Madame la Présidente, on parle aujourd'hui de la situation relative aux blocages ferroviaires. Ce dont on parle d'abord et avant tout, c'est d'un gâchis.
Il s'agit d'un gâchis libéral. En plus d'être un gâchis libéral, il s'agit d'un gâchis canadien. Présentement, ce que l'on voit, c'est que le gouvernement fait preuve d'un laisser-faire. Je vais en arriver tranquillement à la situation des blocages ferroviaires.
Le gouvernement fait preuve d'un laisser-faire sur le plan de l'autoréglementation des entreprises ferroviaires, par exemple. Elles décident elles-mêmes, à peu près, des règles qui fonctionnent pour elles. Cela entraîne des conséquences comme des accidents et des explosions. Les Québécois se souviennent bien de la tragédie du Lac‑Mégantic, et je pense qu'ils ne l'oublieront pas de sitôt.
Il y a aussi un laisser-faire relativement aux contrôleurs. En 2012, il n'y a pas si longtemps, il y avait cinq centres de contrôle ferroviaire au Canada. Bientôt, il y en aura seulement deux, soit un pour le Canadien National, le CN, et un pour le Canadien Pacifique, le CP. Si un accident se produit, que se passera-t-il? On ne le sait pas. Le trafic ferroviaire sera interrompu partout au pays. On ne pourra rien y faire et on va se retrouver dans la même situation que celle que l'on vit en ce moment. Encore là, il y a un laisser-faire.
Il y a aussi un laisser-faire en ce qui a trait à la Loi sur les Indiens, une loi que le Canada a imposée aux Autochtones, en 1876, de façon coloniale et paternaliste. Au fond, cette loi traitait les Autochtones comme des enfants et ils se faisaient dire ce qui était bon pour eux. Cela a instauré un climat d'amertume et de tension. La loi a été instaurée en 1876; aujourd'hui, nous sommes en 2020. Entre 1876 et 2020, il y en a eu du temps. Comment se fait-il que cela ait pris tant de temps avant d'entrevoir la possibilité que la loi n'est pas tout à fait adaptée à la réalité?
Du côté du gouvernement, on ne le dit pas clairement. En fait, on a entendu des doléances de la part du gouvernement. Du bout des lèvres, le gouvernement a dit que ce n'était pas parfait. Nous savons quel est le problème: il s'agit de la maudite Loi sur les Indiens. Cette dernière est catastrophique pour les Autochtones. D'ailleurs, ces derniers ne l'ont jamais acceptée.
À long terme, la crise actuelle découle de la Loi sur les Indiens. À court terme, il y a aussi un autre problème, soit le gouvernement libéral. C'est pour cela que je parle du gouvernement canadien dans son ensemble et du gouvernement libéral. Il y en a un à long terme et un à court terme.
Des blocages ferroviaires ont été mis en place tranquillement un peu partout au Canada. Lors des premiers blocages, le gouvernement faisait l'autruche. On ne répondait pas au téléphone et on ne savait pas ce qui se passait. On agissait comme s'il n'y avait pas de problème. Tout va très bien, Madame la Marquise. C'est assez hallucinant.
Aux nouvelles, on voyait des topos sur la situation, on voyait des gens qui bloquaient des voies ferrées. Du côté du gouvernement, il n'y avait pas de réponse, pas de répondant, pas de signal, pas de lumière. Cela a évidemment fait réagir les gens. Plutôt que d'agir, d'aller rencontrer les gens ou de prendre une initiative tout de suite, le gouvernement a laissé les choses aller. Les jours ont passé, et les blocages se sont multipliés au lieu de disparaître. En effet, il n'y a pas seulement un blocage ferroviaire, il y en a deux, trois, quatre ou cinq. Je ne sais pas combien il y en a, puisque je ne les compte plus. Dans une situation comme celle-là, on ne peut plus simplement dire qu'il n'y a pas de problème et on ne peut pas juste regarder ailleurs, parce que c'est bloqué partout. Le CN a décidé d'arrêter ses trains, tout comme VIA Rail, mais cela cause des problèmes.
Tout à l'heure, mon collègue le député de La Prairie disait qu'il avait essayé de joindre la ministre des Relations Couronne-Autochtones et le ministre des Services aux Autochtones, mais que tous deux étaient injoignables. Il n'y avait pas de réponse. C'était difficile de s'y retrouver.
Aussi, la vice-première ministre était pratiquement inexistante. Il n'y avait pas de réponse ou de leadership de ce côté-là. On ne sait pas où elle était pendant cette crise.
Quant au premier ministre, il était à l'étranger. Il cherchait à décrocher un siège au Conseil de sécurité de l'ONU, ce qui n'est évidemment pas négatif en soi. Le problème, c'est que lorsque la maison est en feu, on s'occupe habituellement des problèmes plutôt que d'aller chercher des gratifications ailleurs. À mon avis, jusqu'à maintenant, la gestion du gouvernement est catastrophique.
Pour ce qui est du ministre des Transports, il était un fantôme. On ne le voyait pas et on ne savait pas où il était. La première fois qu'on l'a vu, c'était lors de la réunion des premiers ministres de toutes les provinces. Comme il y avait des caméras pendant la réunion, on n'a pas eu le choix de dire quelque chose. Ce qu'on a finalement appris, c'est que le ministre s'en lavait les mains et que les provinces devaient trouver une solution.
Au début, on pouvait dire qu'il y avait un blocus en Colombie-Britannique, mais, maintenant, il y en a partout. C'est le système ferroviaire au complet qui est bloqué. Ce n'est pas un problème qui ne concerne qu'une petite province à qui on dit de s'arranger avec ses problèmes. C'est tout le monde qui en pâtit. Je pense que le gouvernement fait preuve d'une déconnexion totale dans cette gestion.
C'est assez décevant, parce que cela a pris à peu près une semaine avant qu'on commence à se dire qu'il y avait finalement peut-être un problème. Que s'est-il passé pendant cette semaine? Il ne s'est rien passé. Il y avait des blocus, des gens manifestaient, des marchandises n'étaient plus transportées. Du côté du gouvernement, il ne s'est rien passé. On a laissé pourrir la situation. Évidemment, quand on laisse pourrir une situation, tout ce qui traîne se salit et la situation s'aggrave. La gangrène s'installe dans la plaie et cela devient de plus en plus difficile à régler. C'est évident que cela a été mal géré, et c'est évident qu'un coup de barre doit être donné de l'autre côté.
Devant à la colère de tout le monde, le gouvernement a fini par considérer qu'il y avait peut-être un problème et qu'il faudrait peut-être qu'il commence à y penser. En fin de semaine, des ministres piteux sont allés faire des rencontres un peu partout, la tête basse. Ils se disaient qu'ils étaient forcés d'aller leur parler alors qu'ils auraient dû le faire une semaine auparavant. C'est un peu décevant. En fait, c'est pas mal décevant parce que, en plus, le résultat n'a pas été terrible. Un barrage a été levé, mais, ailleurs, rien n'a bougé et les barrages sont encore là.
On comprendra notre déception. En effet, on aurait dû prendre le taureau par les cornes et aller voir ces personnes dès le début. On aurait dû prendre en considération ces personnes, qui manifestaient pour de bonnes raisons: elles ne sont pas contentes qu'on leur enfonce un oléoduc dans la gorge. Au Québec, on ne serait pas content non plus qu'on nous enfonce Énergie Est dans la gorge. Je pense que les manifestations seraient pas mal importantes, si cela se produisait.
De plus, ces gens ne sont pas contents de la manière dont ils sont traités en vertu de la Loi sur les Indiens. Ils ont toutes les raisons de se plaindre. Il faut les écouter et prendre acte du problème qu'ils vivent. On ne doit pas les ignorer et détourner le regard quand il y a un problème, et on ne doit pas laisser les entreprises dans le pétrin. Cela n'a pas de commune mesure.
Voici la situation actuelle: le CN a dit à 450 personnes de retourner chez elles. Elles ne peuvent pas travailler, parce que la voie ferrée n'est pas fonctionnelle. Cela pourrait n'être qu'un début. Ce nombre pourrait monter à 1 000, 2 000 ou 6 000 personnes parce que beaucoup de gens y travaillent. Si les gens ne peuvent pas travailler, on ne les paiera pas à se tourner les pouces devant leur bureau. Il faut que ça bouge.
Donc, le CN ne bouge plus. Ce sera ensuite au tour des épiceries de se dire qu'elles vont manquer de stock et d'en faire venir par camion. Elles vont devoir augmenter leurs prix parce que cela va leur coûter 25 % plus cher.
Par ailleurs, le propane ne se rend plus chez les agriculteurs, ni dans les écoles ni dans les hôpitaux, qui paniquent parce qu'on pourrait bien se retrouver dans une situation où on n'a plus de propane. Les villes pourraient ne plus avoir de chlore. Éventuellement, elles ne pourraient même plus traiter leur eau. Je crois que l'eau potable constitue une question importante. Le port de Montréal, si cela continue, ne pourrait plus recevoir des bateaux. C'est du moins ce qui a été sous-entendu aujourd'hui. Ce serait un blocage.
Dans ma circonscription, je pense aux entreprises qui en écopent. ArcelorMittal nous appelle chez nous. Près de 2 000 personnes y travaillent. On nous dit qu'il va falloir ralentir la cadence à un moment donné. Les métaux n'arrivent plus et ils ne sont plus capables de produire le stock. Danone, qui emploie des centaines de personnes de la circonscription et qui fournit tout le yogourt au pays, nous dit la même chose. Le yogourt ne sera plus bon et ils ne savent plus quoi faire.
Aujourd'hui, devant tous ces problèmes, on a un premier ministre qui s'est dit qu'il allait faire une déclaration de ministre à la Chambre des communes, mais qui n'a rien dit. Il nous a simplement répété les mêmes choses, c'est-à-dire qu'il y avait un problème et qu'ils vont essayer de se parler. Il n'y a pas de solution ni de plan d'action. On est pas mal découragé.
Pourtant, le Bloc québécois a proposé des solutions. On a proposé de mettre en place une cellule de crise dès le début. Le gouvernement ne l'a pas fait. Il a attendu. Après cela, on a proposé un médiateur. Le gouvernement n'a rien fait, il a attendu. On a proposé de revenir à la Chambre, hier. Le gouvernement n'a pas voulu. On propose aussi — ce serait la moindre des choses — d'arrêter les travaux du pipeline Coastal GasLink, cela serait peut-être bon pour le dialogue.
On aimerait que le gouvernement écoute nos propositions et qu'il se mette à l'action. On pourrait aussi, au bout du compte, finir par étudier comme il faut la Loi sur les Indiens et par la rendre conforme aux exigences et aux besoins des Premières Nations.