Madame la Présidente, c'est un honneur et un privilège de prendre la parole au nom du Parti vert du Canada concernant le projet de loi S-223 depuis le territoire traditionnel de la Première Nation snuneymuxw et de représenter les collectivités de Nanaimo—Ladysmith et les territoires non cédés des Premières Nations snaw-naw-as, snuneymuxw, de Stz'uminus et de Lyackson.
Le projet de loi à l'étude s'inspire des efforts du rabbin Reuven Bulka, qui demande depuis 2007 que la troisième semaine de février soit reconnue comme étant la semaine de la gentillesse. Le rabbin Bulka est le fondateur de Canada généreux, un organisme qui veut inspirer les Canadiens à cultiver la gentillesse au quotidien, à soutenir les œuvres de bienfaisance et à veiller au bien-être des autres.
Ma collègue la députée de Saanich—Gulf Islands est une bonne amie du rabbin Bulka. Le rabbin occupait déjà une place importante dans la vie de la députée avant même que cette dernière se joigne au Parti vert. Ils se sont rencontrés aux alentours de l'an 2000. Le rabbin l'avait invitée à participer à une émission de la télévision communautaire à Ottawa. Ils ont fait de nombreuses émissions par la suite pour discuter de différents sujets, dont le mouvement environnemental et le fait que l'idée voulant que l'être humain soit supérieur aux autres créatures viendrait d'une mauvaise interprétation des Écritures. La députée de Saanich—Gulf Islands m'a demandé de transmettre ses meilleurs vœux au rabbin et de le remercier d'avoir travaillé à faire en sorte que ce projet de loi sur la semaine de la gentillesse soit adopté à la Chambre le plus tôt possible.
J'apprécie vraiment le préambule du projet de loi. Ce sont des principes auxquels nous pouvons tous aspirer. La gentillesse incite à faire siennes les valeurs que sont l’empathie, le respect, la gratitude et la compassion. Les actes de gentillesse contribuent à améliorer la santé et le bien-être des Canadiens. Il est important d'inciter les Canadiens à poser des actes de gentillesse et à faire du bénévolat et des dons au bénéfice de l’ensemble de la population canadienne. Nous devons favoriser la création d’une culture de gentillesse au Canada tout au long de l’année, mais nous ne devons pas limiter nos actes de gentillesse aux Canadiens et favoriser la création d’une culture de gentillesse uniquement au Canada. Nous devons faire preuve de gentillesse envers tous les gens et tous les êtres vivants de la planète.
Sur le thème de la gentillesse, la chercheuse et auteure Brené Brown a dit ceci: « Tout d'abord, nous devons être les adultes que nous voulons que nos enfants soient. Nous devons surveiller nos propres commérages et notre propre colère. Nous devons donner l'exemple de la gentillesse que nous voulons voir. »
Nous vivons à une époque où il est plus facile que jamais d'être méchant envers les autres. Combien de Canadiens ont reçu un commentaire négatif sur les médias sociaux qu'ils n'auraient jamais reçu en personne? C'est particulièrement vrai pour les élus et les personnalités publiques, mais cela arrive aussi tout le temps à des personnes qui ne sont pas sous les projecteurs. Pourquoi les médias sociaux sont-ils devenus aussi toxiques? Pourquoi autant de gens agissent-ils méchamment en ligne?
Ce n'est pas un hasard. Il s'agit d'un sous-produit de la façon dont sont conçues les plateformes de médias sociaux. Les algorithmes des médias sociaux ont pour but de nous faire passer le plus de temps possible sur leurs plateformes afin de vendre notre attention aux annonceurs. Les algorithmes ont découvert qu'une excellente façon de retenir notre attention est de nous mettre en colère, alors ils nous montrent des publications qui alimentent cette colère, ce qui accentue la polarisation et détruit la gentillesse.
Les militants le savent également. De nos jours, dans le discours politique public, nous constatons en effet que les gens utilisent la colère pour en tirer un avantage politique à court terme. Nourrir les facettes sombres et méchantes de la nature humaine aura un coût élevé et les conséquences seront difficiles à réparer. Certains penseurs ont surnommé ce qui se passe actuellement « une guerre contre la création de sens ». Il fut un temps où les camps politiques opposés pouvaient s'engager dans un débat rationnel et respectueux sur des désaccords stratégiques. Aujourd'hui, nous avons des forces politiques qui attisent les flammes de la délégitimation totale de leurs adversaires, non seulement de leurs politiques et de leurs idées, mais aussi des adversaires eux-mêmes. Certaines des expressions utilisées dans les courriels envoyés aux bureaux des députés ces jours-ci sont inquiétantes.
Ceux qui attisent les flammes de la peur, de la méfiance et de la colère étouffent en même temps la gentillesse, l'empathie et le respect mutuel. Nous allons tous payer cher cette irresponsabilité.
Le dalaï-lama dit: « Soyez gentil autant que possible. C'est toujours possible. »
Parmi les différentes sortes de gentillesse que nous cherchons à incarner dans notre vie, la gentillesse dans le malaise est peut-être l'une des plus difficiles. Pour faire face aux injustices, il faut avoir des conversations exigeantes à propos de notre privilège. Nous devons reconnaître que nous profitons de l'oppression systémique et examiner comment nous la perpétuons, consciemment ou inconsciemment. Pour incarner la gentillesse dans le malaise, il ne faut pas avoir peur de prendre la responsabilité de notre malaise. Il faut continuer de travailler activement à la création d'une société plus juste.
Il est particulièrement important de parler de cette idée de « gentillesse dans le malaise » à l'heure actuelle. Des incidents de racisme à l'endroit de la Première Nation Snuneymuxw, très médiatisés, sont survenus récemment dans ma circonscription à la suite d'une éclosion de COVID-19 dans cette communauté. Une installation à la mémoire des femmes et des filles autochtones disparues ou assassinées a aussi été vandalisée sur le territoire de la Première Nation Stz'uminus.
Le Canada connaît également une montée du racisme envers les Asiatiques. Le racisme fait partie de notre passé et de notre présent. Nous n'aimons pas nous l'avouer, mais nous devons absolument enlever nos œillères et accepter cette réalité, aussi inconfortable soit-elle. Quand il est question d'éliminer les obstacles structurels et systémiques du racisme, des préjugés et de la discrimination, la plus grande forme de gentillesse que nous puissions pratiquer personnellement est celle de l'inconfort. C'est faire le choix conscient de devenir un meilleur allié pour bâtir une société plus équitable et plus inclusive. La pionnière américaine de l'aviation et autrice Amelia Earhart a écrit: « Un seul acte de gentillesse jette des racines dans toutes les directions, et les racines jaillissent et font de nouveaux arbres. »
J'appuie la Loi instituant la Semaine de la gentillesse et je suis très reconnaissant du travail effectué par celui qui a inspiré ce projet de loi, le rabbin Bulka. Lorsque nous donnons aux Canadiens l'occasion de cultiver la gentillesse par l'éducation, l'action et le service, nous améliorons aussi nos possibilités d'établir des liens. L'absence de relations entre les gens est un problème fondamental dans notre société, et nous en subissons tous les conséquences dans la crise de santé mentale, la crise des surdoses d'opioïdes, la crise de l'itinérance, la lutte contre la pauvreté, la lutte pour la paix, l'effondrement de la biodiversité et la crise climatique. Chaque petit geste de gentillesse est un geste de défi face à un ordre social qui va à l'encontre des impulsions naturelles que sont la compassion et l'empathie.