.
Dans le cadre de ce débat, je tiens à préciser clairement qu'il n'est pas nécessaire d'ajouter au serment de citoyenneté 23 mots qui, à mon avis, sont redondants. Si nous devons ajouter une partie sur les Premières Nations, pourquoi n'ajoutons-nous pas aussi des parties sur le bilinguisme officiel, la vie privée, la sécurité nationale, l'antisémitisme?
Par conséquent, je propose l'amendement suivant:
Que la motion soit modifiée par substitution, aux mots suivant le mot « Que », de ce qui suit: « la Chambre refuse de donner deuxième lecture au projet de loi C-6, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté (appel à l’action numéro 94 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada), car les nouveaux citoyens promettent déjà d’observer fidèlement les lois du Canada lorsqu’ils prêtent le serment de citoyenneté et le projet de loi ne fait rien pour appuyer la prise de mesures concrètes en vue de favoriser la réconciliation avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis du Canada. »